2014-07-09 14:00+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Danses indiennes — Culture indienne — Photographies
Salle Pleyel — 2014-06-02
Les Talens Lyriques
Christophe Rousset, direction musicale
Gyula Orendt, Orfeo
Emöke Barath, Euridice
Carol Garcia, La Musica, La Messagiera, Speranza
Elena Galitskaya, Proserpina, Ninfa
Cyril Auvity, Pastore
Alexander Sprague, Pastore
Nicholas Spanos, Pastore
Daniel Grice, Pastore
Gianluca Buratto, Caronte, Plutone
Damian Thantrey, Apollo
Chœur de l'Opéra de Lorraine
Merion Powell, chef de chœur
Ludovic Lagarde, Sébastien Michaud, création lumières
Orfeo (Monteverdi)
Je regrette presque d'avoir assisté à cette version de concert d'Orfeo qui n'a pas atteint les sommets de la version scénique donnée à la Cité de la musique à l'automne. Il devrait être interdit de modifier les réglages des lumières de la Salle Pleyel pendant qu'un orchestre joue : il est lamentable que le bruit de la motorisation des luminaires gâche ainsi un concert. Du point de vue vocal, les plus grandes sensations sont venues d'Elena Galitskaya.
⁂
Barbican Hall — 2014-06-05
Bernard Haitink, direction
Chamber Orchestra of Europe
Manfred, ouverture (Schumann)
Isabelle Faust, violon
Concerto pour violon (Berg)
Symphonie nº6 Pastorale (Beethoven)
La complexité topologique du Barbican Hall me donne une préfiguration de ce que sera peut-être la future Philharmonie de Paris. Je doute cependant que la nourriture y sera aussi appétissante...
Je n'ai pas accroché au Schumann, j'ai apprécié le concerto pour violon de Berg (plus tonal que je ne l'aurais imaginé) et j'ai évidemment adoré la Symphonie Pastorale qui était la raison de mon déplacement à Londres pour le week-end. C'était tout autant exaltant que la première fois que j'avais entendu le Chamber Orchestra of Europe et Bernard Haitink interpréter cette œuvre.
⁂
Royal Academy of Music — 2014-06-06
Maria Włoszczowska, violon
Schubert, Elgar, Ysaÿe
Le lendemain matin, suivant la suggestion de la meilleure directrice marketing du Chamber Orchestra of Europe, je suis allé à la Royal Academy of Music. Des récitals ou plutôt examens de fin d'année d'étudiants très avancés avaient lieu. La matinée a commencé par un récital de violon de Maria Włoszczowska, magnifique dans Schubert, Elgar et surtout Ysaÿe ! (Il est possible d'écouter certaines de ses interprétations à cette adresse.)
⁂
Royal Academy of Music — 2014-06-06
Tahirah Osborne, soprano
Pawel Siwczak, clavecin
Alexander Rolton, violoncelle
Yi-Ru Hung, piano
Allor ch'io dissi addio (Händel)
An die Laute, An die Sonne, Du liebst mich nicht, An mein Herz (Schubert)
Trois poèmes de Louise de Vilmorin (Poulenc)
Quatre chansons pour enfants (nº1 et 3) (Poulenc)
There's none to soothe, Sweet Polly Oliver (Britten)
Music, when soft voices die, Love's Philosophy (Quilter)
Vient ensuite le récital de la soprano Tahirah Osborne. Je ne sais pas s'il s'agit d'une contrainte de ce type d'examen, mais elle a chanté dans quatre langues : italien, allemand, français, anglais. Certains passages des Lieder de Schubert étaient très émouvants. Sa diction du français, sans être parfaite, était plus que correcte ; il ne m'était ainsi pas nécessaire de lire le texte fourni pour comprendre les Chansons pour enfants de Poulenc.
⁂
Barbican Hall — 2014-06-06
Leonidas Kavakos, violon et direction
London Symphony Orchestra
The Creatures of Prometheus, overture (Beethoven)
Tim Hugh, violoncelle
Enrico Pace, piano
Triple concerto (Beethoven)
Symphonie nº3 en mi bémol majeur Héroïque
(Beethoven)
Délicieux concert du London Symphony Orchestra dirigé par le violoniste Leonidas Kavakos. Je ne dirais pas que c'était un concert extraordinaire, mais j'ai pris beaucoup de plaisir à écouter ces œuvres de Beethoven. L'entente entre les trois solistes dans le Triple Concerto de Beethoven faisait plaisir à voir. Lors de ce concert, j'étais au tout premier rang du Barbican Hall ; certains premiers violons n'arrêtaient pas de me faire des sourires !
⁂
Royal Opera House — 2014-06-07
Robert Carsen, mise en scène
Michael Levine, décors
Falk Bauer, costumes
Jean Kalman, lumières
Philippe Giraudeau, mouvements
Royal Opera Chorus
Renato Balsadonna, chef de chœur
Stephen Westrop, chef de chœur (pour cette production)
Orchestra of the Royal Opera House
Vasko Vassilev, premier violon
Simon Rattle, direction musicale
Yann Beuron, Chevalier de la Force
Thomas Allen, Marquis de la Force, son père
Sally Matthews, Blanche de la Force, fille du marquis
Neil Gillespie, Thierry, Leur valet
Deborah Polaski, Madame de Croissy, prieure
Anna Prohaska, Sœur Constance de Saint Denis
Sophie Koch, Mère Marie de l'Incarnation, sous-prieure
John Bernays, Monsieur Javelinot, Médecin
Emma Bell, Madame Lidoine, La nouvelle prieure
Yvonne Barclay, Sœur Antoine
Katy Batho, Sœur Valentine
Tamsin Coombs, Sœur Gertrude
Eileen Hamilton, Sœur Martha
Anne Osborne, Sœur Anne de la Croix
Deborah Peake Jones, Sœur Saint Charles
Dialogues des Carmélites, Poulenc
Les places debout du Royal Opera House sont d'un rare rapport qualité-prix. On voit toute la scène, pour ainsi dire de face ! J'ai même eu la chance de me tenir au même endroit qu'une certaine Julie Jones, comme le montre cette plaque commémorative :
In Memory of Julie Jones Who Stood Here
J'assistais pour la première fois à une représentation de Dialogues des Carmélites. Je pense que ce n'est pas la dernière ! La mise en scène m'a semblée très réussie. Les lumières étaient remarquables. Du point de vue vocal, je retiens tout particulièrement la performance d'Anna Prohaska dans le joyeux rôle de Constance. Une faute de goût m'a un peu gêné dans l'émouvante scène finale : le son enregistré de la guillotine était un peu cracra...
⁂
Wigmore Hall — 2014-06-08
Atos Trio
Annette von Hehn, violon
Stephan Heinemeyer, violoncelle
Thomas Hoppe, piano
Trio pour piano en ré (Hob. XV:24), Haydn
Trio pour piano en mi mineur op. 90 “Dumky”, Dvořák
Allegro du Trio pour piano en la majeur (Hob. XV:18), Haydn
J'allais pour la première fois au Wigmore Hall pour un concert de musique de chambre. Je n'ai pas été particulièrement ému par ce concert. Le premier trio de Haydn que l'Atos Trio a interprété manquait un peu de mordant. S'ils l'avaient interprété comme ils ont joué le bis (de Haydn aussi), je pense que j'aurais passé un meilleur moment...
⁂
Le jour de mon départ, je me suis promené dans Londres, et je me suis retrouvé à proximité d'une manifestation de Sikhs pour l'indépendance du Khalistan... Trafalgar Square était orange de monde :
Je pense que la National Gallery voisine a rarement vu passer autant de visiteurs sikhs en une journée !
Les autres photographies que j'ai prises à Londres sont visibles là.
⁂
Mairie du troisième arrondissement — 2014-06-12
Jyotika Rao, nattuvangam, chant, danse
Matthias Labbe, mridangam
Joël Riou, tampura
Anjeli, Camille, Laure, bharatanatyam
Allaripu
Prastar (Camille/Anjeli)
Dashavatar (Anjeli)
Shiva Kautukam (Camille)
Jatisvaram (Jyotika/Anjeli)
Ranga Dwara (Camille)
Tillana (Jyotika/Laure)
Nritya Mangalam (Camille)
Je ne suis pas tout à fait objectif pour parler de ce spectacle puisque pendant la première moitié, je jouais du tampura pour accompagner ma professeure Jyotika Rao qui chantait et Matthias Labbe qui jouait du mridangam pour ce récital d'élèves avancées de bharatanatyam organisé à la mairie du troisième arrondissement. Les quatre cordes à vide du tampura sont censées être actionnées de façon indépendante du rythme de la musique, il n'est pas si facile d'en jouer pour accompagner la musique au rythme vif de la danse bharatanatyam, mais je ne m'en suis pas trop mal tiré. Bien que je n'aie vu le récital que de profil, le plus grand moment a été pour moi l'interprétation du Shiva Kautukam par celle-là même qui m'avait tant impressionné il y a un an et demi. J'ai vu cette danseuse interpréter beaucoup d'autres pièces depuis, mais il était particulièrement émouvant pour moi de la revoir tout en participant, très modestement, à la représentation de cette pièce. Je retiens aussi le très beau Dashavatar (avec une mention spéciale pour le nain Vamana) et le magnifique Tillana.
⁂
Salle Pleyel — 2014-06-16
Guy Braunstein, violon
Zvi Plesser, violoncelle
Sunwook Kim, piano
Sonate pour violon et piano en la majeur (Franck)
Trio pour violon, violoncelle et piano en la mineur (Ravel)
Trio pour violon, violoncelle et piano n°1 en si bémol majeur, op. 99 (Schubert)
Andante con moto du Trio pour violon, violoncelle et piano n°2 en mi bémol majeur, op. 100 (Schubert)
Merveilleux concert de musique de chambre ! Que l'on décide d'écouter ce qui paraît au premier plan ou que l'on tente de percevoir l'arrière-plan, tout semble magnifique... Les phrasés du violoncelliste Zvi Plesser étaient particulièrement beaux.
⁂
Opéra Garnier — 2014-06-23
Felix Krieger, direction musicale
Orchestre de l'Opéra National de Paris
Ballet de l'Opéra
Frédéric Chopin, musique (Mazurkas op. 6 nº2 et nº4, op. 7 nº4 et nº5, op. 24 nº2, op. 33 nº3, op. 56 nº2, op. 63 nº3 ; Valse op. 34 nº2, op. 69 nº2 ; Grandes valses brillantes op. 34 nº1 et op. 42 ; Études op. 25 nº4, nº5 et op. 10 nº2 ; Scherzo nº1 op. 20 ; Nocturne op. 15 nº1)
Jerome Robbins, chorégraphie (1969) réglée par Jean-Pierre Frohlich
Joe Eula, costumes
Jennifer Tipton, lumières
Vessela Pelovska, piano
Mathieu Ganio, en brun
Nolwenn Daniel, en jaune
Josua Hoffalt, en vert
Ludmila Pagliero, en rose
Karl Paquette, en violet
Charline Giezendanner, en bleu
Christophe Duquenne, en bleu
Amandine Albisson, en mauve
Aurélie Dupont, en vert
Emmanuel Thibault, en rogue brique
Dances at a gathering
César Franck, musique (1890)
Alexei Ratmansky, chorégraphie
Karen Kilimnik, décors
Adeline André, costumes
Madjid Hakimi, lumières
Accentus
Christophe Grapperon, chef du chœur
Laëtitia Pujol, Psyché
Marc Moreau, Eros
Alice Renavand, Vénus
Christelle Granier, Caroline Robert, Les deux Sœurs
Daniel Stokes, Simon Valastro, Adrien Couvez, Alexandre Labrot, Quatre Zéphirs
Psyché
Pas grand'chose à dire sur ce programme de danse du ballet de l'Opéra. S'il a comporté quelques beaux moments (dont le lancé de Nolwenn Daniel dans les airs magnifiquement rattrapée par Christophe Duquenne, une manœuvre spontanément applaudie par le public), j'ai trouvé Dances at a gathering de Robbins long, très long... Sinon, même avec de nouveaux costumes et la magnifique Laëtitia Pujol, Psyché de Ratmansky ne m'a pas convaincu. Par exemple, la chorégraphie du lancer de flèches par Eros est d'une très grande faiblesse par rapport à ce que je vois régulièrement dans la danse bharatanatyam quand Kama est représenté. Il reste néanmoins quelques photographies des saluts :
Charline Giezendanner, Christophe Duquenne
⁂
Centre Jean Bosco — 2014-06-28
Élèves de Jyotika Rao, bharatanatyam
Alarippu
Shri Gana Natha
Jatiswaram
Varnam
Tillana
Récital de fin d'année des élèves de Jyotika Rao dont je fais partie. Diverses combinaisons d'élèves (duo, trio, quatuor) ont été présentées (la liste des pièces ci-dessus n'est pas exhaustive). Je dansais avec une autre élève Shri Gana Natha qui comporte une partie rythmique de danse pure et une partie évoquant Ganesh (Shloka) ; cela a dû durer à peine trois minutes en tout. Nous avons dansé tous les deux la partie rythmique, mais c'est moi qui ai dansé le Shloka et avais présenté les mouvements pour expliquer ce dont il allait s'agir au public. Cette explication était vraiment nécessaire parce que je pense que si j'avais vu cette pièce sans l'avoir travaillée, je n'y aurais pas compris grand'chose !
Si tout le programme s'est bien passé, deux pièces ont sans doute été plus remarquables que d'autres : le Varnam évoquant Muruga et dans lequel apparaît Kama, et le fabuleux Tillana qui a conclu le récital, deux pièces déjà dansées par Jyotika Rao au Centre Mandapa.
2014-07-08 22:00+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Danses indiennes — Culture indienne
Pour le mois de mai, je ne suis pour le moment revenu que sur le récital de bharatanatyam de Jyotika Rao au Centre Mandapa. Voici mes brèves impressions sur les autres spectacles vus au cours de ce mois :
Salle Pleyel — 2014-05-03
Ballet royal du Cambodge
Son Altesse Royale la Princesse Norodom Buppha Devi, chorégraphie
Ombres et lumières
J'ai été moins enthousiasmé par ce spectacle du Ballet Royal du Cambodge que par celui que j'avais vu en 2010. Pourtant, il s'est agi d'une adaptation du Ramayana, un texte que j'apprécie beaucoup. Ce spectacle-ci m'a semblé beaucoup moins dansé que le précédent. Il associait pantomime et théâtre d'ombre. Pas de corps de ballet. Je suis resté sur ma faim. Je suis néanmoins fasciné par l'extrême concavité que peuvent adopter les mains des interprètes.
⁂
Théâtre du Châtelet — 2014-05-05
Jean-Yves Ossonce, direction musicale
Vishal Bhardwaj, mise en scène
Sudesh Adhana, scénographie et chorégraphie
Gunjan Arora & Rahul Jain, costumes
Dadi Pudumjee et The Ishara Puppet Theatre Trust, création des marionnettes
Renaud Corler, lumières
Orchestre Symphonique Région Centre-Tours
Chœur du Châtelet
Stephen Betteridge, chef de chœur et assistant du directeur musical
Paulina Pfeiffer, Kumudha
David Curry, Le Prince
Franco Pomponi, Le Narrateur
Ella Fiskum, danseuse soliste alter ego de Kumudha
Sudesh Adhana, danseur soliste alter ego du Prince
Dadi Pudumjee, Vivek Kumar, Simon T Rann, marionnettistes
A Flowering Tree, John Adams.
Il n'y a pas grand'chose à sauver de cette triste production de A Flowering Tree de John Adams, un opéra inspiré d'un conte indien : Kumudha, une jeune femme, possède le pouvoir de se métamorphoser en arbre en fleurs, ce qui la conduit à épouser un prince ; la sœur de celui-ci lui demande de se métamorphoser, mais ne se soucie pas de la faire reprendre son apparence initiale ; Kumudha devient difforme, et après une longue séparation, elle finit par retrouver son mari et son apparence. Le livret contient les rôles de Kumudha, du prince et un narrateur. Les personnages secondaires sont représentés par des marionnettes. C'est triste à dire, mais les passages les plus émouvants sont venus de ces marionnettes, ainsi que de la danseuse Ella Fiskum qui par ses mouvements suggérait la transformation en arbre. Il est manifeste qu'elle a intégré certains codes des danses indiennes dans son interprétation. Le chorégraphe Sudesh Adhana, qui dansait aussi, m'a semblé beaucoup moins convaincant...
Si certains (comme le critique Renaud Machart) ont trouvé le chœur remarquable d'un point de vue vocal, pour ce qui est des positions des mains empruntées aux danses indiennes, je trouve que cela manquait de travail. Il y avait essentiellement une seule position à retenir, Alapadma, qui évoque l'éclosion d'une fleur. Le moins que je puisse dire est que la plupart des fleurs évoquées par les choristes avaient triste mine, tout comme les affreux costumes...
⁂
Salle Pleyel — 2014-05-06
Orchestre Colonne
Laurent Petitgirard, direction
Mémoire du vent (Florent Motsch)
Juliana Steinbach, piano
Concerto pour piano et orchestre (Schumann)
Concerto pour orchestre (Bartók)
J'ai adoré l'œuvre contemporaine de Florent Motsch qui m'a fait penser au style spectral de Gérard Grisey. J'ai joyeusement détesté le concerto pour piano de Schumann ; bien qu'abhorrant ce compositeur, j'arrive en général à apprécier ce concerto espiègle, mais cette fois-ci je n'ai pas du tout aimé le jeu de la pianiste. En revanche, le concerto de Bartók était phénoménal !
⁂
Amphithéâtre de la Cité de la musique — 2014-05-07
Ensemble De Caelis
Laurence Brisset, direction, chant
Alia Sellami, chant arabe traditionnel
Estelle Nadau, chant
Florence Limon, chant
Caroline Tarrit, chant
Marie-George Monet, chant
Monodies, conduits et motets des XIIIe et XIVe siècles
Déserts (Jonathan Bell)
J'ai passé un plutôt bon moment pendant ce concert de musique a capella. Je me suis quelque peu inquiété à l'écoute de la première pièce, une monodie. Les œuvres polyphoniques qui ont suivi m'ont davantage plu. Bien qu'elles soient semble-t-il assez peu variées, j'ai aimé les ornementations présentes dans cette musique ancienne. Les plus beaux moments du concert sont toutefois venus des improvisations de chant arabe traditionnel d'Alia Sellami qui se greffait tout d'abord au chœur puis prenait parfois son indépendance. La deuxième partie du concert constituée de la pièce Déserts de Jonathan Bell était moins exaltante que la première.
⁂
Opéra Bastille — 2014-05-10
Chœur et Orchestre de l'Opéra national de Paris
Ballet de l'Opéra
Philippe Jordan, direction musicale
Alessandro Di Stefano, chef du chœur
Georges Bizet, musique (Symphonie en ut majeur)
George Balanchine, chorégraphie
Christian Lacroix, costumes
Madjid Hakimi, réalisation des lumières
Colleen Heary, répétitions
Amandine Albisson, Mathieu Ganio
Marie-Agnès Gillot, Karl Paquette
Ludmila Pagliero, Emmanuel Thibault
Nolwenn Daniel, Pierre-Arthur Raveau
Le Palais de cristal
Maurice Ravel, musique (version intégrale, 1912)
Benjamin Millepied, chorégraphie
Daniel Buren, scénographie
Holly Hynes, costumes
Madjid Hakimi, lumières
Sébastien Marcovici, assistant du chorégraphe
Aurélie Dupont, Chloé
Hervé Moreau, Daphnis
Eleonora Abbagnato, Lycénion
Alessio Carbone, Dorcon
François Alu, Bryaxis
Daphnis et Chloé (création)
J'allais assister à cette représentation un peu à reculons, mais je dois avouer que ce programme m'a semblé être une grande réussite. Le corps de ballet et de nombreux solistes ont brillé dans Le Palais de cristal de Balanchine. Mention spéciale à Amandine Albisson et les élégants entrechats qu'elle a interprétés portée par son partenaire. Je me suis néanmoins ennuyé pendant le mouvement lent de la Symphonie de Bizet interprété par Karl Paquette et Marie-Agnès Gillot (laquelle était complètement à côté de sa ligne lors du finale quand les solistes sont tous rassemblés et en principe alignés...).
Si les aspects narratifs et expressifs étaient assez peu développés dans Daphnis et Chloé de Millepied au point de rendre presqu'anecdotiques les deux rôles principaux (pourtant interprétés par Aurélie Dupont et Hervé Moreau), le public s'est enthousiasmé lors de l'incroyable solo de François Alu (Bryaxis). On ne voyait que lui, ainsi que Léonore Baulac ! Je ne suis habituellement pas un grand admirateur de Philippe Jordan, mais je dois admettre que l'œuvre de Ravel m'a semblé magnifiquement interprétée. Sinon, je n'ai aucun commentaire à faire sur la scénographie de Daniel Buren parce que manifestement les personnes assises au parterre n'ont pas du tout vu la même chose que moi depuis un des coins du deuxième balcon.
⁂
Salle Pleyel — 2014-05-17
Philippe Aïche, violon solo
Orchestre de Paris
Andris Poga, direction
Jean Manifacier, mise en scène
Patrick Pleutin, décor
Vincent Malone, présentation
Sept danses d'après Les Malheurs de Sophie (Jean Françaix)
Métamorphoses symphoniques sur des thèmes de Carl Maria von Weber (Scherzo), Hindemith
Sérénade pour cordes op. 48 (Pezzo in forma di sonatina), Tchaikovski
Carmen Suite (Boléro), Rodion Shchedrin
The Young Person's Guide to the Orchestra op. 34, Variations et fugue sur un thème de Purcell (Britten)
Candide, ouverture (Bernstein)
Sympathique concert pour jeune public de l'Orchestre de Paris auquel se sont joints des moins jeunes qui étaient venus écouter l'œuvre de Britten qui était programmée, très agréable à écouter, mais sans doute pas la plus géniale du compositeur.
⁂
Opéra de Massy — 2014-05-18
Orchestre de l'Opéra de Massy
Chœurs Les Cris de Paris
Compagnie Julien Lestel
Les Enfants de la Comédie
Dominique Rouits, direction musicale
Nadine Duffaut, mise en scène
Emmanuelle Favre, décors
Danièle Barraud, costumes
Jacques Benyeta, éclairages
Julien Lestel et Mallika Thalak, chorégraphies
Constantin Rouits, chef assistant
Mathieu Pordoy, chef de chant
Geoffroy Jourdain, chef de chœur
Vennina Santoni, Leïla
Julien Dran, Nadir
Alexandre Duhamel, Zurga
Jérôme Varnier, Nourabad
Mallika Thalak, danseuse soliste
Les Pêcheurs de perles
J'ai assisté à cette représentation des Pêcheurs de perles pour voir Mallika Thalak, une de mes danseuses de bharanatyam préférées. Le livret de l'opéra n'est pas très informé sur la culture hindoue : on y vénère très étrangement Brahma et la blanche Shiva... Une particularité de la musique est d'utiliser un leitmotif mélodique qui revient régulièrement dans la pièce, ce qui est d'autant plus agréable pour l'auditeur que cette mélodie est tirée du très beau C'est elle, c'est la déesse. Bref, cet opéra n'est pas un chef d'œuvre absolu, mais ce n'est pas si mal, pour un opéra français. La production est assez traditionnelle. Si on laisse de côté quelques affreux décors peints, c'est plutôt bien fait. J'ai particulièrement aimé les costumes, qui s'inspirent des costumes royaux moghols pour Zurga et qui utilisent toute la palette de couleurs pour les villageois, ce qui était du meilleur effet dans le dernier acte. Pour ce qui est des chanteurs, la seule réserve que j'ai eue, pendant le premier acte, concernait l'interprète de Leïla, qui ne m'a pas convaincu pendant les passages vocaux les plus acrobatiques ; une fois cette séquence passée, mes réserves se sont évanouies.
J'étais donc venu pour voir Mallika Thalak, et je ne l'ai pas regretté ! Le spectacle comportait des passages dansés. Il y avait du spectaculaire avec les danseurs et danseuses de la compagnie Julien Lestel, mais il y avait aussi des passages plus émouvants du fait de la présence de Mallika Thalak. C'est d'ailleurs elle qui ouvrait le spectacle en suggérant l'éclosion d'un lotus. Elle accompagnait les mouvements d'ensemble du chœur dont elle a supervisé la chorégraphie. Le moins que je puisse dire est que les choristes de cette production faisait beaucoup mieux le mudra Alapadma que ceux du Théâtre du Châtelet dans l'opéra A Flowering Tree mentionné plus haut ! (Il faut aussi mentionner les mouvements empruntés aux danses indiennes réalisés par les solistes : c'était très convaincant, et quand la prêtresse Leïla présentait symboliquement le feu à la divinité, ses mouvements étaient d'une justesse rare.) Dans certaines séquences, la danseuse Mallika Thalak apparaissait pour accompagner des passages chantés. Le plus beau de ces moments est intervenu avec l'air du ténor vers la fin du premier acte. Alors que le chanteur interprétait son air (en adoptant une posture assez statique), le sens des paroles était traduit en mouvement par la danseuse. C'était extrêmement émouvant ! et la vitesse modérée des mouvements permettait d'en apprécier encore davantage la beauté. L'Inde (ou plutôt le Sri Lanka) qui est représentée dans l'opéra est évidemment l'Inde phantasmée de l'époque de la composition, mais la danse présentée par Mallika Thalak m'a remarquablement semblée tout à fait respectueuse de la tradition.
(La moyenne d'âge des spectateurs de la représentation de ce dimanche après-midi devait être voisine ou supérieure à 60 ans. Avec la politique tarifaire de l'Opéra de Massy, ce n'est pas très étonnant. Certes, le modèle économique de l'opéra est fragile, mais que la griffe tarifaire se réduise à deux catégories (78€ en première catégorie, 72€ en deuxième) me semble relever d'une scandaleuse injustice sociale. Certes, c'est un tout petit peu moins hors de prix pour les habitants de Massy, mais sur le chemin du retour, je me suis dit qu'il ne devait pas y avoir beaucoup de lyricomanes parmi les personnes habitants entre la gare et l'opéra, puisqu'ils ont le malheur d'habiter la commune voisine d'Antony...)
⁂
Temple de Pentemont — 2014-05-23
Orchestre des Concerts Gais
Alexandre Korovitch, direction
Yannick Henri, piano
Concerto pour piano nº3 (Beethoven)
Marc Korovitch, direction
Symphonie nº35 (Mozart)
Pour ce concert gai, le temple de Pentemont avait une acoustique déplorable. J'ai beaucoup aimé le jeu du pianiste Yannick Henri dans le Concerto nº3 de Beethoven et j'ai adoré la Symphonie nº35 de Mozart dirigée par Marc Korovitch (qui reviendra une dernière fois diriger cet orchestre amateur fin novembre dans la Cinquième symphonie de Beethoven !).
⁂
Amphithéâtre de la Cité de la musique — 2014-05-24
Isabelle Druet, mezzo-soprano
Vanessa Wagner, piano
Chansons de Bilitis (Debussy)
La Mort d'Ophélie (Berlioz)
Préludes pour piano (Dutilleux)
Chanson de la déportée (Dutilleux)
La Geôle (Dutilleux)
Gibet (Ravel)
Clair de lune (Fauré)
Plutôt un bon moment sur l'instant, ce concert ne me laisse pour ainsi dire aucun souvenir un mois et demi après.
⁂
Cité de la musique — 2014-05-24
Chamber Orchestra of Europe
Semyon Bychkov, direction musicale
Symphonie nº8 “Inachevée” (Schubert)
Renaud Capuçon, violon
Concerto pour violon nº2 (Mendelssohn)
Mélodie (Gluck)
Symphonie nº7 (Beethoven)
Je n'aime pas beaucoup le chef Semyon Bychkov. La symphonie nº7 de Beethoven qu'il a dirigée ne pouvait évidemment pas rivaliser avec celle que Yannick Nézet-Séguin avait obtenu avec ce même orchestre à Édimbourg, mais elle a toutefois comporté de très beaux moments (en particulier dans les deux derniers mouvements).
⁂
Cité de la musique — 2014-05-25
Quatuor Les Dissonances
David Grimal, Hans Peter Hofmann, violons
David Gaillard, alto
Xavier Phillips, violoncelle
Ainsi la nuit... (Dutilleux)
Les Dissonances
Mystère de l'instant (Dutilleux)
Symphonie nº1 (Brahms)
De ce week-end Dutilleux, je me souviens surtout avoir apprécié Mystère de l'instant, qui présente l'originalité d'associer aux instruments à cordes de l'orchestre un cymbalum, cet instrument que l'on n'entend plus guère que dans le métro.
⁂
Cité de la musique — 2014-05-26
Les Siècles
François-Xavier Roth, direction musicale
Symphonie nº5 (Beethoven)
Muss es sein? (Dutilleux)
Métaboles (Dutilleux)
Gautier Capuçon, violoncelle
Tout un monde lointain (Dutilleux)
L'Apprenti sorcier (Dukas)
Je n'ai aucun souvenir des œuvres de Dutilleux programmées ce soir-là, mais je retiens bien sûr L'Apprenti sorcier de Dukas que j'entendais pour la première fois en concert, et surtout la Symphonie nº5 de Beethoven phénoménale qu'ont interprété les musiciens des Siècles.
⁂
Espace Jemmapes — 2014-05-31
Élèves de Kalpana
Mallari
Kautwam (Ganapati)
Kautwam (Murugan)
Jatiswaram
Kautwam (Shiva)
Jatiswaram
Dashavatar
Javali
Kirtana
Javali
Ashtapadi
Récital de fin d'année des élèves de bharatanatyam de Kalpana. Je retiens quelques pièces spectaculaires (les Kautwams) et surtout quelques délicieux pièces et parmi elles tout particulièrement le Javali dédié à Kama.
2014-07-07 10:00+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Culture indienne — Dhrupad
Pour le mois de mars, j'ai déjà eu l'occasion de revenir sur le récital de Gayatri Sriram au Musée Guimet et sur le Dhrupad Festival à Utrecht. Voici de brefs souvenirs des autres spectacles que j'ai vus au cours de ce mois :
Cité de la musique — 2014-03-01
Les Dissonances
David Grimal, violon
Concerto pour violon et orchestre nº4 en ré majeur, KV 218 (Mozart)
Vicent Alberola, clarinette
Concerto pour clarinette en la majeur, KV 622 (Mozart)
Concerto pour violon et orchestre nº5 en la majeur, KV 219 (Mozart)
Très beau concert des Dissonances. L'orchestre et le soliste David Grimal m'ont semblé particulièrement magnifiques dans le Cinquième concerto pour violon de Mozart. J'ai apprécié aussi le clarinettiste Vicent Alberola aux très subtils pianissimi dans le concerto pour clarinette en la majeur. (Cela n'efface cependant pas tout à fait de ma mémoire l'interprétation de Romain Guyot avec le Chamber Orchestra of Europe.)
⁂
Opéra Garnier — 2014-03-03
Ballet de l'Opéra
Orchestre Colonne
Horton Gould, musique
Agnès De Mille, chorégraphie (1948), réglée par Paul Sutherland
Oliver Smith, décors
Miles White, costumes
Pascal Mérat, lumières
Alice Renavand, L'Accusée
Vincent Chaillet, Le Pasteur
Laurence Laffon, La Mère de l'Accusée
Stéphanie Romberg, La Belle-mère de l'Accusée
Christophe Duquenne, Le Père de l'Accusée
Léonore Baulac, L'Accusée enfant
Sébastien Bertaud, Le Porte-parole du jury
Juliette Gernez, Hugo Marchand, Nocturne
Fall River Legend, ballet en un prologue et huit scènes
Ture Rangstrom, musique
Hans Grossman, arrangements musicaux et orchestration
Birgit Cullberg, chorégraphie (1948), réglée par Ana Laguna
Sven X:et Erikson, décors et costumes
Erik Berglund, lumières
Katrin Brannstrom, responsable technique pour les décors et costumes
Monika Mengarelli, Agneta Valcu, répétitions
Aurélie Dupont, Mademoiselle Julie
Nicolas Le Riche, Jean
Amélie Lamoureux, Kristin
Michaël Denard, Le Père de Julie
Alessio Carbone, Le Fiancé de Julie
Charlotte Ranson, Clara, La Fille du garde-forestier
Aurélien Houette, Anders
Takeru Coste, L'Ivrogne
Jean-Christophe Guerri, Andrey Klemm, Richard Wilk, Les trois vieilles Femmes
Mademoiselle Julie, ballet en quatre tableaux d'après la tragédie naturaliste en un acte d'August Strindberg
Pour ce programme de ballet, malgré un placement exceptionnel au parterre dû à des ventes promotionnelles, j'ai été globalement plus enthousiasmé par la musique que par la danse. Si je me souviens bien ma préférence allait à Fall River Legend, surtout pour la musique : j'avais ainsi été un peu déçu par l'expression d'Alice Renavand que j'ai connue plus bouleversante dans d'autres rôles. Je mesure cependant le privilège que cela a été de voir d'aussi près Nicolas Le Riche et Aurélie Dupont dans Mademoiselle Julie !
⁂
Salle Pleyel — 2014-03-07
Hélène Collerette, violon solo
Orchestre philharmonique de Radio France
Ádám Fischer, direction
Symphonie nº88 en sol majeur (Haydn)
Tedi Papavrami, violon
Concerto pour violon et orchestre nº1 (Bartók)
Symphonie nº5 en fa majeur op. 76 (Dvořák)
Ce fut un délicieux concert du Philharmonique de Radio France. Je garde en particulier un très bon souvenir de la Symphonie nº88 de Haydn dirigée par Ádám Fischer. Encore une fois, je me demande comment il est possible que les symphonies de Haydn ne soient pas remboursées par la sécu'.
⁂
Cité de la musique — 2014-03-15
Chamber Orchestra of Europe
Vladimir Jurowski, direction
Danses allemandes (Schubert, arrangement de Webern)
Christian Tetzlaff, violon
Concerto pour violon et orchestre en ré majeur op. 61 (Beethoven)
Cinq Mouvements, op. 5, Anton Webern
Symphonie nº4 “Tragique” en ut mineur (Schubert)
Magnifique programme du Chamber Orchestra of Europe ! Le moment le plus exaltant pour moi a sans doute été l'interprération des Cinq Mouvements de Webern.
⁂
Amphithéâtre de la Cité de la musique — 2014-03-18
Pierre Hantaï, clavecin
Suite anglaise nº4 en fa majeur, BWV 809
Suite anglaise nº5 en mi mineur, BWV 810
Suite anglaise nº6 en ré mineur, BWV 811
Le clavecin que jouait Pierre Hantaï était assez affreux d'un point de vue strictement visuel, mais j'ai pris beaucoup de plaisir à entendre dans de bonnes conditions ces Suites anglaises de Bach.
⁂
Ivry-sur-Seine — 2014-03-19
Céline Wadier, chant dhrupad
Gérard Hababou, pakhawaj
Raga Puriya (Alap, Jor, Jhala & Chautal)
Raga Jog (Alap & Tivratal)
Raga Bhinna Shadja (Alap & Sultal)
Avant de commencer son concert, Céline Wadier a demandé aux quelques débutants en dhrupad qui se trouvaient là quels ragas nous étudions. Une des élèves a opportunément dit Puriya. Ce fut manifestement une bonne idée parce que non seulement l'interprétation de ce raga m'a paru superbe, mais ayant pratiqué moi-même ce raga (c'est celui que je connais le mieux), c'est la première fois qu'en écoutant un concert de dhrupad, je sentais à chaque instant de l'Alap où on est était dans la gamme de ce Raga. Je peux ainsi dire en étant à peu près certain de ne pas me tromper que la chanteuse est descendue jusqu'au Ga de l'octave inférieure et est allé jusqu'au Ga de l'octave supérieure (soit deux octaves plus haut). Après ce Raga très développé, elle a chanté Raga Jog et Raga Bhinna Shadja. Seul regret, il y a eu moins d'interactions au cours de ce concert entre la chanteuse et le percussionniste que lors de leur concert d'octobre.
⁂
Salle Pleyel — 2014-03-21
Svetlin Roussev, violon solo
Orchestre philharmonique de Radio France
Myung-Whun Chung, direction
Antoine Tamestit, alto
Till l'Espiègle (Strauss)
Concerto pour alto (Bartók)
Une Vie de héros (Strauss)
La corde de do d'Antoine Tamestit ! Quelle sonorité incroyable ! Je suis extrêmement admiratif de l'interprétation qu'il a donné du concerto pour alto de Bartók, même si je dois avouer en toute subjectivité que j'avais été plus ému par l'interprétation de Daniel Vagner (qui se trouvait ce soir-là dans le Philharmonique de Radio France).
⁂
Salle Pleyel — 2014-03-27
Orchestre de Paris
Giovanni Antonini, direction
Chœur de l'Orchestre de Paris
Lionel Sow, chef de chœur
Olympia, ouverture (Joseph Martin Kraus)
Giorgio Mandolesi, basson
Concerto pour basson, KV 191, Mozart
Sol Gabetta, violoncelle
Concerto pour violoncelle nº2 (Haydn)
Messe de l'orphelinat, KV 139, Mozart
Camilla Tilling, soprano
Kate Lindsey, mezzo-soprano
Rainer Trost, ténor
Havard Stensvold, basse
Délicieux concert de l'Orchestre de Paris. Les habitués, et ils ont eu
mille fois raison, étaient venus pour entendre Giorgio Mandolesi dans le
concerto pour basson de Mozart et trinquer avec lui au café d'à côté
:-)
: je suis reparti avec un autographe en forme de basson.
La déception de la soirée est cependant venue pour moi de l'interprétation
du concerto pour violoncelle nº2 de Haydn par Sol Gabetta. De la place très
proche de la scène où je me trouvais, j'entendais le bruit de ses doigts
frappant violemment la touche comme des petits marteaux. Cela accentuait ma
sensation de percevoir des suites de notes dont je ne pouvais saisir
l'organisation en phrases. Son bis en revanche a été magnifique.
⁂
Opéra Comédie, Montpellier — 2014-03-29
Orchestre national Montpellier Languedoc-Roussillon
Jérôme Pillement, direction musicale
Benoît Bénichou, mise en scène et adaptation du livret
Amélie Kiritzé-Topor, scénographie
Bruno Fatalot, costumes
Thomas Costerg, lumières
Anne Lopez, chorégraphie
Vincent Recolin, chef des chœurs
Valérie Blanvillain, Marie Arnaud, chefs de chant
Samy Camps, Le Roi Ouf 1er
Héloïse Mas, Lazuli
Solistes du Jeune Opéra
Chœurs du Jeune Opéra
L'Étoile (Chabrier)
Dans la salle presque vide (à part au parterre) de l'Opéra Comédie de Montpellier, j'ai assisté à une représentation de L'Étoile de Chabrier. Ce spectacle n'est pas particulièrement bouleversant, mais assurément agréable à regarder et écouter. Les chanteurs étaient tous jeunes. Parmi eux, je retiens l'excellente Héloïse Mas dans le rôle de Lazuli.
2014-06-02 09:59+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
2014-05-26 10:55+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse
Avec trois mois de retard, voici le vite dit de février 2014...
Salle Pleyel — 2014-01-31
Orchestre philharmonique de Radio France
Svetlin Roussev, violon solo
Leonidas Kavakos, direction musicale et violon
Concerto pour violon et orchestre nº3 en sol majeur, KV 216 (Mozart)
Symphonie nº1 en ré majeur op. 25 dite Classique (Prokofiev)
Symphonie nº9 La Grande (Schubert)
Superbe concert du Philharmonique de Radio France dirigé par Leonidas Kavakos. Le programme est très semblable à celui qu'il avait dirigé avec le Chamber Orchestra of Europe. La Symphonie Classique de Prokofiev a été magnifiquement interprétée, tout comme la Symphonie La Grande de Schubert, que très exceptionnellement je n'ai pas trouvée longue ; j'ai particulièrement aimé la façon dont il a maintenu l'orchestre (et une partie du public) en suspension lors d'un point d'orgue dans le deuxième mouvement.
⁂
Cité de la musique — 2014-02-01
Patrick Davin, direction
Orchestre du Conservatoire de Paris
Bandar-log, poème symphonique op. 176 (Koechlin)
Nicholas Angelich, piano
Concerto pour la main gauche (Ravel)
Symphonie nº1 “Le Poème de la forêt” (Roussel)
J'ai été plutôt content d'entendre la symphonie nº1 de Roussel qui m'avait décidé d'assister à ce programme, mais j'avoue que ce programme de musique française m'a laissé indifférent. J'ai beaucoup de mal à comprendre l'enthousiasme que peut susciter le Concerto pour la main gauche de Ravel, que j'entendais pour la première (et sans doute dernière) fois...
⁂
Salle Pleyel — 2014-02-02
Wayang Wong, le Ramayana balinais, théâtre rituel de Bali
Troupe d'acteurs, danseurs et gamelan de Telepud (Bali)
I Wayan Gde Adhi Wijaya, direction artistique et musicale
Jacques Brunet et Jean-Luc Larguier, conception
Dewa Putra, conseiller scientifique
L'Enlèvement de Sita
J'ai beaucoup apprécié ce spectacle de théâtre de Bali racontant le Ramayana. Ce qui se passait sur scène était magnifique, mais la représentation a été à mon avis lamentablement gâchée par le surtitrage défaillant. C'est une chose qu'une phrase sur dix soit traduite, c'en est une autre que le texte affiché ne corresponde pas à la scène qui est représentée, mais à la précédente ou à la suivante... et quand le texte correspondait à la bonne scène, il ne fallait pas forcément l'entendre comme ayant été prononcé par le personnage qui s'exprimait sur scène. L'histoire suivant très fidèlement l'épopée indienne (cf. mon résumé), je n'ai eu aucune difficulté à suivre, mais comme cela a dû paraître hermétique à bien des spectateurs !
L'orchestre de percussions et les chanteurs-récitants ont pris place au fond de la scène. Entre deux interventions, les interprètes sont assis de part et d'autre de l'orchestre, à gauche le camp de Rama et à droite celui de Ravana. La seule véritable différence avec l'épopée sanskrite réside dans l'ajout de quatre personnages burlesques : deux serviteurs pour Rama et deux pour Ravana. Les interprètes sont vêtus de costumes richement ornés et de masques. Les seules parties du corps restant visibles étant les mains, on ne découvre que lors des saluts que les rôles de Rama et de son frère Lakshmana sont interprétés par des femmes. Leur gestuelle ainsi que celle de l'interprète de Sita n'est pas sans rappeler celle des danses indiennes. Les positions des mains ressemblent à certains mudras, mais les doigts sont très souvent animés d'une sorte d'oscillation qui me fait étrangement penser à des tentacules de poulpe. Si ces personnages à la démarche majestueuse ne sont pas très loin de danser, le spectacle est bien davantage du théâtre que de la danse. Les divers types de personnages (humains, démons, singes) se distinguent par leurs attitudes et les costumes recèlent de belles trouvailles, par exemple dans la représentation de l'antilope dorée dont un démon a pris l'apparence pour tromper Sita.
Le spectacle peut être visionné sur Cité de la musique live.
⁂
Salle Pleyel — 2014-02-05
Orchestre National du Capitole de Toulouse
José Antonio Sainz Alfaro, chef de choeur
Choeur Orfeón Donostiarra
Tugan Sokhiev, direction
Ferruccio Furlanetto, Boris Godounov
Anastasia Kalagina, Xénia
Ain Anger, Pimène
Vasily Efimov, Missaïl
Stanislav Mostovoi, L'Innocent
John Graham-Hall, Le Prince Chouïski
Garry Magee, Andrei Tchelkalov
Pavel Chervinsky, Nikitch, Mityukha
Alexander Teliga, Varlaam
Marian Talaba, Grigori
Svetlana Lifar, Fiodor
Sarah Jouffroy, La Nourrice de Xénia
Hélène Delalande, L'Aubergiste
Vladimir Kapshuk, Un Boyard
Magnifique représentation de Boris Godounov, un opéra que j'ai déjà vu à Munich. Je retiens la très belle prestation de l'Orchestre National du Capitole de Toulouse (dirigé par Tugan Sokiev) que j'entendais pour la première fois. Du point de vue vocal, les plus grandes émotions sont venues de la basse Ain Anger dans le rôle de Pimène.
⁂
Salle Pleyel — 2014-02-07
Orchestre philharmonique de Radio France
Sergej Krylov, violon
Vasily Petrenko, direction
Concerto pour violon nº2 (Bartók)
Symphonie nº1 (Sibelius)
Je n'ai pas accroché à la virtuosité de Sergej Krylov qui m'a semblé un peu trop démonstrative dans Toccata et Fugue en ré mineur (BWV 565) de Bach qu'il a joué en bis ; autant j'ai pris plaisir à écouter la Toccata, autant il m'a semblé présomptueux de jouer cette fugue au violon. Cela ressemblait bien à une fugue, mais les limites de l'instrument étaient un peu trop souvent dépassées pour que je puisse réellement apprécier cette performance.
Le style de direction du chef Vasily Petrenko que j'avais moyennement apprécié dans Bartók s'est métamorphosé pour la deuxième partie du concert et j'ai beaucoup aimé l'interprétation de la Première Symphonie de Sibelius.
⁂
Salle Pleyel — 2014-02-13
Philippe Aïche, violon solo
Orchestre de Paris
Christoph Eschenbach, direction
Carnaval, ouverture, Dvorák
Tabea Zimmermann, alto
Concerto pour alto (Bartók)
Symphonie nº4 (Brahms)
Quelques mois après, je ne retiens de ce concert de l'Orchestre de Paris que le concerto pour alto de Bartók interprété par Tabea Zimmermann. Elle a été magnifique, et plus encore dans le troisième mouvement !
⁂
Salle Pleyel — 2014-02-19
Roland Daugareil, violon solo
Orchestre de Paris
James Gaffigan, direction
Kleine Dreigroschenmusik, suite pour orchestre de vents d'après l'Opéra de Quat'sous (Weill)
Gil Shaham, violon
Concerto pour violon en ré majeur, op. 35 (Korngold)
Gavotte en rondeau de la Partita nº3 en mi majeur, BWV 1006, Bach
Cendrillon, extraits (Prokofiev)
Très beau concert de l'Orchestre de Paris. J'ai apprécié la Fugue que l'on entend dans la musique de l'Opéra de Quat'sous. Gil Shaham et l'orchestre ont été excellents dans le concerto pour violon de Korngold, mais j'ai surtout adoré écouter la musique de Cendrillon de Prokofiev. Vus et entendus depuis l'arrière-scène, l'orchestre et le chef James Gaffigan semblaient particulièrement grandioses, notamment lors des coups de minuit.
⁂
Cité de la musique — 2014-02-21
MusicAeterna
Teodor Currentzis, direction
Dixit Dominus, HWV 232, Händel.
Anna Prohaska, Didon
Tobias Berndt, Énée
Nuria Rial, Belinda
Maria Forsström, Magicienne
Valeria Safonova, L'Esprit
Victor Shapovalov, Marin
Didon et Énée, Purcell
Merveilleux concert ! Si certains ensembles baroques ont tendance à procurer l'ennui (chez moi, en tout cas), cela ne saurait survenir lors d'un concert de MusicAeterna, l'ensemble le plus enthousiasmant que j'aie entendu en concert ! Les musiciens de MusicAeterna jouent debout et sont dirigés par l'extravagant chef Teodor Currentzis. Son seul défaut : quand il demande à ses musiciens de jouer moins fort, le bruit de son pied frappant l'estrade s'entend presque davantage que le reste de l'orchestre. Parmi les voix entendues lors de ce concert, je retiens la merveilleuse Nuria Rial dans le rôle de Belinda dans le génial Didon & Énée de Purcell. Des amis-spectateurs se moquaient de moi quand je soulignais le caractère indianisant d'un certain passage que nous avions entendus, juste avant que Didon se lamente Your counsel..., mais je maintiens que le solo improvisé de viole de gambe (accompagné d'un ersatz de tampura obtenu par une pédale des violoncelles) est ce qui ressemble le plus à un Alap de musique classique indienne dans tout ce qu'il m'a été donné d'entendre lors d'un concert de musique classique européenne... Si vous ne me croyez pas, allez écouter les 90 premières secondes de leur enregistrement sur CD. Lors du concert, ce moment magique à l'atmosphère irréelle, lumières éteintes, avait été plus développé. (Le concert s'est terminé par de superbes bis, dont un magnifiquement mis en scène.)
⁂
Cité de la musique — 2014-02-25
Orchestre philharmonique de Radio France
Svetlin Roussev, violon solo
Pascal Rophé, direction
Christa Schoenfeldinger, harmonica de verre
Armonica (Jörg Widmann)
Change pour orchestre (Johannes Boris Borowski)
Chœur de femmes de Radio France
Catherine Simonpietri, chef de chœur
Le Visage nuptial pour soprano, mezzo-soprano, chœur de femmes et orchestre (version définitive), Pierre Boulez
La première œuvre joué dans ce programme du festival Présences est Armonica de Jörg Widmann (que je ne connaissais que comme clarinettiste). J'ai trouvé véritablement magnifique cette œuvre orchestrale utilisant un harmonica de verre (et aussi un accordéon). J'ai rarement été autant émerveillé par une œuvre de musique contemporaine !
Change de Borowski m'a paru au contraire atroce (et sans doute véritablement dangereuse pour les oreilles de spectateurs en raison du volume sonore élévé demandé aux musiciens et en particulier des percussionnistes).
L'œuvre de Boulez jouée après l'entr'acte m'a indifféré. Le texte de René Char, qui n'est pas des plus aisés à entendre, était rendu tout à fait incompréhensible par le compositeur.
⁂
Cité de la musique — 2014-02-27
La Chambre Philharmonique
Andreas Staier, piano et direction
Symphonie nº1 en mi bémol majeur, KV 16 (Mozart)
Concerto pour piano nº1 en fa majeur, KV 37 (Mozart)
Symphonie nº49 en fa mineur (Haydn)
Concerto pour piano nº9 en mi bémol majeur, KV 271 “Jeunehomme” (Mozart)
Si j'ai apprécié l'orchestre La Chambre Philharmonique dans les Symphonies de Mozart et de Haydn qui ont été jouées, je n'ai pris aucun plaisir à l'écoute du concerto pour piano nº1 de Mozart. Le piano que jouait Andreas Staier était assez ancien (début XIXe ?) et devenait pour presque totalement inaudible quand l'orchestre jouait... Je suis parti à l'entr'acte pour m'épargner de souffrir pareillement pour le deuxième concerto programmé.
⁂
Opéra Garnier — 2014-02-28
John Cranko, chorégraphie, mise en scène (1965)
Piotr Ilyitch Tchaikovski, musique
Kurt-Heinz Stolze, arrangements et orchestration
Jürgen Rose, décors et costumes
Steen Bjarke, lumières
Reid Anderson, Jane Bourne, répétitions
James Tuggle, direction musicale
Hervé Moreau, Onéguine
Isabelle Ciaravola, Tatiana
Mathias Heymann, Lenski
Charline Giezendanner, Olga
Karl Paquette, Le Prince Grémine
Ballet de l'Opéra
Orchestre de l'Opéra national de Paris
Onéguine, ballet en trois actes de John Cranko d'après Eugène Onéguine d'Alexandre Pouchkine
Je n'ai jamais été un grand fan d'Isabelle Ciaravola. La seule fois où elle m'avait vraiment ému, c'était dans le rôle de Nouredda lors de la création de La Source. Quelques jours avant ses adieux, lors d'une autre représentation d'Onéguine, alors qu'elle interprétait le rôle Tatiana avec Evan McKie (Onéguine), j'avais trouvé que ce couple ne fonctionnait pas (alors que beaucoup de balletomanes se souviennent avec émotions du couple Dupont/McKie dans ce rôle). J'allais donc un peu à réculons à cette soirée d'adieux et je dois dire que je ne l'ai pas regretté. Isabelle Ciaravola était alors associée à Hervé Moreau, et cela fonctionnait beaucoup mieux ! Dans le rôle d'Olga, j'ai également été ravi de voir Charline Giezendanner, associée à Mathias Heymann (Lenski).
2014-05-01 14:37+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Danses indiennes — Planning
Des billets rendant compte de concerts reviendront bientôt... En attendant, voici mon programme de spectacles pour le mois de mai :
2014-03-07 10:40+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Danses indiennes — Culture indienne — Dhrupad — Planning
2014-01-24 14:06+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Danses indiennes — Culture indienne
J'ai vu singulièrement plus de spectacles en 2013 qu'en 2012, à savoir plus de deux cents... Un certain nombre d'entre eux m'ont fait passer des moments exceptionnels. Si je ne devais retenir que l'exceptionnel parmi l'exceptionnel, je garderais les spectacles suivants (dans l'ordre chronologique) :
Voici quelques autres spectacles qui m'ont procuré beaucoup de plaisir. La sélection est évidemment très subjective. Je me suis limité à 10, mais beaucoup d'autres spectacles auraient pu figurer dans cette liste !
2013-12-18 10:30+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Culture indienne — Dhrupad
À propos des spectacles d'octobre 2013, j'ai déjà eu l'occasion de revenir sur Orfeo à la Cité de la musique et le récital de Vaibhav Arekar et Anuya Rane au Musée Guimet. Pour les autres spectacles, voici mon vite dit :
Salle Pleyel — 2013-10-01
Orchestre Colonne
Laurent Petitgirard, direction
Philippe Graffin, violon
Concerto pour violon et orchestre Le Violon rouge, John Corigliano
Marie-Claude Bantigny, violoncelle
Daniel Vagner, alto
Don Quichotte, variations fantastiques sur un thème à caractère chevaleresque (Strauss)
J'étais venu à ce concert pour entendre la violoncelliste Marie-Claude Bantigny dans Don Quichotte de Strauss. Elle a été magnifique, mais à l'alto, un certain Daniel Vagner, que j'entendais pour la première fois, tenait le rôle de Sancho Panza, et c'était tout simplement incroyable !
⁂
Les 3 arts — 2013-10-02
Céline Wadier, chant dhrupad
Gérard Hababou, pakhawaj
Raga Todi
Raga Bhinna Shadja
J'assiste pour la première fois à un récital de chant dhrupad de ma prof, qui a interprété le Raga Todi en finissant par la composition Samhara Chalate (Dhamar) que j'ai déjà pratiquée avec elle et quelques autres. Les difficultés de ce raga font qu'il m'est pour le moment beaucoup plus plaisant de l'écouter en concert que d'essayer de le pratiquer ! Si j'ai apprécié la première partie de ce concert, la deuxième était a été merveilleusement belle. Trop pour que mes glandes lacrymales puissent le supporter... Quel plaisir de l'entendre dans ce très lumineux Raga Bhinna Shadja et deux compositions en Chautal puis en Sultal !
⁂
Salle Colonne — 2013-10-06
Michel Bernier, clarinette
Marie-Claude Bantigny, violoncelle
Carole Villiaumey, piano
Trio pour clarinette, violoncelle et piano en la mineur, op. 114 (Brahms)
Pierre Hamel, violon
Nachtgesang pour piano clarinette, violon et violoncelle (Hersant)
Ching Yun Tu, violon
Mathieu Rolland, alto
Quintette pour clarinette et cordes en si mineur, op. 115 (Brahms)
Magnifique interprétation du Quintette pour clarinette et cordes de Brahms !
⁂
Opéra Garnier — 2013-10-10
Frédéric Chopin, musique
John Neumeier, chorégraphie et mise en scène (1978)
Jürgen Rose, décors et costumes
Rolf Warter, lumières
Victor Hughes, assistant du chorégraphe
Claude de Vulpian, répétitions
James Tuggle, direction musicale
Emmanuel Strosser, piano
Frédéric Vaysse-Knitter, piano
Agnès Letestu, Marguerite Gautier
Stéphane Bullion, Armand Duval
Michaël Denard, Monsieur Duval
Nolwenn Daniel, Prudence Duverney
Laurent Novis, Le Duc
Christine Peltzer, Nanine, la servante de Marguerite
Simon Valastro, Le Comte de N
Frédéric Vaysse-Knitter, Un pianiste
Eve Grinsztajn, Manon Lescaut
Christophe Duquenne, Des Grieux
Léonore Baulac, Olympia
Nicolas Paul, Gaston Rieux
Ballet de l'Opéra
Orchestre de l'Opéra national de Paris
La dame aux camélias, ballet en un prologue et trois actes d'après le roman d'Alexandre Dumas fils
J'ai vu trois représentation de cette série de représentations de La Dame aux camélias de Neumeier (déjà vu en 2010). La scénographie est plus classique que dans mon souvenir et la musique de Chopin, à force d'être répétée, me paraît presqu'insupportable. Dans les rôles principaux, le couple Eleonora Abbagnato/Benjamin Pech n'était vraiment pas exaltant. Celui formé par Hervé Moreau et Aurélie Dupont au regard captivant d'autorité était au contraire bouleversant ! S'il m'a un peu moins touché, j'ai aussi apprécié celui formé par Agnès Letestu et Stéphane Bullion. Ce dernier était absolument déchaîné. Le temps d'un solo, j'ai eu l'impression que c'était Ivan Vasiliev qui virevoltait sur scène. J'ai eu malheureusement trop peu d'occasions de voir Agnès Letestu dans de grands ballets pour retenir d'elle de grands souvenirs et de grandes émotions alors qu'elle faisait ses adieux. Les saluts furent néanmoins émouvants, notamment du fait de la présence de José Martinez.
⁂
Salle Pleyel — 2013-10-15
Russian National Orchestra
Mikhaïl Pletnev, direction
Le Retour de Lemminkäinen (Sibelius)
Gidon Kremer, violon
Concerto pour violon en ré mineur, op. 47 (Sibelius)
Symphonie nº2, Rachmaninov
Vocalise, Rachmaninov
Je ne suis vraiment pas fan du violoniste Gidon Kremer. Par contre, j'ai beaucoup aimé le Russian National Orchestra et dans le concerto pour violon de Sibelius, j'avoue avoir souvent préféré concentrer mon attention sur l'arrière-plan orchestral que sur le jeu du soliste.
⁂
Salle Pleyel — 2013-10-26
Gewandhausorchester Leipzig
Riccardo Chailly, direction
Julian Rachlin, violon
Enrico Dindo, violoncelle
Double concerto pour violon et violoncelle, Brahms
Symphonie nº1, Brahms
Le programme de la Salle Pleyel de ce mois d'octobre permettait d'entendre de grands orchestres étrangers. Quelques jours plus tôt, j'ai entendu le Russian National Orchestra et plus tard j'entendrai le Budapest Festival Orchestra. Intercalé entre les deux, j'ai découvert le Gewandhausorchester Leipzig, dirigé par Riccardo Chailly. Je n'ai pas très bien compris les quelques huées qui furent semble-t-il destinées au violoniste Julian Rachlin, qui remplaçait Leonidas Kavakos, souffrant. J'ai pour ma part bien aimé le double concerto pour violon et violoncelle (Enrico Dindo), mais la partie la plus mémorable du concert est intervenue après l'entr'acte, avec une interprétation de la Première symphonie de Brahms qui m'a mis d'un rare état d'exaltation...
⁂
Salle Pleyel — 2013-10-29
Budapest Festival Orchestra
Iván Fischer, direction
Threnos in memoriam Béla Bartók (Sándor Veress)
Maria João Pires, piano
Concerto pour piano nº4 (Beethoven)
Impromptu op. 142 nº2 (Schubert)
Symphonie nº8 (Dvořák)
Valse (Takemitsu)
Danse hongroise nº1 (Brahms)
Magnifique concert du Budapest Festival Orchestra. Le plus grand frisson de la soirée est venu avec l'interprétation de la Symphonie nº8 de Dvořák !
⁂
Cité de la musique — 2013-10-30
Chamber Orchestra of Europe
Jaap van Zweden, direction
La Nuit transfigurée, op. 4, version pour orchestre à cordes (Schönberg)
Hilary Hahn, violon
Concerto pour violon, op. 14 (Barber)
Symphonie nº9 en mi bémol majeur, op. 70 (Chostakovitch)
Avec le Chamber Orchestra of Europe, on s'attend à de l'inoubliable (cf. ici ou là). Ce soir-là, ce ne fut que bon. Je n'ai pas aimé la direction de Jaap van Zweden dans La Nuit transfigurée. Aucun frisson autour de la mesure 100. Des nuances parfois excessivement piano. En effet, comme malheureusement presque toutes les salles de concert parisiennes, la Cité de la musique présente le défaut d'émettre un petit bruit de fond, même en l'absence de son émis par les musiciens ou les spectateurs. À partir du jour où je l'ai remarqué, j'ai commencé à le trouver insupportable pendant les silences orchestraux. C'est une chose que l'on entende un bruit de fond pendant les silences, mais c'en est une autre que ce bruit de fond couvre la musique des instruments à cordes comme ce fut le cas par moments.
Après avoir entendu récemment une autre interprétation de La Nuit transfigurée par les Berliner Philharmoniker dirigés par Simon Rattle, je mesure rétrospectivement le privilège que j'ai eu d'avoir découvert cette œuvre avec Pierre Boulez.
Le concerto pour violon de Barber interprété par l'orchestre et Hilary Hahn m'a paru plus convaincant et après l'entr'acte, la Symphonie nº9 de Chostakovitch le fut plus encore !
⁂
Opéra Garnier — 2013-10-31
Saburo Teshigawara, chorégraphie, musique, scénographie, costumes et lumières
Tim Wright, Akira Oishi, éléments sonores
Daniel Burke / Illusion of Safety, musique additionnelle (Dissenting Voices, extrait de Water Seeks Its Own Level, Finite Material Context / Silent Record, 1994)
Rihoko Sato, assistante du chorégraphe
Sergio Pessanha, assistant lumières
Kazuomi Kurosawa, assistant technique
Aurélie Dupont, Jérémie Bélingard, Nicolas Le Riche
Darkness is hiding black horses (création)
Trisha Brown, chorégraphie (1979)
Robert Rauschenberg, photographies, scénographie et costumes
Beverly Emmons, lumières
Lisa Kraus, Carolyn Lucas, assistantes de la chorégraphe
Laurence Laffon, Caroline Robert
Letizia Galloni, Juliette Hilaire, Miho Fuji
Glacial Decoy
Chant traditionnel géorgien et madrigaux de Carlo Gesualdo (IV et XVII du livre VI), Claudio Monteverdi (extraits du IIe et IIIe livres)
Jiří Kylián, chorégraphie
Michael Simon, scénographie et lumières
Joke Visser, costumes
Patrick Delcroix, assistant du chorégraphe
Kees Tjebbes, assistant technique et réalisation lmières
Images en direct réalisées par le Service vidéo de l'Opéra
Maud Gnidzaz, soprano
Hannah Morrison, soprano
Lucile Richardot, contralto
Sean Clayton, ténor
Lisandro Abadie, baryton basse
Stéphanie Leclerq, contralto (chant grégorien)
Marcio Soares Holanda, ténor (chant grégorien)
Julien Neyer, baryton basse (chant grégorien)
Les Arts Florissants
Paul Agnew, direction musicale
Eleonora Abbagnato, Vincent Chaillet
Alice Renavand, Stéphane Bullion
Doux mensonges
Je me suis beaucoup ennuyé en regardant les deux premiers ballets. Certes, Nicolas Le Riche a dansé dans le ballet de Teshigawara, mais ce n'est pas en soi suffisant pour rendre une chorégraphie intéressante. La création de ce ballet a été très froidement accueillie par le public. Je n'ai pas du tout accroché à Glacial Decoy de Trisha Brown, mais pour sauver ce programme de ballet, il y avait heureusement Doux mensonges de Jiří Kylián dans lequel deux couples évoluent entre la scène et les sous-sols de Garnier, tandis que des chanteurs des Arts Florissants interprètent de magnifiques madrigaux.
2013-12-09 09:57+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Culture indienne — Dhrupad
Il n'arrive pas vraiment en avance, mais voici le vite dit de septembre, un mois au cours duquel outre les spectacles mentionnés ci-dessous j'ai aussi eu l'occasion de voir la magnifique danseuse Janaki Rangarajan :
Salle Pleyel — 2013-09-01
Berliner Philharmoniker
Sir Simon Rattle, direction
La Nuit transfigurée, op 4, version pour orchestre à cordes de 1943 (Schönberg)
Barbara Hannigan, soprano
Trois Fragments de Wozzeck, pour voix et orchestre (Berg)
Le Sacre du Printemps, édition révisée de 1947 (Stravinski)
Formidable concert ! Grâce à un ami, j'ai pu assister à ce concert de l'Orchestre Philharmonique de Berlin. Les solos des musiciens de l'orchestre étaient magnifiques, mais collectivement, l'ensemble n'était qu'excellent, alors qu'avec un orchestre de cette réputation, je m'attendais à ce que ce soit inoubliable. Je n'ai pas autant vibré pendant La Nuit transfigurée que lorsque j'avais vu Pierre Boulez la diriger. Tel moment palpitant (autour de la mesure 100) sous la direction de Boulez me paraissait tout plat avec Simon Rattle, comme s'il n'avait pas lu le Molto rit.. En revanche, quel plaisir d'entendre Barbara Hannigan interpréter Berg avec une telle beauté de chant, une aussi remarquable technique et une si grande conviction !
⁂
Salle Pleyel — 2013-09-12
Philippe Aïche, violon solo
Orchestre de Paris
Paavo Järvi, direction
Orages, ouverture de concert pour orchestre, op. 93, Bechara El-Khoury
Janine Jansen, violon
Concerto pour violon nº2 (Prokofiev)
Mélodie (Tchaikovski)
Mari Eriksmoen, soprano
Max Emanuel Cencic, contre-ténor
Ludovic Tézier, baryton
Chœur de l'Orchestre de Paris
Lionel Sow, chef de chœur
Maîtrise de Paris
Patrick Marco, chef de chœur
Carmina Burana, “Cantiones profanae” pour soprano, ténor, baryton, chœur mixte, chœur d'enfants et orchestre, Carl Orff.
Comme je m'étais rendu compte du fait que je n'aurais sans doute pas d'autre occasion d'entendre Janine Jansen cette année, j'avais réservé une place pour ce concert un peu au dernier moment, et une opportunité d'assister à ce concert depuis le tout premier rang s'est présentée. Je n'ai pas été déçu ! Je ne saurais dire si je l'ai préférée à Lisa Batiashvili. Elles ont toutes les deux été magnifiques dans ce concerto nº2 de Prokofiev ! A priori, je me serais bien dispensé d'écouter Carmina Burana, mais j'ai bien fait de ne pas partir à l'entr'acte. L'orchestre et le chœur étaient en très bonne forme, mais mon plus grand plaisir est venu des solistes, Max Emanuel Cencic, Ludovic Tézier et surtout Mari Eriksmoen dont le chant d'extase, cette redoutable acrobatie vocale, m'a paru superbe.
⁂
Opéra Garnier — 2013-09-19
Yann Beuron, Admète
Sophie Koch, Alceste
Jean-François Lapointe, Le Grand Prêtre d'Apollon
Franck Ferrari, Hercule
Stanislas de Barbeyrac, Evandre/Coryphée ténor
Marie-Adeline Henry, Coryphée soprano
Florian Sempey, Apollon/Un Héraut/Coryphée basse
François Lis, Une Divinité Infernale/L'Oracle
Manuel Nunez-Camelino, Coryphée Alto
Marc Minkowski, direction musicale
Olivier Py, mise en scène
Pierre-André Weitz, décors et costumes
Bertrand Killy, lumières
Pierre Dumoussaud, chef de chœur
Chœur et Orchestre des Musiciens du Louvre-Grenoble
Alceste, Gluck
Mise en scène sobre d'Olivier Py avec décors et costumes en noir et blanc. Les décors sont dessinés en direct à la craie par des artistes dont les noms ne sont scandaleusement pas mentionnés dans la feuille de distribution. Quelques très beaux moments choraux. Des musiciens du Louvre-Grenoble plutôt inspirés. De très bons chanteurs (notamment les quatre coryphées). Alors que ma place ne me permet pas d'apercevoir les surtitres, je m'étonne de comprendre presque tout le texte (racontant le mythe assez peu exaltant d'Alceste). Le point noir de la distribution est Sophie Koch, dont le français chanté est incompréhensible. (Même en me contorsionnant pour voir les surtitres, ce que je lis ne semble pas correspondre à ce que j'entends.)
⁂
Cité de la musique — 2013-09-20
Alexandre Astier, écriture et interprétation
Jean-Christophe Hembert, mise en scène
Seymour Laval, scénographie, lumières
Anne-Gaëlle Daval, costumes
François Vatin, création son
Jean-Charles Simon, voix
Rémi Vander-Heym, régie lumières
François Vatin, régie son
Yannick Bourdelle, régie plateau
Thierry Cabecas, régie
Que Ma Joie Demeure !
J'ai été content d'assister à ce charmant spectacle musical d'Alexandre Astier autour de la vie de Bach. Malheureusement, j'avais eu l'occasion de visionner quelques extraits du spectacle et connaissais donc déjà pas mal de gags, ce qui gâche un peu le plaisir...
⁂
Cité de la musique — 2013-09-27
Ensemble Intercontemporain
Matthias Pintscher, direction musicale
Fuga (ricercata) a 6 voci, extrait de L'Offrande musicale, BWV 1079, Johann Sebastian Bach/Anton Webern
Claire Booth, soprano
Gordon Gietz, ténor
Gilbert Nouno, Carl Faia, réalisation informatique musicale IRCAM
Franck Rossi, ingénieur du son IRCAM
Two Interludes and a Scene for an Opera (Jonathan Harvey)
Pierre Strauch, violoncelle
Sonate pour violoncelle seul (Bernd Alois Zimmermann)
Bereshit (Matthias Pintscher)
Je garde deux souvenirs de ce concert. Le premier concerne les extraits d'un opéra de Jonathan Harvey intitulé Wagner Dream et inspiré par le projet de Wagner de composer un opéra Vainqueurs sur un thème bouddhiste. À la scène peu exaltante faisant intervenir Prakriti et Ananda j'ai nettement préféré les interludes orchestraux qui l'entouraient. L'autre souvenir est celle de la Sonate pour violoncelle seul de B. A. Zimmermann. J'y ai rencontré une des limites de mes possibilités d'écoute de la musique contemporaine. En la voyant, j'ai eu l'impression d'assister à une séance de torture de violoncelle par Pierre Strauch (qui n'utilisait pas son instrument design habituel). Mon écoute était complètement perturbée par cette vision. Quand j'ai écouté l'enregistrement sonore lors d'une diffusion sur France Musique, l'œuvre et l'interprétation m'ont paru bien plus agréable à écouter...
Ailleurs : Bladsurb.
⁂
Théâtre des Champs-Élysées — 2013-09-29
Emmanuel Pahud, flûte
Maja Avramovic, violon
Joaquín Riquelme García, alto
Stefan Koncz, violoncelle
Quatuor avec flûte en ut majeur, KV 285B, Mozart
Sonata a quattro nº2 en la majeur, Rossini
Quatuor avec flûte en sol majeur, KV 285A, Mozart
Sonata a quattro nº1 en sol majeur, Rossini
Quatuor avec flûte en ré majeur, KV 285, Mozart
Ravissant concert de musiciens berlinois autour du flûtiste Emmanuel Pahud ! La grande découverte de ce concert a été pour moi celle du violoncelliste Stefan Koncz (qui a fait l'objet d'une chouchouscopie du Klariscope). Avec ses merveilleux et variés pizz. et son entente avec les autres musiciens, il a contribué à faire de la Sonata a quattro nº2 de Rossini le point culminant de ce concert.
⁂
Chez Véronique — 2013-09-29
Nirmalya Dey, chant dhrupad
Céline Wadier, tampura, chant dhrupad
Gérard Hababou, pakhawaj
Raga Multani
Raga Malkauns
Nirmalya Dey, un des tout meilleurs chanteurs de dhrupad était présent à Paris pour un concert donné dans un appartement où une foule de spectateurs s'étaient rassemblés (soit une petite cinquantaine). Quelques jours avant, j'ai eu la chance de pouvoir prendre un cours particulier avec lui sur le Raga Puriya (et ce ne sera sans doute pas le dernier...). J'ai tout particulièrement aimé ses Alap. Quand j'écoute de la musique classique occidentale, même sans avoir une connaissance préalable de l'œuvre jouée, il m'arrive très souvent de m'attendre à ce qui se passe quelque chose d'assez précis, comme la reprise d'une phrase, une montée ou une baisse de tension ou plus simplement la fin d'un morceau ; dans les secondes qui suivent, je suis soit flatté quand la prédiction s'avère juste soit surpris quand le compositeur avait prévu autre chose. Je commence à avoir entendu et pratiqué assez le chant dhrupad pour commencer à avoir de telles attentes, même dans les sections improvisées qui constituent un Alap. J'ai ainsi eu le sentiment que Nirmalya Dey cherchait parfois à créer une attente chez l'auditeur, notamment dans sa façon de jouer les notes proches des notes très stables comme Sa (tonique) ou Pa (dominante). Le premier Raga (Multani) comportait un Tivra Ma et un Shuddh Ni (respectivement un demi-ton en dessous du Pa et du Sa). Dans son exploration du Raga, le chanteur est resté plusieurs fois de façon prolongée sur ces notes qui ne sont pas les plus consonnantes, créant une tension qu'il pouvait libérer en finissant sa phrase avec la note très consonnante voisine ou au contraire prolonger en redescendant sur des notes plus basses avant de prochains assauts. J'ai pris un certain plaisir à voir mes attentes surprises ou au contraire contrariées.
Je crois me souvenir que la composition sur la Raga Multani était en Chautal (12 temps). Ce même Tala était utilisé dans la première composition sur le Raga Malkauns, que je n'ai pas reconnu avant que le chanteur ne commence une deuxième composition Shankara Girija Pati (Sultal, 5 ou 10 temps suivant comment on compte...) que je connaissais pour l'avoir un tout petit peu pratiquée.
⁂
Opéra Bastille — 2013-09-30
Ricarda Merbeth, Emilia Marty
Atilla Kiss-B, Albert Gregor
Vincent Le Texier, Jaroslav Prus
Jochen Schmeckenbecher, Dr Kolenaty
Andreas Conrad, Vitek
Andrea Hill, Krista
Ladislav Elgr, Janek
Ryland Davies, Hauk-Sendorf
Susanna Mälkki, direction musicale
Krzyzstof Warlikowski, mise en scène
Małgorzata Szczęśniak, décors et costumes
Denis Guéguin, vidéo
Felice Ross, lumières
Miron Hakenbeck, dramaturgie
Alessandro Di Stefano, chef du chœur
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
Věc Makropoulos, Janáček
Le livret de cette Affaire Makropoulos m'a paru assez confus. La belle mise en scène de Krzyzstof Warlikowski qui transpose ce cas dans le monde du cinéma n'aide pas vraiment à caractériser les différents personnages secondaires. Je m'attendais à apprécier la musique puisqu'il s'agit d'un opéra de Janáček, mais je ne pensais pas prendre un tel plaisir à l'écoute de l'Orchestre de l'Opéra. Mille mercis à Susanna Mälkki pour son exaltante direction musicale !
2013-11-07 12:25+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Culture indienne — Planning
Voici mon programme de spectacles pour le mois de novembre :
2013-10-31 14:15+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Danses indiennes — Culture indienne
Cité de la musique — 2013-10-05
Françoise Lasserre, direction musicale et conception du projet
François Rancillac, mise en scène
Sabine Siegwalt, dramaturgie, scénographie et costumes avec la collaboration de Parvesh & Jai
Charlotte Delaporte, assistanat de la mise en scène et travail du mouvement
Dominique Fortin, lumière
Baptiste Chapelot, direction technique
Madhup Mudgal, composition du prélude
Arushi Mudgal, danse odissi
Dávid Szigetvári, Orfeo
Claire Lefilliâtre, Musica, Messagiera
Nitya Urbanna Vaz, Euridice
Dagmar Saskova, Ninfa
Aude Priya, Proserpina
Jean-Christophe Clair, Speranza, Pastore, Spirito
Jan Van Elsacker, Pastore, Spirito
Johannes Weiss, Pastore, Spirito
Hugo Oliveira, Caronte, Pastore, Spirito
Geoffroy Buffière, Plutone
Akadémia
Laurent Stewart, clavecin
Emmanuel Mandrin, orgue
Thomas Dunford, archiluth, guitare
Quito Gato, théorbe, guitare
Flora Papadopoulos, harpe triple
Lucas Peres, lirone
Sylvia Abramowicz, ténor de viole
Sylvie Moquet, basse de viole
Yuka Saïto, basse de viole
Matthieu Lusson, violone
Flavio Losco, Jose Manuel Navarro, violons
Etienne Mangot, violoncelle
Frithjof Smith, Josue Melendez, cornets
Claire Michon, Michel Quagliozzi, flûtes
Thierry Gomar, percussion
Murad Ali, sarangi
Sanjeev & Ashwani Shankar, shehnai
Mithilesh Jha, tabla
Mohan Shyam Sharma, pakhawaj
Michel & Marie-Thérèse Guay, tanpura
Neemrana Vocal Ensemble
Nadya Balyan, chef de chœur
Sparsh Bajpal, Priyanka Mukherjee, Ashwani Parameshwar, Ramya Roy, sopranos
Nadya Balyan, Isabelle Faure Jaitly, altos
Prabhat Chandola, ténor
Bhanu Sharma, basse
Antoine Redon, producteur exécutif pour la Fondation Neemrana
Valérie Déal, régie surtitrage
Orfeo par-delà le Gange (Monteverdi)
Depuis son passage au Musée Guimet il y a un an, j'avais bien retenu le nom de la danseuse Arushi Mudgal. Ainsi, lors de la sortie de la brochure 2013/2014 de la Cité de la musique, quand je vis qu'elle participerait avec d'autres artistes indiens à une production de l'opéra Orfeo de Monterverdi, j'incluai immédiatement ce spectacle à mon abonnement.
Le spectacle a commencé par un prélude magnifiquement dansé par Arushi Mudgal sur une musique de son père Madhup Mudgal. Sa danse était au début très lente, comme souvent dans le style odissi, ce qui permet de bien apprécier les moindres mouvements de mains, et puis elle s'est accélérée tandis que la danseuse se transformait en Shiva-Nataraja, le danseur cosmique dont les pas sont rythmés par son tambour Damaru. Cette danse très virile valait à elle seule le déplacement ! La raison de cette évocation de Shiva dans ce spectacle intitulé Orfeo par-delà le Gange était évidemment qu'il joue un rôle majeur dans la descente de la déesse Ganga sur terre, puisqu'après avoir été emprisonnée dans la chevelure de Shiva, Ganga peut finalement jaillir. Après que la danseuse a représenté cette descente de Ganga, l'action s'est déplacée au bord de la rivière. La danseuse évoque alors des rites effectués par les dévôts comme l'offrande de feu (aarti). Après avoir évoqué les divers personnages impliqués, la danseuse prend résolument la forme d'un personnage féminin, celui qu'elle incarnera jusqu'à la fin du spectacle. La fin de ce prélude (dont la danse est très étrangement influencée par la danse kathak) est marquée par l'intrusion du personnage d'Orfeo, qui, habillé en costume européen, comme venu d'un autre univers, enlace impulsivement cette Eurydice indienne sans son consentement.
La musique indienne laisse alors la place à la musique de Monteverdi (sans la fanfare qui aurait quelque peu cassé l'ambiance). Je suis alors très impressionné par l'ensemble Akadémia dirigé par Françoise Lasserre, et plus encore par la chanteuse Claire Lefilliâtre qui incarne le rôle de la Musique. Que son chant est beau et délicieusement ornementé...
J'ai trouvé la mise en scène sans artifice très bien menée. Le projet
prend tout son sens dans la deuxième partie du spectacle quand Orphée
descend aux Enfers. Sur sa route, il rencontre Charon, qui est habillé en
brâhmane et porte les marques sectaires shivaïtes. Les spectateurs des
premiers rangs peuvent humer d'abondantes vapeurs d'encens. L'entrée au
royaume de Pluton se fait sur une musique rituelle des temples d'Inde
(jouée par deux shehnai, la variante nord-indienne du
nadaswaram). Orphée entre en fait dans un temple de Shiva et la
divinité est conforme à l'iconographie traditionnelle : il porte bien sûr
un chignon tressé, un serpent est enroulé autour de son cou et son
apparence est aussi conforme à l'épithète de Nilakantha (celui qui a la
gorge bleue, référence au mythe du barattage
de la mer de lait). De façon plus étrange, ses mains sont aussi peintes
en bleu et il semble qu'il porte un cordon sacré réservé aux deux fois
nés
(comme les brâhmanes).
Ne connaissant pas très bien l'œuvre de Monteverdi, j'ai été très étonné par le caractère secondaire du rôle d'Eurydice. Elle doit avoir au plus deux ou trois répliques ! Alors que dans la version de Gluck, elle est en quelque sorte co-responsable avec Orphée de l'issue fatale (dans la version sans happy ending), puisqu'en disant à Orphée à quel point elle est désespérée de ne pas le voir tourner son regard vers elle, elle l'incite à enfreindre la condition qu'il devait respecter pour retrouver Eurydice. Chez Monteverdi, Eurydice est muette et Orphée est seul responsable de sa triste fin, emporté par les furies, avant que les musiciens de l'ensemble Akadémia ne soient rejoints par le son des tampuras indiens.
Du point de vue vocal, ma plus forte impression est venue comme je l'ai dit plus haut de Claire Lefilliâtre, et aussi de l'interprète du rôle d'Orfeo (Dávid Szigetvári), mais les autres chanteurs (qu'ils soient solistes ou du Neemrana Vocal Ensemble) ont également fait de très belles prestations.
Ailleurs : Bladsurb.
2013-10-19 13:30+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Danses indiennes — Culture indienne
J'ai déjà eu l'occasion de revenir sur des spectacles de juin et juillet vus à Budapest (Blanche Neige, Hámos Júlia, Isabelle Druet, Parsifal, Die Meistersinger von Nürnberg), à Montpellier, Salzburg ou München, mais quelques autres n'avaient pas encore fait l'objet d'un compte-rendu, fût-il succint. Il n'est jamais trop tard...
Salle Pleyel — 2013-06-02
Orchestre Colonne
Laurent Petitgirard, direction
Der Freischütz, ouverture (Weber)
Le Chasseur Maudit (Franck)
Guillaume Tell, ouverture (Rossini), extraits
Un charmant et court concert dans lequel de très jeunes spectateurs furent invités à diriger des extraits de l'ouverture de Guillaume Tell de Rossini. Cela valait surtout le déplacement pour Le Chasseur Maudit de César Franck ; sinon, je ne me serais pas levé aussi tôt un dimanche matin !
⁂
59 Rivoli — 2013-06-02
Célinn et l'Arbre des Songes
Ce concert avait lieu dans un endroit inattendu, le 59 Rivoli, un squat d'artistes légalisé. J'y étais allé pour écouter l'octuor Célinn et l'Arbre des Songes dont fait partie ma prof de chant dhrupad. Le programme était entièrement constitué de compositions de chant dhrupad arrangées par Pierre Tereygeol. L'écoute fut aussi plaisante qu'étonnante. Le plus surprenant fut pour moi l'utilisation des instruments à vents dans la composition Paravati en Raga Puriya (cf. les extraits chantés Nirmalya Dey).
⁂
Opéra Garnier — 2013-06-03
Vello Pähn, direction musicale
Orchestre de l'Opéra national de Paris
Ballet de l'Opéra
Igor Stravinski, musique (Suite pour orchestre, 1919)
Maurice Béjart, chorégraphie
Costumes d'après les maquettes de Joëlle Roustan
Roger Bernard, lumières
Mathias Heymann, L'Oiseau de feu
Allister Madin, L'Oiseau Phenix
L'Oiseau de feu
Claude Debussy, musique (Prélude à l'Après-midi d'un faune, 1894)
Vaslav Nijinski, chorégraphie (1912) réglée par Ghislaine Thesmar
Léon Bakst, décors et costumes
Jérémie Bélingard, Le faune
Eve Grinsztajn, La nymphe
L'Après-midi d'un faune
Claude Debussy, musique (Prélude à l'Après-midi d'un faune)
Jerome Robbins, chorégraphie (1953) réglée par Jean-Pierre Frohlich
Jean Rosenthal, décor et lumières
Irene Sharaff, costumes
Perry Silvey, réalisation lumières
Myriam Ould-Braham, Mathias Heymann
Afternoon of a Faun
Maurice Ravel, musique (1928)
Sidi Larbi Cherkaoui, Damien Jalet, Marina Abramovič, conception
Sidi Larbi Cherkaoui, Damien Jalet, chorégraphie
Marina Abramovič, scénographie
Riccardo Tisci, costumes
Urs Schonebaum, lumières
James O'Hara, Emilios Arapoglu, assistants des chorégraphes
Aurélie Dupont, Marie-Agnès Gillot, Alice Renavand, Muriel Zusperreguy, Letizia Galloni
James O'Hara, Vincent Chaillet, Marc Moreau, Alexandre Gasse, Daniel Stokes, Adrien Couvez
Boléro
Il aura fallu que je voie trois fois ce programme de ballets pour trouver la distribution idéale. Les conditions idéales sont réunies le soir de la dernière. Tout d'abord, l'orchestre est en très grande forme, ce qui n'a pas été le cas tous les soirs. Dans L'Oiseau de feu de Béjart, Mathias Heymann a été tout simplement extraordinaire le soir de cette dernière représentation. Dans le corps de ballet, François Alu se distinguait aussi, comme à chacune de ses apparitions...
Jérémie Bélingard dansait dans L'Après-midi d'un faune de Nijinski. Son interprétation fut sans doute plus terre à terre que celle de Nicolas Le Riche, mais je l'ai préférée.
Alors qu'Afternoon of a Faun de Jerome Robbins m'avait paru inintéressant et ennuyeux au possible avec d'autres interprètes, Myriam Ould-Braham et Mathias Heymann en ont livré une interprétation passionnante ! Myriam Ould-Braham utilise ses cheveux d'une façon très sensuelle et certaines ondulations de pieds suggèrent un décor aquatique au jeu du faune et de la nymphe.
Pour finir, je n'ai pas été passionné par le Boléro de Sidi Larbi Cherkaoui et Damien Jalet. Les costumes et le maquillage transformaient les danseurs en des créatures indifférenciées, anonymes. Aucune progression dans la tension à l'approche de la fin de la musique. C'était cela dit assez joli à regarder, surtout grâce à la scénographie de Marina Abramovič comportant un grand miroir permettant d'avoir une vue de dessus de la scène et ainsi d'apprécier les mouvements de rotation. Lors de cette dernière cependant, beaucoup de balletomanes présents n'ont eu d'yeux que pour James O'Hara (qui remplaçait Jérémie Bélingard dans ce ballet). Alors que les autres danseurs pouvaient parfois donner l'impression de retenir leurs mouvements, James O'Hara semblait s'abandonner complètement dans la danse, rendant la chorégraphie bien plus convaincante !
⁂
Salle Pleyel — 2013-06-06
Philippe Aïche, violon solo
Orchestre de Paris
Yutaka Sado, direction
Divertissement pour orchestre de chambre (Ibert)
Boris Berezovsky, piano
Variations sur un thème de Paganini, pour piano et orchestre, op. 43 (Rachmaninov)
Chœur de l'Orchestre de Paris
Lionel Sow, chef de chœur
Luisa Miller (Ouverture), Verdi
I Lombardi alla Prima Crociata (Gerusalem!, O Signore, dal tetto natio), Verdi
Ernani (Esultiamo), Verdi
Il Trovatore (Le fosche notturne spoglie), Verdi
Nabucco (Ouverture, Gli arredi festivi, Va, pensiaro, sull'ali dorate), Verdi
Aida (Marche des trompettes), Verdi
Ce fut un très beau concert ! Un chef survolté (Yutaka Sado), un
pianiste superlatif (Boris Berezovsky), de très beaux chœurs de Verdi, et
pour conclure le concert, un renfort de six trompettes (à la forme
inhabituelle) pour le bis attendu : la Marche des Trompettes
d'Aïda.
⁂
Théâtre des Champs-Élysées — 2013-06-08
Erin Wall, soprano
Mark Padmore, ténor
Hanno Müller-Brachmann , baryton
Maîtrise de Radio France
Sofi Jeannin, chef de chœur
Chœur Symphonique de Birmingham
Simon Halsey, chef de chœur
Orchestre Symphonique de Birmingham
Andris Nelsons, direction
War Requiem, Britten
J'ai pris un énorme plaisir à découvrir ce War Requiem de Britten, dirigé par Andris Nelsons, un chef dont j'avais déjà eu l'occasion d'apprécier le travail dans Tristan et Isolde. J'ai apprécié les délicieuses dissonances présentes dans cette œuvre qui me donnait l'impression d'être parfois modale, parfois chromatique. La qualité du texte (et de ses interprètes, notamment Mark Padmore) est aussi à souligner...
⁂
Salle Pleyel — 2013-06-18
Jerusalem Quartet
Alexander Pavlovsky, violon
Sergei Bresler, violon
Ori Kam, alto
Kyril Zlotnikov, violoncelle
Quatuor à cordes nº1 en ut mineur, op. 51 nº1 (Brahms)
Amihai Grosz, alto
Quintette à cordes nº1 en fa majeur, op. 88 (Brahms)
Quatuor à cordes nº3 en si bémol majeur, op. 67 (Brahms)
Salle Pleyel — 2013-06-19
Jerusalem Quartet
Alexander Pavlovsky, violon
Sergei Bresler, violon
Ori Kam, alto
Kyril Zlotnikov, violoncelle
Quatuor à cordes nº2 en la mineur, op. 51 nº2 (Brahms)
Amihai Grosz, alto
Ohad Ben Ari, piano
Sonate pour alto et piano nº1 en fa mineur, op. 120 nº1 (Brahms)
Quintette à cordes nº2 en sol majeur, op. 111 (Brahms)
Ces deux concerts du Jerusalem Quartet concluaient une série de huit concerts de musique de chambre de Brahms (cf. épisodes précédents #1/#2 #3/#4 et #5/#6). De ces deux concerts, je retiens surtout sa magnifique conclusion avec le quintette à cordes nº2. Je retiens également l'indécence quasi-pornographique que peut revêtir l'interprétation d'une corde à vide par un violoncelliste.
⁂
Théâtre des Champs-Élysées — 2013-06-20
Anna Caterina Antonacci, Pénélope
Roberto Alagna, Ulysse
Vincent Le Texier, Eumée
Edwin Crossley-Mercer, Eurymaque
Marina de Liso, Euryclée
Julien Behr, Antinoüs
Sophie Pondjiclis, Cléone
Jérémy Duffau, Léodès
Khatouna Gadelia, Mélantho
Marc Labonette, Ctésippe
Antonin Rondepierre, Le Pâtre
Chœur Lamoureux
Patrick Marco, chef de chœur
Orchestre Lamoureux
Fayçal Karoui, direction
Pénélope, Fauré
Effet Alagna oblige, le Théâtre des Champs-Élysées était très plein. Cependant, si Roberto Alagna (Ulysse) m'a fait une très bonne impression dans cette œuvre très wagnérienne de Fauré, l'héroïne de la soirée a indiscutablement été Anna Caterina Antonacci (Pénélope).
⁂
Gare au Théâtre, Vitry-sur-Seine — 2013-06-22
Chœur et orchestre du Balkansambl
Sophie Ménissier, chorégraphie
Khizim (Danses d'inspirations tsiganes)
Elise Kusmeruck, violon
À un jet de pierre de la gare de Vitry-sur-Seine se trouve une salle de
spectacle où se tenait ce jour-là une journée tzigane. J'ai ainsi pu
entendre avec plaisir le Chœur et orchestre du Balkansambl interpréter des
chansons dans des langues qui ne sont pas vues d'un très bon œil en ce pays
par les gouvernements récents... Un groupe de danseuses se sont jointes par
la suite à l'ensemble pour interpréter Khizim, un ballet que j'ai
trouvé extrêmement bien conçu et interprété. La mise en scène était
remarquable. Je n'avais vraiment pas l'impression d'assister à un spectacle
amateur
! Le ballet comportait des ensembles dans lesquels étaient
insérés des solos de danseuses évoquant des destins individuels de femmes.
Le récital de la violoniste Elise Kusmeruck m'a un peu moins intéressé dans
la mesure où la plupart des morceaux joués avec quelques autres musiciens,
s'ils étaient très rapides et indéniablement virtuoses, étaient aussi un
peu trop répétitifs à mon goût.
⁂
Centre Jean Bosco — 2013-06-30
Élèves de Jyotika Rao, bharatanatyam
Invocation de Saraswati, Durga et Lakshmi
Alarippu
Saraswati Kautwam
Shiva Kautwam
Shabdam
Rangadwara
Toreyamangalam (?)
Tillana
J'ai assisté au spectacle de fin d'année des élèves de la prof de bharatanatyam de l'association où je prends des cours de dhrupad (et où je prends aussi des cours de bharatanatyam depuis la semaine dernière...). Le programme avait la structure formelle d'un récital. Avant chaque pièce, pour permettre aux spectateurs d'en comprendre le sens, une danseuse montrait les mouvements les plus significatifs. La plupart des chorégraphies étaient exécutées de façon synchronisées par deux danseuses. Le programme comportait aussi un Alarippu en l'honneur de Ganesh exécuté par trois très jeunes danseuses, et deux solos : un Saraswati Kautwam qui était dansé sur un rythme particulièrement vif et une pièce narrative élaborée apparemment intitulée Shabnam évoquant les espiègleries de Krishna. Dans cette pièce, j'ai particulièrement apprécié la façon de représenter Vishnu sous le nom de Padmanabha, c'est-à-dire qu'alors qu'il est couché, de son nombril émerge un lotus sur lequel Brahma est assis. Même si elle n'a pas dansé de pièce narrative, j'ai revu avec grand plaisir l'élève la plus avancée qui m'avait tant impressionné il y a quelques mois. Que j'ai hâte qu'il lui soit donné la possibilité de donner un récital !
⁂
Opéra Bastille — 2013-07-04
Carolyn Carlson, chorégraphie
Olivier Debré, décors et costumes
René Aubry, musique
Patrice Besombes, lumières
Colette Malye, assistante de la chorégraphe
Ballet de l'Opéra
Émilie Cozette, Hervé Moreau
Signes
Assister à ce ballet à été un supplice pour moi. La musique et la chorégraphie répétitives m'ont beaucoup ennuyé. Même le tableau Les couleurs de Maduraï m'a déplu... Je n'ai pas vraiment vu le rapport avec cette ville d'Inde.
⁂
Centre d'animation de la Place des Fêtes — 2013-07-05
Élèves de l'association Triloka, bharatanatyam
Kalaimmamani MK Saroja, chorégraphies
Smt. Lavanya Ananth, chorégraphies
Subramanyam Kautwam (chorégraphie de MK Saroja)
Nritanjali (chorégraphie de Lavanya Ananth)
Shiva Kirtanam (chorégraphie de Lavanya Ananth)
Varnam (chorégraphie de MK Saroja)
Madhura Ashtakam (chorégraphie de Lavanya Ananth)
Ambashtuti (chorégraphie de Lavanya Ananth)
Tillana (chorégraphie de MK Saroja)
Il s'agissait du spectacle de fin d'année des élèves de bharatanatyam de Shalini (association Triloka). Les chorégraphies étaient de Smt. MK Saroja ou de Lavanya Ananth. Presque toutes les pièces étaient dansées de façon synchronisée par un ensemble de danseuses d'effectif variable. Beaucoup de pièces de danse pure, mais aussi quelques pièces évoquant certaines divinités. La multiplicité des danseuses n'est exploitée d'un point narrative que dans certains passages du Varnam et en particulier dans sa fin qui m'a beaucoup ému : l'union de Shiva et Meenakshi est célébrée tandis que Vishnu, placé en retrait avec deux spectateurs assiste à la scène. Le niveau des danseuses était globalement bon, voire très bon, mais dans les ensembles, une d'entre elles m'a sidéré par la beauté, l'exactitude et la vérité de ses mouvements. Quand elle mimait les mouvements de prêtres lors de l'aarti (offrande du feu), j'avais vraiment l'impression d'y être !
⁂
Place Stalingrad — 2013-07-07
Vasantha, “bharatanatyam”
Sharmila Sharma, kathak
Tulika Srivatsava, odissi
Revati, odissi
La société internationale pour la conscience de Krishna organisait un simulacre de la fête de Rath Yatra (qui se déroule à Puri, dans l'état indien d'Odisha). Place Stalingrad, en attendant que le char arrive, une petite scène était installée. La partie “bharatanatyam” ne méritait pas ce nom, puisque c'était plutôt du Bollywood... La danse kathak était plus convaincante. Des deux danseuses d'odissi, j'ai préféré la deuxième interprète, Revati, extrêmement gracieuse dans cette danse dont la lenteur permet d'apprécier les moindres détails des mouvements.
⁂
Opéra Garnier — 2013-07-15
Pierre Lacotte, adaptation et chorégraphie
Jean-Madeleine Schneitzhoeffer, musique
Ludwig Wilhelm Maurer, musique du pas de trois de l'acte I
Adolphe Nourrit, livret
Marie-Claire Musson, décors d'après Pierre Ciceri
Michel Fresnay, costumes d'après Eugène Lami
Philippe Hui, direction musicale
Amandine Albisson, La Sylphide
Florian Magnenet, James
Valentine Colasante, Effie
Stéphane Phavorin, La Sorcière
Mickaël Lafon, Gurn
Natacha Gilles, La Mère d'Effie
Laurène Levy, Marc Moreau, Pas de deux des Écossais
Laurène Lévy, Laura Hecquet, Marie-Solène Boulet, Trois Sylphides
Ballet de l'Opéra
Orchestre de l'Opéra national de Paris
La Sylphide, ballet en deux actes d'après Philippe Taglioni
Pour moi, la Sylphide, c'est Amandine Albisson. Bien sûr, j'ai été très impressionné par Evgenia Obraztsova (et moins par Mélanie Hurel et Ludmila Pagliero). Le premier acte de ce ballet me plait toujours autant (j'aurai assisté au total à cinq représentations de la série !). Avec d'autres interprètes qu'elle, le deuxième acte (blanc) a eu tendance à m'ennuyer du fait de se narration plus ténue, mais Amandine Albisson, par ses qualités d'expression m'a autant passionné dans ce deuxième acte.
La représentation du 15 juin était la dernière de Stéphane Phavorin en
tant que premier danseur de l'Opéra. Il a encore une fois été magnifique
dans le rôle de la Sorcière. Ayant eu la possibilité de prendre une place
dans la loge de l'Impératrice
, je lui lancé un bouquet lors des
saluts enthousiastes du public à son égard. J'avoue que je ne suis pas
mécontent qu'il ait donné ce bouquet à Amandine Albisson...
Stéphane Phavorin ©Isabelle Aubert
Amandine Albisson, Stéphane Phavorin, Florian Magnenet ©Isabelle Aubert
Merci à la photographe !
Ailleurs : Les Balletonautes.
⁂
Centre Mandapa — 2013-07-18
Hakilée Tula, kathak
Magali-Uma, bharatanatyam
Guruvandana (chorégraphie de Jai Kishan Maharaj)
Nritta Tintal Vilambit
Louange à Murugan (chorégraphie de MK Saroja)
Alarippu (chorégraphie de Vidya et MK Saroja)
Ardhanarishwara
Ambashtuti (chorégraphie de MK Saroja)
Thumri
Nritta Tintal
Ce programme associait de façon curieuse deux danseuses de styles très différents : bharatanatyam et kathak. De la partie bharatanatyam, je retiens surtout un passage extrêmement impressionnant dans le premier jati d'Ambashtuti (une telle vigueur est du jamais vu pour moi) ; le deuxième jati était au contraire dans un genre plus gracieux. De la partie kathak, je retiens le Tumri évoquant le réveil de Radha ayant le sentiment d'être délaissée par Krishna, un thème souvent traité dans le bharatanatyam et que je voyais pour la première fois mis en scène dans la danse kathak.
⁂
Théâtre des Bouffes du Nord — 2013-07-24
Vincent Planès, piano
Roger Padullès, Tamino
Dima Bawab, Pamina
Malia Bendi Merad, La Reine de la Nuit
Betsabée Haas, Papagena
Thomas Dolié, Papageno
Vincet Pavesi, Sarastro
Alex Mansoori, Monostatos
Abdou Ouologuem, magicien
Jean Dauriac, figuration
Peter Brook, mise en scène
Peter Brook, Franck Krawczyk, Marie-Hélène Estienne, adaptation
Christophe Capacci, conseiller artistique
Philippe Vialatte, lumières
Une Flûte Enchantée, librement adaptée d'après la partition de Mozart et le livret de Emanuel Schikaneder
J'avais été émerveillé par le travail de Peter Brook quand j'avais assisté à la création de sa Flûte enchantée en 2010. En en faisant l'expérience à nouveau avec une distribution différente, j'ai passé un très bon moment, mais je n'ai pas été autant ému que lors de la première. La surprise engendrée par certains choix du metteur en scène ne fonctionne plus aussi bien avec moi, malheureusement, et ce indépendamment de la qualité des interprètes.
2013-10-03 12:47+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Culture indienne — Planning
Voici mon programme de spectacles pour le mois d'octobre :
2013-09-12 12:15+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Culture indienne — Planning
Voici mon programme de spectacles pour ce début de saison 2013/2014 :
2013-08-13 21:03+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
La solution la plus économique pour me rendre à Salzburg était de prendre l'avion pour Munich puis le train. La ville m'a beaucoup plu. On y trouve des hôtels et des restaurants à des prix tout à fait raisonnables. Je ne suis pas allé dans des grands restaurants, mais vu la qualité de ce que j'ai mangé dans certaines échoppes, je crois pouvoir dire qu'on mange bien dans cette ville. La gare de Munich (Hauptbahnhof), avec ses nombreux petits restaurants et stands, est particulièrement impressionnante de ce point de vue là.
Pour ce qui est du tourisme, la perspective d'assister à des opéras depuis des places debout ne m'a pas incité à faire de longues marches. Je me suis contenté de la Maximiliamstraße :
Regierung von Oberbayern, Munich
Le seul monument pour lequel j'aie pris un billet payant a été la Résidence de Munich, située tout près de l'Opéra d'État de Bavière. Je n'ai pas pu visiter qu'un nombre limité des salles, sans que je comprenne très bien si les autres étaient en travaux ou si leur accès était fermé en fin de journée (j'étais pourtant entré deux heures avant la fermeture). L'endroit est sidérant de beauté. J'avais hésité à prendre un billet combiné pour le Trésor, mais je ne l'ai pas regretté, parce que je n'ai jamais vu autant d'objets aussi richement ouvragés, même dans les palais et temples les plus extravagants de l'Inde !
⁂
Bayerische Staatsoper, Munich — 2013-07-26
Alexander Tsymbalyuk, Boris Godunow
Yulia Sokolik, Fjodor
Anna Virovlansky, Xenia
Heike Grötzinger, Xenias Amme
Gerhard Siegel, Fürst Schuiskij
Igor Golovatenko, Andrej Schtschelkalow
Anatoli Kotscherga, Pimen
Sergey Skorokhodov, Grigorij Otrepjew
Vladimir Matorin, Warlaam
Ulrich Reß, Missaïl
Margarita Nekrasova, Schenkwirtin
Kevin Conners, Gottesnarr
Goran Jurić, Nikititsch
Joshua Stewart, Leibbojar
Tareq Nazmi, Mitjucha
Christian Rieger, Hauptmann der Streifenwache
Kent Nagano, direction musicale
Calixto Bieito, mise en scène
Rebecca Ringst, décors
Ingo Krügler, costumes
Michael Bauer, lumières
Sören Eckhoff, chef des chœurs
Andrea Schönhofer, dramaturgie
Bayerisches Staatsorchester
Chor, Extrachor der Bayerischen Staatsorchester
Kinderchor der Bayerischen Staatsorchester
Statisterie der Bayerischen Staatsorchester
Boris Godunow, Oper in vier Teilen (7 Bilder), Erste Fassung „Ur-Boris“, Moussorgsky.
Quelques jours avant de venir à Munich, j'avais revu avec plaisir La Flûte enchantée mise en scène par Peter Brook, une production que j'avais beaucoup aimée en 2010 et dont les décors se réduisent à quelques tiges de bambous. Le lendemain, je verrai à Salzburg une production très traditionnelle de Lucio Silla, puis une production un peu moins traditionnelle de Falstaff. Ces mises en scènes représentent des styles très variés, mais pour le lyricomane parisien, le travail de Calixto Bieito est encore au-delà, en dehors du monde connu. Visuellement, ça décoiffe, mais la production ne m'a pas franchement convaincu.
De même que La Khovantchina programmée au début de l'année 2013 à l'Opéra Bastille, Boris Godounov est un opéra de Moussorgsky sur un sujet historique. Comme l'a expliqué la dramaturge Andrea Schönhofer dans la présentation de l'opéra qui a été faite quelques dizaines de minutes avant le début de la réprésentation, on jouait la version d'origine „Ur-Boris“, en sept scènes, resserrée autour du personnage de Boris Godounov (mais dans laquelle l'usurpateur Grigori apparaît dans deux scènes consécutives pour ne plus revenir, me donnant une impression de l'ensemble comme étant une suite de tableaux dans lesquels je ne saisis pas la cohérence). Le synopsis de l'opéra a été rappelé lors de cette présentation. Je l'avais parcouru avant de venir (sans saisir complètement quelles scènes seraient omises dans cette version). Pendant la représentation, un placement pas idéal à une place debout, la fatigue de cette station, la difficulté à apercevoir les surtitres (et à les comprendre, le cas échéant), toutes ces conditions d'écoute ne favorisaient pas ma compréhension de ce qui se passait. Le moins que je puisse dire est que la mise en scène n'était pas de nature à m'aider. C'est anecdotique, mais par exemple un personnage de garçon a été doublement travesti (rôle masculin interprété par une femme portant des vêtements féminins) et l'interprête du rôle principal change radicalement de coiffure pour la scène finale (et du coup, avec le cerveau ramolli par la chaleur, je ne l'ai pas reconnu ; enfin, si, j'ai bien compris que c'était Boris Godounov, mais je me demandais rétrospectivement où il s'était caché dans les scènes précédentes). Parmi les images intéressantes, je retiens néanmoins la représentation de la manipulation de la foule, qui après avoir brandi des panneaux à l'effigie de Poutine, Sarkozy et d'autres se met à soutenir Godounov.
Alors que j'avais beaucoup aimé La Khovantchina, principalement en raison des magnifiques chœurs, je n'ai pas été émerveillé par la musique. Si certains passages et quelques thèmes récurrents sont saisissants ou beaux (comme le solo introductif du cor anglais), la musique m'a paru assez statique, comme une atmosphère se développant dans un lent surplace. Dans cet opéra, si l'on fait exception de quelques moments fugitifs, le chant en russe m'a paru assez peu gracieux.
J'ai presque regretté d'avoir pris une place payante pour cet opéra que j'ai vu dans de mauvaises conditions, puisque j'aurais pu y assister peut-être pas confortablement, mais néanmoins assis sur la Max-Joseph-Platz où la représentation était diffusée sur grand écran dans le cadre de l'opération Oper für alle. Ceci dit, rien ne remplace le spectacle vivant...
Les chanteurs et le chef sont venus saluer ce public nombreux en descendant sur les marches de l'Opéra :
Il est possible de visionner cette production sur le site de la Radio bavaroise.
⁂
Cuviliés-Theater, Munich — 2013-07-30
Schumann Quartett (München)
Barbara Burgdorf, violon
Traudi Pauer, violon
Stephan Finkentey, alto
Olivier Göske, violoncelle
Quatuor à cordes nº9 en ré mineur, op. 34 nº2 (Dvořák)
Quatuor à cordes nº1 en ré majeur, op. 25 (Britten)
Quatuor à cordes nº3 en si bémol majeur, op. 67 (Brahms)
Ce concert de musique de chambre avait lieu dans le Cuviliés-Theater,
qui appartient au vaste ensemble de bâtiments constituant la Résidence. Il
peut d'ailleurs se visiter pendant la journée. Cela dit, la meilleure façon
de visiter une salle de spectacles est d'aller, justement, y assister à un
spectacle. J'ignore pourquoi le site Internet de l'Opéra de Bavière ne m'a
pas proposé d'imprimer moi-même mon billet. Je ne savais pas très bien où
le récupérer, alors je suis allé à tout hasard à la billeterie de l'Opéra.
Habitué aux habitudes françaises, en demandant à la guichetière si je
pouvais retirer mon billet, je m'attendais à me faire réprimander, mais
j'entendis quelque chose comme Ja, natürlich!
. J'en profitais pour
lui demander par où on entrait au Cuviliés-Theater. En passant par
l'Odeonplatz, après avoir marché dans une grande allée, devant le plus
grand trompe-l'œil que j'aie vue, puis contourné l'entrée vers une grande
cour où aurait lieu simultanément un concert en plein air, j'ai pu accéder
à un couloir donnant accès au foyer du Théâtre, apparemment plus grand que
la salle elle-même ! C'est un charmant petit théâtre à l'italienne :
Bien qu'excentré, mon placement me permet de voir tous les musiciens
alors que la japonaise assise en première partie à côté de moi ne voyait
strictement rien (elle est partie à l'entr'acte, alors qu'elle prétendait
préférer sa place just for hearing
à la place vacante au premier
rang de la loge que je lui suggérais d'occuper...).
Tous les musiciens de ce quatuor Schumann (München) à l'exception du violoncelliste appartiennent à l'Orchestre de l'Opéra d'État de Bavière et sont chefs de pupitres des premiers violons, des seconds et des altos. Je n'ai été que moyennement convaincu par l'interprétation du quatuor de Dvořák, notamment à cause des pizz. tous pareils du violoncelliste dans le troisième mouvement. Après l'entr'acte, j'ai apprécié le quatuor de Brahms (avec une très belle présence de l'alto dans les deux derniers mouvements), mais c'était sans commune mesure avec le plaisir que m'a procuré le quatuor nº1 de Britten, joué avec beaucoup d'engagement par les musiciens. C'est la présence de ce compositeur au programme qui m'avait décidé à acheter une place pour ce concert. Je m'attendais à ce que cela soit bien, mais pas que mon plaisir fût à ce point élevé que la petite demi-heure aura été pour moi très largement le point culminant émotionnel de l'ensemble des concerts auxquels j'ai assisté pendant cette semaine à Munich et Salzburg.
⁂
Bayerische Staatsoper, Munich — 2013-07-31
Thomas Hampson, Amfortas
Ante Jerkunica, Titurel
Kwangchul Youn, Gurnemanz
Christopher Ventris, Parsifal
Evgeny Nikitin, Klingsor
Petra Lang, Kundry
Kevin Conners, Erster Gralsritter
Tareq Nazmi, Zweiter Gralsritter
Solist der Tölzer Knabenchors, Erster Knappe
Solist der Tölzer Knabenchors, Zweiter Knappe
Ulrich Reß, Dritter Knappe
Kenneth Roberson, Vierter Knappe
Anna Virovlansky, Golda Schultz, Tara Erraught, Evgeniya Sotnikova, Angela Brower, Heike Grötzinger, Klingsors Zaubermädchen
Kent Nagano, direction musicale
Peter Konwitschny, mise en scène
Johannes Leiacker, décors et costumes
Peter Halbsgrut, lumières
Werner Hintze, dramaturgie
Sören Eckhoff, chef des chœurs
Bayerisches Staatsorchester
Chor und Kinderchor der Bayerischen Staatsorchester
Parsifal, Wagner
On pourra voir sur la photographie ci-dessous que je ne voyais vraiment pas grand'chose de la scène depuis ma place debout, même si quelques abandons de spectateurs au premier entr'acte m'ont permis de me recentrer un peu :
À part quelques détails parmi lesquels la mutilation visible de Klingsor ou la scène des filles-fleurs, c'est donc comme si je n'avais rien vu de ce Parsifal ! L'orchestre m'a plu, comme il y a deux ans, surtout dans les deux derniers actes, mais mon plaisir d'auditeur n'a pas été aussi grand qu'avec l'Orchestre de la Radio hongroise et ses extraordinaires contrebasses entendues un mois plus tôt à Budapest. À part un Amfortas pas au meilleur de sa forme (Thomas Hampson), la distribution est très solide. Dans le rôle de Gurnemanz dans lequel Matti Salminen était un peu limite à Budapest, Kwangchul Youn est absolument ma-gni-fique.
Mon placement ne m'a pas permis d'apprécier véritablement la mise en scène de Peter Konwitschny, mais j'ai été néanmoins ému par l'image de colombe blanche descendue des cintres à la fin de l'opéra. Le moment le plus émouvant de cette représentation fut toutefois l'adieu très chaleureux du public munichois à Kent Nagano, qui quitte son poste de chef d'orchestre principal.
2013-08-04 12:43+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse
Contrairement à ce que l'on pourrait imaginer, la ville de Salzburg n'est pas hors de prix. Il est vrai que lorsque l'on pénètre dans le Großes Festspielhaus ou le Haus für Mozart, on a l'impression de faire la montée des marches au festival de Cannes, les hommes ayant presque tous veste et nœud papillon ou cravate et les dames des robes de soirée, qui en comparaison font d'une soirée de gala à l'Opéra de Paris une petite fête paysanne. Ce qui est vrai en revanche, c'est que la ville est obsédée par le jeune prodige Mozart qui y est né ; le physicien Christian Doppler aussi, mais cela se voit moins quand on parcourt les ruelles de la vieille ville. Il serait intéressant de connaître la proportion des visiteurs estivaux de Salzburg qui fréquentent le festival. La veille ville est en effet infestée de touristes, et à supposer que le commerce y soit prospère, ceux-ci semblent plus intéressés par les chocolats Mozart et autres produits dérivés que par la musique de Mozart. Cela dit, j'ai aussi mangé ma dose de ces chocolats et pus opportunément acheter juste avant qu'il pleuve un parapluie décoré de partitions.
⁂
Haus für Mozart, Salzburg — 2013-07-27
Rolando Villazón, Lucio Silla
Olga Peretyatko, Giunia
Marianne Crebassa, Cecilio
Inga Kalna, Lucio Cinna
Eva Liebau, Celia
Francesco Corti, clavecin
Marie McDunnough, Julia Sedwick, Cynthia Smithers, Magdalena Vasko, Jones Henry, Kevin Kong, Jeremy Nasmith, Jack Rennie, Edward Tracz, danseurs
Marc Minkowski, direction musicale
Marshall Pynkoski, mise en scène
Antoine Fontaine, décors et costumes
Jeannette Zingg, chorégraphie
Hervé Gary, lumières
Aloïs Glaßner, chef de chœur
Les Musiciens du Louvre-Grenoble
Salzburger Bachchor
Lucio Silla, KV 135 (Mozart)
La plus grande satisfaction de ce festival, aussi haute qu'inattendue a été pour moi cette représentation de Lucio Silla, la première de la reprise de cette production déjà jouée lors de la Mozartwoche en février 2013.
La production est traditionnelle. Le décor unique représente une sorte d'atrium me semble être un décor générique qui pourrait servir à représenter n'importe quel opéra. Les costumes sont d'époque, ce qui ne signifie pas que les chanteurs portent des costumes plaçant l'action à Rome au premier siècle avant Jésus-Christ (comme le fait timidement le décor), mais plutôt en Europe il y a quelques siècles de cela (peut-être du temps de Mozart ?). La dizaine de danseurs apporte une décoration supplémentaire à ce tableau. Au milieu de l'avant-scène est disposée une petite rallonge de scène souvent utilisée par les chanteurs ; ils peuvent ainsi être certains d'être bien au milieu de la scène pour chanter leurs airs. Malgré tous les aspects traditionnels de cette production, je trouve qu'elle est réussie. En effet, les sonorités produites par l'orchestre sont merveilleuses. Le caractère très engagé des Musiciens du Louvre-Grenoble dirigés par Marc Minkowski assorti à la bonne acoustique de la salle rend tellement vivante cette musique. Je n'imaginais pas prendre autant de plaisir à l'écoute d'un opéra de jeunesse de Mozart (disons avant Idomeneo), et ce d'autant plus que l'histoire se finit par un happy ending invraisemblable comme souvent chez le jeune Mozart : pour laisser une trace heureuse dans l'Histoire, Lucio Silla fait volte-face en décidant de rendre tout le monde heureux. Par ailleurs, j'ignore si le livret y fait référence, mais la mise en scène suggère une relation incestueuse entre Lucio Silla et sa sœur Celia.
La distribution vocale est sans faille ! Des quatre chanteuses (dont deux travesties), celle qui remporte le plus de suffrage est évidemment Marianne Crebassa dans le rôle de Cecilio. Elle fait d'ailleurs une forte impression dans la scène d'escrime magnifiquement chorégraphiée, et j'ai particulièrement aimé l'air qu'elle a chanté accompagnée de seulement quatre musiciens constituant un quatuor à cordes. Si Rollando Villazón ne m'a semblé qu'à moitié convaincant dans les deux premiers actes, il a fait des merveilles dans le troisième !
Ailleurs : il tenero momento.
⁂
Mozarteum, Salzburg — 2013-07-28
Gereon Kleiner, orgue
Mozarteumorchester Salzburg
Ádám Fischer, direction
Sonate d'église pour orchestre et orgue en do majeur, KV 278 (Mozart)
Jörg Widmann, clarinette
Concerto pour clarinette en la majeur, KV 622 (Mozart)
Sonate d'église pour orgue et orchestre en do majeur, KV 329 (Mozart)
Symphonie nº6 Pastorale (Beethoven)
Le dimanche matin avait lieu une Mozart-Matinee au Mozarteum. En première partie, entre deux sonates d'église anecdotiques de Mozart (avec un orgue inaudible dans la première), le programme comportait le concerto pour clarinette en la majeur. Si l'orchestre m'a paru très convaincant et très engagé, le clarinettiste Jörg Widmann ne m'a pas autant plu que Romain Guyot dont l'interprétation à Dijon m'avait semblée plus incarnée. Le musicien a fait le choix de jouer peu d'ornementations (voire pas du tout) et ses notes aiguës passaient souvent difficilement. Bref, si l'écoute de cette œuvre ne m'a pas paru désagréable, elle ne m'a pas mis en transe.
Après l'entr'acte, l'orchestre a joué tout autre chose : la Symphonie Pastorale de Beethoven. On n'a à mon avis pas atteint les sommets de l'interprétation du Chamber Orchestra of Europe dirigé par Bernard Haitink, pourtant quelle belle interprétation que celle qu'ont donné ces musiciens déchaînés sous la direction d'Ádám Fischer (qui dirige cette œuvre de mémoire) ! Mon placement dans la salle ne me permettait de voir que la moitié droite de l'orchestre, mais fort heureusement le timbalier était en plein milieu de mon champ de vision. Dans le quatrième mouvement, je n'ai regardé que lui. Après avoir mis ses lunettes précautionneusement, il a paisiblement attendu le moment de son entrée pour déclencher un orage inouï !
⁂
Großes Festspielhaus, Salzburg — 2013-07-28
Dorothea Röschmann, soprano
Michael Schade, soprano
Florian Boesch, basse
Wiener Philharmoniker
Konzertvereinigung Wiener Staatsopernchor
Nikolaus Harnoncourt, direction
Ernst Raffelsberger, chef de chœur
Die Jahreszeiten, Joseph Haydn
La raison de ma venue à Salzburg était ce concert dans lequel Nikolaus Harnoncourt allait diriger les Wiener Philharmoniker dans Les Saisons de Haydn. Je m'attendais à ce que de concert salzbourgeois fût très bon, voire extraordinaire, mais je n'imaginais pas un seul instant en ressortir avec un sentiment d'amère déception. Heureusement, j'aimais déjà Haydn avant d'entrer dans le Großes Festspielhaus, et tout particulièrement Les Saisons dont je garde un souvenir émerveillé de l'interprétation de John Elliot Gardiner à Pleyel il y a quatre ans. En effet, sinon, ce concert m'aurait dégoûté de Haydn...
Les problèmes sont apparus dès la toute première mesure de l'œuvre. Les musiciens ne jouaient tout simplement pas ensemble. Les violents coups de timbales étaient un bon gros quart de seconde en avance sur les cordes. Ensuite, le volume sonore des Wiener Philharmoniker a pratiquement toujours été très faible. Dans ces conditions, les si délicieux passages dans lesquels Haydn fait imiter les sons des animaux par l'orchestre ne pouvaient guère se distinguer. Le seul passage de ce genre dont je me souvienne est celui évoquant le son des abeilles. Quand le volume sonore augmentait, comme dans l'orage intervenant dans l'Été, c'était avec une brusquerie assez déplaisante. Dans l'accompagnement des récitatifs, si j'ai apprécié le musicien jouant du pianoforte, celui qui officiait au violoncelle m'a paru produire des sons insipides, alors que j'ai souvent eu l'occasion de m'extasier devant le talent des violoncellistes ou gambistes accompagnant des récitatifs (Nils Wiebolt et Atsushi Sakaï sont les premiers noms qui me viennent à l'esprit). Ce n'était pas du tout, mais alors pas du tout baroquisant. Si les chanteurs n'ont globalement pas démérité, comme les musiciens des Wiener Philharmoniker, ils ont exécuté l'œuvre de façon très austère, complètement désincarnée, sans vie. Les trois rôles ont pourtant des noms ! Ils s'appellent Hanne, Lukas et Simon...
Si certains musiciens de l'orchestre se sont parfois brillamment distingués (les cornistes semblent appartenir à un autre monde !), mon unique satisfaction est venue du chœur de l'Opéra d'État de Vienne. La seule des quatre parties de l'œuvre qui m'aient un peu plu a en effet été l'Automne, et cela tient surtout au chœur qui a égaillé l'ambiance par son interprétation de la chanson à boire à la fin de cette partie.
⁂
Haus für Mozart, Salzburg — 2013-07-29
Ambrogio Maestri, Sir John Falstaff
Fiorenza Cedolins, Mrs. Alice Ford
Massimo Cavalletti, Ford
Eleonora Buratto, Nannetta
Elisabeth Kulman, Mrs. Quickly
Stephanie Houtzeel, Mrs. Meg Page
Javier Camarena, Fenton
Luca Casalin, Dott. Cajus
Gianluca Sorrentino, Bardolfo
Davide Fersini, Pistola
Zubin Mehta, direction musicale
Damiano Michieletto, mise en scène
Paolo Fantin, décors
Carla Teti, costumes
Alessandro Carletti, lumières
rocafilm, vidéo
Christian Arseni, chef de chœur
Walter Zeh, chef de chœur
Wiener Philharmoniker
Philharmonia Chor Wien
Falstaff (Verdi)
Cette représentation de Falstaff m'a paru fort agréable. Sans être éblouissants collectivement, les Wiener Philharmoniker sonnent bien mieux que la veille ! Les solos des musiciens de l'orchestre sont très souvent délicieux. Dans les ensembles, les qualités individuelles des musiciens ont toutefois tendance à se perdre, notamment quand à la fin de certains passages le chef Zubin Mehta lâche les décibels...
La production, sans être géniale, est tout à fait plaisante. Le concept est semble-t-il de représenter le compositeur Verdi vieillissant, écrivant son dernier opéra comme si c'était pour lui un cauchemar dans lequel il est identifié au personnage de Shakespeare. Ce personnage prenant le temps de ce rêve la place de Falstaff pourrait aussi bien être plus simplement un musicien retraité anonyme hanté par Verdi, ce n'est pas tout à fait clair pour moi.
Tandis que les spectateurs prennent place dans la salle, des images de la Casa Verdi contemporaine sont montrées en plan fixe comme pour en souligner la monotonie. Au lever du rideau, on entre dans l'institution, qui est une maison de retraite pour musiciens. Alors qu'en principe cet opéra de Verdi commence sans préambule, on voit ici un pianiste jouer pour les pensionnaires des morceaux de musique dans lesquels on peut reconnaître des extraits d'opéra de Verdi. Cette musique va en quelque sorte infuser dans l'esprit du personnage, qui va, selon l'interprétation, revivre l'histoire de Falstaff ou composer l'opéra que l'on est en train de voir. Le côté onirique de cette vision permet de ne pas traiter de façon littérale certaines scènes, en particulier dans la fameuse scène où le panier dans lequel Falstaff s'est caché est en principe jeté dans la Tamise.
Sans être éblouissants, les chanteurs m'ont paru plutôt bons. Toutefois, je garde un meilleur souvenir des interprètes des rôles féminins de la seule autre représentation de Falstaff à laquelle j'aie assisté (au TCE en 2008). J'ai beaucoup aimé le ténor Javier Camarena dans le rôle de Fenton, et dans celui de Falstaff, Ambrogio Maestri m'a paru meilleur chanteur qu'Alessandro Corbelli que j'avais vu dans ce rôle en 2008.
Ailleurs : Paris — Broadway.
⁂
Les autres photographies que j'ai faites à Salzburg et à Munich sont ici.
2013-07-11 12:20+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Budapest
Bartók Béla Nemzeti Hangversenyterem, Művészetek Palotája, Budapest — 2013-06-15
James Rutherford, Hans Sachs
Eric F. Halfvarson, Veit Pogner
William Saetre, Kunz Vogelgesang
Domonkos Blazsó, Konrad Nachtigall
Bo Skovhus, Sixtus Beckmesser
Miklós Sebestyén, Fritz Kothner
István Horváth, Balthasar Zorn
Csapó József, Ulrich Esslinger
Lars-Olivier Rühl, Augustin Moser
Piotr Prochera, Hermann Ortel
Ferenc Cserhalmi, Hans Schwarz
Zoltán Nagy, Hans Foltz
Kaus Florian Vogt, Walther von Stolzing
Uwe Stickert, David
Annette Dasch, Eva
Gudrun Pelker, Magdalena
Dömötör Pintér, Un veilleur de nuit
Ádám Fischer, direction musicale
Michael Schulz, mise en scène
Dirk Becker, décors
Renée Listerdal, costumes
Sylvie Gabor, assistant à la mise en scène
Magyar Rádió Szimfonikusok és Énekkar
Csaba Somos, chef de chœur
Nemzeti Énekkar
Mátyás Antal, chef de chœur
Die Meistersinger von Nürnberg, Wagner
J'ai du mal à concevoir comment cette représentation des Maîtres chanteurs de Nuremberg aurait pu être meilleure ! Que l'opéra soit donné dans une salle de concert plutôt qu'un théâtre impose certes des restrictions sur la scénographie, mais la qualité musicale a été telle qu'on se contente bien volontiers d'une plate-forme carrée occupant le tiers central de la scène dont le fond représente au début de l'ouvrage un retable qui est découvert alors que l'on célèbre une messe dans l'église Sainte-Catherine. Une réunion des Maîtres chanteurs y a lieu ensuite. Walther échoue à se faire admettre parmi les Maîtres, ce qui devait lui permettre de participer au concours du lendemain dont le gagnant remportera la main d'Eva, la jeune femme dont il vient de tomber amoureux et que convoite aussi le ridicule Beckmesser. L'opéra se finissant bien, il parviendra néanmoins à gagner le concours. Il sera en cela aidé par le cordonnier Hans Sachs qui lui apprendra comment concilier l'originalité de son chant et le respect de la tradition musicale dont les Maîtres sont les gardiens.
Au début de la représentation, une voix avait annoncé en hongrois et en
allemand que l'interprète de Beckmesser (Bo Skovhus) était handicapé en
raison d'une opération chirurgicale récente. Il a ainsi joué son rôle avec
une béquille. Si cette béquille n'avait pas été prévue par la mise en
scène, il aurait fallu de toute évidence l'ajouter tant le chanteur en a fait
un usage à mourir de rire ; même un mois plus tard, je ne m'en suis
toujours pas remis. La mise en scène comportait une mise en abyme dans la
mesure où le thème musical de l'opéra était illustré sur scène par des
pupitres et des partitions vocales que les chanteurs tenaient parfois entre
leurs mains. Dans son numéro comique, Beckmesser moquait parfois la musique
de Wagner, au point qu'il arracha de façon provocante quelques pages de la
partition sur laquelle on pouvait lire Wagner
...
Les prestations vocales de tous les chanteurs ont été superbes. Pendant le premier acte, j'ai bien eu quelques réserves sur la voix de Klaus Florian Vogt (Walther) en raison de son timbre (une pure question de goût, cohérente avec une impression passée), mais il a tellement bien chanté dans les actes suivants qu'à la fin de la représentation, j'étais conquis par ce chanteur ! J'ai aussi aimé Annette Dasch (Eva). James Rutherford a été relativement endurant dans le rôle très exigeant de Hans Sachs. Le reste de la distribution était excellent, et ce jusqu'au rôle plus modeste du veilleur de nuit dans lequel Dömötör Pintér a fait des merveilles (et il joue aussi du trombone !).
C'était la première fois que j'entendais cet opéra, joyeux et drôle. Les cordes de l'orchestre de la Radio hongroise jouent de façon très différente, beaucoup plus en douceur que lorsqu'ils jouent le Ring ou Parsifal. Je me suis particulièrement délecté par les changements d'atmosphères musicales qui se sont succédées lorsqu'un des personnages fait à Walther le catalogue des modes musicaux reconnus par les Maîtres chanteurs. Les noms quelques peu ridicules de ces modes se retrouvent immédiatement suggérés par la musique. Cependant, les actes qui m'ont fait la plus grande impression sont les deuxième et troisième. Je ne m'attendais pas à un tel echantement ! Toutefois, si les chœurs étaient magnifiques, j'ai malheureusement quelques notions d'allemand et je n'ai pu m'empêcher d'éprouver un léger sentiment de malaise lors du finale exaltant l'Art allemand.
Ailleurs : Paris — Broadway.
⁂
Avant chaque acte, les cuivres de l'orchestre interprétaient un motif extrait de l'opéra pour rappeler aux spectateurs de reprendre place. Ils le font en général depuis une terrasse puis de la passerelle ci-dessus. Avant le dernier acte des Maîtres chanteurs, ces musiciens se font fait remarquer de façon amusante en jouant la fanfare depuis un escalator en marche !
2013-07-05 17:42+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Théâtre — Culture indienne
Cité de la musique — 2013-05-13
Akiko Suwanai, violon
Henri Demarquette, violoncelle
Michel Portal, clarinette
Michel Dalberto , piano C. Bechstein
Nocturne, pour violoncelle et piano (André Jolivet)
Noël nouvelet, Crudelis Herodes, pour piano (Daniel-Lesur)
Comme un souvenir, pour clarinette, Michel Portal
Les Chants de Kervéléan nº3 et nº6, pour piano (Charles Koechlin)
Sonate op. 50, pour violon et violoncelle (Marcel Mihalovici)
Quatuor pour la fin du Temps, Olivier Messiaen
Des œuvres composées pendant la deuxième guerre mondiale étaient au programme de ce concert réunissant de grands interprètes de musique de chambre. J'ai aimé le Nocturne d'André Jolivet qui m'a permis d'entendre pour la première fois le violoncelliste Henri Demarquette. Le son cristallin du piano utilisé par Michel Dalberto m'a beaucoup plu dans les œuvres de Daniel-Lesur qu'il a jouées ensuite. Le clarinettiste Michel Portal, que je n'avais jusque là jamais entendu, a ensuite improvisé en intégrant des souvenirs de jeunesse dans lesquels on pouvait reconnaître un peu de Bach. Je me suis désespérement ennuyé à l'écoute des Chants de Kervéléan de Koechlin. Le point culminant de cette première partie de concert a été atteinte avec la sonate pour violon et violoncelle de Marcel Mihalovici.
Avant la reprise du concert après l'entr'acte, François Henrot, fils d'un codétenu d'Olivier Messiaen à Görlitz, a sobrement évoqué les conditions de la création du Quatuor pour la fin du Temps dans le camp de prisonniers. L'œuvre en huit mouvements utilise diverses configurations de musiciens. Les mouvements se suivent et me procurent des émotions diverses. Michel Portal interprète d'une façon assez sombre l'Abîme des oiseaux. Plus loin, certaines notes du piano au milieu de la Danse de la fureur, pour les sept trompettes me rappellent très étrangement le thème de Darth Vader. Le pianiste ne joue d'ailleurs pas à moitié les passages les plus percussifs de l'œuvre ! L'atmosphère fut toute différente pendant le dernier mouvement. Le temps s'est comme suspendu à l'écoute de la violoniste Akiko Suwanai et du pianiste Michel Dalberto. Quel plaisir intense ce fut d'écouter cette Louange à l'Immortalité de Jésus !
Ailleurs : Bladsurb.
⁂
Cité de la musique — 2013-05-14
Chamber Orchestra of Europe
Semyon Bychkov, direction musicale
Métamorphoses, Richard Strauss
Lisa Batiashvili, violon
Concerto pour violon nº2 (Prokofiev)
Valse (Chostakovitch)
Symphonie nº41 en ut majeur “Jupiter”, KV 551 (Mozart)
Ce n'est pas le meilleur concert du Chamber Orchestra of Europe auquel j'aie assisté. Contrairement à ma première audition de cette œuvre, cette interprération des Métamorphoses de Richard Strauss m'a procuré un certain plaisir, mais j'ai le sentiment que cela aurait pu être mieux, l'engagement habituel du COE ne semblant présent que par moments. (J'espère que ce sera mieux à Edimbourg quand cette œuvre, associée de façon intéressante à la Troisième Symphonie de Beethoven, sera dirigée par Yannick Nézet-Séguin.) En revanche, je n'ai aucune réserve sur le Concerto pour violon nº2 de Prokofiev interprété par Lisa Batiashvili ! Absolument magnifique ! Après l'entr'acte, je me suis malheureusement ennuyé à l'écoute de la 41e symphonie de Mozart “Jupiter”. Dirigeant sans partition, le chef Semyon Bychkov me donnait parfois curieusement l'impression d'être en retard sur l'orchestre. J'admire cependant le professionnalisme d'un des violonistes de l'orchestre qui après que sa partition se fut volatilisée suite à une tourne périlleuse parvint néanmoins à jouer de mémoire la fugue placée à la fin de la symphonie !
⁂
Auditorium du Musée Guimet — 2013-05-17
Shahid Parvez Khan, sitar
Nihar Mehta, tabla
Ce concert de Shahid Parvez Khan fut très différent de celui qu'il avait donné au Théâtre de la Ville en 2011. Celui-ci a été en quelque sorte plus extraverti. Sans prendre beaucoup de temps pour développer le raga (dont il n'a d'ailleurs pas annoncé le nom), il s'est lancé très rapidement dans de très virtuoses improvisations. J'aime moins, mais cela a néanmoins été un concert très agréable.
⁂
Opéra Bastille — 2013-05-18
Torsten Kerl, Siegfried
Evgeny Nikitin, Gunther
Peter Sidhom, Alberich
Hans-Peter König, Hagen
Petra Lang, Brünnhilde
Edith Haller, Gutrune, Dritte Norn
Sophie Koch, Waltraute, Zweiter Norn
Wiebke Lehmkuhl, Erste Norn, Flosshilde
Caroline Stein, Woglinde
Louise Callinan, Wellgunde
Philippe Jordan, direction musicale
Günter Krämer, mise en scène
Jürgen Bäckmann, décors
Falk Bauer, costumes
Diego Leetz, lumières
Otto Pichler, chorégraphie
Stefan Bischoff, création images vidéo
Patrick Marie Aubert, chef du chœur
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
Götterdämmerung, Wagner (répétition générale)
Grâce à Olivier, j'ai pu assister à la répétition générale du Crépuscule des Dieux à l'Opéra Bastille dans la production que je n'avais pas vraiment aimée il y a deux ans. Si quelques couacs se faisaient entendre dans l'orchestre (ce n'était qu'une répétition), j'ai passé un moment plutôt agréable. Cela dit, il n'y a désespérement pas de théâtre dans cette mise en scène. Je n'en ai vu que dans le deuxième acte, et ce uniquement dans le personnage de Brünnhilde auquel Petra Lang est parvenue à donner vie.
⁂
Théâtre des Champs-Élysées — 2013-05-21
Orchestre de chambre de Paris
François Leleux, direction, hautbois
Music of Gaity dal "Fitzwilliam Virginal Book" (Maderna)
Deborah Nemtanu, violon et direction
Concerto pour violon nº5 en la majeur, KV 219 (Mozart)
Introduction, thème et variations pour hautbois et orchestre op. 102 (Hummel)
Symphonie nº4 “Tragique” en ut mineur (Schubert)
Plus d'un mois après ce concert, j'en retiens deux choses. Premièrement,
comme les Parisiens sont chanceux de pouvoir entendre à quelques jours
d'intervalle des violonistes aussi incroyables que Leonidas Kavakos, Lisa
Batiashvili ou Akiko Suwanai ; ce soir-là, il fallait si j'ose dire se
contenter
de Deborah Nemtanu, dont j'ai aimé l'interprétation du
Concerto pour violon nº5 de Mozart. Deuxièmement, si François Leleux est un
fabuleux hautboïste, c'est également un superbe chef d'orchestre. Suivant
les chefs invités à diriger l'Orchestre de chambre de Paris, j'ai eu des
impressions toutes différentes, parfois très négatives, parfois très
positives. Pendant la Symphonie nº4 de Schubert, c'était pour le
meilleur que le chef et l'orchestre étaient réunis.
⁂
Cité de la musique — 2013-05-23
Les Dissonances
Xavier Phillips, violoncelle
Trois strophes sur le nom de Sacher pour violoncelle solo (Dutilleux)
David Grimal, direction artistique, violon solo
David Gaillard, alto solo
Variations on a Theme of Frank Bridge op. 10 (Britten)
Lachrymae, Réflexions sur un chant de Dowland op. 48a (Britten)
Adagio pour cordes op. 11 (Barber)
Sérénade pour violon, cordes, harpe et percussions (Bernstein)
Si j'ai été heureux d'entendre l'altiste David Gaillard jouer Britten et de voir l'orchestre des Dissonances dans la Sérénade pour violon, cordes, harpe et percussions de Bernstein, je retiens surtout le souvenir de l'émerveillement procuré par le violoncelliste Xavier Phillips qui a fabuleusement défendu les Trois strophes sur le nom de Sacher de Dutilleux, une œuvre insérée au programme pour rendre hommage au compositeur décédé la veille.
Ailleurs : Bladsurb.
⁂
Centre Mandapa — 2013-05-24
Nancy Boissel, Estelle Guihard
Sowri Rajan/David Ramsamy, ghatam, morsing
Estelle Guihard, mise en scène
Marie de La Bellière, accessoires, régie
L'Homme Semence, d'après le texte de Violette Ailhaud
Après la répression faisant suite au soulèvement républicain contre le coup d'état de Napoléon III, tous les hommes d'un village du Sud de la France ont disparu. Les femmes se retrouvent seules. Elles décident d'un pacte : le prochain homme qui entrera au village serait le mari de toutes, l'homme semence. Au bout de deux ans, un homme s'approche. Violette Aillhaud est la femme qu'il a regardée en premier.
Cette pièce de théâtre met en scène la narratrice, jouée par Estelle Guihard. Certains actes et émotions du personnage sont illustrés par les mouvements de Nancy Boissel (dont j'ai déjà pu apprécier les qualités de danseuse de bharatanatyam). Une musique utilisant des instruments du Sud de l'Inde fournit une atmosphère sonore à cette pièce : le ghatam (une sorte de cruche) et le morsing (guimbarde).
Je vais très rarement au théâtre, mais j'ai beaucoup aimé cette pièce. Les accessoires et costumes sont sobres, mais sont utilisés d'une façon très juste. Le moment qui m'a le plus passionné fut le solo de danse de Nancy Boissel sur le thème de l'Amour au moment où la narratrice et l'homme sont unis. Ce passage empruntait à la danse bharatanatyam non seulement des gestes mais aussi une manière d'aborder ce thème, et pourtant les mouvements utilisés étaient parmi les plus universellement compréhensibles qui soient. Ce solo fut pour moi un superbe moment de danse, aussi émouvant qu'intéressant.
⁂
Opéra Comique — 2013-05-28
Ensemble Ictus
Georges-Elie Octors, direction musicale
Prélude à l'après-midi d'un faune (Debussy, arrangement de Benno Sachs pour douze instruments, accompagné du film de Thierry De Mey, Prélude à la Mer, avec Cynthia Loemij et Mark Lorimer, dans une chorégraphie d'Anne Teresa De Keersmaeker)
Valse³, une cour impérale vers 1885, d'après La Valse de Maurice Ravel (Frédéric Verrières)
Marianne Pousseur, soprano
François Deppe, direction musicale
Pierrot lunaire, pour voix et cinq instruments, op. 21, Schönberg
Ce concert a été pour moi une déception. Le Prélude à l'après-midi d'un faune m'a procuré moins de plaisir que ne l'a fait un orchestre amateur, et ce alors-même que l'interprétation de l'ensemble Ictus était associée à la projection d'un film montrant la chorégraphie d'Anna Teresa De Keersmaeker (qui ne m'a pas du tout passionné). Si j'avais aimé The Second Woman de Frédéric Verrières, j'ai vraiment eu l'impression que sa Valse³ d'après Ravel était une vaste plaisanterie... En deuxième partie, j'ai cependant apprécié Marianne Pousseur dans Pierrot lunaire de Schönberg (et cela aurait été encore mieux si le concert avait été surtitré).
⁂
Théâtre des Champs-Élysées — 2013-05-30
Ballet et Orchestre du Théâtre Mariinsky
Valery Gergiev, direction musicale
Vaslav Nijinsky, chorégraphie (1913)
Millicent Hodson, Kenneth Archer, reconstitution de la chorégraphie, des décors et des costumes
Le Sacre du Printemps, Stravinski
Sasha Waltz, chorégraphie (2013)
Bernd Skodzig, costumes
Pia Maier Schriever, Sasha Waltz, décors
Thilo Reuther, lumières
Le Sacre du Printemps, Stravinski
Ce spectacle du Ballet du Théâtre Mariinsky comportait deux versions du Sacre de Printemps. La première est une tentative de reconstitution de la version d'origine de Nijinsky par Millicent Hodson et Kenneth Archer. L'animateur du Forum Dansomanie, Haydn signalait sur Twitter que lors d'une conférence au Théâtre des Champs-Élysées, les chorégraphes expliquaient qu'il ne restait rien de la chorégraphie de Nijinsky et qu'ils revendiquaient l'entière paternité de la chorégraphie présentée... En tout cas, je dois avouer m'être ennuyé pendant la réprésentation de ce ballet. J'ai été bien davantage intéressé par la version de Sasha Waltz présentée après l'entr'acte, quoiqu'en la visionnant on ne peut s'empêcher de remarquer les références à la version de Pina Bausch.
2013-07-01 14:37+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Culture indienne — Planning
Cet été, très exceptionnellement, je ne voyagerai pas en Inde. À la place, je visiterai quelques villes où se déroulent des festivals de musique. J'ai d'ailleurs déjà commencé en juin avec les journées Wagner à Budapest. J'irai ainsi à Montpellier pour le festival de Radio France, puis à Salzbourg en passant par Munich, et enfin à Edimbourg, mais ce sera déjà le mois d'août. Voici donc le programme inhabituellement chargé de mon mois de juillet :
2013-06-20 17:59+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Budapest
Bartók Béla Nemzeti Hangversenyterem, Művészetek Palotája, Budapest — 2013-06-14
Lauri Vasar, Amfortas
Kolos Kováts, Titurel
Matti Salminen, Gurnemanz
Christian Franz, Parsifal
Hartmut Welker, Klingsor
Petra Lang, Kundry
Péter Kiss, Premier chevalier
Ákos Ambrus, Second chevalier
Solistes du Chœur de garçons de Tölz, Premier et deuxième écuyer
István Horváth, Troisième écuyer
Zoltán Megyesi, Quatrième écuyer
Zita Váradi, Cecilia Lloyd, Krisztina Simon, Mónika González, Eszter Wierdl, Éva Várhelyi, Filles-fleurs
Atala Schöck, Une voix du ciel
Bálint Krúdy, Parsifal enfant
Fischer Ádám, direction musicale
Alexandra Szemerédy, Magdolna Parditka, mise en scène, décors et costumes
Károly Györgyfalvay, lumières
Magyar Rádió Szimfonikus Zenekar és Énekkar
Csaba Somos, chef de chœur
Magyar Rádió Gyermekkórus
Dr. Lászlo Matos, chef de chœur
Sándor Kabdebó, co-chef de chœur
Nemzeti Énekkar
Mátyás Antal, chef de chœur
Parsifal, Wagner
Quel plaisir de retrouver l'Orchestre de la Radio hongroise ! Le premier contact a lieu avec les cuivres, qui comme à Bayreuth interprètent quelques minutes avant chaque acte un motif de l'opéra représenté pour rappeler aux spectateurs de se diriger vers leurs places. Une fois installé à ma place, je reconnais quelques uns des musiciens aperçus il y a un an : le corniste, quelques contrebassistes, quelques violoncelles parmi lesquels le soliste barbu, etc. Dirigées par Ádám Fischer, les cordes et plus particulièrement les contrebasses et les violoncelles ont conservé leur inimitable son ! Avec quelle férocité ceux-ci poussent ou tirent sur leur archet, à tel point que certains doivent remettre régulièrement de la colophane pendant les actes ! Certains motifs joués en arrière-plan par les instruments à cordes les plus graves qui auraient sinon risqué d'être occultés dans les ensembles n'en ressortent que mieux. Les vents, et plus particulièrement la clarinette et le hautbois, m'ont paru sublimes dans le troisième acte !
La mise en scène de Alexandra Szemerédy et Magdolna Parditka est d'une sobriété extrême. La scène est initialement toute noire, puis après l'arrivée de Parsifal, la moitié droite deviendra blanche quand le tissu noir qui couvrait cette partie de la scène sera ingénieusement tiré depuis les coulisses. Le blanc règnera sur toute la scène quand Gurnemanz aura pris conscience que Parsifal est le nouveau roi. La duplicité du rôle de Kundry est soulignée par son costume blanc dans les premier et troisième actes tandis qu'elle sera en noir puis en rouge quand, sous l'emprise de Klingsor, elle tentera de séduire Parsifal au deuxième acte. En dehors de la scène des filles-fleurs fort bien réglée, la mise en scène a été assez statique, mais ce ne fut guère un problème compte tenu des merveilles qui sortent de la fosse. Si les solistes ont globalement plus que bien chanté, j'ai été particulièrement saisi dans les premier et troisième actes par les magnifiques chœurs qui avaient pris place sur scène et aux deux étages d'arrière-scène ! L'ensemble était très impressionnant !
Ailleurs : Paris — Broadway.
2013-06-01 08:13+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Mathématiques — Planning
Voici mon programme pour le mois de juin :
2013-04-08 23:38+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Culture indienne
J'ai déjà eu l'occasion de revenir sur les concerts des Solistes des Berliner Philharmoniker. Les fabuleux concerts de l'Orchestre de Paris avec Leonidas Kavakos (concerto de Sibelius) feront l'objet d'un prochain billet. En attendant, voici le vite dit d'avril, récapitulant mes impressions sur les autres spectacles vus au cours du mois :
Théâtre des Champs-Élysées — 2013-04-04
Luc Héry, violon solo
Orchestre national de France
David Afkham, direction
Atmosphères, György Ligeti
Till Fellner, piano
Concerto pour piano nº3 et ut mineur op 37 (Beethoven)
Roméo et Juliette, extraits (Prokofiev)
Mes dernières expériences de spectateur avec l'Orchestre National de France dataient d'il y a deux ans et étaient très contrastées. Ce concert m'a réconcilié avec cet orchestre et permis d'entendre Maria Chorokoliyska, la merveilleuse contrebassiste solo de l'orchestre dont l'engagement est impressionnant. Elle me consolerait presque de la retraite prise par Bernard Cazauran de l'Orchestre de Paris. Si j'ai pu la voir, c'est en raison des bruyants scolaires qui m'ont gâché l'audition de Atmosphères de Ligeti : entre deux œuvres, le temps que le piano soit installé, je me suis replacé du côté opposé ce qui me permit de voir les contrebasses, et de ne pas en détourner mon regard, mon cou douloureux étant immobilisé par un torticolis...
Je me suis amusé de ce que le troisième concerto pour piano de Beeethoven commence par les trois mêmes notes que le thème de l'Offrande musicale (do-mi♭-sol). L'orchestre était tellement agréable à écouter que j'ai été surpris par l'entrée du piano... Les extraits de Roméo et Juliette de Prokofiev furent irrésistible ! Le chef David Afkham s'est même offert la fantaisie de se recoiffer pendant La Mort de Tybalt.
Le concert était précédée d'une Appoggiature
animée par Clément
Lebrun et agrémentée d'extraits musicaux joués par les musiciens de
l'orchestre. Il est suffisamment rare que l'on parle de musique (et pas
uniquement des musiciens) pendant les exposés musicologiques précédant
certains concerts pour que ce soit signalé.
⁂
Amphithéâtre de la Cité de la musique — 2013-04-06
Blandine Rannou, clavecin
Variations Goldberg, BWV 988, Johann Sebastian Bach.
J'ai été très déçu par ce concert. L'Aria des Variations
Goldberg m'a paru tellement interminable que je me demandais si
l'interprète cherchait à battre un record de lenteur. L'interprétation de
Blandine Rannou a en effet duré un peu moins d'une heure quarante (à
comparer aux 1h18 de Pierre Hantaï, 1h24 d'Evgeni Koroliov et aux 37
minutes de Glenn Gould en 1959). D'une part, la lenteur n'aide pas à
maintenir l'attention des spectateurs (j'ai faibli autour de la vingtième
des trente variations) ; d'autre part, plus on joue lentement plus les
couacs se font entendre distinctement. Il y en a eu un certain nombre... Le
plus frappant est intervenu au début de la 14e variation : après
une ou deux mesures, l'interprète est tout simplement revenue au début. Si
j'ai pris assez peu de plaisir pendant ce concert, j'ai toutefois trouvé
que la 23e variation avait été jouée de façon vraiment
remarquable. Étrangement, un spectateur a lancé un Bravo
à la fin de
la 25e ; pensait-il que le concert était terminé ? À partir de
ce moment-là, des spectateurs inquiets de la durée imprévue du concert ont
commencé à s'enfuir un peu bruyamment pour rejoindre l'autre salle de la
Cité de la musique où le concert suivant du Marathon Bach allait
commencer...
⁂
Centre Mandapa — 2013-04-11
Aurélie Oudiette, danse kathak
Pandit Jaikishan Maharaj, Isabelle Anna, chorégraphies
J'ai décidé au dernier moment d'aller voir ce récital d'Aurélie Oudiette
et je ne l'ai pas regretté ! Depuis un récital d'Isabelle
Anna et Anuj Mishra, j'espérais voir un récital de kathak résolument
tourné vers la narration, une composante de la danse privilégiée par les
interprètes féminines. Cet espoir a été exaucé. La première pièce
Vandaran Shantha Vishnu représentait Vishnu et Lakshmi et
comportait certainement le plus beau visuel du récital avec la
représentation de Vishnu couché sur le serpent Shesha, l'accent était
particulièrement mis sur l'épithète Padmanabha
indiquant que de son
nombril émerge un lotus (sur lequel se tient Brahma). Les mouvements
ondulatoires des mains qui semblent assez utilisés dans la danse pure en
kathak trouvent ici une merveilleuse expression quand il s'agit d'évoquer
le cordon ombilical ou la tige de ce lotus. Cette pièce comme la plupart
des autres était enchaînée à des passages de danse pure sur une musique
rythmique (parfois solfiée) sur des cycles variés (Tîntal, Japtal,
Chautal). La pièce suivante a évoqué Krishna (tenant le mont Govardhana à
la force d'un seul doigt ou portant le disque). Un changement de costume
est intervenu avant la deuxième partie du récital d'inspiration moghole,
plus tournée vers la séduction que les thèmes sacrés. Une pièce mettra
ainsi en scène une courtisane, une autre évoquera les amours de Krishna et
Radha et enfin une troisième évoquera une femme espiègle et séductrice qui
insupporte son mari en faisant tinter ses bracelets. Le récital s'est
terminé avec une pièce de danse pure dans laquelle Isabelle Anna prononçait
les syllabes rythmiques sur lesquelles les mouvements de la danseuse
s'appuyaient. Le cycle rythmique était Chautal (12 temps). Si les temps forts
étaient au début marqués de façon très nette, avec une virtuosité d'autant
plus grande que l'on s'approchait de la fin des cycles rythmiques, les
développements successifs ont mis en lumière des variations très complexes
et nettement moins évidentes à suivre !
⁂
Salle Pleyel — 2013-04-13
Quatuor Hagen
Lukas Hagen, Rainer Schmidt, violons
Veronika Hagen, alto
Clemens Hagen, violoncelle
Quatuor à cordes nº15 (Beethoven)
Quatuor à cordes nº8 “Razumovski” (Beethoven)
Salle Pleyel — 2013-04-14
Quatuor Hagen
Lukas Hagen, Rainer Schmidt, violons
Veronika Hagen, alto
Clemens Hagen, violoncelle
Quatuor à cordes nº11 “Quartetto serioso” (Beethoven)
Quatuor à cordes nº10 “Les Harpes” (Beethoven)
Quatuor à cordes nº6 (Beethoven)
Salle Pleyel — 2013-04-14
Quatuor Hagen
Lukas Hagen, Rainer Schmidt, violons
Veronika Hagen, alto
Clemens Hagen, violoncelle
Quatuor à cordes nº9 “Razumovski” (Beethoven)
Quatuor à cordes nº13 (Beethoven)
Grande Fugue, op. 133 (Beethoven)
J'ai assisté à ces trois premiers concerts de l'intégrale Beethoven par le quatuor Hagen. J'en ressors émerveillé par la variété de la production du compositeur en la matière. Le quatuor Hagen m'a tout particulèrement ému pendant les mouvements lents, comme la première moitié Adagio du quatrième mouvement du Quatuor nº6 ou le Molto Adagio du Quatuor nº8 “Razumovski”. Lors du premier concert, j'ai été bluffé par l'unité du quatuor que je n'ai plus vraiment regardé, mais seulement écouté comme s'il s'agissait d'un unique instrument.
Une partie public s'est montré particulèrement grossière lors du concert du samedi soir. Les tousseurs sont une plaie. On peut presque s'estimer heureux quand les toux se concentrent entre les mouvements ; c'est un moindre mal. Cependant, il est inacceptable qu'à la fin d'un mouvement lent les hordes de toux se déclenchent sur le silence de fin alors que les archets des musiciens sont encore en contact avec les cordes... Le concert du dimanche matin s'est passé dans de bonnes conditions, mais la première moitié de celui de l'après-midi m'a été rendue insupportable par les ronflements du spectateur situé derrière moi, et ce pendant toute la durée du quatuor nº9 “Razumovski”. Replacé à l'arrière-scène pour le quatuor nº13, j'ai pour la première fois entendu le bruit de fond de la salle Pleyel. C'est un bruit irrégulier assez déplaisant (ventilation, canalisations, appareils électronico-mécaniques ?). D'après mes expérimentations plus récentes en Salle Pleyel, cela ne s'entend que depuis l'arrière-scène pendant les passages les plus doux.
⁂
Opéra Garnier — 2013-04-14
Jochen Schmeckenbecher, Peter
Irmgard Vilsmaier, Gertrud
Daniela Sindram, Hänsel
Anne-Catherine Gillet, Gretel
Anja Silja, Die Knusperhexe
Elodie Hache, Sandmännchen
Olga Seliverstova, Taumännchen
Claus Peter Flor, direction musicale
Mariame Clément, mise en scène
Julia Hansen, décors et costumes
Philippe Berthomé, éclairages
Mathieu Guilhaumon, chorégraphie
Orchestre de l'Opéra national de Paris
Maîtrise des Hauts-de-Seine, Chœur d'enfants de l'Opéra national de Paris
Hänsel und Gretel, Humperdinck
La musique de Humperdinck sauve cette soirée. Le compositeur a manifestement bien écouté Wagner dont quelques effets orchestraux sont réutilisés dans Hänsel et Gretel. Parfois, j'ai presque eu l'impression d'entendre des citations de Wagner. Le problème de cette production est que les conceptrices du spectacle n'ont pas tenu du compte du fait que l'Opéra Garnier était un théâtre à l'italienne. N'ayant vu que les deux-tiers de gauche de la scène, il m'a néanmoins semblé que la mise en scène de Mariame Clément fait des aventures des deux enfants un rêve dans lequel leur mère (ou belle-mère ?) apparaît en sorcière. Pourquoi pas, mais visuellement sans être affreux, tout est assez laid et la réalisation n'est pas très convaincante. Les chanteurs, comédiens et figurants (doublant ou triplant les personnages) sont comme enfermés dans les compartiments du décor à deux étages. La seule scène que j'ai trouvée assez bien faite a été celle où Hänsel et Gretel commencent à manger la maison en pain d'épices de la sorcière, mais j'ai ressenti comme un décalage entre l'intellectualisation de l'histoire sous forme de rêve et le style un peu naïf de certains décors ou costumes. Bref, tout cela n'est pas très enthousiasmant...
⁂
Salle Pleyel — 2013-04-16
Orchestre Colonne
Laurent Petitgirard, direction
Traverses (Prodromidès)
Viktoria Kogan, direction
Variations sur un thème de Paganini (Rachmaninov)
Symphonie nº5 (Tchaikovski)
Encore un magnifique concert de l'Orchestre Colonne. L'œuvre contemporaine, choisie avec goût comme toujours avec cet orchestre, était de Prodrominès. Elle alterne passages de tension et passages de relâchement. J'apprécie ensuite l'étendue du talent de la pianiste Viktoria Kogan dans les Variations sur un thème de Paganini de Rachmaninov. Après l'entr'acte, l'orchestre s'est déchaîné dans la Cinquième symphonie de Tchaikovski dont j'ai particulièrement apprécié les trois derniers mouvements. Pendant tout le concert, un musicien de l'orchestre m'a sidéré : un grand bravo au clarinettiste !
⁂
Opéra Garnier — 2013-04-17
Élèves de l'école de danse de l'Opéra
Orchestre des Lauréats du Conservatoire
Marius Stieghorst, direction musicale
Jean-Philippe Rameau, musique (extrait des Indes Galantes, 1735)
Béatrice Massin, Nicolas Paul, chorégraphie
Olivier Bériot, costumes
Madjid Hakimi, lumières
Valentin Chou
D'ores et déjà
Charles Gounod, musique (extrait de l'acte V de Faust, 1859)
Claude Bessy, chorégraphie d'après Léo Staats
Madjid Hakimi, lumières
Roxane Stojanov, Hélène
Nine Seropian, Cléopâtre
Awa Joannais, Phrynée
Camille Bon, Aspasie
Clara Spitz, Laïs
La Nuit de Walpurgis
Maurice Pacher, musique
Jacques Garnier, chorégraphie (1979) réglée par Wilfried Romoli
Christian Pacher, accordéon diatonique
Gérard Baraton, accordéon chromatique
Marin Delavaud, Julien Guillemard, Pablo Legasa
Aunis
Gioacchino Rossini, musique (Sonate nº1 en sol majeur, extraits des Sonates nº3 en do majeur, nº4 en si bémol majeur, nº5 en mi bémol majeur pour cordes, 1804)
Jean-Guillaume Bart, chorégraphie (2000)
Philippe Binot, costumes
François-Éric Valentin, lumières
Péchés de jeunesse
Plutôt que des ballets narratifs comme Coppélia ou Piège de
lumière présentés ces dernières années par les élèves de l'école
de danse dans des programmes comportant aussi des pièces moins classiques
ou néo-classiques, on n'aura vu dans ce programme que des pièces de
danse pure
, certes fort bien exécutées, mais qui me laissent
globalement assez indifférent. D'ores et déjà est une pièce pour
garçons : comme exercice d'appropriation du langage de la danse baroque
pour les élèves, elle est intéressante, mais en tant que ballet présenté
dans un spectacle, elle manque singulièrement de consistance... Les filles
s'illustrent par le placement et quelques variations dans La Nuit de
Walpurgis. Seul Aunis me convainc par l'engagement des trois
danseurs et des deux accordéonistes dans cette pièce très vive. Malgré tout
le bien que je pense de Jean-Guillaume Bart en tant que chorégraphe pour la
La Source, je n'ai pas été excessivement
enthousiasmé par les balanchiniens Péchés de jeunesse. On y voit
des couples de danseurs, qui s'illustrent dans des pas de deux comportant
des portés, mais il ne suffit pas qu'un homme et une femme se rencontrent
pour qu'un ballet raconte une histoire...
⁂
Salle Pleyel — 2013-04-18
Académie du Chœur de l'Orchestre de Paris
Lionel Sow, direction
Margot Modier, piano
Pauline Amar, Charlotte Bozzi, Sterenn Gourlaouen, Lauriane Launay, Anne-Sophie Petit, Juliette Rennuit, Marion Trigo, Louise Vanderlynden, sopranos
Lola Dauthieux, Julie Nemer, Sarah-Léna Winterberg, altos
Maxence Douez, ténor
Timothée Sonnier, basse
Spanisches Liederspiel, op. 74, nº1, nº3, nº8(Schumann)
Drei sweistimmige Lieder, op. 43 (Schumann)
Zwölf Gedichte aus “Liebesfrühling” (Rückert) (Schumann)
Lieder-Album für die Jugend, op. 79, nº9, nº15, nº18, nº20, nº24 (Schumann)
Drei Lieder, op. 114, nº2 (Schumann)
Sommerruh, WoO7 (Schumann)
Mädchenlieder, op. 103 (Schumann)
Drei Gedichte nach Emanuel Geibel, op. 29, nº1, nº2 (Schumann)
En prélude au concert de l'Orchestre de Paris avait lieu le premier concert de l'Académie du Chœur de l'Orchestre de Paris dirigé par Lionel Sow. Bien que le programme fût 100% Schumann, une publicité plus importante n'aurait pas été superflue puisqu'à peine une cinquantaine de spectateurs ont assisté à ce beau concert de 12 chanteuses et 2 chanteurs.
⁂
Salle Pleyel — 2013-04-18
Philippe Aïche, violon solo
Orchestre de Paris
Alondra de la Parra, direction
Capriccio espagnol, suite pour orchestre, op. 34 (Rimski-Korsakov)
Nikolaï Lugansky, piano
Concerto pour piano nº2 en fa mineur, op. 21 (Chopin)
Le Tricorne, suites orchestrales nº1 et nº2 (Manuel de Falla)
Danzón nº2 (Arturo Márquez)
Quelle idée saugrenue d'insérer un concerto de Chopin dans un tel programme ! Si j'ai aimé le deuxième mouvement du concerto, par le jeu varié de Lugansky et le doux accompagnement de l'orchestre, l'intérêt principal du concert venait des œuvres hispanisantes ou mexicaines. L'orchestre est dirigé par la jeune chef Alondra de la Parra. S'il n'y a rien de remarquable à ce que sa main droite batte régulièrement la mesure, il est plus singulier pour un chef que l'ensemble de son être paraisse à ce point animé par la musique que ses manifestations extérieures ne semblent qu'un prolongement d'une animation plus intérieure. La chef danse sur son estrade ! Si elle faisait du bharatanatyam, je dirais qu'elle est aussi douée en danse pure qu'en abhinaya, l'art de l'expression (dans lequel excelle aussi le chef Andris Nelsons). Quel regard ! Dans la deuxième partie du programme, l'orchestre se déchaîne, d'abord dans Le Tricorne, et surtout dans l'irrésistible Danzón nº2 d'Arturo Márquez.
Ailleurs : Paris — Broadway, Andante con anima, Palpatine.
⁂
Opéra Bastille — 2013-04-19
Gustav Mahler, musique
John Neumeier, chorégraphie, décor et lumières (1975)
Kevin Haigen, Victor Hughes, assistants du chorégraphe
Madjid Hakimi, réalisation lumières
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
Simon Hewett, direction musicale
Aline Martin, mezzo soprano
Alessandro Di Stefano, chef de chœur
Maîtrise des Hauts-de-Seine, Chœur d'enfants de l'Opéra national de Paris
Mathieu Ganio, Laëtitia Pujol
Vincent Chaillet, Alessio Carbone, Cyril Mitilian, Fabien Révillion, Florian Magnenet, Vincent Cordier
Charline Giezendanner, Muriel Zusperreguy, Eve Grinsztajn, Laura Hecquet, Nolwenn Daniel
Troisième Symphonie de Gustav Mahler
Il a fallu attendre le dernier tableau Ce que me conte l'amour pour j'apprécie véritablement ce spectacle grâce au superbe pas de deux entre Mathieu Ganio et Laëtitia Pujol. Alors que j'étais installé au fond du deuxième balcon, j'ai vu vers 19h29 un groupe de scolaires entrer. La très intelligente régie de l'Opéra a bien sûr coupé les lumières pour les empêcher de trouver leur place. Cela a complètement pourri les premières minutes du premier mouvement de la Troisième symphonie de Mahler, lequel a des proportions inquiétantes. Je n'ai pas accroché à cette musique. Je suis en effet écartelé entre diverses sensations contradictoires et simultanées : une oreille me signale une danse joyeuse, une autre des gloussements des instruments à vents, tandis qu'une marche militaire tente d'entraîner le corps entier dans une agitation martiale. Je n'avais pas vu l'entrée au répertoire de ce ballet de Neumeier en 2009, mais si je n'ai pas été émerveillé par ce ballet, j'ai trouvé que l'œuvre était bien montée, avec des danseurs qui semblent totalement investi dans leurs rôles abstraits. Parmi eux, Charline Giezendanner m'a paru particulièrement convaincante.
On dit parfois que le silence à la fin de Mozart est aussi de Mozart. Ce soir, le silence à la fin de Mahler n'était pas de Mahler. Même l'accord final ne lui appartenait plus. Je ne comprends pas qu'une proportion aussi importante du public soit aussi peu respectueuse de la musique pour applaudir un rideau en train de descendre...
⁂
Salle Pleyel — 2013-04-24
Académie de l'Orchestre de Paris
Ambroisine Bré, mezzo-soprano
Chloé Dufossez, flûte
Olivier Marger ou Aurélien Pascal, violoncelle
Mayoko Surayya Salloum, piano
Trois chansons madécasses pour flûte, mezzo, violoncelle et piano (Ravel)
Khoa-Nam Nguyen, Lev Bogino, violons
Issey Nadaud, alto
Rémi Carlon, violoncelle
Quatuor à cordes en la mineur, 1889 (Sibelius)
Salle Pleyel — 2013-04-25
Académie de l'Orchestre de Paris
Quatuor Tosca
Constance Ronzatti, Marc Desjardins, violons
Marine Gandon, alto
Armance Quéro, violoncelle
Quatuor à cordes en la mineur, op. 51 nº2 (Brahms)
Avant d'assister aux deux représentations du programme Ravel/Sibelius/Brahms de l'Orchestre de Paris, je suis allé aux deux courts concerts donnés en prélude mercredi et jeudi. J'ai été très convaincu de l'interprétation des chansons madécasses de Ravel dont le texte, à défaut d'être complètement intelligible, l'était davantage que lorsque j'avais entendu pour la première fois cette œuvre il y a quelques mois. Le violoncelliste m'a beaucoup plu, mais son nom me restera inconnu, puisque comme la semaine précédente, il y a des coquilles dans la fiche de distribution. Les jeunes musiciens interprétant le quatuor de Sibelius étaient convaincants, mais dans l'ensemble j'avais l'impression d'entendre trop le premier violon et le violoncelle au détriment du second violon et de l'alto qui avaient un très beau son. Le quatuor Tosca (qui n'était exceptionnellement féminin qu'aux trois quarts) est plus avancé et m'a fait passer un très bon moment, en particulier dans les premier et quatrième mouvements du quatuor à cordes op. 51 nº2 de Brahms.
⁂
Théâtre des Champs-Élysées — 2013-04-26
Orchestre de chambre de Paris
Ivor Bolton, direction
Divertissement en fa majeur nº10 (Mozart)
Gidon Kremer, violon
Polonaise pour violon et orchestre en si bémol majeur (Schubert)
Konzertstück pour violon et orchestre en ré majeur (Schubert)
Maria Fedotova, flûte
Impromptu pour flûte, violon et orchestre à cordes (Sofia Gubaidulina/Schubert)
Andante et Rondo pour flûte et orchestre en ut majeur (Mozart)
Symphonie nº104 en ré majeur (Haydn)
Ce concert aurait été épouvantablement ennuyeux s'il n'y avait eu avant l'entr'acte l'adaptation pour flûte, violon et orchestre à cordes par la compositrice Sofia Gubaidulina de l'Impromptu en la bémol mineur op. 90 nº4 de Schubert et en fin de programme la symphonie nº104 de Haydn. J'ai beaucoup aimé la flûtiste Maria Fedotova qui passait parfois à la flûte alto dans l'œuvre de Gubaidulina/Schubert. La transcription de la première phrase pour la flûte plutôt que tout autre instrument me rappelait de façon amusante la Badinerie de Bach. Dans la symphonie nº104 de Haydn, j'ai aimé retrouver certains détails auxquels j'avais déjà goûté, mais d'autres ont été un peu noyés dans le volume orchestral. L'orchestre jusque là apathique jouait vraiment. J'eusse aimé qu'ils jouassent comme ça pendant tout le concert et de façon plus engagée encore dans cette symphonie, puisque cette nouvelle audition ne m'a pas procuré un plaisir plus grand qu'avec l'Orchestre des Concerts Gais. Cela faisait quatre ans que je n'avais pas vu le chef Ivor Bolton. Je vais sans doute attendre encore quelques années avant de retenter l'expérience...
2013-04-01 16:06+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse
Au cours du mois de mars j'ai déjà eu l'occasion de développer mes impressions sur le concert de Romain Guyot et du Chamber Orchestra of Europe, sur leur Don Giovanni et sur le programme de bharatanatyam de Priya Venkataraman. Pour les autres spectacles vus au cours du mois, voici le vite dit de mars :
Opéra Garnier — 2013-03-06
Hommage à Rudolf Noureev
Orchestre Colonne
Fayçal Karoui, direction musicale
Polonaise, extraite de l'acte I du Lac des cygnes (Tchaikovsky)
Ballet de l'Opéra
Les Élèves de l'École de Danse
Piotr Ilyitch Tchaikovski, musique
Rudolf Noureev, chorégraphie (1985)
Nicholas Georgiadis, costumes
Myriam Ould-Braham, Christophe Duquenne
Casse-Noisette (La marche des enfatns, extrait de l'acte I, deuxième tableau, Pas de deux extrait de l'acte I, cinquième tableau)
Piotr Ilyitch Tchaikovski, musique
Rudolf Noureev, chorégraphie (1989) d'après Marius Petipa
Franca Squarciapino, costumes
Aurélie Dupont, Audric Bezard, Vincent Chaillet, Stéphane Phavorin, Yann Saïz
La Belle au Bois dormant (Adage à la Rose, Pas de cinq extrait de l'acte I)
Sergueï Prokofiev, musique
Rudolf Noureev, adaptation et chorégraphie (1986) d'après Marius Petipa
Hanae Mori, costumes
Marie-Agnès Gillot, Florian Magnenet
Cendrillon (Pas de deux extrait de l'acte II)
Ludwig Minkus, musique
John Lanchberry, arrangements
Rudolf Noureev, chorégraphie (1981)
Elena Rivkina, costumes
Ève Grinsztajn, Vincent Chaillet (Fandango)
Ludmila Pagliero, Karl Paquette (Pas de deux)
Don Quichotte
Alexandre Glazounov, musique
Rudolf Noureev, chorégraphie (1983) d'après Marius Petipa
Nicholas Georgiadis, costume
Isabelle Ciaravola
Raymonda (Variation de Raymonda extrait de l'acte III)
Piotr Ilyitch Tchaikovski, musique
Rudolf Noureev, chorégraphie (1984) d'après Marius Petipa et Lev Ivanov
Franca Squarciapino, costumes
Émilie Cozette, Hervé Moreau (Adage du pas de deux extrait de l'acte II)
Dorothée Gilbert, Mathieu Ganio, Benjamin Pech (Pas de trois)
Le Lac des Cygnes
Sergueï Prokofiev, musique
Rudolf Noureev, chorégraphie (1984)
Ezio Frigerio, Mauro Pagano, costumes
Laëtitia Pujol, Nicolas Le Riche
Roméo et Juliette (Pas de deux extrait de l'acte I)
Piotr Ilyitch Tchaikovski, musique
Rudolf Noureev, chorégraphie (1979)
Nicholas Georgiadis, costume
Mathias Heymann
Manfred (Variation du Poète extrait du quatrième tableau)
Ludwig Minkus, musique
John Lanchberry, arrangements
Rudolf Noureev, chorégraphie (1992) d'après Marius Petipa
Franca Squarciapino, costumes
Agnès Letestu, Stéphane Bullion
La Bayadère (Les Ombres, extraits de l'acte III)
Il m'est difficile de commenter ce spectacle de danse puisque mon placement ne me permettait de voir qu'une petite moitié de la scène. Ce que j'ai vu m'a peu enthousiasmé. Je crois que j'aime trop la danse narrative pour être intéressé par ces extraits sortis de tout contexte dramatique. Avant l'entr'acte, je ne suis guère intéressé que par les extraits de Don Quichotte, qui à défaut d'émouvoir émerveillent par la vivacité des danseurs, notamment Ève Grinsztajn, et Ludmila Pagliero. Après l'entr'acte, il faudra que Nicolas Le Riche (Roméo) et Laëtitia Pujol (Juliette) entrent en scène pour que je me passionne pour ce qui se passait sur scène. Une ovation méritée pour eux, tout comme pour Mathias Heymann que le public était heureux de revoir, enfin ! La présence de l'acte des Ombres de La Bayadère au programme m'avait fait adopter une tenue toute indienne pour cette soirée de gala. Vu de biais, la descente des trente-deux ballerines perd quelque peu de ses vertus géométriques, mais ce fut un passage émouvant tout comme le pas de deux entre Agnès Letestu et Stéphane Bullion.
Dans l'Orchestre Colonne, j'ai particulièrement aimé les interventions conjointes des harpes et des flûtes. J'ai aussi entendu un superbe solo de violoncelle. L'interprète n'étant pas dans mon chant de vision, je me suis mis sur la pointe des pieds pour l'apercevoir, et bien sûr il s'agissait de la violoncelliste que j'avais tant appréciée lors d'un précédent concert Colonne.
⁂
Salle Pleyel — 2013-03-15
London Symphony Orchestra
Frank Strobel, direction
Jurassic Park (Thème) (John Williams)
Les Dents de la mer (Suite) : Thème du requin, En mer et Fugue de la cage du requin (John Williams)
La Liste de Schindler : Nº2 Ville juive, Nº1 Thème (John Williams)
Indiana Jones et le Royaume du crâne de cristal (Suite) : Extraits nº1, 3, 4 (John Williams)
Les Aventuriers de l'arche perdue : La Marche des aventuriers (John Williams)
Hook : Vol vers le Pays imaginaire (John Williams)
La Guerre des mondes : La Fuite de la ville, Épilogue (John Williams)
Rencontres du troisième type (Extraits) (John Williams)
L'Empire du soleil : La nouvelle vie de Jim (John Williams)
Le Terminal : L'Histoire de Viktor Navorski (John Williams)
E. T. : Aventures sur terre (John Williams)
Munich (John Williams)
1941 (John Williams)
Star Wars Theme (John Williams)
Les musiques de films de John Williams de la première partie de ce concert du London Symphony Orchestra m'étaient familières, et m'ont procuré le sentiment de retomber en enfance. Le Thème du requin des Dents de la mer était particulièrement impressionnant, et la fugue particulièrement délectable, tout comme, plus loin les apparitions d'abord fugitives puis indiscutablement spectaculaires du thème d'Indiana Jones. Avec la deuxième partie, je découvre des titres de films de Spielberg que je ne connaissais pas. Si tous les extraits vidéo montrés pendant le concert ne m'incitent pas à visionner ces films (surtout 1941, joué en bis), les musiques m'ont toutes beaucoup plu. Je n'osais trop y croire puisque le thème du concert était Williams/Spielberg et non Williams/Lucas, mais en troisième bis, l'orchestre a joué la musique de Star Wars pour le plus grand plaisir de tous les auditeurs !
⁂
Opéra Comique — 2013-03-17
Pascal Rophé, direction musicale
Ludovic Lagarde, mise en scène
Antoine Vasseur, décors
Fanny Brouste, costumes
Sébastien Michaud, lumières
Lidwine Prolonge, vidéo
Élodie Dauguet, assistante décors
Julian Janeczko, assistant vidéo
Christophe Manien, assistant chef d'orchestre
Anna Caterina Antonacci, Contessa Susanna, Elle
Vittorio Prato, Conte Gil
Bruno Danjoux, Sante
Orchestre Philharmonique du Luxembourg
Il Segreto di Susanna, Ermanno Wolf-Ferrari
La Voix humaine, Francis Poulenc
À l'écoute de l'ouverture du Secret de Susanne, je me suis
dit : Non, ce n'est pas possible, Minkus a écrit un opéra. Au
secours !
. Par la suite, la façon de mettre le texte en musique me fait
davantage penser à Puccini. À défaut d'être bouleversante, la musique me
semble luxueusement bien jouée par l'Orchestre Philharmonique du Luxembourg
dont j'ai tout particulièrement apprécié les instruments à vents.
L'histoire de cet opéra est inintéressante au possible. Un opéra de
boulevard... Le secret de Susanne est qu'elle fume, son mari s'imagine
qu'elle le trompe avec un homme, car seul un homme pourrait fumer,
pense-t-il. Toutefois, autant le texte que la mise en scène laissent une
part de doute sur le rôle du valet, ne partage-t-il avec Susanna que son
addiction pour le tabac ? Le rôle du mari est très bien chanté par le
baryton Vittorio Prato.
Anna Caterina Antonacci est l'artiste lyrique que j'ai vue le plus souvent en concert. Quatorze fois ! La première fois était il y a presque dix ans dans Agrippina de Händel au Théâtre des Champs-Élysées. Ces dernières années, mes expériences d'auditeurs la concernant ont été contrastées (pour le meilleur et pour le pire). Mes dernières impressions sur Les Troyens était mitigées. Dans la salle à taille plus humaine de l'Opéra Comique, j'ai l'impression de la retrouver en pleine possession de ses moyens ! Quand la chanteuse bascule en français pour La Voix humaine de Poulenc après l'entr'acte, elle achève de me convaincre. Jamais je ne l'ai entendue chanter un texte français de façon aussi intelligible. Il n'était plus nécessaire de lire surtitres pour se laisser émouvoir par l'évolution du drame jusqu'à sa conclusion avec la terminaison de la conversation téléphonique de l'héroïne.
Tout comme dans la production d'Orphée et Eurydice que j'avais vue à la MC93 Bobigny, le décor représente un appartement moderne dont on peut voir l'héroïne parcourir les différentes pièces puisque le décor peut tourner sur lui-même. Voilà à peu près l'unique idée que j'aie distinguée dans la mise en scène...
⁂
Salle Pleyel — 2013-03-18
Klangforum Wien
Neue Vocalsolisten Stuttgart
Tito Ceccherini, direction
Daniele Pollini, piano
Carnaval nº10 Lascia vibrare (Salvatore Sciarrino)
Carnaval nº11 Stanze della pioggia (Salvatore Sciarrino)
Carnaval nº12 Liuto senza corde (Salvatore Sciarrino)
Maurizio Pollini, piano
Sonate pour piano nº30 en mi majeur op. 109 (Beethoven)
Sonate pour piano nº31 en la bémol majeur op. 110 (Beethoven)
Sonate pour piano nº32 en ut mineur op. 111 (Beethoven)
Ne raffolant pas des récitals pour piano, j'ai trouvé bienvenue la forme de ce concert. En première partie, un orchestre a joué trois œuvres de musique de chambre contemporaines de Salvatore Sciarrino. La première m'a beaucoup plu du fait de l'utilisation d'un chœur de quelques chanteurs solistes dont les voix se mêlent très harmonieusement. Quelle justesse ! La musique repose sur l'utilisation de glissandi par les instruments qui le permettent (les violoncelles, les trombones, les voix). Quoique le matériau musical y soit un peu trop délayé à mon goût, j'apprécie les idées développées dans le deuxième morceau, purement instrumental. Un thème très reconnaissable de quatre notes (dont les deux dernières sont liées dans un glissando) revient fréquemment au violoncelle. J'aime la direction très claire de Tito Ceccherini (dont la tête me disait quelque chose, et pour cause : il dirigeait Reigen il y a quelques semaines de cela). Toutefois, le volume sonore produit par l'effectif orchestral très réduit aurait pu trouver meilleur écrin que la volumineuse Salle Pleyel. Les petits bruits des spectateurs (sans même parler des toux) perturbent quelque peu l'audition de cette œuvre.
La deuxième partie du concert m'a donné à entendre le pianiste Maurizio Pollini dans les sonates nº30, 31 et 32 de Beethoven. Je n'avais jamais entendu de sonates de Beethoven en concert. Ce fut pour moi une expérience très réjouissante. Que j'aime la façon dont ce pianiste fait ressortir la pulsation de cette musique !
⁂
Salle Pleyel — 2013-03-19
Orchestre Philharmonique de l'Oural
Dmitri Liss, direction
Suite pour orchestre nº3 (Tchaikovski)
Chœur Symphonique de l'Oural
Yana Ivanilova, soprano
Alexander Timchenko, ténor
Pavel Baransky, basse
Les Cloches, op. 35 (Rachmaninov)
J'avais choisi ce concert de l'Orchestre Philharmonique de l'Oural parce que La Nuit sur le mont Chauve de Moussorgsky était programmée. Le programme du concert a été chamboulé. Je découvre la Suite pour orchestre nº3 de Tchaikovski, qui à défaut de me bouleverser maintient mon intérêt du fait de sa forme très variée : une atmosphère pastorale au tout début, la mise en valeur des altos et du cor anglais, une superbe fugue et une fin hydravionesque très bien amenée (un mix entre l'Arlésienne de Bizet et la Polonaise d'Eugène Onéguine du même Tchaikovski).
Le concert n'était pas surtitré, j'ignore le sens du texte russe (traduit d'une œuvre d'Edgar Allan Poe) que le chœur et les solistes ont chanté après l'entr'acte. Cela n'a pas nui à mon plaisir d'écouter la musique des Cloches de Rachmaninov comme s'il s'agissait d'une mystérieuse féerie musicale. Cela valait le déplacement ne serait-ce que pour les interventions du cor anglais en arrière-plan dans la partie chantée par la basse.
⁂
Salle Pleyel — 2013-03-21
Philippe Aïche, violon solo
Orchestre de Paris
Paavo Järvi, direction
Symphonie nº1 (Dutilleux)
Concerto pour violon nº2 (Bartók)
Gil Shaham, violon
Gavotte en rondeau de la Partita nº3 en mi majeur, BWV 1006, Bach
Symphonie nº1 en ut majeur, opus 21 (Beethoven)
Je ne m'attendais pas à ce que la Première Symphonie de Beethoven soit
le point culminant de ce concert ! Pourtant, le chef Paavo Järvi
(exceptionnellement sans partition) et l'orchestre de Paris étaient
réjouissants comme jamais. L'enthousiasme unanime de tous les musiciens ne
faisait nullement obstacle à l'appréciation des joyeux détails
d'orchestration de cette œuvre. Avant cela, le concert avait déjà fort bien
commencé avec la Première Symphonie de Dutilleux. Les partitions que
j'apercevais depuis ma place comportaient de nombreuses ratures,
corrections et annotations, comme un REGARDEZ Cymb
manuscrit écrit
en gros sur celles des percussionnistes. Dans le concerto pour violon nº2
de Bartók, dans lequel j'ai quelques difficultés à percevoir une structure,
le violoniste Gil Shaham a été très convaincant...
⁂
Opéra Comique — 2013-03-22
Kate McGarry, Desdémone
Bunny Sigler, Othello
Jacques Bonnaffé, Iago
Uri Caine, piano
Achille Succi, clarinette
Darryl Hall, basse
Nguyên Lê, guitare
Alain Venkenhove, trompette
Nicolas Geremus, violon
Sangoma Everett, batterie
Le Syndrome d'Othello
Après avoir assisté à cette représentation du Syndrome
d'Othello, je crois pouvoir dire que le jazz n'est pas exactement fait
pour moi... Du point de vue narratif, ce spectacle inspiré par
Otello de Verdi est très décevant. Le texte chanté par Bunny
Sigler (Othello) et Kate McGarry (Desdémone) semble sans rapport évident
avec l'histoire qui ne semble qu'un prétexte. Je dis semble
parce
que le concert n'était pas surtitré. Le texte parlé ou slammé en français
par Jacques Bonnaffé (Iago), s'il était parfois assez drôle et décalé,
était trop souvent complètement incompréhensible, sa voix étant couverte
par le petit orchestre qui produisait un son du tonnerre (pourquoi donc
amplifier les musiciens ? pendant les premières minutes du spectacle j'ai
cru que mes oreilles allaient exploser !). Comme spectacle dénué de sens,
ce Syndrome d'Othello est toutefois loin d'être déplaisant, les
musiciens semblant très bons, le pianiste Uri Caine, le trompettiste Alain
Venkenhove et le guitariste Nguyên Lê étant particulièrement
impressionnants. Je n'ai pas perçu toutes les références dans la musique,
mais j'aurai au moins reconnu une référence incongrue à En passant par
la Lorraine (avec mes sabots...). Un passage particulièrement beau
utilisait une musique arabisante comportant quelques glissandi jouée par le
violoniste Nicolas Geremus. On trouve même un morceau atonal pendant la
scène du meurtre, au cours de laquelle les protagonistes ne sont pas sur
scène. En revanche, le public des premiers rangs dont je faisais partie
aura eu tout le loisir d'admirer l'interminable suicide d'Othello, pour
lequel le showman Bunny Sigler a curieusement passé un
achkan (dans les mêmes style et coloris que ce que je portais pour
le Gala Noureev...).
⁂
Opéra Garnier — 2013-03-27
Yannis Pouspourikas, direction musicale
Orchestre Colonne
Ballet de l'Opéra
Jacques Prévert, argument
Joseph Kosma, musique originale
Roland Petit, chorégraphie (1945) réglée par Luigi Bonino
Pablo Picasso, rideau de scène
Brassaï, décors
Mayo, costumes
Jean-Michel Désiré, lumières
Jan Broeckx, assistant du chorégraphe
Amandine Albisson, La plus belle fille du monde
Alexandre Gasse, Le jeune homme
Stéphane Phavorin, Le destin
Hugo Vigliotti, Le bossu
Peggy Dursort, La fleuriste
Claire Gandolfi, Jennifer Visocchi, Les filles
Samuel Murez, Le lanceur de tracts
Sophie Mayoux, Antonio Conforti, Carola Puddu, Milo Avêque, Les enfants qui s'aiment
Florent Mélac, Alexis Saramite, Axel Alvarez, Niccolo Balossini, Les garçons
Pascal Aubin, Le chanteur
Anthony Millet, L'accordéoniste
Le Rendez-vous
Jean Anouilh, Georges Neveux, argument
Henri Dutilleux, musique originale
Roland Petit, chorégraphie (1953)
Carzou, décors et costumes
Jean-Michel Désiré, lumières
Jean-Philippe Halnaut, répétitions
Émilie Cozette, La jeune fille
Stéphane Bullion, Le loup
Sabrina Mallem, La Bohémienne
Christophe Duquenne, La jeune homme
Alexis Saramite, Le montreur de bêtes
Natacha Gilles, La mère
Le Loup
D'après la nouvelle de Prosper Mérimée
Georges Bizet, musique arrangée par G. Tommy Desserre
Roland Petit, chorégraphie (1946) réglée par Luigi BOnino
Antoni Clavé, décors et costumes
Jean-Michel Désiré, lumières
Jean-Philippe Halnaut, répétitions
Eleonora Abbagnato, Carmen
Nicolas Le Riche, Don José
Audric Bezard, Escamillo
Valentine Colasante, François Alu, Mathieu Botto, Les Chefs des brigands
Carmen
Les héros de la soirée sont l'Orchestre Colonne et Eleonora Abbagnato, merveilleuse interprète du rôle de Carmen, nommée étoile à l'issue de la représentation. Le ballet Le Rendez-vous est tellement insipide que mon attention est totalement concentrée sur la fosse d'orchestre. Au cours de la soirée, les musiciens ont paru très engagés et les solistes se sont brillamment illustrés (notamment les vents, la trompette et le superbe premier violon, Sébastien Surel, identifié par Klari). Dans Le Loup, entre deux coups d'œil vers la fosse d'orchestre, je regardais ce qui se passait sur scène (et cela piquait un peu les yeux). On passe un bon moment grâce à Sabrina Mallem (La Bohémienne) et Sébastien Bullion (Le Loup). Je sais que le pas de deux entre le Loup et la jeune fille peut être plus émouvant, je me rappelle avoir vu Laëtitia Pujol dans ce rôle... mais j'avoue avoir été presqu'ému par Émilie Cozette.
J'ai adoré le ballet Carmen que je n'avais pas encore vu. Pour ce qui est de la danse, il est très supérieur à mon goût aux deux ballets présentés avant l'entr'acte. Si Nicolas Le Riche (Don José) et Audric Bezard (Escamillo) ont été superbes dans les rôles masculins, c'est bien sûr Eleonora Abbagnato (Carmen) qui m'a fait apprécier ce ballet ! Quelle présence ! Je ne retiens pas le bruit de ses pointes frappant le sol, plutôt le râle qui se fait entendre dans ses pas de deux avec Nicolas Le Riche. Pour une argumentation plus construite, il faut lire le billet chez Impression danse. J'ai rarement été autant ému par la représentation d'un ballet à l'Opéra ! J'ai été très heureux qu'Eleonora Abbagnato soit nommée danseuse étoile à l'issue de la représentation.
⁂
Salle Pleyel — 2013-03-30
Orchestre national d'Île de France
Ann-Estelle Médouze, violon supersoliste
Enrique Mazzola, direction
Nicolas Southon, présentation
Ouverture des Maîtres chanteurs de Nuremberg (Wagner)
Murmures de la forêt (extrait de Siegfried) (Wagner)
Nora Gubisch, mezzo-soprano
Wesendonck Lieder (Wagner)
Voyage de Siegfried sur le Rhin (extrait du Crépuscule des Dieux (Wagner)
Prélude de Tristan et Isolde (Wagner)
Ouverture de Tannhäuser (Wagner)
Ce n'est pas vraiment le meilleur Wagner que j'aie entendu, mais cela n'a pas excessivement gâché mon plaisir d'auditeur, n'ayant pas plus d'une ou deux occasions par an d'entendre ce type de programmes. L'Orchestre national d'Île de France était très beau dans les passages délicats (superbes oiseaux dans les murmures de la forêt), mais nettement moins clair dans les fortissimi, notamment vers la fin de l'ouverture de Tannhäuser qui semblait assez délicate à négocier pour les cordes. Dans cette ouverture, je retiens toutefois une belle superposition entre le chœur des pélerins par les cuivres et le Vénusberg par les cordes. (Était-il vraiment nécessaire d'inclure des mini-conférences sur Wagner pendant ce concert ? Surtout si c'était pour entendre des bêtises à propos de la création parisienne de Tannhäuser...) Je n'ai pas été très ému par Nora Gubisch dans les Wesendonck Lieder ; il est difficile de me faire oublier Nina Stemme...
2013-03-27 15:08+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Auditorium de Dijon — 2013-03-24
Edwin Crossley-Mercer, Don Giovanni
Josef Wagner, Leporello
Diana Higbee, Donna Anna
Michael Smallwood, Don Ottavio
Timo Riihonen, Le Commandeur
Ruxandra Donose, Donna Elvira
Camille Poul, Zerlina
Damien Pass, Masetto
Marie Buffet, Suivante de Donna Elvira
Bertille Lucarain, Charlotte Mignot, Figurantes
Élèves du Pôle d'Enseignement Supérieur de la Musique de Bourgogne, bandas
Élèves du Conservatoire à Rayonnement Régional de Dijon, danseurs
Gérard Korsten, direction musicale
Jean-Yves Ruf, mise en scène
Anaïs de Courson, collaboration à la mise en scène
Laure Pichat, scénographie
Claudia Jenatsch, costumes
Christian Dubet, lumières
Caroline Marcadé, chorégraphie
Cécile Kretschmar, maquillage, masques et coiffures
Lucie Hermand, assistanat aux costumes
Yvon Repérant, chef de chant, claveciniste continuiste
Mihály Zeke, chef de chœur
Maurizio Prosperi, pianiste répétiteur
Thierry Aveline, CUTFX, vidéo
Atelier Prelud, Ateliers de l'Opéra de Dijon, réalisation des décors
Atelier Caraco Canezou, Ateliers de l'Opéra de Dijon, réalisation des costumes
Thomas and Neel, création des surtitres
Bärenreiter, éditeur des partitions
Chamber Orchestra of Europe
Chœur de l'Opéra de Dijon
Don Giovanni (version de Prague), Mozart
J'ai assisté dimanche à mon quatrième Don Giovanni. J'avais adoré cette œuvre lorsque je l'avais découverte au TCE en 2010. En 2012 à l'Opéra Bastille, j'avais apprécié la mise en scène de Michael Haneke malgré la pesanteur de l'interprétation musicale. Il y a quelques semaines à Budapest, mon plaisir est davantage venu de ma visite du Magyar Állami Operaház que de la représentation de cet opéra, quoiqu'il me parût alors très bien chanté.
Dimanche après-midi avait lieu à Dijon la deuxième représentation d'une nouvelle production de Don Giovanni. Dès l'ouverture, on sent que c'est le Chamber Orchestra of Europe qui est dans la fosse, dirigé par Gérard Korsten. Néanmoins, il est à noter qu'il y avait un travail sur le son des cordes pour que cela sonne un peu baroque. Bien souvent, je me surprenais à entendre des détails de phrasés très finement ciselés !
Tous les chanteurs m'ont paru très bons. J'ai a-do-ré Edwin Crossley-Mercer en Don Giovanni. Les autres chanteurs masculins m'ont tous semblé très convaincants. Michael Smallwood dont le rôle de Don Ottavio reste assez discret pendant le premier acte se révèle au deuxième acte dans le magnifique air Il mio tesoro infanto ! Du côté des dames, mes plus grandes émotions sont venues de Diana Higbee (Donna Anna), dont les airs m'ont beaucoup ému. J'ai aimé Camille Poul dans l'adorable rôle de Zerlina. Il y avait une sorte de fragilité dans la voix de Ruxandra Donose, mais plutôt qu'elles soient dissimulées, il n'était à mon avis pas malvenu que les fêlures du personnage d'Elvira se manifestent ainsi. Voilà une très belle équipe de chanteurs assez jeunes : Damien Pass (Masetto) était à l'Atelier Lyrique de l'Opéra de Paris il y a à peine deux ans...
À part les premières minutes de l'opéra qui se passent devant le rideau de scène, l'action est située sur un décor de verdure en pente irrégulière. Cela fait un peu peur au premier coup d'œil, mais cet espace est très habilement occupé par la mise en scène et il paraît tout à fait approprié pour la fête paysanne en l'honneur de Zerlina et Masetto. Les mouvements des membres du chœur tout comme ceux des solistes s'opèrent de façon très fluide et naturelle, ce qui conforte l'impression que l'action de Don Giovanni est sans aucun temps mort : un numéro musical est à peine terminé que le suivant arrive comme un prolongement naturel du précédent, autant pour les oreilles que pour les yeux.
Dans la mise en scène, j'ai particulièrement aimé certains détails qui
éclairent le texte qui est chanté. Ainsi, pendant l'air du catalogue
que Leporello chante à Elvira, il dit de son maître que sa passion
prédominante, c'est la jeune débutante
. À ce moment-là, par ses
mouvements candides, la jeune suivante d'Elvira attire l'attention du
spectateur, en une sorte de prémonition de ce qui se passera au second
acte.
L'idée que le metteur en scène Jean-Yves Ruf explique dans sa note d'intention est de faire de Don Giovanni un personnage errant. Vu le décor utilisé, il apparaît donc tout naturel que le Commandeur soit invité à un dîner sur l'herbe... Les dernières scènes de l'opéra étaient magnifiquement éclairées. Avant cette invitation à dîner, le cortège funèbre du Commandeur était passé avec un grand encensoir. Si les vapeurs d'encens ont indisposé quelques spectateurs des premiers rangs, elles ont surtout contribué à créer une pénombre vaporeuse de toute beauté pour l'apparition du Commandeur sur son piédestal pour sa mise en garde à Don Giovanni.
Pour la mort de Don Giovanni, si l'on excepte le rouge sang projeté sur la chemise blanche du malheureux, la mise en scène a été plutôt sobre. En effet, la partie spectaculaire était tout naturellement confiée à l'orchestre qui se l'est appropriée avec le talent qu'on lui connaît ! Quand le Commandeur est censé frapper à la porte de Don Giovanni, on entend un terrifiant son de cordes. Ceci prépare les oreilles du spectateur aux retrouvrailles avec les rugissants coups de timbales déjà entendus dans l'ouverture. Cet accompagnement musical tout Cihohiësque de l'intervention du Commandeur contribue à faire de ce passage une des scènes d'opéra les plus impressionnantes auxquelles j'aie eu l'occasion d'assister !
Le moins que l'on puisse dire est que je ne regrette pas le déplacement à Dijon pour cette représentation de Don Giovanni et le concert de la veille !
Cette production va faire l'objet d'une captation qui sera diffusée sur medici.tv à partir du 30 mars avant de sortir en DVD...
2013-03-01 12:33+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse
Le mois de février vient de se terminer. Pour le concertivore que je
suis, cela a été un mois fou. Après l'équipée budapestoire du début du mois
(Mozart, Bizet, Bartók-Maraton), j'ai maintenu un rythme
de spectacle soutenu. Au total, j'aurai assisté à 31 spectacles en 28
jours... J'ai déjà fait un billet sur Nala et
Dayamanti au Quai Branly. Pour dix-sept qui restent, je vais
tenter de revenir au genre des microniquettes
déjà apparu ici en novembre dernier.
⁂
Salle Pleyel — 2013-02-05
Orchestre Colonne
Laurent Petitgirard, direction
Le Chasseur Maudit (Franck)
Gary Hoffmann, violoncelle
Concerto pour violoncelle (Petitgirard)
Symphonie nº1 (Chostakovitch)
Ce concert du Colonne était magnifique ! Le deuxième balcon étant vide, je ne me suis pas fait prier pour descendre à l'orchestre. Tout m'a plu dans ce programme. Les cuivres de l'orchestre étaient superbes dans Le Chasseur Maudit de Franck. Dans le concerto pour violoncelle du chef d'orchestre Laurent Petitgirard, je me suis délecté du duo du début du deuxième mouvement entre le concertiste Gary Hoffmann et la for-mi-da-ble violoncelliste solo de l'orchestre. J'ai donc été plus que ravi que ce deuxième mouvement ait été rejoué en bis ! La Symphonie nº1 de Chostakovitch m'a procuré beaucoup de plaisir. Il serait impossible d'énumérer tous les solos que j'ai aimé, tous les instruments ayant l'occasion de se mettre en valeur au cours de la symphonie. Je les ai tous adorés !
⁂
Salle Pleyel — 2013-02-07
Roland Daugareil, violon solo
Orchestre de Paris
Juraj Valčuha, direction
Danses de Galánta (Galánti táncok), Zoltán Kodály
Yuja Wang, piano
Concerto pour piano nº2 en sol mineur, op. 16 (Prokofiev)
Toccata en ré mineur (Prokofiev)
Variations sur un thème de Carmen (Vladimir Horowitz)
Die Seejungfrau, poème musical (Zemlinsky)
J'ai aimé découvrir les Danses de Galánta de Kodály (où se distinguait le clarinettiste Philippe Berrod !). Je suis resté indifférent (pour ne pas dire somnolent) au concerto pour piano nº2 de Prokofiev interprété par Yuja Wang, qui a fait preuve d'une aussi sidérante que vaine virtuosité dans un bis adapté de Carmen dans lequel Bizet devenait méconnaissable. La Petite Sirène de Zemlinsky (dont j'ai récemment adoré Der Zwerg à l'Opéra Garnier) alterne des moments délicatement aquatiques à la harpe et des tutti cuivrés assourdissants.
À la lecture des autres billets sur la blogosphère, on pourra constater que je partage l'avis des filles : Grignotages, Klari, Andante con anima, Palpatine.
⁂
Théâtre des Champs-Élysées — 2013-02-08
Joyce DiDonato, Ariodante
Il Complesso Barocco
Dmitry Sinkovsky, premier violon et direction
Air d'Orontea Intorno all'idol mio extrait d'Orontea (Antonio Cesti)
Sinfonia (Presto, Grave, Presto) extrait de Tolomeo ed Alessandro (Domenico Scarlatti)
Air d'Ottavia Disprezzata regina extrait de L'incoronazione di Poppea (Claudio Monteverdi)
Air d'Irene Sposa, son disprezzata extrait de Merope (Geminiano Giacomelli)
Concerto pour violon et cordes RV 242 per Pisendel
(Antonio Vivaldi)
Air de Berenice Da torbida procella extrait de Berenice (Giuseppe Maria Orlandini)
Air de Cleopatra Morte col fiero aspetto extrait de Antonio e Cleopatra (Johann Adolf Hasse)
Air de Cleopatra Piangerò la sorte mia extrait de Giulio Cesare in Egitto (Händel)
Passacaglia extraite de Radamisto HWV 12a (Händel)
Air d'Ifigenia Madre diletta, abbraciami extrait de Ifigenia in Aulide (Giovanni Porta)
Musique de ballet extraite d'Armide (Christoph Gluck)
Air de Rossane Brilla nell'alma extrait de Alessandro (Händel)
Air de Fredegunda Lasciami piangere extrait de Galsuinde (Kaiser)
Air de Berenice Col versar, barbaro, il sangue extrait de Berenice (Giuseppe Maria Orlandini)
Joyce ! Ah, Joyce ! Quel plaisir de l'entendre, dans un répertoire
baroque qui alterne des airs lyriques
et d'autres qui ne sont pas
très éloignés du récitatif. L'orchestre qui l'accompagne, Il Complesso
Barocco, semble métamorphosé par la direction du premier violon Dmitry
Sinkovsky.
Ailleurs : Palpatine.
⁂
Cité de la musique — 2013-02-09
Les Dissonances
Symphonie de chambre nº1 op. 9 (Schönberg)
David Grimal, Hans-Peter Hofmann, violon
Hélène Clément, Natasha Tchitch, alto
Christophe Morin, Maja Bogdanović, violoncelle
Sextuor à cordes nº1 en si bémol majeur, op. 18 (Brahms)
Symphonie nº4 op. 98 en mi mineur (Brahms)
Dix jours après ce concert, je n'ai aucun souvenir de la Symphonie de chambre nº1 de Schönberg. J'aurais sans doute trouvé très bien le sextuor nº1 de Brahms si je n'avais pas déjà entendu quelques musiciens berlinois l'interpréter en début de saison. Je ne sais pas par quel mystère les berlinois magnifiaient cette partition qui cette fois-ci n'a pas produit sur moi le même insoutenable émerveillement. Après l'entr'acte, j'ai en revanche adoré la quatrième symphonie de Brahms !
⁂
Théâtre des Champs-Élysées — 2013-02-10
Ensemble Intercontemporain
Matthias Pintscher, direction musicale
Huit miniatures instrumentales (Stravinski)
Concertino pour douze instruments (Stravinski)
Margriet van Reisen, mezzo-soprano
Le Marteau sans maître, pour voix d'alto et six instruments (Boulez)
Octandre, pour huit instruments (Varèse)
Déserts, pour orchestre et bande magnétique (Varèse)
Les Stravinski m'ont plu. Je me suis ennuyé pendant le Boulez. Je suis content d'être resté pour les Varèse. Octandre n'est certainement pas l'œuvre la plus dérangeante de Varèse. Son côté hors-système est plus flagrant dans Déserts pour orchestre et bande magnétique. Je ne vais pas discuter l'interprétation de l'orchestre, mais celle de la bande magnétique : on a beau dire que c'est un son fixé sur un support, le rendu peut être très différent d'une fois à l'autre. En 2009, les basses fréquences m'avaient donné la nausée. Cette fois-ci, je n'ai pas eu envie de vomir. Zut, je pensais que ce concert serait un peu plus déstabilisant !
⁂
Théâtre des Champs-Élysées — 2013-02-11
Nikolaï Lugansky, piano
Dans les brumes, Janáček
Quatre impromptus op. 142 (Schubert)
Sonate nº1 en ré mineur op. 28 (Rachmaninov)
Ma raison d'aller à ce concert était la présence de Dans les brumes de Janáček. J'espérais me régaler autant que lorsque j'avais entendu pour la première fois cette œuvre interprétée par Alain Planès en janvier 2012 ; le plaisir d'écouter à nouveau ce pianiste dans cette œuvre avait d'ailleurs été renouvelé à la Cité de la musique à la mi-janvier 2013. Lugansky a certainement fait ce qu'il voulait faire. Il y avait sans doute plus de fausses notes dans les interprétations de Planès, mais les tempi excessivement lents et les phrasés hachés de Lugansky m'ont donné l'impression d'une déconstruction de l'œuvre, qui perdait à mon sens toute poésie. Pour moi, cela a été vingt minutes de souffrance. On pourra dire que Lugansky a livré une interprétation toute personnelle de l'œuvre de Janáček... Si mon attention était maximale pendant ce Janáček, j'ai sombré dans les impromptus de Schubert, qui avaient pourtant l'air d'être très bien joués. Ne me sentant pas prêt à affronter la première sonate de Rachmaninov et les nombreux bis subséquents, je suis exceptionnellement parti à l'entr'acte...
Ailleurs : Frederick Casadesus.
⁂
Salle Pleyel — 2013-02-12
Freiburger Barockorchester
Sunhae Im, Bellezza
Julia Lezhneva, Piacere
Christophe Dumaux, Disinganno
Jeremy Ovenden, Tempo
René Jacobs, direction
Il Trionfo del Tempo e del Disinganno (version italienne de 1707), Händel
Il Trionfo del Tempo e del Disinganno est censé être un oratorio, mais il s'agit pour ainsi dire d'un opéra dans lequel la Beauté personnifiée finit par se désintéresser du Plaisir pour se tourner vers le Temps et la Désillusion. Dans les airs da capo du Plaisir, je me délecte des ornementations dans le chant de l'adorable Julia Lezhneva. Les solos du premier violon sont fabuleux. La façon dont certaines phrases musicales allant de l'aigu au grave passent sans discontinuité apparente des violons aux violoncelles est sidérante. Les couleurs sonores apportées à l'orchestre par les flûtes à bec sont ravissantes. Que j'aime que la musique baroque soit jouée avec un tel engagement ! Bref, quel merveilleux orchestre baroque que ce Freiburger Barockorchester que je n'avais pas entendu depuis 2005 !
⁂
Conservatoire de Paris, Salle d'art lyrique — 2013-02-13
Orchestre du Conservatoire de Paris
Tito Ceccherini, direction
Alexandre Cravero, assistante à la direction
Marie Soubestre, La prostituée (soprano)
Alban Dugourt, Le soldat (ténor)
Catherine Trottmann, La femme de chambre (mezzo-soprano)
Enguerand de Hys, Le jeune homme (ténor)
Laura Holm, La jeune femme (soprano)
Aurélien Gasse, Le mari (baryton)
Charlotte Schumann, La grisette (mezzo-soprano)
Jean-Jacques L'Anthoen, Le poète (ténor)
Marie-Laure Garnier, La cantatrice (soprano)
Roman Dayez, Le comte (baryton)
Yoan Hereau, Lutxi Nesprias, Fanny Prandi, Thomas Tacquet-Fabre, chefs de chant
Marguerite Borie, mise en scène
Darren Ross, chorégraphie et assistant à la mise en scène
Laurent Castaingt, scénographie et conception lumière
Myriam Dogbé, assistante à la scénographie
Pieter Coene, costumes
Sonia Bosc, assistante aux costumes
Héloïse Grandu, habilleuse
Isabelle Lemeilleur, maquilleuse
Naty Meneau, maquilleuse/coiffeuse
Jean-Pierre Le Gallic, Patrick Buisson, régie générale
Mathilde Lemoine, Magid Mahdi, régie plateau
Bruno Bescheron, Guillaume Fesneau, régie lumière
Stéphane Darmon, régie de scène
Nathalie Berthier, Yann Divet, régie orchestre
Reigen, opéra en dix scènes sur un livret de Luc Bondy d'après Der Reigen, pièce de théâtre d'Arthur Schnitzler, Philippe Boesmans (version de chambre de Fabrizio Cassol).
Mes impressions sur cette représentation d'opéra adaptée de la pièce de Schnitzler sont sur le Biblioblog.
⁂
Opéra Garnier — 2013-02-15
Maki Ishii, musique (1985)
Jiří Kylián, chorégraphie (1988)
Michael Simon, scénographie et lumières
Ferial Simon, Joke Visser, costumes
Patrick Delcroix, Elke Schepers, assistants du chorégraphe
Kees Tjebbes, assistant technique et réalisation lumières
Michael De Roo, direction musicale
Alice Renavand, Kaguyahime
Hervé Moreau, Mikado
Muriel Zusperreguy, Amandine Albisson, Caroline Robert, Laurène Levy, Charlotte Ranson, Villageoises
Alessio Carbone, Vincent Chaillet, Aurélien Houette, Sébastien Bertaud, Adrien Couvez, Villageois
Caroline Bance, Eléonore Guérineau, Christelle Granier, Séverine Westermann, Juliette Hilaire, Allister Madin, Marc Moreau, Daniel Stokes, Mathieu Botto, Yvon Demol, Les Citadins
Julien Meyzindi, Alexis Renaud, Les compagnons du Mikado
Ballet de l'Opéra
Kodō, Gagaku et ensemble de percussions invité
Kaguyahime
Malgré une musique et une scénographie superbe, ce ballet qui m'avait tellement plu en 2010 m'a laissé sur ma faim. Certes, la scène de la guerre au début de la deuxième partie est très impressionnante, j'ai bien sûr aimé retrouver Alice Renavand dans le rôle-titre et j'ai pris beaucoup de plaisir à voir danser Amandine Albisson et Aurélien Houette dans des rôles de villageois. Mais, ce ballet me semble insatisfaisant du point de vue narratif. Si on n'a pas (re)lu le synopsis détaillé, le ballet est tout simplement incompréhensible (je n'ai d'ailleurs toujours pas saisi pourquoi il y a deux scènes de castagne, une avant et une après l'entr'acte). Il n'aurait pas été superflu d'ajouter un peu de pantomime pour donner un sens à ce qui se passait sur scène. Bien malin celui qui comprendrait ce que sont les épreuves impossibles imposées par Kaguyahime à ses cinq prétendants...
⁂
Cité de la musique — 2013-02-16
Ensemble Intercontemporain
Alejo Pérez, direction musicale
Modulations (Gérard Grisey)
Hae-Sun Kang, violon
Vita Nova (Sérénades) (Brice Pauset)
Dérive 1 (Pierre Boulez)
Christina Daletska, alto
Gesänge-Gedanken mit Friedrich Nietzsche (Philippe Manoury)
Il y a quelques mois, lors d'un autre concert de l'Intercontemporain, j'avais trouvé merveilleuse la composition #9 de Mauro Lanza. En sortant, Bladsurb m'avait expliqué que c'était de la musique spectrale. En entendant Modulations de Gérard Grisey lors de ce concert, je crois pouvoir dire que j'aime beaucoup cette forme de musique contemporaine. Dans un envoûtant sur-place apparent, le temps semble comme s'arrêter et permet à l'auditeur de s'immerger dans ce son, qui néanmoins se développe et présente de multiples facettes. La retombée sur terre avec la composition de Brice Pauset fut brutale... Après l'entr'acte, j'ai à peine eu le temps de renter dans Dérive 1 de Boulez que l'œuvre était déjà terminée. Pour conclure ce concert, il y avait la première audition en France de Gesänge-Gedanken mit Friedrich Nietzsche de Philippe Manoury au cours de laquelle j'ai été captivé par le chant de Christina Daletska, qui semble n'avoir que des qualités.
Ailleurs : Bladsurb.
⁂
Salle Pleyel — 2013-02-21
Roland Daugareil, violon solo
Orchestre de Paris
Ingo Metzmacher, direction
Emanuel Ax, piano
Concerto pour piano nº17 en sol majeur, KV 453 (Mozart)
Impromptu op. 142 nº2 (Schubert)
Chen Reiss, soprano
Renata Pokupić, mezzo-soprano
Werner Güra, ténor
Johannes Weisser, basse
Chœur de l'Orchestre de Paris
Lionel Sow, chef de chœur
Messe nº3 en fa mineur (Bruckner)
J'avais déjà eu l'occasion d'être émerveillé par le jeu du pianiste Emanuel Ax dans un programme Mozart/Haydn avec l'Orchestre de chambre de Paris. Je me suis régalé en écoutant le concerto pour piano nº17. Je pensais qu'Ingo Metzmacher était un chef spécialisé dans la musique contemporaine (cf. le programme d'un autre concert avec l'Orchestre de Paris en juin 2012). Apercevant son profil gauche depuis ma place, je constate qu'il est manifestement heureux de diriger ce concerto de Mozart. (Le bis du pianiste était superbe, je suis cependant un peu déçu qu'il ait joué le même que lors du concert avec l'Orchestre de chambre de Paris...)
J'étais en théorie placé au fond de l'orchestre, mais je m'étais replacé au rang BB pour être près du pianiste. J'y suis resté pour écouter la Messe nº3 de Bruckner. J'ai donc pour ainsi dire eu le nez dans la partition des premiers violons (les seconds étant à droite du chef). L'effort demandé est impressionnant : des pages et des pages de gammes, avec pratiquement que des doubles-croches ! À force d'entendre continuellement TitatatatatatataTitatatatatataTi... j'en viens à me dire que John Adams et Philip Glass n'ont pas inventé grand'chose. Bien sûr, à l'écoute des autres parties, cet aspect répétitif de la musique disparaît et cette composition comporte quelques merveilles comme le passage très impressionnant du Credo évoquant la Résurrection.
Ailleurs : Paris — Broadway, Palpatine.
⁂
Salle Pleyel — 2013-02-22
Colin Currie, percussions
Pierre-Laurent Aimard, piano
Orchestre philharmonique de Radio France
Jukka-Pekka Saraste, direction
Two Controversies and a Conversation : Concerto pour piano, percussions et orchestre de chambre (Elliot Carter)
Mouvements pour piano et orchestre (Stravinski)
Suite de danses (Bartók)
Sinfonietta (Janáček)
Ce concert démontre que s'agissant de musique, il ne faut pas avoir peur du vingtième siècle ! Une de mes raisons de venir à ce concert était la présence du pianiste Pierre-Laurent Aimard que je n'avais encore jamais entendu en concert. Dix minutes d'Elliot Carter et 8 minutes de Stravinski, c'est malheureusement un peu trop court. En règle générale je pense que la musique gagne à être écoutée et vue dans une salle de concert. La pièce d'Elliot Carter ouvrant le programme fait à mon avis exception. Je suis trop distrait par ce que je vois pour rester attentif à la musique. Les très nombreux et sportifs mouvements du percussionniste entre ses différents instruments (marimba, gongs, etc.) détournent mon attention. L'aspect visuellement haché de phrases musicales réparties entre différents groupes d'instruments m'empêche aussi de véritablement écouter les Mouvements pour piano et orchestre de Stravinski, que j'apprécie aussi davantage à la réécoute...
Après l'entr'acte, l'Orchestre Philharmonique de Radio France interprète la Suite de danses de Bartók. Je les avais déjà entendues à Budapest par le Nemzeti Filharmonikusok (les Philharmoniqueux nationaux) pendant le Bartók-Maraton. Le contraste avec les autres merveilles jouées pendant le Marathon ne m'avaient fait trouver ce concert que très bon. Ayant entendu cette fois-ci cette suite de danses dans un autre contexte. j'ai été tout à fait convaincu par la vigoureuse interprétation du Philhar' dirigé le chef Jukka-Pekka Saraste que j'avais déjà apprécié dans un programme Britten/Chostakovitch. J'apprécie évidemment les glissandos des trombones dans l'Allegro molto, mais je savoure aussi tout particulièrement l'Allegro vivace, une danse paysanne très arabisante !
J'ai été tout autant convaincu par le Sinfonietta de Janáček. Je ne sais pas au juste ce que cette œuvre raconte, mais il est évident à l'écoute que cette œuvre est narrative !
Ce concert est disponible à la réécoute sur Cité de la musique live.
Ailleurs : Paris — Broadway.
⁂
Salle Cortot — 2013-02-23
Marc Duprez, violon
Hélène Lequeux-Duchesne, violon
Joël Soultanian, alto
Sarah Veilhan, violoncelle
Bernard Chapron, flûte
Canon à deux, Ricercar à trois, Canon à quatre, Canon perpetuus per giusti intervalli extraits de L'Offrande musicale (BWV 1079), Bach
Quatuor à cordes nº1 en ut majeur op. 49 (Chostakovitch)
Six Épigraphes antiques (Debussy), transcription pour flûte et trio à cordes de Bernard Chapron
Quatuor pour flûte et cordes en ré mineur, KV 285 (Mozart)
Charmant concert de musique de chambre au programme varié ! Parmi les extraits de L'Offrande musicale qui ont été joués, j'ai adoré le Ricercar à trois, grâce au thème de L'Offrande musicale dont les apparitions et réapparitions m'ont semblé limpides. J'ai encore une fois été charmé par le jeu de la violoncelliste Sarah Veilhan, qui a livré de beaux pizz. fins et délicats dans le Quatuor nº1 de Chostakovitch et qui a fort joliment alterné archets et pizz. dans la cinquième des Épigraphes antiques de Debussy, la plus convaincante à mon goût. La plus belle découverte de ce concert a été pour moi celle du remarquable altiste Joël Soultanian dont le solo au début du deuxième mouvement du Quatuor nº1 de Chostakovitch m'a beaucoup ému.
⁂
Opéra Comique — 2013-02-23
Orchestre philharmonique de Radio France
Hélène Collerette, violon solo et direction
Magali Mosnier, flûte
Concerto pour flûte nº1 en sol majeur, KV 313 (Mozart)
Sérénade nº6 en ré majeur, Serenata notturna, KV 239 (Mozart)
Xavier de Maistre, harpe
Concerto pour flûte et harpe, KV 299 (Mozart)
Merci à Hugo d'avoir attiré mon attention sur ce réjouissant programme Mozart dirigé par Hélène Collerette ! Si les deux sous-ensembles du Philhar' entendus lors de ce concert et celui de la veille sont disjoints ou presque, ils m'ont tous les deux comblé de plaisir ; je note d'aller écouter plus souvent cet orchestre l'année prochaine...
Si j'ai aimé le concerto pour flûte et le concerto pour flûte et harpe, le point culminant de ce concert aura été pour moi la Serenata notturna. Les musiciens semblent prendre autant de plaisir que les spectateurs, très attentifs. Le satisfaction est d'autant plus grande dans le dernier mouvement où des mini-cadences semblent avoir été insérées pour chacun des solistes de cette œuvre (deux violons, un alto, une contrebasse et les timbales). D'après l'enregistrement de cette œuvre dont je dispose, ces solos ne semblent pas prévus par la partition, mais quand bien même certains solos m'ont paru d'un style assez peu mozartien (j'ai même pensé à Boulez !), c'était du meilleur effet !
⁂
Théâtre des Champs-Élysées — 2013-02-26
Orchestre de chambre de Paris
Marina Chamot-Leguay, direction et flûte
Suite nº2 en si mineur, BWV 1067.
John Nelson, direction
Italo Marchini, assistant
Le jeune chœur de Paris
Henri Chalet, chef de chœur
Credo, pour chœur et orchestre (James MacMillan)
Omo Bello, soprano
Marianne Crebassa, mezzo-soprano
Claudia Huckle, alto
Pascal Charbonneau, ténor
Matthew Brook, basse
Magnificat, BWV 243, Johann Sebastian Bach.
La suite pour orchestre “Sonnerie de téléphone” de Bach était malheureusement ratée. Malgré l'effectif orchestral réduit utilisé pour cette œuvre, le son de la flûte (en bois) était inaudible, presque complètement couvert par celui des autres instruments. Ma tristesse est aussi grande que l'estime que je porte à la flûtiste.
Le Credo de MacMillan ne m'a pas autant enchanté que son concerto pour hautbois, interprété en janvier par cet orchestre et François Leleux. J'ai un peu l'impression d'avoir entendu une œuvre pour chœur et une œuvre pour orchestre, mais pas vraiment une œuvre pour chœur et orchestre, comme si les parties chorales et des parties orchestrales s'ignoraient l'une l'autre. L'écriture vocale est archaïsante (oh, des intervalles entre voix du chœur qui sonnent juste), ce qui ne messied point s'agissant d'une œuvre religieuse. Les parties orchestrales sont un peu plus tourmentées, mais j'apprécie tout particulièrement les accords doucement dissonants entre les différents pupitres de cordes (on diraît un tampura mal réglé !). Ayant eu du mal à discerner le texte prononcé par le chœur, je n'ai même pas reconnu le moment où celui-ci dit Et resurrexit..., un passage sans doute totalement dénué d'effet, contrairement à Bruckner dans sa Messe nº3 mentionnée plus haut.
L'interprétation de ce Credo a été perturbée par la présence dans la salle d'un bébé qui a commenté les deux premiers mouvements avec les quelques syllabes à sa disposition. Le troisième mouvement a même été interrompu après quelques secondes. Le chef s'est tourné silencieusement vers le côté, quelques spectateurs ont inventivé contre les parents dudit bébé, les exhortant à sortir (en vain...).
Après l'entr'acte, l'orchestre, le chœur et cinq chanteurs solistes sont venus interpréter le Magnificat de Bach, que je n'avais pas entendu en concert depuis 2007. Cette interprétation réjouissante de la musique de Bach m'a vraiment convaincu. Outre les chanteurs presque tous excellents, j'ai aimé les solos de hautbois, le duo de flûtes, l'organiste, le chœur, le phrasé intéressant choisi par les cordes dans le Deposuit potentes, etc.
⁂
Cité de la musique — 2013-02-27
Philippe Aïche, violon solo
Orchestre de Paris
Paavo Järvi, direction
Symphonie nº86 (Haydn)
Piotr Anderszewski, piano
Symphonie nº4 (Szymanowski)
Sérénade nº1 (Brahms)
Il faudrait que l'Orchestre de Paris joue plus souvent à la Cité de la Musique. C'était une orgie sonore ! J'ai adoré les trois œuvres. La Symphonie nº4 de Szymanowsky m'a paru cette fois-ci bien plus équilibrée que lorsqu'elle avait été interprétée en décembre par le LSO. La Sérénade nº1 de Brahms est une très belle friandise qui commence espièglement dans une atmosphère très paysanne. Pendant tout le concert, le bassoniste Giorgio Mandolesi a fait honneur à sa réputation !
⁂
Église Saint-Eustache — 2013-02-28
Orchestre Colonne
Marc Korovitch, direction
Fabienne Conrad, soprano
Nicolas Lépolard, baryton
Chœur de l'orchestre Colonne
Francis Bardot, chef de chœur
Am Saum ses Gedankens (Gualtiero Dazzi)
Ein deutsches Requiem (Brahms)
Je ne suis pas très friand a priori des concerts dans les églises. Le placement est souvent libre ; il faut donc penser à arriver un peu en avance. Les chaises sont inconfortables et trop rapprochées les unes des autres. Il fait froid (ou trop chaud si on est assis sur le chauffage...). Les musiciens ne sont pas sur une scène surélevée, donc on ne les voit pas et en outre, le son qu'ils produisent est transformé par la durée de réverbération invraisemblablement longue de ces édifices (cf. le cas de la basilique Sainte-Clotilde).
Le concert a commencé par Am Saum des Gedankens de Gualtiero
Dazzi. Contrairement au Credo de MacMillan entendu l'avant-veille de ce concert, je ne ressens
pas ici de grand écart entre les parties vocales et les parties
orchestrales de cette œuvre contemporaine. J'apprécie l'atmosphère créée
par l'orchestre par différents procédés, comme de longues notes tenues ;
cela m'a parfois fait un peu penser au style spectral (voir plus haut à propos de Modulations de
Grisey). Dans cette œuvre pour orchestre, chœur et voix féminine, mes plus
fortes émotions sont venues des interventions de la soprano Fabienne
Conrad. Certes, il m'a semblé qu'il y avait beaucoup de vibrato dans sa
voix au tout début, mais que ses phrasés étaient beaux ! J'ai ainsi
beaucoup aimé sa façon de chanter une fin de phrase sur le texte den
Stern in die Nacht
. Le clou du spectacle résidait dans l'ondulation
presque dhrupadisante sur les deux syllabes d'un unique
mot vers la fin de l'œuvre, était-ce sur le mot immer
dans le poème
Die Pappel ? Merveilleux !
J'appréhendais de réétendre Ein deutsches Requiem de Brahms. Je l'ai entendu deux fois : en 2006 par le COGE et en 2009 par le Philharmonique de Radio France. À chaque fois, je m'étais ennuyé au point que je m'étais peut-être même assoupi. Je garde aussi en mémoire le souvenir de passages qui m'avaient semblé un peu pompeux.
L'Orchestre et le Chœur Colonne sont dirigés par Marc Korovitch, que j'ai déjà pu apprécier comme chef de l'Orchestre des concerts gais. Amenés comme ils l'ont été, sans affectation, les passages qui joués par d'autres m'avaient parus pompeux m'ont semblé venir tout naturellement dans le flux musical. L'acoustique de l'église valorise tout particulièrement le chœur qui explore une large gamme de nuances. Le premier mouvement Selig... m'a bouleversé. J'ai rarement autant pleuré pendant un concert ! Après un deuxième mouvement tout aussi riche en émotions, j'ai pu retrouver une certaine contenance et écouter la suite de l'œuvre d'un air ravi que je n'ai même pas pensé à quitter quand je me suis pris un gros coup de coude involontaire de la part de la spectatrice située à ma gauche...
2013-03-01 10:28+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Planning
Après un mois de février très chargé en spectacles, mon mois de mars sera un peu plus raisonnable.
2013-02-09 15:47+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Budapest
Magyar Állami Operaház, Budapest — 2013-02-01
Csaba Szegedi, Don Giovanni
Klára Kolonits, Donna Anna
Dovlet Nurgeldiyev, Don Ottavio
Géza Gábor, Il Commendatore
Beatrix Fodor, Donna Elvira
Gábor Bretz, Leporello
Marcell Bakonyi, Masetto
Júlia Hajnóczy, Zerlina
György Vashegyi, direction musicale
Gianfranco De Bosio, mise en scène
Andrea P. Merlo, chorégraphie
Nana Cecchi, décors et costumes
Don Giovanni, Mozart.
À peine arrivé à mon appartement à Budapest le vendredi 1er février, j'ai fait le plein de provisions dans un supermarché près de la place de l'Oktogon et me suis dirigé vers l'Opéra national hongrois qui de l'extérieur a un petit air d'Opéra Garnier :
La salle est extrêmement belle. On y trouve un magnifique escalier :
Le plafond n'est pas mal non plus :
Cependant, alors qu'à Paris la salle de spectacle proprement dite n'occupe qu'une petite partie du volume du bâtiment, le bâtiment du Magyar Állami Operaház n'est qu'un fin masque enveloppant la salle. N'espérez pas y boire ou manger quelque chose à l'entr'acte, les bars sont assez inaccessibles (c'est pire qu'au Châtelet, c'est dire !). Je n'ai donc pas essayé de franchir la porte donnant sur le grand foyer que l'on aperçoit au fond de la photographie ci-dessous. Je me suis réfugié aux étages supérieurs dont les couloirs étroits étaient moins encombrés.
Pour environ 15€, j'ai eu une bonne place au deuxième rang d'une première loge côté gauche (Földszint páholy bal).
Même quand les trois dames du premier rang ont pris place, je voyais relativement bien. À savoir : les Hongrois ne font pas semblant de s'habiller quand ils vont à l'Opéra !
Ma raison principale pour aller à l'Opéra ce soir-là était de visiter ce bâtiment, ce qui m'a procuré une grande satisfaction. Accessoirement, j'ai aussi assisté à une représentation de l'opéra Don Giovanni.
La production est très traditionnelle. Le décor est unique, mais comme ce mur placé au fond de la scène doit participer à l'acoustique de la représentation, je ne m'en plaindrai pas trop. Certains déplacement d'éléments de décor se font alors que les machinistes sont visibles. Les costumes sont d'une époque indéterminée dans laquelle semblaient évoluer les personnages de tous les opéras italiens dans les vieux films d'archives.
Le début de l'opéra m'enthousiasme puisque j'ai l'impression d'y distinguer un semblant de direction d'acteurs (notamment dans les scènes avec Donna Anna), mais j'aurai un peu plus de mal à apprécier la suite, d'autant plus que mes souvenirs du livret de l'opéra étaient assez réduits et que les surtitres en hongrois uniquement et le texte chanté en italien ne m'ont pas permis de saisir tous les détails.
Si l'interprétation musicale de l'orchestre ne m'a pas paru inoubliable, j'ai beaucoup aimé les voix des chanteurs et la proximité que la configuration de la salle permet avec le public (au moins pour la partie du public à laquelle j'appartenais). Deux passerelles enjambent la fosse d'orchestre et débouchent sur les allées du parterre. Les entrées et sorties des chanteurs peuvent ainsi se faire par ces passages et il n'était pas rare que les airs soient chantés depuis ces passerelles. Qu'il était agréable d'entendre des chanteurs interpréter leurs airs dans une salle dont l'acoustique les dispense de forcer leur voix.
J'ai aimé tous les interprètes des rôles masculins, et tout particulièrement Csaba Szegedi (Don Giovanni) et Gábor Bretz (Leporello). Chez les dames, ma préférence va à Klára Kolonits (Donna Anna) et à l'espiègle Júlia Hajnóczy (Zerlina).
J'ai mangé et bu jusqu'à la dernière goutte une excellente soupe au Zsákbamacskához à l'issue de la représentation :
Cliquer ici pour voir les autres photographies que j'ai faites à l'Opéra ce jour-là.
Voilà, c'était le dernier de mes billets sur le week-end que j'ai passé à Budapest. J'ai déjà mon billet d'avion pour le prochain !
2013-02-07 10:23+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Budapest
Après avoir rendu compte des concerts du Bartók-Maraton donnés dans l'amphithéâtre du Művészetek Palotája, je vais maintenant me concentrer sur les six concerts donnés dans la grande salle, en procédant cette fois-ci par ordre chronologique, car sinon je ne m'y retrouverais plus...
Bartók Béla Nemzeti Hangversenyterem, Művészetek Palotája, Budapest — 2013-02-03 à 10:30
Csaba Péter, vezényel
Banda Ádám, hegedű
MÁV Szimfonikus Zenekar
I. hegedűverseny
Concerto
Le programme de ce concert m'intriguait. Comme I. hegedűverseny
signifie Concerto pour violon nº1
, je me disais quelques jours avant
de venir qu'il y avait peut-être une coquille dans le programme parce
qu'adjoindre à celà le mot Concerto
serait redondant. Je n'osais
croire comme l'expliquera Klari
que ce mot désignait ce qui est connu par chez nous sous le nom de
Concerto pour orchestre
, et ce d'autant plus que les deux œuvres ne
tiennent pas dans le temps imparti à ce concert, le suivant étant programmé une
heure plus tard. Le concert s'est terminé avec un quart d'heure de retard
:-)
J'ai aimé retrouver le violoniste Ádám Banda que j'avais adoré il y a quelques semaines à la Cité de la musique dans la Sonate pour violon seul de Bartók. Le début crépusculaire de concerto m'a semblé idéal pour rentrer dans l'univers du compositeur. Je me suis ensuite laissé porter par la musique, tout comme dans le concerto pour orchestre. Comme tous les orchestres qui vont se succéder sur la scène, l'orchestre symphonique du MÁV est impressionnant ! Si tous les musiciens sont très engagés, l'attitude souriante du violoncelliste solo me plaît beaucoup.
⁂
Bartók Béla Nemzeti Hangversenyterem, Művészetek Palotája, Budapest — 2013-02-03 à 12:30
Kovács János, vezényel
Budapesti Vonósok (Botvay Károly, művészeti vezető ; Pilz János, koncertmester)
Zene húros hangszerekre, ütőkre és cselesztára
Divertimento
L'orchestre à cordes de Budapest présente une particularité vestimentaire : si les hommes ont la tenue habituelle des musiciens d'orchestre, les femmes portent des robes colorées. Cet ensemble joue une des œuvres du Bartók-Maraton que j'attendais avec le plus d'impatience : la musique pour cordes, percussion et célesta. J'avais déjà été captivé quand je l'avais entendue pour la première fois jouée par le LSO en mai 2012. Cela n'a pas raté, j'ai encore été émerveillé par le premier mouvement Andante tranquillo, et par tous le reste, avec une pensée particulière pour le son des timbales. Il m'a semblé voir seize violonistes, huit à gauche du chef et huit à sa droite, et chaque groupe de huit était subdivisé en deux groupes de quatre, lesquels se subdivisaient exceptionnellement en des mini-groupes de deux musiciens, suivant que les musiciens soient du côté gauche ou du côté droit de leur pupitre. À la lecture de l'instrumentation décrite sur Wikipédia, il semble en réalité qu'il s'agisse d'une œuvre pour double orchestre (comme l'est la Passion selon Saint-Mathieu de Bach). Quelle énergie déployée par cet ensemble dont l'effectif n'est en rien pléthorique (seulement deux contrebasses) ! Le Bartók-Maraton se serait arrêté là, j'aurais déjà été heureux d'avoir fait le déplacement. Mais, sans parler des autres concerts, celui-ci m'a aussi donné à entendre le Divertimento...
⁂
Bartók Béla Nemzeti Hangversenyterem, Művészetek Palotája, Budapest — 2013-02-03 à 15:00
Muzsikás együttes
Jandó Jenő, zongora
Petrás Mária, ének
Farkas Zoltán, Tóth Ildikó, tánc
Kaél Csaba, rendező
Bartók és a népzene
Ce concert mettait en regard la musique folklorique et des œuvres pour piano de Bartók qui en sont inspirées. C'est peu dire que j'ai adoré le pianiste Jenő Jandó qui a notamment joué les Danses populaires roumaines et Allegro barbaro. Je n'ai pas retenu le détail du programme qui n'a été affiché qu'assez furtivement sur des écrans situés sur la scène et sur lesquels étaient projetés des photographies et des films anciens montrant des danses populaires. Un couple de danseur a interprété quelques danses pendant que l'ensemble de musique folklorique Muzsikás jouait. J'ai apprécié la façon dont le pianiste et cet ensemble se sont passé le relais au cours du concert, la musique folklorique s'enchaînant sans pause aux œuvres pour piano de Bartók et réciproquement. La musique folklorique était tout à fait plaisante pour mes oreilles et elle m'a fait découvrir quelques instruments originaux. Il y a ainsi eu une longue flûte tenue verticalement par un musicien multi-instrumentiste (puisque qu'il a joué aussi de l'alto). A également attiré mon attention une contrebasse à trois cordes avec laquelle l'interprète faisait des pizz. à pleines mains, comme s'il allait arracher les cordes ! Tout autant étonnant fut la sorte de violoncelle en bois peu noble accroché sur le ventre et dont les cordes n'étaient pas frottées par un archet mais frappées violemment par une baguette. Pendant quelques minutes, la magnifique voix a capella de la chanteuse Mária Petrás dans la Modvai Ballada s'est fait entendre.
⁂
Bartók Béla Nemzeti Hangversenyterem, Művészetek Palotája, Budapest — 2013-02-03 à 17:00
Nemzeti Filharmonikusok
Kocsis Zoltán, vezényel
Kossuth-szimfónia
Táncszvit
Si j'avais écouté ce concert en dehors du contexte du Bartók-Maraton, j'aurais sans doute été plus qu'enchanté. Entre toutes les merveilles programmées lors de cette journée, je dois avouer avoir presque été déçu de n'avoir trouvé que très bon ce concert de l'Orchestre philharmonique national. Les deux œuvres (la Symphonie Kossuth et la Suite de danses) me font penser à un autre compositeur, Stravinski (celui du Sacre du printemps et de Petrouchka). Dans la voluptueuse musique de la Symphonie Kossuth, j'ai aimé l'incongruité d'une sorte de fugue qui est initiée par un ensemble de bassons avant de se propager dans l'orchestre. Dans la Suite de danses, je me suis notamment délecté des glissandi des trombones, du son du hautbois et du tuba (qui a dû mettre et enlever sa maxi-sourdine un certain nombre de fois...).
⁂
Bartók Béla Nemzeti Hangversenyterem, Művészetek Palotája, Budapest — 2013-02-03 à 19:00
Pannon Filharmonikusok
Várjon Dénes, zongora
Bogányi Tibor, vezényel
III. zongoraverseny
A csodálatos mandarin - szvit
Quel bel orchestre que cet Orchestre Philharmonique Pannon ! J'envie les habitants de la ville de Pécs où cet orchestre est installé. S'agissant du programme de leur concert, je dois toutefois admettre avoir quelques difficultés à apprécier le concerto pour piano nº3. Je n'avais pas tellement aimé cette œuvre quand je l'avais entendue par le Philharmonia Orchestra. Ayant acquis un enregistrement des concertos pour piano par le Budapest Festival Orchestra dirigé par Iván Fischer avec András Schiff comme soliste, j'ai appris à l'aimer. En vrai avec cet orchestre et le pianiste Dénes Várjon (déjà entendu quelques heures plus tôt dans des œuvres pour piano seul), si j'ai encore une fois adoré le deuxième mouvement, dans l'ensemble je n'ai pas été conquis, mais l'orchestre m'a fait une impression plus qu'excellente. Il est à noter qu'alors que l'Orchestre philharmonique de Vienne est entre autres réputé pour être très masculin, le Pannon est au contraire très féminin. Les femmes ne sont d'ailleurs pas exclues des postes à responsabilité puisque le violon solo est une femme.
Si le point culminant du Bartók-Maraton a été pour moi le concert du chœur Nyíregyházi Cantemus, le plus grand frisson purement orchestral est assurément venu de la Suite du Mandarin merveilleux que cet orchestre a interprété. Si j'avais lu le synopsis de ce ballet-pantomime avant de venir, je n'ai pas véritablement réussi à faire le lien entre ce que j'entendais et l'histoire. J'ai seulement reconnu que le rôle de la prostituée était joué par la (magnifique) clarinette. Plutôt que de penser à l'histoire, je me demandais s'il était possible de faire rugir un orchestre de façon plus impressionnante. Choquant. Sidérant. Un régal !
⁂
Bartók Béla Nemzeti Hangversenyterem, Művészetek Palotája, Budapest — 2013-02-03 à 21:00
Budapesti Fesztiválzenekar
Kovács István, A kékszakállú herceg (basszus)
Komlósi Ildikó, Judit (mezzoszoprán)
Gera Marina, Hekler Melinda, Szilágyi Csenge, korábbi feleségek
Szlávik Juli, jelmez
Baumgartner Sándor, fény
Fischer Iván, vezényel
A kékszakállú herceg vára
Parmi les diverses merveilles composées par Bartók que j'ai entendues en 2012, celle qui m'a décidé de venir à Budapest pour le Bartók-Maraton était A kékszakállú herceg vára (Le Château de Barbe-Bleue) interprété par l'Orchestre de Paris en octobre. C'est l'œuvre qui était programmée pour clore le Bartók-Maraton. De façon cohérente avec le propos de l'opéra, on a pour ainsi dire fait l'obscurité dans la salle. C'est le chef d'orchestre Iván Fischer lui-même qui a joué le rôle du barde. Au milieu de ce court prologue, Iván Fischer a commencé à diriger de dos le Budapest Festival Orchestra. Même si j'avais relu le livret quelques jours auparavant, je n'ai pas compris un traître mot de ce qu'Iván Fischer a dit, mais c'était impressionnant et cela m'a immédiatement mis dans l'atmosphère troublée de cet opéra dont je ne suis sorti qu'une heure plus tard, envoûté que j'étais par le flux musical et le chant des deux solistes. Je n'ai été en quelque sorte déconcentré que lorsque j'ai reconnu quelques mots dans le texte comme lorsque Judith se plaint qu'il fasse froid (hideg, comme quoi cela sert d'aller aux bains !), quand elle dit merci à Barbe-Bleue (köszönöm) ou quand le nom de Barbe-Bleue est mentionné (kékszakállú). Je ne me suis pas repéré très précisément dans le succession des ouvertures de portes. Toutefois, dans la musique, l'apparition de sons stridents signalent régulièrement l'effroi de Judith qui voit ou croit voir du sang un peu partout. Dans le délice auditif constitué par l'opéra, les moments que je trouve les plus délectables interviennent lors de l'ouverture des troisième (le trésor tintant) et sixième porte (les larmes évoquées par un glissando de harpe). Pour l'ouverture de la septième porte, trois comédiennes interprétant le rôle des trois ex-épouses se sont rapprochées du centre de la scène. Jusque là, elles étaient au fond de la scène, cachées par des voiles. Portant des robes aux traînes excessivement longues, elles ont fait de Judith une des leurs. J'ai été ému par la sincérité exprimée par Barbe-Bleue (István Kovács), en particulier dans les moments où ses nuances étaient les plus piano. Si j'avais pu suivre le texte hongrois, je l'aurais sans doute été tout autant par Ildikó Komlósi (Judith). Le moment le plus émouvant du concert a été pour moi le silence de quelques secondes entre la fin de l'opéra et le début des applaudissements.
(Je ne l'ai pas encore visionné en entier, mais on peut voir et écouter sur YouTube un film fait à partir de cet opéra dans lequel le rôle de Barbe-Bleue est interprété István Kovács. Celui de Judith est interprété par Klára Kolonits que par le plus grand des hasards j'ai entendue dans le rôle de Donna Anna dans Don Giovanni vendredi dernier...)
⁂
Voilà, mon Bartók-Maraton est maintenant tout à fait terminé... C'est quand la prochaine fois qu'un orchestre hongrois vient à Paris jouer du Bartók ?
Ailleurs : Paris ― Broadway, Klari, vadalmacsutka.
2013-01-28 13:50+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Planning
Mon programme de spectacles pour le mois de février est assez démentiel, mais si j'assisterai à plus de spectacles que le mois de février compte de jours, j'aurai tout de même 11 jours sans spectacle !
négligence, j'ai pu me faire un petit lexique hongrois : hegedű (violon), zongora (piano), etc. À partir de vonósnégyes (quatuor à cordes), j'ai même pu former mon tout premier mot hongrois : vonósötös (quintette à cordes).
Mahabharataa attiré mon regard. D'après la liste des personnages mentionnés dans la distribution, ce spectacle du Shizuoka Performing Arts Center est en réalité centré sur un beau conte raconté par un sage aux Pandava pendant leur exil en forêt dans le troisième livre de la grande épopée indienne. Je ne sais pas si c'est pour attirer le public que le spectacle a été ainsi nommé. Pour ma part, j'aurais été tout autant intéressé si j'avais lu Histoire de Nala et Damayanti sur l'affiche. La comparaison de cette affiche et de la couverture de la bande dessinée indienne Amar Chitra Katha sur ce sujet permet de mesurer la différence entre les univers visuels !
2012-12-27 19:21+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Lectures — Culture indienne
Cette année, j'ai vu à peu près le même nombre de spectacles qu'en 2011. C'est encore peut-être un peu trop...
En 2012, j'ai assisté à vingt-huit représentations d'opéras, ce qui est bien moindre qu'en 2011. Je n'ai pour ainsi dire plus aucun plaisir à aller à l'Opéra Bastille, et ce pour de nombreuses raisons (voir par exemple mon billet sur Don Giovanni). Contrairement aux années précédentes, je n'ai même plus envie de me risquer à aller écouter et voir les nouvelles productions, qui sont pour ainsi dire toutes ratées depuis la prise de fonction de Nicolas Joel. Le salut vient d'ailleurs, même si à Paris la nouvelle direction du Théâtre des Champs-Élysées fait des efforts, cf. Médée. Pour ce qui est des opéras en version scénique, je crois que mon meilleur souvenir est celui de La Traviata donnée à Dijon (où j'avais toutefois été moins convaincu par L'Opéra de la lune de Brice Pauset...). Le deuxième acte de Billy Budd entendu à Londres était une merveille musicale. Cela dit, je n'étais pas venu à Londres pour ça mais plutôt pour Les Troyens dont je me souviendrai sans doute longtemps de la démesure des décors et de l'absence de Jonas Kaufmann...
Pour ce qui est des opéras en version de concert, je ne regrette pas le déplacement à Budapest pour le Ring qui s'y est donné en juin dernier ! Le Tristan et Isolde dirigé par Andris Nelsons au TCE m'a aussi bouleversé. Le Château de Barbe-Bleue de l'Orchestre de Paris m'a procuré beaucoup de plaisir. J'ai eu assez longtemps une certaine méfiance vis-à-vis de la musique de Bartók, mais cette année, je suis allé d'émerveillements en émerveillements : le concerto pour piano nº2, la musique pour cordes, percussions et célesta, Le Prince de bois, etc...
J'ai eu l'occasion d'assister à un nombre invraisemblable de bons concerts. Beaucoup de concerts excellents. Pas mal de concerts merveilleux. Quelques concerts fantastiques. Dans cet ensemble, il se trouve une poignée de concerts auxquels je ne peux repenser sans être saisi d'une émotion rétrospective quasiment insoutenable. Les voici, par ordre chronologique :
Dans la catégorie “un pouillème en dessous de fantabullissime”, j'incluerais deux concerts Bach très différents : La Messe en si mineur dirigée par Masaaki Suzuki et La Passion selon Saint Matthieu dirigée par Marc Minkowski.
S'agissant des compositeurs que j'ai découverts cette année, j'ai déjà mentionné Bartók, mais j'ai aussi été émerveillé par la Symphonie nº3 “Chant de la nuit” de Szymanowski et par son concerto pour violon nº1, entendus deux fois cette année, par Christian Tetzlaff et Janine Jansen. J'ai aussi en quelque sorte découvert que Mozart, ça pouvait être bien... notamment grâce à l'Orchestre de chambre de Paris et Sir Roger Norrington ! Grâce au Chamber Orchestra of Europe, j'ai pu apprécier des œuvres que je n'aimais pas trop (cela marche au moins avec les compositeurs en Schu- : Schubert, Schumann). Cette année, quelques autres orchestres de chambre m'ont fait également de très bonnes impressions : le Britten Sinfonia, Les Dissonances, Academy of St Martin in the Fields.
La musique de chambre a également eu une certaine importance dans les concerts auxquels j'ai assisté en 2012. Il y eut bien sûr la Biennale de quatuors à cordes à la Cité de la musique qui a concouru à une de mes grandes découvertes de l'année : la musique de chambre de Beethoven. Plus tard, à Budapest, j'ai ainsi pu me délecter de son trio en si bémol majeur, op. 97. La musique de chambre de Brahms m'a aussi fait une forte impression dans la série en cours à Pleyel par les solistes du Berliner Philharmoniker. Parmi bien d'autres moments mémorables liés à la musique de chambre, je retiens aussi les master-classes de Kurtág à la Cité de la musique ou Clair de lune de Debussy joué en bis par Menahem Pressler, par exemple.
Ma grande découverte musicale de l'année dernière était le chant dhrupad. Cette année, je me suis mis à le pratiquer. Les premiers cours me firent un certain effet ! Partant de zéro, je n'ai bien sûr pu faire que des progrès... Maintenant, je dois arriver au moins à chanter une gamme à peu près juste dans quelques ragas et chanter quelques compositions en respectant le rythme imposé (et de plus en plus, je reçois non plus la suggestion mais presque l'ordre de chanter plus fort, ça doit impliquer que c'est plus juste qu'au tout début...). Les opportunités d'entendre ce type de musique en concert dans de bonnes conditions furent assez limitées, mais tous furent d'excellente qualité : Nirmalya Dey, Uday Bhawalkar (déjà cité plus haut parmi mes meilleurs souvenirs de concerts de l'année !).
Du côté de la danse indienne, j'ai eu l'occasion de voir des formes de danse que je ne connaissais pas vraiment et de les apprécier : le kathak avec Isabelle Anna et l'odissi avec Arushi Mudgal. Cependant, mon style préféré reste le bharatanatyam. La raison est tout simplement que c'est le style que j'ai vu le plus souvent, et progressivement j'ai le sentiment de le comprendre de mieux en mieux. J'ai aussi eu l'occasion cette année de voir presque toutes mes danseuses préférées et d'en découvrir d'autres : Lavanya Ananth, Mallika Thalak, Meenakshi Srinivasan et Nancy Boissel. Depuis le déclic délenché par Srithika Kasturi Rangam lors de son récital à Chennai en février 2010, cette forme d'art est devenue une de celles qui me procurent le plus de plaisir en tant que spectateur, souvent autant sinon davantage que lors de représentations moyennes du Ballet de l'Opéra. Cette compagnie m'aura procuré en 2012 moins de moments mémorables que les années précédentes... Que me reste-t-il ? Josua Hoffalt et Aurélie Dupont dans L'Histoire de Manon (et les adieux de Clairemarie Osta dans ce ballet). Myriam Ould-Braham dans La Bayadère, La Fille mal gardée et dans le défilé du Ballet. De la série des Don Quichotte dans laquelle pratiquement personne n'a vu les danseurs prévus initialement, les distributions n'ayant pas arrêté de changer, je retiens l'interprétation de Mathilde Froustey dans le rôle de Cupidon.
La danse n'est l'apanage de jeunes corps parfaits. Parmi mes plus grandes émotions liées à la danse cette année, je retiens le récital Abhinaya de Malavika et le duo entre Mats Ek et Ana Laguna dansé dans le programme “6000 miles away” de Sylvie Guillem.
J'ai beaucoup moins lu cette année que les années précédentes, mais je ne peux m'empêcher de penser qu'avec Pagli d'Ananda Devi j'ai lu un chef d'œuvre de la littérature francophone. Plus récemment, Parva d'Amruta Patil m'a fait renouer plus qu'agréablement avec la littérature indienne ancienne.
2012-12-15 01:18+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Théâtre des Champs-Élysées — 2012-12-14
Nadja Michael, Médée
John Tessier, Jason
Elodie Kimmel, Dircé
Vincent Le Texier, Créon
Varduhi Abrahamyan, Néris
Ekaterina Isachenko, Première servante
Anne-Fleur Inizan, Seconde servante
Antoine Bui, Tom Perkins, Enfants de Médée
Christophe Rousset, direction musicale
Krzyzstof Warlikowski, mise en scène
Małgorzata Szczęśniak, décors et costumes
Saar Magal, chorégraphie
Christian Longchamp, dramaturgie
Felice Ross, lumières
Denis Guéguin, conception vidéo
Stephane Petitjean, chef de chœur
Les Talens Lyriques
Chœur de Radio France
Médée, Luigi Cherubini.
Je ne comprends pas pourquoi certains se scandalisent de la production
de Médée qui passe actuellement au Théâtre des Champs-Élysées. À
lire certains avis
, l'œuvre serait dénaturée, et la musique de
Cherubini parasitée par le bazar sur scène. Ce n'est pas du tout ce que
j'ai vu ou entendu lors de la troisième représentation.
N'ayant vu aucune des mises en scène de Krzyzstof Warlikowski du temps où Gerard Mortier dirigeait l'Opéra de Paris, je voulais me rattraper en allant voir cette Médée qui avait initialement été montée à Bruxelles.
Le décor est unique, mais il peut se transformer. Un élément-clef de ce décor est le grand miroir vertical faisant toute la largeur de la scène. Ceci permet au public de se voir lui-même, notamment à la toute fin de l'opéra, quand la musique se sera évanouie et que Médée restera longuement à l'avant-scène avant de sortir, le public s'applaudissant lui-même d'applaudir celle qui vient de tuer ses propres enfants.
En dehors d'un air que j'avais déjà entendu lors du spectacle Altre Stelle autour d'Anna Caterina Antonacci, je crois bien que je n'avais jamais entendu la musique de Cherubini. L'ouverture ne m'a pas vraiment plu, mais pour le reste, je ne suis pas d'accord avec les nombreux commentaires qui critiquent cette musique. Dans la première scène, j'ai trouvé remarquable la façon très chantante dont le texte français était mis en musique. Un peu comme Mozart, mais en français... Cela dit, certains effets d'orchestration sont assez étonnants ou étranges, comme un des airs dont la partie principale de l'accompagnement était assurée par un basson. À d'autres moments, de délicieuses phrases virtuoses se font entendre de la flûte traverso. L'interprétation est très baroque (le son des timbales me choquait dans l'ouverture, mais dans la scène de tempête-sorcellerie au début du troisième acte, c'était indiscutablement spectaculaire !). Cette musique est jouée de façon très engagée par les musiciens des Talens lyriques dirigés par Christophe Rousset ! Depuis ma place au centre du deuxième balcon (66€ quand même...), je suis presque horrifié par la facilité des seconds violons à faire huit notes dans un seul coup d'archet...
Pour ce qui est des voix, l'interprète que j'ai préférée est Elodie Kimmel, qui interprétait le rôle de Dircé, qui se prépare à être la nouvelle épouse de Jason tout en étant effrayée par son avenir. Toutefois, ce qui m'a le plus ému dans le chant, tout au long de l'opéra, c'est le chœur !
Le chant des solistes présentait quelques ornementations qui n'étaient pas pour me déplaire. Cependant, il y a un certain problème avec l'interprète du rôle de Médée. D'un côté, rien que par son jeu, elle a pu m'émouvoir dans certaines scènes où son personnage était comme sous l'emprise de l'alcool ou de médicaments (ce qui doit être très difficile à faire de façon convaincante tout en évitant de partir dans le décor). D'un autre côté, sa façon de passer en force et sans articulation les aigus est assez déplaisante. Aussi, on ne comprend pas grand'chose de son texte, surtout dans les dialogues récrits pour cette production. Ceci étant, qu'un personnage aussi extrême que Médée souffre d'inarticulation, c'est presque crédible. Dans le rôle de Mélisande, cela passerait moins bien, je pense...
Ailleurs : Zvezdo, André Tubeuf, Fomalhaut.
2012-10-14 11:20+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Salle Pleyel — 2012-10-11
Philippe Aïche, violon solo
Orchestre de Paris
Christoph von Dohnányi, direction
Symphonie nº4 Italienne
(Mendelssohn)
Matthias Goerne, baryton
Elena Zhidkova, mezzo-soprano
András Bálint, récitant
A kékszakállú herceg vára (Bartók)
J'entendais pour la première fois cette symphonie nº4 de Mendelssohn. Dès les premières secondes, il paraît très naturel que celle-ci soit appelée Italienne. J'ai en effet souvent comme l'impression d'être en train d'écouter un opéra italien sans paroles. Le plaisir est pour moi d'autant plus grand qu'au milieu du premier mouvement, il me semble entendre comme une fugue. Dans le suivant, les notes détachées des violoncelles contribuent à me faire m'imaginer dans le deuxième acte de La Flûte enchantée quand deux hommes en armure soumettent Tamino et Pamina aux épreuves du feu et de l'eau (Der, welcher wandert diese Straße voll Beschwerden). Dans le dernier mouvement, les deux musiciens que je voyais le mieux, les altistes David Gaillard et Nicolas Carles, avaient l'air heureux de jouer à fond, tout comme Bernard Cazauran, le contrebassiste dont j'apercevais parfois la tête. Pour la plupart des camarades vus à l'entr'acte, ce n'était pas l'Italienne du siècle ; pour ma part, j'assume parfaitement avoir aimé cette première partie du concert, tout comme j'avais aimé ma première Écossaise avec le Cleveland Orchestra, pourtant bien moins belle que celle du même Orchestre de Paris dirigé alors par Juraj Valčuha que j'entendis quelques mois plus tard.
C'est évidemment plus pour la deuxième partie du concert que la première que je m'étais déplacé. L'émerveillement de Klari à propos d'Elena Zhidkova dans Alexandre Nevski m'avait convaincu d'acheter exceptionnellement une place de première catégorie pour ce concert. Au centre du troisième rang du parterre, je voyais on ne peut mieux les deux solistes de l'opéra en un acte de Bartók A kékszakállú herceg vára (Le Château de Barbe-Bleue). Et puis, d'une telle place, on peut même entendre parfois Matthias Goerne couvrir l'orchestre ! J'en avais déjà fait l'expérience, à la faveur d'un replacement sauvage, lors d'un concert de Lieder orchestrés.
Si mes toutes premières expériences avec Bartók furent assez déplaisantes, depuis le concert de mars dernier du Budapest Festival Orchestra, je vais de merveilles en merveilles : chansons paysannes hongroises pour orchestre, le concerto pour piano nº2, la musique pour cordes, percussion et célesta, Le Prince de bois, le concerto pour orchestre, le quatuor à cordes nº4 et plus récemment le concerto pour violon nº1.
L'opéra de Bartók ne fait pas exception. C'est un délice ! Après une introduction du récitant (András Bálint), Judit (Elena Zhidkova) entre au Château de Kékszakállú (Barbe-Bleue), son époux interprété par Matthias Goerne. Elle se plaint de l'obscurité qui règne au château et en y voyant sept portes fermées, elle demande à Barbe-Bleue de les ouvrir. La lumière pourra peut-être entrer par ces portes ? Quand elle les ouvre, le premier regard que porte Judith sur ce qui lui était caché est souvent très positif. Et puis, elle se rend compte que tout est souillé par le sang, qu'il s'agisse de la chambre de torture, de la salle d'arme, du trésor, du jardin ou du royaume. La musique incarne magnifiquement les sentiments de Judit dans cette métamorphose des images qui s'offrent ainsi à son regard. Par exemple, quel émerveillement ce fut pour mes oreilles d'entendre la montagne d'or ! (Plus émouvant encore que le dévoilement de l'or dans Das Rheingold de Wagner.) Et puis, des dissonances se font entendre, évidemment anxiogènes pour le personnage de Judit, mais tout autant délectables pour l'auditeur ! J'ai beaucoup aimé aussi l'évocation du lac de larmes à l'ouverture de la sixième porte par un glissando de harpes qui est répété au cours de la scène.
Je n'ai pas été déçu par Elena Zhidkova ! Bien qu'il s'agissait d'une
version de concert, son visage n'a cessé d'exprimer les sentiments de son
personnage. Que d'émotions suscitées par sa voix quand elle demande à
Barbe-Bleue d'ouvrir les portes en levant son poing ! N'étant pas
magyarophone, j'ai trouvé plutôt gracieuse son intonation qui me faisait
penser au russe et j'ai même réussi à comprendre un mot dans son hongrois :
Köszönöm !
. Cela me donnerait presque envie d'aller l'écouter dans
le rôle de Vénus à Düsseldorf.
En comparaison, le personnage résigné interprété par Matthias Goerne
paraissait forcément plus bourru. Pourtant, il aura un peu tout essayé pour
dissuader Judit d'ouvrir les sept portes. À sa belle voix est souvent
associé un superbe cor anglais.
Pendant le concert, il m'était difficile de détacher mon regard des chanteurs. La direction du chef allemand d'origine hongroise Christoph von Dohnányi restera un mystère complet pour moi, puisque mon placement ne me donnait à voir que son dos, mais quelques signes indiquaient que le courant devait bien passer avec les musiciens, comme les sourires que lui rendait le premier violon Philippe Aïche après ses solos. J'étais également très bien placé pour voir le premier rang des violoncellistes. Ceux qui travaillent aux Invalides pourront prochainement écouter celui d'entre eux qui, totalement investi dans l'interprétation d'une très longue note, essayait de fermer les yeux tout en les maintenant ouverts afin de regarder le chef.
Ailleurs : Zvezdo, Palpatine, Grignotages, Bruno Serrou, Bladsurb.
2012-07-03 23:33+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Royal Opera House — 2012-07-01
David McVicar, mise en scène
Leah Hausman, assistante à la mise en scène
Es Devlin, décors
Moritz Junge, costumes
Wolfgang Göbbel, lumières
Andrew George, chorégraphie et mouvements
Royal Opera Chorus
Renato Balsadonna, chef de chœur
Orchestra of the Royal Opera House
Peter Manning, premier violon
Antonio Pappano, direction musicale
Daniel Grice, Soldat
Anna Caterina Antonacci, Cassandre
Fabio Capitanucci, Chorèbe
Ashley Holland, Panthée
Ji Hyun Kim, Hélénus
Barbara Senator, Ascagne
Pamela Helen Stephen, Hécube
Robert Lloyd, Priam
Jenna Sloan, Polyxène
Sophia McGregor, Andromaque
Sebastian Wright, Astyanax
Bryan Hymel, Énée
Jihoon Kim, Fantôme d'Hector
Lukas Jakobski, Capitaine grec
Eva-Maria Westbroek, Didon
Hanna Hipp, Anna
Ji-Min Park, Iopas
Brindley Sherratt, Narbal
Daniel Grice, Voix de Mercure
Ed Lyon, Hylas
Adrian Clarke, Premier soldat
Jeremy White, Deuxième soldat
Peuple troyen, soldats grecs, soldats troyens, marins, courtisans et serviteurs de Didon, Carthaginois
Les Troyens, Berlioz
Dimanche dernier, mon week-end londonien se terminait avec la
représentation en matinée
du grand opéra de Berlioz : Les
Troyens. Mes attentes étaient peut-être trop hautes. J'étais presque
bouleversé rien qu'à la lecture du synopsis de l'opéra dans le programme
maxi-format vendu dans le hall (maxi-prix aussi : £10). Je m'attendais à
assister à la représentation d'opéra de ma vie
, mais ce ne sera
qu'une après-midi plutôt agréable.
Si je suis resté concentré pendant toute la durée de l'opéra (cinq actes, soit 4h11 sans compter les deux entr'actes), j'ai parfois légèrement piqué du nez. Les deux premiers actes se passent à Troie, au moment où les Grecs vont prendre le dessus par la fameuse ruse du Cheval. Fort heureusement, il ne s'agit pas d'une production façon péplum. Plutôt que de rester à l'époque du mythe, les costumes et les décors semblent transposer l'histoire au temps de la composition de l'opéra, en tout cas au XIXe siècle, dans le contexte de quelque conflit franco-anglais. Je ne suis pas expert en uniformes militaires, mais les quelques Grecs que l'on voit sont en Red coat, et les uniformes des Troyens sont suffisamment tarabiscotés pour paraître français. Le grand décor semi-circulaire fait vaguement penser à un glauque immeuble d'habitations pour ouvriers (l'utilité de ce décor me paraît très discutable). D'autres éléments de décors sont constitués d'un bric-à-brac mécaniste en ferraille. Le Cheval dont le mouvement restera mystérieux pour moi est particulièrement impressionnant. C'est un gigantesque et curieux assemblage d'engrenages et d'autres éléments mécaniques sortis du même bric-à-brac que les débris qui traînent sur scène. Ces décors et accessoires semblent évoquer la révolution industrielle.
La musique très contrastée de Berlioz maintient une tension permanente. Elle n'est malheureusement pas parsemée de grands moments extatiques (pour mon goût tout au moins). Dans le rôle de Cassandre, Anna Caterina Antonacci (que je vois pour la treizième fois !) me fait une très bonne impression dans le premier acte. Toutefois, j'ai souvent bien du mal à entendre sa voix et son français. La traduction anglaise des surtitres est un peu trop fantaisiste pour que je puisse reconstituer le texte français. Surtout, j'imaginais que la scène finale du deuxième acte (un véritable Jauhar dans la tradition rajpoute, cf. Padmâvatî) serait déchirante d'émotions, mais je n'ai aucunement été transporté. Scéniquement, on aura pu constater que les équipes du Royal Opera n'ont pas peur des flammes : le Cheval crache du feu !
Pendant les actes 3 & 4, je me replace à côté de Hugo dans la zone Balcony Left. C'est un peu excentré, mais on y bénéficie d'une belle vue sur l'orchestre. Ceci me permet de voir d'assez près aussi le très beau décor carthaginois du troisième acte évoquant une kasbah. Le décor tout en hauteur permet au chœur vêtu de couleurs vives de chanter sur différents niveaux (le procédé fait penser à ce que l'on peut voir dans la production de Manon de Massenet mise en scène par le même David McVicar, avec Natalie Dessay et Rolando Villazón). Au sol, une maquette de la kasbah sur laquelle les comédiens et acrobates vont pouvoir évoluer dans une scène de divertissement. Cette maquette reparaîtra sous d'autres formes dans les actes suivants. La grande façade de la kasbah sera aussi utilisée dans la suite. Comme le décor des deux premiers actes, il peut se diviser en deux pour créer un certain espace au centre.
Les actes 3, 4 et 5 m'inspirent la réflexion qu'il ne se passe pas grand'chose dans cet opéra, paradoxalement. Carthage paraît être un endroit paradisiaque où le bateau de l'expédition d'Énée va échouer. Il va inspirer l'amour à Didon qui ne lui pardonnera pas sa trahison, Énée étant en effet appelé à un autre destin : fonder une nouvelle et immortelle Troie en Italie.
Après qu'elle a souffert il y a quelques mois de la comparaison avec la subtilité du chant dhrupad de Marianne Svašek, je me réconcilie avec la chanteuse Eva-Maria Westbroek dont le français est presque parfaitement intelligible, surtout quand l'orchestration est légère. Cependant, la chanteuse qui m'a m'a le plus marqué au cours de l'opéra est la jeune Hanna Hipp qui interprète le rôle d'Anna, la sœur de Didon. J'ai aussi aimé les interprètes des rôles du ministre Narbal (Brindley Sherratt) et du marin Hylas (Ed Lyon). Dans le rôle-marathon d'Énée, le remplaçant de Jonas Kaufmann, Bryan Hymel, m'a semblé faire une prestation tout à fait honorable.
La mise en scène de David McVicar n'est pas sa plus mauvaise
(L'Incoronazione di Poppea) ni sa meilleure (Agrippina),
pour ne parler que de celles que j'ai vues. Le décor devient un personnage
à part entière du grand spectacle. C'est impressionnant, on en a pour son
argent, mais à quoi cela sert-il ? je me le demande bien. Je n'ai pas
compris l'image finale qui fait paraître au centre une sorte de squelette
de buste humain fait du même bric-à-brac mécaniste que le Cheval de la
première partie de l'opéra. Avec les grands décors qui peuvent se diviser
en deux, ces deux créatures extravagantes et enflammmées sont les seuls
points communs entre les deux parties de l'opéra. Je ne vois pas du tout ce
qu'on a voulu signifier par là. Peut-être avait-on commandé un peu trop de
ferraille de sorte qu'il devenait possible de construire non pas une grande
créature (le Cheval), mais deux... Pour ce qui est de la mise en scène
proprement dite, elle permet la formation de belles images. Toutefois, on a
connu David McVicar plus exaltant dans sa direction d'acteur. Pour moi,
c'est ce travail avec les chanteurs sa marque de fabrique au-delà du
tradi bien fait
. J'aurais presque préféré voir des toges et un
cheval en carton, si cela avait été le prix à payer pour que la direction
d'acteurs fût meilleure !
Une des conclusions de cette représentation est que la meilleure façon d'écouter la Marche des Troyens est d'aller voir le défilé du Ballet de l'Opéra. Dans Les Troyens, la marche apparaît sous diverses formes et elle est souvent en concurrence avec les parties chantées...
PS: On peut voir quelques photos de cette production sur le site du ROH.
Ailleurs : Musica Sola, David.
2012-07-03 13:15+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
English National Opera — 2012-06-30
Kim Begley, Edward Fairfax Vere
Oliver Dunn, First Mate
Gerard Collett, Second Mate
Darren Jeffery, Mr Flint
Andrez Rupp, Bosun
Duncan Rock, Donald
Jonathan Stoughton, Maintop
Nicky Spence, The Novice
Daniel Norman, Squeak
Jonathan Summers, Mr Redburn
Henry Waddington, Lieutenant Ratcliffe
Matthew Rose, John Claggart
Michael Colvin, Red Whiskers
Philip Daggett, Arthur Jones
Benedict Nelson, Billy Budd
Marcus Farnsworth, Novice's Friend
Gwynne Howell, Dansker
Joseph Bingham Cooper, Tom Couffon, Robel Durub, Calum Currie Patiño, Thomas Fetherstonhaugh, Sean Hill, Henry Mattar, Louis O'Shea, Joseph Outtrim, Bartłomie Rój, Francis de Souze, Matthew Whiting, Midshipmen/Powder monkeys
Thomas Fetherstonhaugh, Cabin boy
Officers, Sailors, Drummers, Marines
Edward Gardner, direction musicale
Nicholas Ansdell-Evans, chef assistant
Francine Merry, chef de chœur
Genevieve Ellis, assistante de la chef de chœur
Janice Graham, premier violon
David Alden, mise en scène
Paul Steinberg, décors
Constance Hoffman, costumes
Adam Silverman, lumières
Maxine Braham, mouvements
Jessica Jackson-Smith, maître d'armes
Orchestre et Chœur de l'English National Opera
Billy Budd, Britten
Samedi après-midi, alors que j'attends un ami londonien devant l'English National Opera pour aller boire un verre et visiter le British Museum (qui a une très belle collection indienne), je croise Laurent, ce qui n'est guère surprenant en ces lieux !
En fin d'après-midi, j'assiste à une représentation de Billy Budd. La mise en scène et les décors ne sont pas aussi beaux que dans la production que j'ai vue il y a deux ans à Bastille. Comme Laurent qui a vu cette production avant moi, je ne comprends pas très bien quelle est l'époque suggérée par les costumes (des marins comme des hommes en armes). La musique de Britten me semble moins déroutante que la première fois, mais il me faut encore attendre le deuxième acte pour être tout à fait enthousiasmé par le spectacle. Le délice est avant tout musical. Dans certains passages orchestraux, j'aime l'alternance des textures orchestrales qui changent parfois presqu'à chaque mesure. J'apprécie le retour de l'onctueux motif musical entendu au début de l'opéra et qui me semble évoquer la mer. Avant cela, le deuxième acte aura commencé par l'impressionnante scène de l'attaque au canon d'un navire français. Le livret contient un certain nombre de piques contre les Français, ce qui fait rire bruyamment nos amis anglais. Le canon est représenté par un gros cylindre multifonctions (il sert en effet aussi de couloir d'accès à la cabine blanche du capitaine Vere, remarquable Kim Begley). Les tambours dont les interprètes ont pris position dans des loges proches de la scène contribuent à rendre cette scène indescripttiblement spectaculaire. Mon plaisir musical restera ininterrompu jusqu'à la fin alors que Billy Budd bégaillant tue d'un coup de poing celui qui l'accusait de mutinerie, Claggart, dont l'interprète (Matthew Rose) m'a beaucoup plu. Les trois personnages du First Lieutenant Redburn, du Lieutenant Ratcliffe et du Sailing Master Flint ne semblent exister que pour faire partie du tribunal qui condamnera Billy Budd à la pendaison, le capitaine Vere n'ayant pas eu le courage de le défendre.
L'interprète de Billy Budd m'a fait une très bonne impression. Le chœur était épatant aussi. J'ai rarement été autant ému à l'opéra. Ce deuxième acte de Billy Budd est ce que j'aurai préféré dans les trois spectacles vus au cours du week-end.
2012-06-24 14:09+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2012-05-23
Alain Vernhes, Le Roi de Trèfle
Charles Workman, Le Prince
Patricia Fernandez, La Princesse Clarice
Nicolas Cavallier, Léandre
Eric Huchet, Trouffaldino
Igor Gnidii, Pantalon
Vincent Le Texier, Tchélio
Marie-Ange Todorovitch, Fata Morgana
Alix Le Saux, Linette
Alisa Kolosova, Nicolette
Amel Brahim-Djelloul, Ninette
Hans-Peter Scheidegger, La Cuisinière
Antoine Garcin, Farfarello
Lucia Cirillo, Sméraldine
Vincent Morell, Le Maître de cérémonies
Alexandre Duhamel, Le Héraut
Alain Altinoglu, direction musicale
Gilbert Deglo, mise en scène
William Orlandi, décors et costumes
Marta Ferri, chorégraphie
Joël Hourbeigt, éclairages
Alessandro Di Stefano, chef de chœur
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
L'Amour des trois oranges, Prokofiev.
On pourra au moins reconnaître à Nicolas Joel, le directeur de l'Opéra de Paris, de savoir piocher parmi les bonnes productions de l'ère Mortier pour faire des reprises. Je n'avais pas vu L'Amour des trois oranges à l'époque. C'est maintenant chose faite avec la première de cette reprise qui a eu lieu hier soir à l'Opéra Bastille.
Il faut bien l'admettre, si j'avais jusque là était toujours déçu par les mises en scène de Gilbert Deflo (Luisa Miller, Un bal masqué, La fiancée vendue), cette production de L'Amour des trois oranges est très réussie.
Il s'agit d'un conte qui se finit bien. Un prince hypocondriaque reçoit un sort : il sera fasciné par les trois oranges gardées par une cuisinière géante. Après les avoir subtilisées, il finira par tomber amoureux de la princesse Ninette qui était dans la troisième orange. Après une séparation liée à une machination, le prince et la princesse seront réunis.
Les scènes se suivent sans temps mort grâce à une mise en scène très vivante faisant appel à de nombreux figurants, jongleurs et même un cracheur de feu. Tout se passe dans un décor unique dont les couleurs peuvent changer au gré des éclairages.
Le texte chanté est en français, comme lors de la création de l'opéra, mais certaines élisions excessives et la prosodie trahissent le fait que la langue originale était le russe. Cependant, le texte reste tout à fait compréhensible. Si les interprètes m'ont semblé convaincants (notamment Charles Workman dans le rôle du Prince et Amel Brahim-Djelloul dans celui de Ninette), mon attention ne s'est pas focalisée sur les voix qui interprètent le plus souvent de brefs récitatifs chantés. Le rôle principal est en effet joué par l'orchestre.
Comme toujours avec ce compositeur, je n'ai pas été déçu par la musique de Prokofiev... Sa vivacité me rappelle parfois le style de son ballet Cendrillon. Ce que je retiens surtout, c'est la somptueuse omniprésence des instruments à vents (et des cuivres). Du côté des cordes, les altos, très engagés, me semblent jouer assez souvent les premiers rôles. L'orchestre dirigé par Alain Altinoglu paraît parfois parcouru par une euphorie collective.
2012-06-22 17:56+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Budapest
À l'automne, j'avais découvert la Symphonie Écossaise
à la sauce
Cleveland. J'avais sincèrement aimé. Et puis, j'entendis
à nouveau cette œuvre lors d'un concert de l'Orchestre de
Paris. Le plaisir d'écoute avait alors été tout autre. Une autre
métamorphose s'était produite avec le concerto pour piano nº2 de Bartók, joué par ce même orchestre sous la direction de Pierre
Boulez. J'avais aimé, mais là encore, quand les musiciens
du Budapest Festival Orchestra (dirigés par Iván Fischer) vinrent à
Pleyel pour l'interpréter, j'eus l'impression d'entendre une autre œuvre,
tellement supérieure à ce que j'avais entendu la première fois.
Entre le Ring donné en 2010 et 2011 à l'Opéra Bastille sous la direction de Philippe Jordan et celui que je viens d'entendre à Budapest avec Laurent et Klari, c'est le même genre de phénomène qui s'est produit, et ce sont encore des musiciens hongrois qui se distinguent par leur interprétation ! Je commence à souscrire à l'opinion de Klari selon laquelle les Hongrois auraient, du fait de leur langue, une prédisposition à bien jouer les accents. Le rythme de la musique n'en est que plus perceptible. Le phénomène est particulièrement frappant pour les contrebasses de l'orchestre symphonique de la radio hongroise, qui font mur au fond de la fosse, au centre. À chacune de leurs entrées, c'est comme si le sol se mettait à trembler tellement ils sont énergiques. Ils ont confiance en la solidité de leur archet et de leurs cordes. Parfois, c'est comme s'ils écrasaient celui-ci sur celles-là. Pour moi, c'est du jamais vu... Si les impressionnantes contrebasses sont les plus adorables à regarder (et le contrebassiste solo présent pour Das Rheingold et Die Walküre était époustouflant), les autres pupitres de cordes ne sont pas en reste. Les quelques moments de la tétralogie où seuls les instruments à cordes jouaient m'ont procuré un immense plaisir.
Les instruments à vents sont magnifiques également. Je ne sais si je dois cette sensation à la bonne acoustique de la salle ou au fait d'avoir vue sur les vents, mais pour la première fois j'ai pu apprécier certains aspects de l'orchestration de Wagner que je ne soupçonnais pas, notamment la modification du timbre des cordes par la superposition de vents (les flûtes tout particulièrement).
Le son parfois clair parfois inquiétant des cuivres (surtout quand ils jouent avec la sourdine) serait tout à fait inouï pour moi si un autre orchestre hongrois ne m'avait initié à ces sonorités dans Bartók. Dans la scène où Siegfried essaie de communiquer avec l'Oiseau, le cor anglais fera rire de bon cœur toute la salle en jouant (volontairement) faux. Passant juste après lui, le cor solo viendra impérialement jouer le motif de l'Appel du fils des bois, la salle retenant son souffle devant tant de majesté, alors que le musicien est comme seul au monde, sur scène, en habit. Avant chaque acte, une fanfare composée de quelques musiciens de l'orchestre interprétait formidablement bien quelque motif tiré de l'acte qui allait suivre. Lors de la toute dernière fanfare, alors que nous étions tous près d'eux, Klari, Laurent et moi n'avons pas pu nous retenir de continuer à applaudir alors qu'ils repartaient : nous avons eu droit à un salut et un merci rien que pour nous.
Ce serait mentir d'affirmer que l'orchestre ait été parfait pendant les quinze heures de musique de ce Ring, mais ils ont fait preuve de tant de qualités que les petites imperfections paraissent peu de choses par rapport au plaisir procuré. J'ai ainsi aimé voir les musiciens d'orchestre communiquer entre eux. À un moment, un contrebassiste un peu paniqué faisait désespérément signe à son co-pupitre de tourner la page. Le co-pupitre chargé des tournes, malgré une fatigue physique bien perceptible, essayait de le rassurer en lui montrant que le contrebassiste solo était à la même page qu'eux. On a aussi pu voir quelques chuchotements. Alors qu'avec d'autres orchestres, cela donne parfois l'impression que les instrumentistes se désintéressent passagèrement de la musique, avec ces musiciens hongrois, les chuchotis et autres gestes échangés me semblent au contraire le signe d'une envie de bien faire, de rassurer les uns et les autres, bref de faire corps pour affronter tous ensemble l'édifice musical wagnérien.
L'artisan de ce succès est le chef d'orchestre Ádám Fischer. Je l'avais déjà adoré dans La Clémence de Titus à l'Opéra Garnier en septembre dernier. Ici, il dirige parfois assis parfois debout. Dans le prélude de L'Or du Rhin commencé dans l'obscurité totale tout comme se finira Le Crépuscule des Dieux, il dirigera avec une loupiote rouge au bout de sa baguette. Si dès l'entrée dans la salle, j'eus le sentiment que je reviendrais à Budapest une autre fois, quand le Rhin a commencé à se manifester dans la musique, j'étais rassuré, conquis par la faculté de l'orchestre que je découvrais à m'émouvoir. Le retour du Rhin dans Götterdämmerung sera un autre grand moment pour moi. De telles extases musicales (à fort potentiel lacrimal), le chef et les musiciens nous en ont concocté un certain nombre :
Si j'ai beaucoup loué l'énergie des musiciens, l'interprétation n'en
étant pas pour autant moins analytique
, finalement. Certains détails
n'étaient certes peut-être pas autant mis en valeur que par d'autres chefs.
Pourtant, je n'en tire aucune frustration parce que j'ai entendu d'autres
détails insoupçonnés. J'ai eu le sentiment de bien rentrer dans l'univers
motivique de Wagner au cours des représentations des trois premiers
opéras : Das Rheingold, Die Walküre et
Siegfried. Il ne s'est alors pour ainsi dire pas présenté un seul
moment où je ne susse faire correspondre aux motifs entendus les idées
correspondantes. Je ne vise ici que ce qui était mis au premier plan du
flux musical. Il en est allé tout autrement dans Götterdämmerung :
j'ai très vite été complètement perdu tant les motifs sont en permanence
suggérés, empilés, réorchestrés.
Passons maintenant à la mise en scène, aux décors, etc. Les chanteurs (qui sont presque tous en habits) évoluent sur un dispositif scénique unique pendant toute la durée du Ring. Une estrade au milieu prolongée de quelques marches conduisant à une étroite passerelle collée à un large écran sur laquelle des vidéos sont projetées. Les comédiens ou chanteurs situés derrière l'écran paraissent parfois en ombres chinoises. La première image que je croie avoir vue est celle d'une méduse se transformant en la chevelure d'une fille du Rhin, laquelle reviendra à la fin du cycle. Pour le reste, les vidéos projetées ne semblent régies par aucune vision d'ensemble. Le Walhalla sera représenté comme un gratte-ciel dans Das Rheingold, et puis cette image disparaîtra complètement par la suite. Parmi les images marquantes, je retiens la tempête de neige sur quelque montagne au début de Die Walküre, la déchéance de Brünnhilde représentée par la vision du sol qui se rapproche à toute vitesse comme si on sautait du Walhalla en parachute. L'évocation du fil tissé par les nornes, le voyage sur le Rhin moderne en sont d'autres. La scène d'immolation de Brünnhilde sera intelligemment conçue également, puisque des flammes commenceront à paraître sur un des écrans à surtitres situé en hauteur.
Du point de vue de la mise en scène proprement dite, je n'ai rien vu qui puisse susciter l'adhésion totale ou le rejet absolu. Je pense qu'il faut considérer ces représentations comme des versions de concert améliorées. L'orchestre est tellement formidable que j'ai de toute façon eu du mal à détourner mes yeux de la fosse. Si je n'ai pas compris pourquoi ni Siegmund ni Siegfried n'a jamais brandi l'épée (alors que Wotan tenait sa lance), il m'a semblé avoir remarqué quelques bonnes idées dans cette mise en scène. Par exemple, la façon dont au début de Siegfried l'épée était représentée par une feuille de papier déchirée en deux morceaux sur lesquels étaient dessinés deux morceaux de l'épée (qui est brisée au cours de Die Walküre). Quand Siegfried aura l'idée de réduire l'épée en limaille avant de la forger à nouveau, il déchirera les deux bouts de papier de façon à obtenir de tout petits morceaux. C'est plutôt bien vu, je trouve.
Il me reste à parler des chanteurs. On ne va pas pinailler : je les ai tous trouvés excellents ! (La distribution détaillée apparaît à la fin de ce billet.) J'ai tout particulièrement aimé le ténébreux Walter Fink (Hunding), l'endurant Christian Franz (Loge/Siegmund/Siegfried), le touchant Juha Uusitalo (Wotan), l'attachant Hagen (Matti Salminen). J'ai été impressionné par le chœur des Walkyries répondant aux questions de Wotan à propos de Brünnhilde dans Die Walküre. Le chœur du Crépuscule des Dieux a été superlatif aussi... Enfin, dans le rôle de Brünnhilde, je découvrais Irène Theorin. Si son vibrato était quelque peu prononcé dans les acrobaties vocales du cri d'appel des Walkyries, elle a parfaitement réussi à m'émouvoir par la suite !
Ailleurs : Laurent (Das Rheingold, Die Walküre, Siegfried, Götterdämmerung), Klari.
Bartók Béla Nemzeti Hangversenyterem, Művészetek Palotája, Budapest — 2012-06-12
Juha Uusitalo, Wotan
Oskar Hillebrandt, Donner
Ladislav Elgr, Froh
Christian Franz, Loge
Németh Judit, Fricka
Szabóki Tünde, Freia
Kovácz Annamária, Erda
Hartmut Welker, Alberich
Gerhard Siegel, Mime
Walter Fink, Fafner
Bretz Gábor, Fasolt
Wierdl Eszter, Woglinde
Megyesi Schwartz Lúcia, Wellgunde
Mester Viktória, Flosshilde
Fischer Ádám, direction musicale
Hartmut Schörghofer, mise en scène et décors
Christian Martin Fuchs, dramaturgie
Teresa Rotemberg, chorégraphie
Corinna Crome, costumes et marionnettes
Andreas Grüter, lumières
Momme Hinrichs, Torge Møller (fettFilm), vidéo
Rebekka Stanzel, assistante à la mise en scène
Magyar Rádió Szimfonikus Zenekara
Das Rheingold, Wagner
Bartók Béla Nemzeti Hangversenyterem, Művészetek Palotája, Budapest — 2012-06-13
Christian Franz, Siegmund
Walter Fink, Hunding
Juha Uusitalo, Wotan
Michaela Kaune, Sieglinde
Irène Theorin, Brünnhilde
Németh Judit, Fricka
Wittinger Gertrúd, Helmwige
Szabóki Tünde, Gerhilde
Érsek Dóra, Waltraute
Várhelyi Éva, Siegrune
Mester Viktória, Rossweise
Bakos Kornélia, Grimgerde
Kovácz Annamária, Schwertleite
Fischer Ádám, direction musicale
Hartmut Schörghofer, mise en scène et décors
Christian Martin Fuchs, dramaturgie
Teresa Rotemberg, chorégraphie
Corinna Crome, costumes et marionnettes
Andreas Grüter, lumières
Momme Hinrichs, Torge Møller (fettFilm), vidéo
Rebekka Stanzel, assistante à la mise en scène
Magyar Rádió Szimfonikus Zenekara
Die Walküre, Wagner
Bartók Béla Nemzeti Hangversenyterem, Művészetek Palotája, Budapest — 2012-06-15
Christian Franz, Siegfried
Gerhard Siegel, Mime
Juha Uusitalo, Der Wanderer (Wotan)
Hartmut Welker, Alberich
Matti Salminen, Fafner
Gál Erika, Erda
Irène Theorin, Brünnhilde
Gál Gabi, Stimme eines Waldvogels
Fischer Ádám, direction musicale
Hartmut Schörghofer, mise en scène et décors
Christian Martin Fuchs, dramaturgie
Vida Gábor, chorégraphie
Corinna Crome, costumes et marionnettes
Andreas Grüter, lumières
Momme Hinrichs, Torge Møller (fettFilm), vidéo
Rebekka Stanzel, assistante à la mise en scène
Magyar Rádió Szimfonikus Zenekara
Siegfried, Wagner
Bartók Béla Nemzeti Hangversenyterem, Művészetek Palotája, Budapest — 2012-06-17
Christian Franz, Siegfried
Oskar Hillebrandt, Gunther
Matti Salminen, Hagen
Hartmut Welker, Alberich
Irène Theorin, Brünnhilde
Markovics Erika, Gutrune
Gál Erika, 1. Norne
Németh Judit, Waltraute, 2. Norne
Szabóki Tünde, 3. Norne
Wierdl Eszter, Woglinde
Megyesi Schwartz Lúcia, Wellgunde
Mester Viktória, Flosshilde
Fischer Ádám, direction musicale
Hartmut Schörghofer, mise en scène et décors
Christian Martin Fuchs, dramaturgie
Vida Gábor, chorégraphie
Corinna Crome, costumes et marionnettes
Andreas Grüter, lumières
Momme Hinrichs, Torge Møller (fettFilm), vidéo
Rebekka Stanzel, assistante à la mise en scène
Magyar Rádió Szimfonikus Zenekara
Götterdämmerung, Wagner
2012-06-10 01:10+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Garnier — 2012-06-09
Sarah Connolly, Phèdre
Anne-Catherine Gillet, Sophie
Andrea Hill, Diane
Jaël Azzaretti, L'Amour
Salomé Haller, Oenone
Marc Mauillon, Tisiphone
Aurélie Legay, La Grande Prêtresse de Diane/Une chasseresse
Topi Lehtipuu, Hippolyte
Stéphane Degout, Thésée
François Lis, Pluton/Jupiter
Nicholas Mulroy, Première Parque
Aimery Lefèvre, Arcas/Deuxième Parque
Manuel Nuñez Camelino, Un suivant/Mercure
Jérôme Varnier, Neptune/Troisième Parque
Sydney Fierro, Un chasseur
Marc Barret, Emilie Bregougnon, Anna Chirescu, Angèle Fontaine, Sébastien Montagne, Anne-Sophie Ott, Léa Perat, Gilles Poirier, Raphaël Rodriguez, Artur Zakirov, Danseurs
Emmanuelle Haïm, direction musicale
Ivan Alexandre, mise en scène
Antoine Fontaine, décors
Jean-Daniel Vuillermoz, costumes
Hervé Gary, lumières
Natalie Van Parys, chorégraphie
Xavier Ribes, chef du chœur
Orchestre et Chœur du Concert d'Astrée
Hippolyte et Aricie, Rameau
Une production tradi comme c'est pas permis. Je n'avais pas vu ça depuis Cadmus et Hermione à l'Opéra Comique (et un Egisto de sinistre mémoire à l'Athénée). Cependant, c'est plutôt bien fait, dans le genre. À part quelques plates-formes pour faire descendre les Dieux des cintres (doivent-ils rester tout là haut pendant 1h30 en attendant leur tour, ou ont-ils un moyen de monter-descendre sans passer par la scène ?), les décors sont uniquement constitués de toiles peintes. Il y en a une profusion. J'ai comme l'impression d'avoir vu une superproduction époque Louis XV.
Le texte de l'abbé Simon Joseph Pellegrin est très bien fichu. Il mélange différents types de mètres : alexandrins et octosyllabes, surtout. La musique de Rameau est belle et variée. Elle est bien jouée par le Concert d'Astrée. (Cela dit, depuis un certain concert dirigé par Jordi Savall, je sais que cela pourrait être meilleur encore.) J'ai particulièrement aimé les moments où on s'éloigne du récitatif typiquement lullyste et où le rythme des parties vocales s'accélère. On entend plein de façons différentes de mettre en musique des alexandrins sur des mesures à quatre temps. C'est assez amusant à suivre. Une des façons qui m'ont plu était particulièrement adaptée aux vers qui se découpaient naturellement en quatre fois trois syllabes. Le rythme du texte s'en trouvait accentué et les syllabes qui se retrouvaient ainsi rallongées étaient souvent très ornementées.
Parmi les chanteurs, j'ai particulièrement apprécié Anne-Catherine Gillet (Aricie), Stéphane Degout (Thésée) et surtout Jaël Azzaretti, superbe Amour (notamment dans les acrobaties vocales du trio avec violon et flûte évoquant le chant des oiseaux). J'ai bien aimé le chœur et le trio (masculin) des Parques était merveilleux.
La mise en scène est très statique. La chorégraphie des ballets purement décorative. Il ne tient qu'à la musique que je ne me sois pas ennuyé...
Ailleurs : David, Grignotages.
2012-05-20 11:26+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse
Opéra Garnier — 2012-05-19
Toshiro Mayuzumi, musique
Maurice Béjart, chorégraphie
Nuno Corte-Real, décors et costumes
Tatsuo Takasawa, lumières
Fumitake Ichikawa, réalisation sonore
Haruo Goto, Le Jeune homme moderne / Oboshi Turanosuke, chef des vassaux de la Maison Enya
Mao Morikawa, Ashikaga Tadayoshi, jeune prince, frère cadet du Shôgun régnant
Yuki Miyamoto, Enya Hangan, maître des Banquets auprès d'Ashikaga Tadayoshi
Mika Yoshioka, Dame Kaoyo Gozen, épouse d'Enya Hangan
Ren Yoshida, Rikiya, fils d'Ôboshi Yuranosuke
Yuji Matsushita, Kôno Moronô, conseiller du Shogun
Yu Himuro, Sagisaka Bannaï, serviteur de Kôno Moronô
Naoyoshi Nagase, Hayano Kampei, jeune samourï attaché à la Maison d'Enya
Chika Saeki, Okaru, jeune suivante de Dame Kaoyo Gozen, amante d'Hayano Kampei
Kosuke Wada, le double moderne d'Hayano Kampei
Mari Kawai, le double moderne d'Okaru
Yuichi Sugiyama, Ishido, examinateur d'un cadavre mort par seppuku
Hiroki Umezawa, Yakushiji, examinateur d'un cadavre mort par seppuku
Ryo Ogasawara, Ono Sadakuro, bandit
Reiko Koide, Une courtisane
Yuta Nagata, Yoichibei, père d'Okaru
Yuko Tanaka, Okaya, mère d'Okaru
Mayumi Nishimura, Osai, maîtresse de la maison de courtisannes de Kyôto
Ryo Ogasawara, Première variation des 47 Rônin
Naoyoshi Nagase, Deuxième variation des 47 Rônin
Junko Takamura, Shiori Mori, Mika Murakami, Rui Yoshikawa, Natsumi Kishimoto, Asami Sakai, Rei Othsuka, Mamiko Kawashima, Les suivnates de Dame Kaoyo Gozen
Kazuo Kimura, Yuji Matsushita, Yu Himuro, Naoyoshi Nagase, Ryo Ogasawara, Yuki Miyamoto, Dan Tsukamoto, Hiroki Umezawa, Junya Okazaki, Mao Morikawa, Shunsuke Yasuda, Yuichi Sugiyama, Yuta Nagata, Ren Yoshida, Daichi Matsuno, Yuji Nakamura, Ryohei Nojiri, Yo Sato, Kosuke Wada, Torayuki Takeshita, Hiroki Miyazaki, Yuma Ishida, Hideo Kishimoto, Tatsuya Jotaki, Chikahiko Hanayagi, Suginori Hanayagi, Jushitoshi Hanayagi, Tsuranosuke Hanayagi, Rakuto Hanayagi, Tadahiko Hanayagi, Tsunahito Hanayagi, Suzuhiko Hanayagi, Jinshiro Hanayagi, Kanshichiro Hanayagi, Les 47 Rônin
Le Kabuki
Ce samedi 19 mai, j'ai assisté à trois spectacles. Enfin, pas tout à fait. La durée annoncée du ballet Kabuki était de 1h20, ce qui me laissait largement le temps de rejoindre le Théâtre de la Ville pour le concert de 17h. Si j'avais su que cela durait une heure de plus, j'aurais choisi une autre date pour me rendre au Palais Garnier... Cela dit, c'est sans regret que je suis parti à l'entr'acte, une première pour moi, tant la musique (enregistrée) me semble un drôle de fourre-tout : du japonais, du minimalisme répétitif, des citations de Gershwin, avec parfois un instrument bien identifié pour chaque personnage. J'aime bien la scénographie, la chorégraphie mêlant classique et contemporain ne me déplaît pas, mais je reste sur ma faim.
⁂
Théâtre de la Ville — Place du Châtelet — 2012-05-19
François Leleux, hautbois
Lisa Batiashvili, violon
Lawrence Power, alto
Sebastian Klinger, violoncelle
Quatuor pour hautbois et cordes (d'origine pour flûte et cordes) en ré majeur, KV 285 (Mozart)
Sérénade pour trio à cordes, en ut majeur, op. 10 (Ernő von Dohnányi)
Cinq airs de La flûte enchantée, arrangés pour hautbois et violon (d'origine pour 2 violons) par Mozard (1792) : Wie stark ist nicht dein Zauberton (Tamino), Ach, ich fühl's... (Pamina), Der Vogelgänger bin ich ja (Papagano), Du feines Täubchen, nur Herein (Monostatos, Pamino, Papageno), Der Hölle Rache kocht in meinem Herzen (La Reine de la nuit)
Partia da Camera pour trio à cordes et hautbois, op. 88d (2009), Nicolas Bacri
J'arrive au Théâtre de la Ville pour écouter François Leleux, son épouse Lisa Batiashvili, Lawrence Power et Sebastian Klinger. Je me suis replacé au sixième rang pour fuir les effluves tabagiques de mon voisin.
Le hautboïste se met beaucoup en valeur dans le quatuor (transcrit) pour hautbois et cordes de Mozart (KV 285). Le trio de cordes qui l'accompagne fonctionne très bien puisque je n'ai pas l'impression de distinguer de parties dans le tout. J'apprécie particulièrement le deuxième mouvement tout en pizz.. Après une première tentative, il apparaît que la musique pour instruments à vents de Mozart parvient à m'être agréable.
Cependant, pour moi, le point fort du concert sera le trio pour cordes d'Ernő von Dohnányi. Dans les deuxième et troisième mouvements, je retrouve un peu du style de Janáček qui m'avait tellement plu lors d'un mémorable concert aux Bouffes du Nord. J'aime les pizz. du violoncelliste Sebastian Klinger qui effleure à peine les cordes du bout de ses doigts.
Après la pause, François Leleux et Lisa Batiashvili interprètent debout
des transcriptions dues à un certain Mozard
d'airs de La flûte
enchantée. La partie vocale est airs est confiée au hautbois dans
cette version. Je me demandais si les rôles ne seraient pas inversés pour
l'air de La Reine de la nuit, mais c'est bien du hautbois de
François Leleux que sont sorties ces notes aiguës.
Les quatre musiciens sont revenus pour interpréter une partita de chambre de Nicolas Bacri. Les sonorités sont tout ce qu'il y a de plus classique, on est très loin de ce qu'on entend parfois dans la musique contemporaine. Une exception toutefois : le deuxième mouvement Toccata est beaucoup influencé par le jazz. Le quatrième mouvement s'appelle Scherzo diabolico. Il me donne quelque peu le tournis par la virtuosité tout vol-du-bourdonesque qu'il exige. Je décroche complètement pendant le dernier mouvement. Un bis mozartien a conclu ce concert.
⁂
Opéra Comique — 2012-05-19
Catherine Ailloud-Nicolas, Giordano Ferrari, livret (d'après la fable d'Arrigo Boito)
Richard Brunel, mise en scène
Catherine Ailloud-Nicolas, dramaturgie
Thierry Thieû Niang, collaborateur aux mouvements
Bruno de Lavenère, décors et costumes
Laurent Castaingt, lumières
Carlo Laurenzi, réalisation informatique musicale Ircam
Jean Bresson, conseil scientifique Ircam
Olivier Hagen, assistant musical
Ester Pieri, assistant mise en scène
Émilie Roy, assistant décors
Pascale Paume, assistant costumes
Christophe Manien, Joël Soichez, chefs de chant
Alpha, conseil en prestidigitation
Émilie Valentin, conseil en marionnettes
Sylvain Cadars, ingénieur du son Ircam
Rodrigo Ferreira, Re Orso, un homme de pouvoir
Monica Bacelli, Ver, une femme du peuple
Marisol Montalvo, Oliba, épouse forcée du roi, une courtisane
Alexander Kravets, Trouvère, un courtisan
Geoffrey Carey, Papiol, bouffon
Piera Formenti, Daniel Carraz, Cyril Anrep, Des courtisans
Anthony Millet, Accordéon parlant
Piano robotisé, Trouvère bis
Électronique, Voix, sons, présences invisibles
Carlo Laurenzi, Marco Stroppa, Projection du son
Ensemble Intercontemporain
Susanna Mälkki, direction musicale
Re Orso, légende musicale de Marco Stroppa pour quatre chanteurs, quatre acteurs, onze instruments, voix et sons invisibles, spatialisation et totem acoustique (création)
Je me dirige ensuite vers l'Opéra Comique pour assister à la création de Re Orso, le premier opéra de Marco Stroppa. La création initialement prévue pour 2011 avait été reportée pour donner un délai supplémentaire au compositeur pour achever son travail.
Ce spectacle me semble bien meilleur que les trois autres créations d'opéra auxquelles j'ai assisté (Judith de Fénelon, Akhmatova de Mantovani, L'opéra de la lune de Pauset) 1. Pour cette première, le public n'était pas très nombreux. À quelques minutes du début de la représentation, la corbeille était pratiquement vide. C'est manifestement grâce aux effets du replacement qu'elle a paru un peu remplie pendant le spectacle. De mon côté, j'ai pu m'avancer de deux rangs au troisième balcon, sans quoi je n'aurais peut-être pas vu les surtitres. (À une époque, n'y avait-il pas des dispositifs de surtitrages complémentaires sur les côtés ?)
Le nombre de musiciens est très réduit. Ceci permet un aménagement particulier de la fosse d'orchestre. L'espace scénique se prolonge en effet jusqu'à cette fosse, ce qui permet aux chanteurs et comédiens de faire le tour de l'orchestre. De chaque côté, un escalier descend jusqu'aux musiciens. Le problème avec cette architecture est que lorsque les interprètes passent devant l'orchestre, un certain nombre de spectateurs, dont moi, ne voient plus ce qui se passe. Bêtement, un théâtre est conçu pour permettre aux spectateurs de voir ce qui se joue sur scène. Tous les spectateurs n'ont pas le privilège de pouvoir admirer toute la fosse d'orchestre... Sérieusement, chers metteurs en scène et scénographes, pensez au fait que vos spectacles sont destinés à être vus par le public...
Heureusement, l'essentiel se passe sur le plateau de scène. L'histoire racontée dans cet opéra est assez simple. Le roi Ours est un tyran (violeur, meurtrier, etc). Il est confronté à l'apparition spectrale du Ver qui lui rappelle ses méfaits. Alors qu'on fête son mariage avec Oliba (qu'il a forcée), il massacre presque tout le monde quand un trouvère se met à parler un peu trop à Oliba. Dans la deuxième partie de l'opéra, le roi se confesse, mais il n'obtient pas l'absolution. Il meurt misérablement, hanté par les personnages de la première partie.
Si le langage musical de Marco Stroppa m'est largement étranger, il n'a pas la laideur que j'ai trouvée la semaine dernière à celui de Brice Pauset. L'opéra comporte une sorte d'exposition, dans lequel une sorte de chœur raconte les méfaits du roi Ours. Les syllabes successives semblent être confiées à des interprètes différents : ce n'est qu'en mettant ensemble ce que les uns et les autres disent que l'on obtient (peut-être) des phrases complètes en italien. Pour le reste, le traitement des voix me plaît. La tessiture choisie pour le roi tyran est surprenante. J'avais beau avoir lu cette information avant de venir, quand Rodrigo Ferreira a chanté ses premières notes, ce fut une surprise pour moi. Ce choix doit donc être judicieux ! J'ai aimé l'ironie consistant à faire chanter d'une façon toute religieuse la terrible confession du roi. Dans le rôle du Ver, la mezzo-soprano Monica Bacelli m'a beaucoup impressionné. Dans celui d'Oliba, Marisol Montalvo explore le suraigu.
Une des choses que j'ai appréciées dans la musique de Marco Stroppa,
c'est le repère donné par le rythme. Toutefois, avec le raffut qui se passe
sur scène, la multiplicité des voix, les voix invisibles, la spatialisation
et le traitement électronique en temps réel, j'ai en permanence
l'impression de n'entendre qu'une toute petite partie des détails de la
musique. C'est frappant par exemple pendant les interventions du
trouvère bis
, un piano robotisé, dont on voit un nombre
invraisemblable de marteaux se déclencher simultanément.
La mise en scène associe les musiciens de l'Ensemble intercontemporain.
Ils monteront sur scène pour le grand pandémonium
, gros bazar qui
intervient autour de la mort de roi. La chef Susanna Mälkki restera un peu
plus longtemps à sa place puisqu'elle continue à diriger les chanteurs et
qu'elle a passé un costume à capuche qui fait d'elle le confesseur du roi.
Quand les musiciens seront sortis de scène, les chanteurs ne seront plus
accompagnés que par de la musique électronique, et brièvement par un
accordéon. Cette partie ne m'a paru ni plus ni moins intéressante que ce
qui avait précédé.
S'il y a eu quelques huées pour la mise en scène et le compositeur, le public m'a semblé accueillir cette création avec enthousiasme.
Ailleurs : Bladsurb.
[1] Je me rends compte du fait que je suis en train d'oublier The Second Woman de Frédéric Verrières qui m'avait pas mal plu.
2012-05-14 00:15+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Théâtre de Dijon — 2012-05-12
Jacques Prévert, livret
Brice Pauset, direction musicale
Damien Caille-Perret, mise en scène
Céline Perrigon, scénographie, costumes
Jérémie Papin, lumières
Adrien Béal, assistant du metteur en scène
Denis Comtet, chef assistant et chef de chœur
Angéline Pondepeyre, chef de chant
Joël Soichez, préparateur du chœur
Maurizio Prosperi, pianiste accompagnateur
Ateliers de l'Opéra de Dijon, réalisation des décors et costumes
Peggy Sturm, réalisation des costumes
Thomas and Neel, création des surtitres
Éditions musicales Henry Lemoine, édition de la partition
Luanda Siqueira, La Femme (soprano)
Jérôme Billy, L'Enfant (ténor)
Vincent Deliau, L'Homme (baryton)
Gilles Ostrowsky, L'Enfant/récitant
Jérémie Leymarie, L'Enfant (figurant)
Orchestre Dijon Bourgogne
Chœur de l'Opéra de Dijon
L'Opéra de la lune, Brice Pauset (création)
J'ai assisté samedi après-midi à la création de L'Opéra de la lune, le nouvel opéra de Brice Pauset, compositeur en résidence à Dijon. Cette première représentation ne s'est pas passée pour moi dans des conditions idéales. D'une part, il est difficile de rester éveillé alors qu'il fait une chaleur insupportable au fond du premier balcon. D'autre part, comment rester concentré quand on laisse entrer des retardataires et que de nombreux enfants et leurs accompagnateurs chuchotent un peu trop bruyamment. Je vois bien, mais l'acoustique n'est pas idéale ; elle me semblera meilleure au troisième balcon lors de la représentation du soir.
La musique de Brice Pauset me déplaît très franchement. Dans les parties orchestrales, aucune mélodie ou continuité ne se détache du bruit des instruments. J'éprouve de la sympathie pour le percussionniste qui par un mouvement de va et vient du poignet ininterrompu pendant environ trois minutes devra en quelque sorte évoquer le travail des habitants de la Lune pour l'embellir. Après son quasi-solo pour un instrument tout droit sorti du monde des Shadoks, le percussionniste semblait visiblement soulagé, mais sa main mettra un certain temps avant de retrouver une circulation sanguine normale... J'espère qu'aucune tendinite ne fera obstacle au bon déroulement des représentations suivantes.
Quand il faut bien faire chanter le ténor qui interprète le rôle de l'enfant qui rêve de la Lune, en plus de bruits divers, l'orchestre joue de longues notes continues, un sur-place auquel va se superposer un chant atonal d'un ennui profond (plus intéressant quand le rôle est interprété par Jérôme Billy que par Anthony Lo Papa, ce dernier étant plus convaincant dans son jeu scénique). Le seul intervalle autorisé entre deux notes successives semble être le demi-ton. Pendant la prononciation des voyelles d'à peu près toutes les syllabes, la ligne vocale oscille de façon très carrée entre deux notes consécutives. C'est très peu plaisant. Le seul avantage que je puisse voir à cette manière de faire est qu'elle préserve l'intelligibilité du texte. On ne peut pas en dire autant des parties chorales dont le texte est souvent rendu incompréhensible à dessein. La façon qu'ont le ténor et le chœur de rouler les r de façon exagérée est assez hoôoôoôrrrrrriîiîîpiîiîiîlaãaãaãnte.
Voilà pour la musique originale de Brice Pauset dans cet opéra pour un
unique personnage, l'enfant imaginé par Jacques Prévert. Ce personnage est
représenté triplement sur scène par le ténor, par un comédien qui est à la
fois l'enfant et un récitant, et par un enfant-figurant. Trois personnes
sur scène pour incarner un seul personnage, je pense que c'est au moins une
de trop... Les membres du chœur constituent un autre personnage, les
gens
qui interrogent l'enfant sur son rêve lunaire.
Dans cet opéra, toute la musique n'est pas de Brice Pauset. Des Lieder
évoquant la Lune ont en effet été insérés. Ils sont chantés par la Femme et
l'Homme, deux personnages qui ne semblent pas avoir de lien avec le reste
de l'histoire... Si certains programmes de concerts donnent l'occasion
d'entendre deux versions d'une œuvre (comme l'intelligent
programme du Britten Sinfonia en février à Dijon), je trouve ridicule
de faire chanter cinq fois le même texte de Goethe “An den Mond” par les
solistes, quand bien même il s'agirait de compositions différentes par
quatre compositeurs (Schubert, Himmel, Reichardt, Zelter). On voit ainsi
cinq fois Tu emplis à nouveau buissons et vallons
paraître dans les
surtitres... Un lied de Schubert sur un texte de Hölty fait exception. Ces
interludes rompent le déroulement de l'opéra, mais ce seront les seuls
moments qui me seront un peu agréables à l'oreille. Malheureusement,
l'orchestration est de Brice Pauset et si on entend parfois quelques
décorations intéressantes, j'ai globalement le sentiment qu'il a pourri le
matériau musical d'origine. Comment peut-on écrire une musique d'une telle
laideur ? Je n'apprécie guère sa façon d'utiliser systématiquement les
cuivres (en sourdine) et le registre grave des cordes (aux déplaisants
coups d'archets). Chez les vents, le basson est curieusement
sous-utilisé.
Je ne suis pas un grand admirateur de Schumann, mais Brice Pauset a
pareillement maltraité les Kinderszenen dont on reconnaît des
citations tout au long de l'opéra. Ce sont les numéros de ce cycle pour
lesquels Brice Pauset a préservé l'essentiel de la partition pour piano qui
m'ont le plus plu. D'ailleurs, le piano était en quelque sorte un piano
préparé
puisque la pianiste passait une partie de son temps à déplacer
devant elle des petits objets (que je ne distinguais pas depuis ma
place).
Malgré la musique, le spectacle se laisse regarder. La Lune et les astres sont représentés par des cubes qui sont aussi ceux avec lesquels pourrait jouer l'enfant. Un assemblage de cubes beaucoup plus gros constitue un décor mobile au milieu de la profondeur de la scène. Quand la vision de la lune de l'enfant sera dévoilée, une représentation abstraite apparaîtra à l'arrière-plan et d'autres éléments plus concrets pourront surgir.
Globalement, je ne suis pas enthousiaste. Cependant, quand on sait que l'avant-dernière commande de l'Opéra de Paris était Akhmatova de Bruno Mantovani, qui y maltraitait encore plus la voix que ne le fait Brice Pauset dans L'Opéra de la lune, je me dis qu'avec les moyens qui sont les siens, l'Opéra de Dijon n'a vraiment pas à rougir de la comparaison...
2012-04-17 14:17+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2012-04-16
Peter Mattei, Don Giovanni
Paata Burchuladze, Il Commendatore
Patricia Petibon, Donna Anna
Saimir Pirgu, Don Ottavio
Véronique Gens, Donna Elvira
David Bizic, Leporello
Nahuel Di Pierro, Masetto
Gaëlle Arquez, Zerlina
Marius Stieghorst, direction musicale
Michael Haneke, mise en scène
Christoph Kanter, décors
Annette Beaufays, costumes
André Diot, lumières
Alessandro Di Stefano, chef de chœur
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
Don Giovanni, Mozart.
Je n'ai pas pris un plaisir fou en allant voir Don Giovanni à Bastille. Même pour cet opéra, qui s'il n'est pas mon préféré m'avait cependant procuré beaucoup de plaisir au TCE il y a deux ans, l'Opéra Bastille s'avère incapable de m'émouvoir. Ce n'est pas de la faute de la mise en scène remarquable du cinéaste Michael Haneke mettant l'accent sur les cruels antagonismes entre classes sociales (cols blancs et cols bleus) dans un immeuble de bureaux. Ce qui m'a manqué ce soir, c'est le plaisir musical. Pour tout dire, l'Orchestre me procure davantage de plaisir quand il joue La Bayadère de Minkus ! À vrai dire, ce n'était pas exactement le même orchestre qui jouait puisqu'il y a en fait deux orchestres à l'Opéra (les bleus et les verts). Lors des représentations du ballet La Source où les deux formations alternaient, j'avais déjà eu l'occasion de constater qu'un des deux orchestres avait ma préférence... N'étant pas expert en mozartitude, je ne saurais dire exactement ce qui m'a déplu, mais les symptomes étaient présents dès l'ouverture. Parmi les explications possibles, l'effectif musical peut-être un peu trop bourrin pour ce répertoire : quatre contrebasses, cela ne favorise pas vraiment la légèreté. Du gros son, bref, pas vraiment une interprétation baroquisante... Les effets sont parfois brutaux, manquant de rondeur. Les cordes et les vents me donnent parfois l'impression d'être dans des mondes parallèles.
Quand les chanteurs commencent à utiliser leur voix, un soupçon s'installe en moi : sont-ils sonorisés ? Je présume que les mécanismes de financement occulte des précédentes campagnes présidentielles seront complètement mis au jour avant que l'on dispose d'une réponse définitive à cette question...
Dans les prestations vocales, je retiens d'abord celles de Saimir Pirgu (Don Ottavio) et Gaëlle Arquez (Zerlina), et pour mentionner aussi les premiers rôles, Véronique Gens (Donna Elvira), tout particulièrement dans son grand air du deuxième acte. La présence scénique de Peter Mattei (Don Giovanni) est tout à fait impressionnante...
Parmi les sources de déplaisir, il faut mentionner l'insupportable public de l'Opéra Bastille. L'intervention finale du Commandeur est intervenue à l'entour de 23h. J'avais du mal à croire le compte-rendu Laurent/Paris—Broadway à propos d'un concert londonien, mais je peux maintenant faire le même constat : on trouve encore de nos jours des gens qui ont une montre qui bippe toutes les heures et qui ne pensent pas à la laisser chez eux quand ils vont voir un spectacle (ce genre de montre, cela ne devrait être bon que lorsqu'on est au collège et que le bip est couvert par les sonneries périodiques annonçant la fin des cours, non ?). Bref, cela a bippé, bippé et encore bippé. Après l'entr'acte, mon nez s'est retrouvé agressé par une odeur de tabac venant de quelque voisin, lequel se passait souvent la main sur ses joues (ce qui à moins d'avoir un rasage impeccable ne saurait être silencieux...). Un peu plus loin, quelqu'un fouille occasionnellement dans un sac en plastique. Bien sûr, cela bavarde et tousse de partout. Des spectateurs sont manifestement entrés dans la salle avec leur coupe de champagne puisque quelques unes d'entre elles se sont dénoncées bruyamment. En 2012/2013, hors ballets, je n'ai prévu qu'une seule sortie à Bastille pour voir un opéra (La Khovantchina). Je vais essayer de m'y tenir... C'est un comble que la chose la plus plaisante que je puisse associer à cette soirée soit la pièce de 2€ de 2011 ci-contre célébrant les trente ans de la Fête de la musique qui s'est trouvée en ma possession après avoir pris un café.
J'avais déjà remarqué pareil dispositif quand j'étais allé voir La Dame de Pique en février. Ce soir également, un paravent permettait à quelques personnes situées dans une gallerie d'utiliser une lumière pour feuilleter la partition posée sur un pupitre sans gêner visuellement les autres spectateurs :
Est-ce un dispositif nécessaire au bon déroulement de la représentation (déclenchement des surtitres, tournage de boutons pour l'amplification des voix, etc.) ? S'agit-il d'étudiants en musique ? Je suis preneur de toute information ou hypothèse à ce sujet !
Ailleurs : Pink Lady.
2012-04-11 09:35+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse
Théâtre du Châtelet — 2012-04-10
Franco Pomponi, Richard Nixon
Alfred Kim, Mao Zedong
June Anderson, Pat Nicon
Sumi Jo, Jiang Qing (Madame Mao)
Kyung Chun Kim, Zhou Enlai
Peter Sidhom, Henry Kissinger
Sophie Leleu, Nancy Tang, première secrétaire de Mao
Alexandra Sherman, Deuxième secrétaire de Mao
Rebecca de Pont Davies, Troisième secrétaire de Mao
Hai Wen Hsu, Salem Sobihi, Danseurs solistes
Orchestre de chambre de Paris
Chœur du Châtelet
Alexander Briger, direction musicale
Chen Shi-Zheng, mise en scène et scénographie
Shilpa Gupta, décors
Petra Reinhardt, costumes
Alexander Koppelmann, lumières
Yin Mei, collaboratrice à la chorégraphie
Olivier Roset, vidéaste
Stephen Betteridge, chef de chœur et assistant du chef d'orchestre
Nathalie Steinberg, chef de chant
Sylvie Leroy, pianiste répétitrice
Elsa Lambert, pianiste chœur
Rob Kearley, Christophe Gayral, assistants à la mise en scène
Doriane Fréreau, assistant aux décors
Frédéric Llinares, assistant aux costumes
Nixon in China, opéra en trois actes de John Adams sur un livret d'Alice Goodman
J'aime bien John Adams. J'avais entendu pour la première fois sa musique dans le ballet Parzival de John Neumeier. J'avais alors beaucoup aimé Harmonielehre. Plus tard, au disque, j'ai adoré son concerto pour violon électrique The Dharma at Big Sur. J'ai un revanche presque détesté son opéra Doctor Atomic dont j'ai visionné le DVD et en particulier son interminable deuxième acte où il est question de la météo avant le premier essai nucléaire. En concert, je n'ai pas davantage aimé la Doctor Atomic Symphony qui en est tirée. C'était après l'annonce de la programmation 2011/2012 du Théâtre du Châtelet. Sans avoir donc de prévention particulière, j'avais donc réservé une place assez chère pour la première représentation de la nouvelle production de Nixon in China qui avait lieu ce mardi.
John Adams a une façon bien à lui d'associer vents et cordes. Cette
manière apparaît notamment dans les passages les plus
impressionnants
qui me procurent le plus grand plaisir. Cependant,
je suis presque choqué par l'aspect répétitif de cette œuvre. Elle me
semble découpée en tranches d'environ deux minutes. Quelques vents ou le
synthé répètent un motif très court, d'autres motifs durant une mesure sont
joués par d'autres instruments. Quelques phrases musicales plus longues
sont brodées par dessus. La musique ne fait pas non plus complètement du
sur place puisque les harmonies changent régulièrement, et ce de façon
abrupte. À ces répétitions s'ajoutent parfois des notes surgissant
d'une façon qui pourrait laisser à penser qu'elles reviendraient avec
régularité lors des mesures suivantes, mais le compositeur semble s'être
amusé à surprendre l'auditeur en mettant un peu d'aléatoire dans ces
surgissements. Quelques cassures et dégradés rythmiques sont également à
signaler.
Pendant le premier acte, j'ai ainsi eu l'impression d'entendre une première ambiance se développer pendant quelques minutes, puis très brutalement une deuxième est entrée en scène sans aucune transition. Ces changements de Raga peuvent très bien survenir au milieu de l'intervention d'un chanteur, ce qui est assez surprenant.
La façon dont la voix est traitée ne me plaît pas énormément. Cela me
déplaît toutefois moins que dans Doctor Atomic. Le texte d'Alice
Goodman est assez subtil, mais la mise en musique fait un peu brut de
décoffrage
. Comme dans Doctor Atomic, les rares exceptions au
récitatif sont le fait des personnages féminins interprétés par June
Anderson (Pat Nixon) et Sumi Jo (Madame Mao) à qui on a confié quelques
acrobaties vocales.
Pendant le prélude, des vidéos d'époque des États-Unis d'Amérique et de la Chine sont projetées. Quelle époque exaltante cela devait être !.. Le premier acte montre l'arrivée de Nixon en Chine. Il est accompagné par sa femme et Henry Kissinger. Ils sont accueillis par Zhou Enlai puis par Mao Zedong qui semble s'intéresser davantage à la philosophie qu'à la politique.
Comme on peut le constater presque tous les jours à notre époque où ce type de rencontres est très fréquent, l'opéra met très bien en évidence que la communication par images et le storytelling sont aussi mensongers qu'ils ne sont pas nouveaux...
Je me suis un peu plus laissé emporter par la musique du deuxième acte, en particulier pendant la grande scène au cours de laquelle Nixon assiste à une représentation du Détachement féminin rouge (représentation qui dégénère en Révolution culturelle, les héroïnes finissant par être forcée à s'humilier lors de séances d'autocritique). La chorégraphie et la danseuse soliste Hai Wen Hsu méritent que les balletomanes se déplacent !
En revanche, le troisième acte pendant lequel les personnages rêvassent à propos de leur jeunesse, je l'ai trouvé d'un ennui mortel.
2012-03-15 11:53+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2012-03-14
Stéphane Degout, Pelléas
Vincent Le Texier, Golaud
Franz Josef Selig, Arkel
Julie Mathevet, Le petit Yniold
Elena Tsallagova, Mélisande
Anne Sofie von Otter, Geneviève
Jérôme Varnier, Un berger, Le médecin
Philippe Jordan, direction musicale
Robert Wilson, mise en scène et décors
Giuseppe Frigeni, co-metteur en scène
Frida Parmeggiani, costumes
Heinrich Brunke, Robert Wilson, lumières
Holm Keller, dramaturgie
Alessandro Di Stefano, chef de chœur
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
Pelléas et Mélisande, Claude Debussy
Jusqu'à ce soir, je n'avais vu qu'un seul spectacle mis en scène par Robert Wilson. C'était il y a cinq ans avec La Passion selon Saint Jean au Châtelet. Si on voulait être méchant, on pourrait dire que ses spectacles se voient aussi bien, sinon mieux, en photo. Et des photographies de ses mises en scènes, j'en ai en effet vu un certain nombre. En vrai, c'est pareil. En dehors du presque bondissant petit Yniold et des éléments plus ou moins géométriques qui constituent le décor et qui se meuvent entre les tableaux, tout est extrêmement statique. Ce n'est pour autant pas le statisme flasque des metteurs en scène je-m'en-foutistes. Non, c'est un statisme tendu qui doit demander un certain effort physique aux chanteurs, surtout au niveau des bras et des épaules.
Depuis mon tout dernier rang de premier balcon de côté, je suis étonné de si bien entendre. La distribution vocale est absolument formidable. J'avais adoré le Golaud de Laurent Naouri au TCE l'année dernière, celui de Vincent Le Texier, plus froidement inquiétant, m'a également beaucoup plu ! L'Arkel de Franz Josef Selig est impérial. Dans le rôle de Mélisande, j'ai été ravi d'entendre Elena Tsallagova que je n'avais entendue que dans La petite renarde rusée et dans d'adorables rôles de moindre importance (Waldvogel dans Siegfried notamment). J'ai également pu réentendre Anne Sofie von Otter (Geneviève) que je n'avais pas vue depuis 2004 (dans un Couronnement de Poppée au TCE). N'ayant pas la possibilité de voir les surtitres depuis ma place, j'ai été heureux que le français de ces chanteurs soit parfaitement intelligible. On ne peut pas en dire tout à fait autant de Stéphane Degout (Pelléas) dont la voix est un peu trop lyrique, mais son texte restait tout de même à peu près compréhensible. Scéniquement moins contraint que les autres, le seul personnage qui parvienne à m'émouvoir, un peu, est Mélisande. Bref, le plaisir tiré de la mise en scène est légèrement glacé. Celle de Stéphane Braunschweig vue à l'Opéra Comique en 2010, quoiqu'elle fût aussi assez sobre, me semblait plus apte à maintenir un intérêt et à émouvoir.
Plus que des images, le plaisir vient de la musique. Des voix, bien sûr, mais surtout de l'orchestre, dirigé par Philippe Jordan. Le son est merveilleux, aussi bien chez les cordes que chez les vents (et tout particulièrement les hautbois et le cor anglais). Certains aspects illustratifs de la musique de Debussy que je n'avais jamais soupçonnés dans cet opéra paraissaient ici flagrants ! Les moments orchestralement les plus tendus m'ont semblé irrésistibles. Comme les coups de timbales au début du quatrième acte ont bien sonné !
Ailleurs : Zvezdo, Palpatine, Grignotages.
2012-03-12 10:12+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Théâtre des Champs-Élysées — 2012-03-11
Lioba Braun, Isolde
Stephen Gould, Tristan
Matthew Best, Marke
Brett Polegato, Kurwenal
Christianne Stotijn, Brangäne
Ben Johnson, Un marin, un timonier
Benedict Nelson, Melot, un berger
accentus
Pieter-Jelle de Boer, chef de chœur
Orchestre Symphonique de Birmingham
Andris Nelsons, direction
Tristan und Isolde, Richard Wagner
Côté spectacles, après le concerto en fa de Gershwin, les concerts du Chamber Orchestra of Europe (1, 2, 3), le Rundfunk-Sinfonieorchestrer Berlin et Jayanthi Kumaresh et Purbayan Chatterjee, mon mois de mars s'annonce presqu'aussi prometteur que celui de novembre dernier (la Naïla de Myriam Ould-Braham (×2), Lulu, Britten/Chostakovitch par le Philhar', Shakuntala au Cente Mandapa, Ananda Devi au Louvre, La symphonie fantastique (×2), Mallika Thalak (×2), Laxmi Myriam Quinio, Musique russe pour le Colonne, Batiashvili/Leleux et al. au TCE, Jephta, Shahid Parvez, LSO/Gergiev/Chostakovitch (×2) ; je n'ai gardé dans cette liste que le meilleur !).
Si entretemps, je ne suis pas vraiment rentré dans le Didon & Énée donné à l'Opéra Comique, j'ai par contre beaucoup aimé la représentation de l'opéra Tristan und Isolde donné en version de concert au TCE. C'était mon deuxième Tristan et Isolde. La première fois, j'avais eu du mal à ne pas m'endormir. Ce soir, avec l'orchestre symphonique de Birmingham dirigé par Andris Nelsons, je n'ai pas eu ce problème.
Depuis janvier 2011, je me prépare soigneusement aux représentations des opéras de Wagner auxquelles je vais assister : d'abord Siegfried, puis Parsifal, Le Crépuscule des Dieux, le Ring Saga et Tannhäuser. Je me suis ainsi préparé une fiche sur la base des motifs mentionnés dans Le voyage artistique à Bayreuth de Lavignac et je me suis écouté un enregistrement (Barenboim, Bayreuth 1995) en suivant sur la partition d'orchestre, ce qui permet parfois de voir des motifs avant de les entendre ou de remarquer des détails d'orchestration qui sinon pourraient passer inaperçus.
J'avais vu Andris Nelsons diriger l'Orchestre de Paris dans un programme Beethoven/Strauss (Eine Alpensinfonie). Je n'en ai pas parlé ici, donc allez voir les billets de Klari, andante con anima ou Palpatine. Le style de direction assez unique de ce chef m'avait enthousiasmé. Si j'avais jusqu'à maintenant quelque mal à distinguer son nom de celui de Mariss Jansons (avec lequel il a d'ailleurs travaillé, je me sens moins bête, du coup), après la représentation de ce soir au TCE, je pense que je garderai son nom en mémoire pendant un petit moment.
Mon placement est un tout petit peu meilleur que pour le concert de Jonas Kaufmann. Je suis deux rangs devant, mon champ de vision se réduit à la moitié de l'orchestre située à la gauche du chef. Par chance, Isolde et Brangäne apparaissent de ce côté, ce qui me permettra d'apprécier les trois robes portées par l'héroïne acte après acte. Je vois aussi Tristan et en me penchant un peu, je peux apercevoir Kurwenal, et parfois Marke.
Le chef dirige le plus souvent assis sur une chaise haute. Quand il se
lève, c'est pour déchaîner l'orchestre, parfois au prix d'un sonore appui
du pied sur l'estrade. Chez les cordes, je ne vois que les violons et les
altos. L'impression visuelle est très forte (quoique que parfois moins
irréprochablement rigoureuse que celle du Rundfunk-Sinfonieorchester Berlin entendu mardi). J'éprouve
quelques craintes avec l'interprète du rôle d'Isolde (Lioba Braun) au
premier acte tant l'orchestre la met à l'épreuve, mais ces craintes
s'évanouiront dans le deuxième acte, absolument sublime. L'instant du
Regard entre Isolde et Tristan a été fantastique, leur duo subséquent très
émouvant, les mises en gardes de Brangäne (Christianne Stotijn) s'y
incisant très harmonieusement. Le fait d'avoir travaillé les motifs avant
m'a sans doute fait apprécier encore davantage ce concert (et je ne me suis
pas senti perdu lors de la panne de surtitrage au milieu du deuxième
acte !). Cela dit, je basculais parfois du mode analytique
au mode
intuitif-émotif
...
Dans le troisième acte, le premier rôle est celui de Tristan, formidablement bien chanté par Stephen Gould (ok, il y a eu un ou deux mini-couacs). Je ne connaissais aucun des chanteurs de cette distribution. J'ai particulièrement aimé aussi Matthew Best dans le rôle de Marke. Chez les vents, le cor anglais (très beau solo joué depuis les coulisses) et la clarinette-basse se sont particulièrement distingués !
Quand Lioba Braun a commencé à chanter Mild und leise..., j'ai
oublié mes autres références dans le rôle d'Isolde et me suis laissé
entraîner par la musique qui s'est conclue par un long silence respectueux
pendant lequel j'ai bien eu du mal à contenir mes émotions. (L'abruti qui
avait crié Bravo
un micro-pouillème de seconde après la fin du
premier acte n'a heureusement pas récidivé !)
Ailleurs : Paris Broadway, Mes bouquins refermés.
2012-02-10 00:48+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse
Opéra Garnier — 2012-02-09
Maria Riccarda Wesseling, Nicolas Paul, Orphée
Yun Jung Choi, Alice Renavand, Eurydice
Zoe Nicolaidou, Charlotte Ranson, Amour
Balthasar-Neumann Ensemble & Chor
Ballet de l'Opéra
Pina Bausch, chorégraphie, mise en scène (1975)
Rolf Borzik, décors, costumes, lumières
Detlef Bratschke, chef des chœurs
Manlio Benzi, direction musicale
Orphée et Eurydice, Gluck
Il est scandaleux que sur les affiches de la reprise d'Orphée et
Eurydice à l'Opéra Garnier, on ne lise en sous-titre que opéra
dansé de Pina Bausch
. Un opéra, fût-il opéra-ballet, reste avant tout
l'œuvre de son compositeur : Christoph Willibald Gluck.
C'est de la fabuleuse interprétation de cette musique qu'est venu l'essentiel de mon plaisir lors de cette représentation. J'étais pourtant quelque peu dubitatif pendant la première partie deuil (une atmosphère dans laquelle le spectateur est immédiatement plongé du fait de l'omission de l'ouverture). J'avais alors l'impression d'entendre des effets un peu exagérés et parfois mal dégrossis ; le petit nombre de cordes (une seule contrebasse) fait que parfois certaines aspérités dépassent. En tout cas, il est évident que l'on est dans une interprétation überbaroque complètement assumée (bref, on ne joue pas uniquement ce qui est écrit !). Mon état d'esprit a changé à partir de la deuxième partie violence. L'entrée en matière ne ressemblait aucunement à mes souvenirs et références (la même production il y a trois ans, la version Berlioz à la MC93 Bobigny, et au disque René Jacobs et le Freiburger Barockorchester). L'entrée aux enfers se faisait ainsi au son vertigineusement ébouriffant des trombones à coulisses qui ne se contentent pas de tenir la note, mais qui en augmentent progressivement le volume de façon saisissante (je soupçonne les instrumentistes d'avoir aussi glissandé un peu). Pendant ce temps, le chœur alterne les postures. Pris dans l'action, il repousse Orphée de violents Nein!. Parfois, il commente comme un chœur grec : la musique ressemble alors davantage à un choral.
Dans la troisième partie paix, la musique s'adouçit. Paisiblement, les cordes ou le chœur se lancent dans des gammes ascendantes puis descendantes. Dans la quatrième partie mort, je retiens la très subtile interprétation de l'air J'ai perdu mon Eurydice, rien n'égale mon malheur (traduit en allemand en Ach, ich habe sie verloren, all mein Glück ist nun dahin !). Si l'interprète de ce rôle ne m'avait pas complètement convaincu jusque là (sa voix était par moments couverte par l'orchestre), elle a été superbe dans cet air-là. Dans la fosse, les pupitres ne cordes exploraient diverses techniques pour passer d'une note à une autre : parfois avec souplesse, parfois avec raideur, l'ensemble étant du meilleur effet. La conclusion reprenant la musique du début de la deuxième partie n'a évidemment pas été pour me déplaire !
Du côté des deux autres rôles principaux (Eurydice et Amour), j'ai aimé la façon de chanter assez mozartienne des deux chanteuses, et tout particulièrement Zoe Nicolaidou (Amour) qui est issue de l'Atelier Lyrique.
Si le ravissement a été presque total du côté de la musique, j'ai seulement aimé ce que j'ai vu, sans être enthousiasmé. Mon mauvais placement y est sans doute aussi pour quelque chose. Certes, c'est très esthétique (surtout dans la partie paix), mais cela manque de rugosité, certains gestes paraissant un peu trop lisses par rapport à ce que j'ai été habitué avec d'autres chorégraphies de Pina Bausch. À vrai dire, je trouve que cela manque un peu de danse, et surtout cela manque de solos et pas de deux... Cela dit, les ensemble m'ont plutôt convaincu, tout comme la brève apparition en Amour de Charlotte Ranson (qui danse ensuite dans le corps de ballet). Après avoir vu Le Sacre du printemps, il m'est difficile de revoir une autre pièce de Pina Bausch...
2012-01-28 17:10+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Mise à jour du 15 mars : Ce billet a été écrit alors que seule la tarification pour le Ring 2013 était connue. L'annonce de l'ensemble de la saison 2012/2013 confirme les craintes exprimées ici.
Les personnes suivant l'actualité de l'Opéra Bastille avaient entendu parler d'un projet de modification du dispositif de surtitrage pour que ces surtitres soient visibles de partout. Plus récemment, un article de propagande du Figaro faisait dire au directeur Nicolas Joel (sans tréma) :
Sur le plan tarifaire, depuis trois ans, les places n'augmentent pas. Elles vont même baisser la saison prochaine...
Tant de mauvaise foi en si peu de mots... D'un air désabusé, sur le
forum ODB, j'avais imaginé le pire :
Vu que des travaux pour que les surtitres soient visibles de partout ont
été annoncés, pourquoi ne pas faire disparaître la catégorie 7 (ou ne
laisser à la rigueur que les deuxièmes rangs de galeries et les 4
strapontins du deuxième balcon)...
.
Par curiosité, j'avais demandé il y a quelques semaines à recevoir la brochure pour le Ring 2012/2013 à l'Opéra Bastille (que j'ai déjà vu sur les années 2010 et 2011 : Das Rheingold, Die Walküre, Siegfried, Götterdämmerung). Je ne l'ai reçue qu'aujourd'hui, et j'ai pu constater que ma prédiction de malheur s'est réalisée.
Voici le plan de salle 2011/2012 :
Et voici celui de 2012/2013 :
Si vous n'avez pas l'habitude de ce plan, vous n'y voyez pas grand'chose, c'est normal... Le code couleur est le même dans les catégories Optima et 1-6. Les catégories 7-8 sont en blanc sur ce deuxième plan parce que ces places ne sont pas proposées par abonnement. Pour y voir plus clair, concentrons-nous sur un détail, le premier balcon de côté :
J'espère ne pas faire d'erreur de comptage, mais à gauche, on a 2 rangs rouges, 3 rangs bleus, 2 rangs bleu ciel, et 3 rangs orange (les hachures violettes correspondent à une tarification différente pour les ballets). Dans chaque colonne de dix rangs, on avait ainsi donc 2 places de catégorie 1, 3 places de catégorie 2, 2 places de catégorie 4 et 4 places de catégorie 7. Au tarif des superproductions (ratées, en général), cela fait 2×170€+3×150€+2×105€+3×15€=1045€.
À droite, il semble qu'il y ait 3 rangs rouges (catégorie 1), 2 rangs bleus (catégorie 2), 1 rang jaune (catégorie 3), 2 rangs bleu ciel (catégorie 4), 1 rang violet (catégorie 5) et 1 rang vert (catégorie 6). Avec le nouveau tarif (avant ristourne spécial Ring), cela nous fait 3×155€+2×135€+1×115€+2×90€+1×70€+1×35€=1135€.
À vrai dire, je m'aperçois du fait que la grille proposée (155€/135€/115€/90€/70€/35€) ressemble beaucoup à la grille du tarif N actuel (celle utilisée cette année pour les reprises de Don Giovanni et Rigoletto). Comme annoncé dans l'article du Figaro mentionné ci-dessus, elle correspond à une baisse de 5€ en catégories 4/5/6 par rapport au tarif N 2011/2012 : 155€/135€/115€/95€/75€/40€ (catégorie optima inchangée à 180€). Si je refais le calcul du prix d'une colonne de premier balcon de côté, j'obtiens 2×155€+3×135€+2×95€+3×15€=950€.
On nous annonce une baisse des tarifs et effectivement on observe une baisse de 5€ dans certaines catégories de places, mais pourtant on passe de 950€ de recettes par colonne de premier balcon de côté à 1135€ (environ 19% de hausse). Vous l'avez deviné depuis le début, il suffisait de changer les couleurs du plan de salle. On a vu le principe avec le premier balcon, mais il y a d'autres glissements de frontières entre catégories à d'autres endroits (en particulier au parterre). La seule bonne nouvelle que je voie est qu'au centre du deuxième balcon, il y a trois rangs qui passent de 75€ à 35€ (48 places).
Les conséquences immédiates, c'est que les gueux qui prenaient des places 15€, après avoir été écartés du parterre lors de la saison 2011/2012, seront écartés du premier balcon en 2012/2013. Il ne leur reste plus que 4 misérables strapontins au deuxième balcon et des places aux galeries. Vertigineux, s'abstenir.
Tant que j'y suis, je vous donne la grille tarifaire du Ring 2012/2013 incluant la remise (en divisant les chiffres par 4 pour garder un prix par représentation plutôt que par cycle) :
Catégorie de prix | Optima | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 |
Sans remise | 180€ | 155€ | 135€ | 115€ | 90€ | 70€ | 35€ |
Avec remise spéciale ring | 144€ | 124€ | 114€¾ | 97€¾ | 81€ | 63€ | 35€ |
Taux de remise | 20% | 20% | 15% | 15% | 10% | 10% | 0% |
(Précision : ce sont les tarifs pour les cycles s'étendant sur plusieurs mois. Ceux du cycle de juin 2013 sont plus chers (et excluent pour le moment les catégories 5 et 6) : ajouter environ 60% puis 4×15€=60€ de programmes en vente liée.)
La TVA est traditionnellement considérée comme un impôt injuste par la gauche parce que le même taux s'applique à tout le monde, que l'on gagne peu ou beaucoup. Le principe de la redistribution fiscale (qui est plus ou moins celui de l'impôt sur le revenu), c'est d'appliquer un taux d'autant plus élevé que les revenus sont importants. L'Opéra applique une idéologie toute contraire. Si le même taux de réduction avait été appliqué à toutes les catégories, les réductions les plus importantes auraient déjà été accordées aux catégories les plus chères (puisque la réduction aurait été proportionnelle au prix), mais avec ce taux de réduction variant dans le mauvais sens, l'injustice est plus grande encore.
Du point de vue artistique, les rumeurs à propos de la saison 2012/2013 laissent à penser qu'elle sera globalement encore moins intéressante que la saison 2011/2012. Qu'aller à l'Opéra Bastille devienne inabordable fournit une raison de plus pour ne plus trop fréquenter ce lieu. L'herbe est peut-être plus verte ailleurs...
PS: Pour donner une idée de la façon dont les classes moyennes sont éjectées de l'Opéra Bastille, jusqu'à la saison 2010/2011, il y avait environ 320 places à 20€ et moins, en 2011/2012, 165 places (à 15€ et moins, le tarif à 20€ ayant disparu) et a priori, en 2012/2013, il n'en resterait plus qu'à peu près 85. Deux baisses consécutives de 50%, ça fait une baisse de 75%...
Voir aussi le billet de David-fomalhaut.
2012-01-18 01:36+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Théâtre des Bouffes du Nord — 2012-01-17
Nicolas Chesneau, piano
Jérôme Billy, Koudriach
José Canales, Tichon Kabanov
Mathilde Cardon, Glasa
Elena Gabouri, Kabanicha
Paul Gaugler, Boris
Douglas Henderson, Kouliguine
Michel Hermon, Saviol Dikoj
Kelly Hodson, Katia
Céline Laly, Varvara
André Engel, mise en scène
Irène Kudela, direction musicale et études linguistiques
Ruth Orthmann, collaboration artistique
Nicky Rieti, scénographie
Chantal De la Coste-Messelière, costumes
André Diot, création lumières
Pippo Gomez, création son
Guillaume Lepert, régisseur plateau
Gérard Caldas, Grégoire Boucheron, régisseur lumière
Romain Vuillet, régisseur son
Béatrice Boursier, Siegrid Petit-Imbert, couturières
Kátia Kabanová, version de chambre de l'opéra de Leoš Janáček
Je ne sais pas pourquoi Nicolas Joel, le directeur de l'Opéra de Paris avait eu l'idée saugrenue de remonter la production de Salomé mise en scène par André Engel. Cela ne donnait pas très envie d'aller voir d'autres spectacles de ce metteur en scène. Heureusement, j'avais alors déjà acheté ma place pour la première de Kátia Kabanová mise en scène par celui qui avait déjà été l'auteur d'une belle production d'un autre opéra de Janáček : Příhody Lišky Bystroušky.
En m'installant à la corbeille, je peux déjà voir que le décor s'inscrit parfaitement dans le lieu. Ce décor est une terrasse surélevée à laquelle on accède à l'avant par un petit escalier. Un autre escalier est situé à l'arrière (côté jardin). Une porte à l'arrière de la terrasse sert d'entrée pour les rendez-vous nocturnes. La terrasse a la même couleur noire que le sol du théâtre et les surfaces verticales du décor sont en rouge-Bouffes-du-Nord. (Comme j'ai aperçu David, il sera sans doute possible de voir quelques photographies chez lui.)
Quand le personnage de Kátia entre sur scène, on sait immédiatement comment elle se donnera la mort. Elle s'approche en effet dangereusement du parapet de la terasse. Elle répétera plusieurs fois ce mouvement. Que ce geste devienne une évidence permet de mieux distinguer les nombreuses annonces de la mort de l'héroïne qui se trouvent dans le texte. Il n'y a pas d'autre issue possible.
Si la récente superproduction Manon était dénuée de théâtre, cette mise en scène n'en manque pas ! Le tyrannique personnage de Kabanicha mène tout le monde. Amorphe, son fils Tichon obéit sans réfléchir. Elle flagelle son amant Saviol qui ne demande que ça. Quand Kátia est morte, elle s'empare de son alliance et la met à son doigt...
La scène de l'orage est accompagnée de sons enregistrés et d'éclairages qui se propagent dans tout le théâtre pour donner l'illusion de la survenue d'éclairs. Les ruines que Kouliguine et Koudriach explorent et éclairent de leurs lampes au début de ce troisième acte ne sont rien moins que le théâtre lui-même ! Avec le décor, c'est véritablement une production sur mesure pour les Bouffes du Nord !
Une autre originalité de la mise en scène est la façon dont se passe le récit que Kátia fait à son amie Varvara de son rêve d'un amour (qui s'oppose forcément à sa morale chrétienne). La scène devient pour ainsi dire un duo d'amour tant Kátia se comporte comme si Varvara était son amant.
Tout cela est fort bien mené, on ne s'ennuie pas une seconde et on est tout étonné que cela se termine si vite. Les chanteurs (et particulièrement l'interprète du rôle de Kátia : Kelly Hodson) m'ont fait une bonne impression. Par rapport à l'expérience semblable qu'avait été La Flûte enchantée de Peter Brook, s'agissant d'une musique que je connais beaucoup moins, et dont j'ai pourtant pu apprécier l'extrême beauté dans toute sa richesse orchestrale il y a un an à Garnier, la magie opère moins sur moi du fait de la réduction de la musique au piano seul.
2012-01-15 01:56+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2012-01-14
Natalie Dessay, Manon
Giuseppe Filianoti, Le Chevalier Des Grieux
Franck Ferrari, Lescaut
Paul Gay, Le Comte Des Grieux
Luca Lombardo, Guillot de Morfontaine
André Heyboer, de Brétigny
Olivia Doray, Poussette
Carol García, Javotte
Alisa Kolosova, Rosette
Christian Tréguier, L'Hôtelier
Alexandre Duhamel, Ugo Rabec, Deux gardes
Isabelle Escalier, Une vieille dame
Robert Catania, Pascal Meslé, Deux voyageurs
Ghislaine Roux, Catherine Hirt-André, Deux voyageuses
Chae Hoon Baek, Un porteur
Nicolas Marie, Un marchand
Constantin Ghircau, Marc Chapron, Deux croupiers
Olivier Ayault, Jian-Hong Zhao, Deux joueurs
Nicole Monestier, La servante
Michel Derville, Le portier du séminaire
Evelino Pidò, direction musicale
Coline Serreau, mise en scène
Jean-Marc Stehlé, Antoine Fontaine, décors
Elsa Pavanel, costumes
Hervé Gary, lumières
Patrick Marie Aubert, chef du chœur
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
Manon, Massenet
Nous n'en sommes qu'à la deuxième représentation, pourtant tout le monde a déjà pu lire un nombre invraisemblable de critiques toutes plus violentes les unes que les autres envers la nouvelle production de Manon (Massenet) mise en scène par Coline Serreau à l'Opéra Bastille.
Les décors sont loin d'être ratés. Celui du deuxième acte est même franchement réussi : une façade d'hôtel faisant environ un tiers de la largeur de la scène descend des cintres. Arrivée au sol, elle se penche vers l'avant, et étant maintenant complètement à l'horizontale, elle permet au spectateur de voir la chambre de Manon et du chevalier (le procédé ressemble à ce qu'avait fait Tcherniakov dans Macbeth). Ce qui est ridicule, c'est entre autres de faire paraître une couronne et une écharpe de Miss Arras quand Manon se voit belle (cela me rappelle l'armure qui descendait des cintres dans La Dame du Lac). Un certain nombre de détails du livret seront illustrés par des accessoires ou éléments de décors jetables (aussitôt utilisés aussitôt abandonnés). Il en va de même du cortège de femmes proscrites au cinquième acte : purement décoratif.
Les costumes qui mêlent toutes les époques n'ont rien de scandaleux. Encore faudrait-il en faire quelque chose d'intéressant ou de joli... Que Lescaut habillé en punk se déclare garant de l'honneur de la famille est assez ironique. Les coupes (qui n'étant pas expert ès Massenet je ne pourrai détailler) n'aident pas le spectateur à comprendre ce que la mise en scène ne montre pas. Je me demande ainsi comment on est censé comprendre pourquoi le chevalier se fait tabasser à la fin du deuxième acte.
Sur scène, le mouvement et les gesticulations ne manquent pas. On voit ainsi des patineuses à roulettes à Saint-Sulpice. Le cheval de Guillot est une moto à l'arrière de laquelle Manon grimpe en amazone (comme le font les Indiennes en sari...). Comme pour les décors et les costumes, je ne pense pas que ce soit cela qu'il faille moquer ou critiquer. À mon avis, le plus gros problème de cette production, c'est qu'il n'y a pas de théâtre. Les chanteurs, le dos bien droit, comme des piquets, chantent face au public. Un coup de foudre se déclare à vingt mètres de distance sans qu'un regard soit échangé. C'est d'un ennui glaçant.
J'avais un meilleur souvenir de l'œuvre de Massenet (que je ne connaissais que par le DVD de la production de David McVicar avec Dessay/Villazón). La musique contient trois ou quatre motifs (qui ne manquent pas de beauté). Ils reviennent dans l'œuvre comme des rappels d'un certain passé dans le point de vue du héros (qui est plutôt le chevalier Des Grieux que Manon). Peut-être que je fais maintenant davantage attention à ce genre de choses ? En tout cas, j'ai trouvé que la musique se répétait beaucoup.
L'orchestre et le chœur m'ont semblé très bons, tout comme les trois chanteuses issues de l'atelier lyrique : Olivia Doray (Poussette), Carol García (Javotte) et Alisa Kolosova (Rosette). Franck Ferrari (Lescaut) est le soliste que j'ai pris le plus de plaisir à écouter. Giuseppe Filianoti (Le chevalier Des Grieux) m'a paru moins à l'aise que dans les Contes d'Hoffmann. Il en impose trop. Ce serait mieux s'il chantait moins fort, sans crier. Il reste le cas Dessay (Manon). Sa voix est beaucoup critiquée. Je pense qu'elle a encore les moyens d'émouvoir par son chant. Cependant, ce soir, il y a eu une poignée de couacs. Le timbre s'altère parfois inopinément et une fois, la voix s'est éteinte au milieu d'une phrase musicale. Les notes aiguës n'ont pas l'air de lui poser de problème, même si elles sont moins éblouissantes que dans le passé. Ce qui m'a le plus gêné, c'est le manque de volume pendant de nombreux passages de récitatifs chantés. Il fallait vraiment tendre l'oreille pour entendre le son de sa voix, alors même que l'orchestre ne semblait pas jouer particulièrement fort. Le duo de Saint-Sulpice tenait la route, mais il a manqué d'émotions, comme la production dans son ensemble.
À la fin des actes, le public se met bizaremment à applaudir quelques secondes avant que la musique se termine. Une fois l'opéra exécuté, on a très vite rallumé les lumières, laissant très peu de temps aux chanteurs pour recueillir des applaudissements. Formidable ambiance. Encore une nouvelle production ratée ! Quand on pense que ces productions auront vocation à être reprises dans les années qui viennent... Je rappelle que pour le moment la seule nouvelle production de l'ère Nicolas Joel qui tienne la route est celle de Mathis der Maler.
Ailleurs : David, Paris Broadway, Gilda.
2012-01-08 23:04+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Auditorium de Dijon — 2012-01-07
Irina Lungu, Violetta Valéry
Jesús León, Alfredo Germont
Dimitris Tiliakos, Giorgio Germont
Silvia De La Muela, Flora Belvoix
Anne Mason, Annina
Manuel Nuñez Camelino, Gastone, visconte de Létorières
Laurent Alvaro, Baron Douphol
Jean-Gabriel Saint-Martin, Marchese d'Orbigny
Maurizio Lo Piccolo, Dottor Grenvil
Rachid Zanouda, Servo
Yu Chen, Giuseppe, servo di Violetta
Zakaria Elbahri, Commissionario
Rainer Vilu, Domestico di Flora
Roberto Rizzi Brignoli, direction musicale
Jean-François Sivadier, mise en scène
Véronique Timsit, collaboratrice à la mise en scène
Alexandre de Dardel, scénographie
Virgine Gervaise, créatrice costumes
Philippe Berthomé, assistant lumières
Grégoire de Lafond, assistant lumières
Cécile Kretschmar, créatrice maquillage & coiffure
Salvo Sgrò, chef de chœur
Nathalie Steinberg, chef de chant
Maurizio Prosperi, pianiste accompagnateur
Patrick Dutertre, costumes
Ana Garcia, chorégraphie
Fabrice Kebour, lumières
Béatrice Arnal, créateur des surtitres
Kalmus, éditeur de la partition
Orchestre Dijon Bourgogne
Chœur de l'Opéra de Dijon
Estonian Philharmonic Chamber Choir
La Traviata, Verdi
Au début d'un concert, il suffit parfois de quelques secondes pour savoir si la soirée sera à mettre aux oubliettes (cf. la Cenerentola à Garnier). À l'inverse, une petite gamme vocalisée par le chanteur pour se chauffer la voix peut suffire à se décider qu'on va assister à un grand concert (cf. Wasifuddin Dagar). La représentation de La Traviata de ce samedi à Dijon appartient à cette deuxième catégorie. Après avoir entendu les toutes premières secondes du Prélude, je savais que ç'allait être un grand moment d'opéra pour moi. J'en avais déjà les larmes aux yeux. J'étais complètement liquéfié quand Irina Lungu (Violetta) a commencé à chanter.
Il faut dire aussi que j'étais dans de très bonnes dispositions. Je n'avais jamais eu l'occasion de voir La Traviata. Je m'étais décidé à m'abonner quand j'avais su que cet opéra était programmé. Par ailleurs, je faisais partie de la petite douzaine de spectateurs qui avaient assisté à la rencontre avec le metteur en scène Jean-François Sivadier (c'est la même production que celle du dernier festival d'Aix-en-Provence). Une rencontre ? plutôt une discussion à bâtons rompus qu'il a fallu interrompre quand les autres spectateurs ont afflué autour du bar et qu'on ne s'entendait plus. Il est dommage que la rencontre n'ait pas été annoncée plus largement... On peut penser que plus de 1% des spectateurs auraient été intéressés ! Il est par ailleurs dommage que cette rencontre fût apparemment réservée à ceux qui assistaient à cette représentation. Ah, en fait, j'ai compris : sur le site, la rencontre était annoncée pour le samedi 7 décembre...
L'auditorium a une drôle d'architecture (en forme de piano à
queue
). Il faut montrer patte blanche à l'entrée en bas d'un escalator
qui conduit à un no man's land au deuxième étage enjambant le
boulevard de Champagne avant de prendre d'autres escaliers mécaniques pour
redescendre au rez-de-chaussée... Cela me rappelle la BnF et les malls indiens.
Au bout du foyer, je m'installe donc pour la rencontre avec
Jean-François Sivadier. Sa façon de parler du théâtre et de la mise en
scène d'opéra m'a bien plu. En préambule, il avait commencé par dire
L'économie de l'opéra, c'est complètement absurde !
. Il a ensuite
expliqué qu'une grande partie de son travail était de faire que la
technique vocale soit partie intégrante du jeu d'acteur. Un violoniste
ne joue pas qu'il joue du violon.
Le point de départ de la mise en
scène est donc constitué des mouvements que doivent faire les chanteurs
pour interpréter la musique telle qu'elle a été conçue par Verdi. Il doit
aussi aller contre les clichés et idées préconçues que pourraient avoir les
chanteurs sur la façon de jouer. Il explique que l'axe de l'opéra oppose le
mot Jouir
que répète inlassablement Violetta au premier acte et
l'Amour que lui porte Alfredo. Avec cette idée en tête, pendant la
représentation, il est évident que pour Violetta, tout bascule dans la
dernière scène du premier acte : peu après qu'elle a dit gioir!...
gioir!...
, elle entend Alfredo chantant Amor, amor à palpito
depuis les coulisses.
Il explique aussi aimer diriger les chanteurs comme des danseurs et être fasciné par Pina Bausch. On peut d'ailleurs déceler une évidente référence à son univers dans sa mise en scène : à un moment, Violetta avance sans prendre garde aux chaises noires qui font obstacle devant elle et qu'un homme se précipite pour les écarter de son chemin (cf. Café Müller).
L'idée principale de la mise en scène est de concevoir que se déroule sur scène une énorme fête au début de laquelle un homme, qui pourrait être un spectateur, décide de déclarer son amour à Violetta, qui se prend à rêver que c'est vrai. Quelques chanteurs-comédiens sont déjà sur scène (à fumer) quand les spectateurs s'installent à leur place. Certains chanteurs entreront via les allées du parterre (où je suis impérialement placé ; c'est un petit plaisir bien plus abordable à Dijon qu'à l'Opéra Bastille !). Un rideau tiré d'un côté à l'autre de la scène (parfois à moitié) semble plus ou moins séparer deux univers : le réel et le rêve. Au cours de cette fête s'insère un épisode à la campagne : des panneaux descendus des cintres et représentant une végétation bucolique et un ciel transpercé de nuages viennent créer cette ambiance visuelle tout en cloisonnant l'espace scénique que l'on peut concevoir comme étant une maison de campagne divisée en plusieurs pièces.
Tous les chanteurs et choristes m'ont donné une impression de
vérité
dans leur jeu. J'ai rarement vu une telle cohésion et autant
de conviction partagée par tous sur une scène d'opéra. L'orchestre quand il
a de quoi se mettre en valeur (comme au début des premier et troisième
actes) le fait très bien. Malheureusement, le début du troisième a été
pourri par les tousseurs (dont un en particulier qui n'arrêtait pas à
quelques mètres derrière moi et qu'une de ses voisines suppliait de
sortir). L'orchestration n'est pas de Prokofiev ou de Britten, mais il y a
néanmoins de quoi prendre un certain plaisir à découvrir des détails
insoupçonnés lors de précédentes écoutes au disque (ou au DVD). Le chef
fait un remarquable usage du rubato, qui sert ici particulièrement
bien le drame. Du côté des voix, les trois rôles principaux sont
remarquablement bien interprétés. Irina Lungu (Violetta) était annoncée
souffrante, mais je n'ai rien remarqué de particulier, à part un timbre
légèrement altéré pendant les aigus du premier acte. Jesús León (Alfredo) a
été parfait. J'ai eu un tout petit peu peur lors de la première
intervention un peu criée de Dimitris Tiliakos (Germont), mais son volume
de voix s'est vite équilibré. On peut également noter un excellent Laurent
Alvaro dans le rôle de Douphol. Un seul petit maillon faible vocal est à
signaler dans le rôle d'Annina.
Standing-ovation méritée !
2012-01-05 20:22+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Je suis loin d'être d'accord avec tout ce qu'écrit Renaud Machart dans Le Monde, mais j'approuve le paragraphe suivant à propos de l'Opéra de Paris (dirigé par Nicolas Joel), extrait de l'article intitulé L'institution lyonnaise tient la dragée haute à la parisienne paru dans l'édition du 6 janvier 2012 du Monde :
Nicolas Joel dit volontiers qu'il préfère une production éprouvée à une nouvelle mise en scène ratée. L'ennui est que les productions venues d'ailleurs le sont aussi (ratées) le plus souvent et que les nouvelles productions ne le sont pas moins.
2011-12-25 22:22+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Lectures — Culture indienne
L'année dernière, après en avoir vu 107 au cours de l'année, je m'étais dit qu'il ne serait pas raisonnable d'augmenter encore la dose de spectacles et qu'il faudrait bien faire des choix. C'est bien entendu le contraire qui s'est produit : j'ai vu davantage de spectacles cette année. J'ai passé plus d'une soirée sur trois à assister à un spectacle, mais moins d'une sur deux...
L'opéra reste un des piliers de ces spectacles. J'ai assisté à 42
représentations d'opéra (j'inclus dans ce total les opéras en version de
concert) correspondant à environ 30 opéras, parmi lesquels se sont trouvés
22 opéras que je n'avais encore jamais vus. Parmi ceux-là, deux créations :
The Second Woman (Frédéric Verrières) et Akhmatova (Bruno Mantovani). Si le sujet du
deuxième m'a intéressé davantage, le plaisir procuré par le premier a été
supérieur. Cette année, j'ai diversifié quelque peu les lieux pour assister
à des opéras. J'ai ainsi vu une de bonnes productions d'Orphée et Eurydice à la MC93 Bobigny et de Carmen à Nancy. Plus près de l'Opéra, j'ai fait
deux belles découvertes
à l'Athénée ‒ Louis Jouvet : Didon & Énée (Purcell) et The
Turn of Screw (Britten). Ce lieu m'a également offert une des plus
détestables soirées d'opéra de ma vie : L'Egisto
(Marazzoli/Mazzochi). La musique était loin d'être inintéressante, mais le
théâtre était sclérosé (je sais gré à Peter Brook d'avoir introduit cette
notion il y a plus de quarante ans dans L'espace
vide). Du théâtre sclérosé, il y en a également eu une certaine
dose à l'Opéra de Paris : Francesca Da Rimini,
Salomé, Faust, La
Cenerentola. À l'inverse, il y eut en ces lieux une production
tout-à-fait honorable de La Clémence de Titus et
d'excellentes productions de Lulu, de Tannhäuser et de Kátia
Kabanová. Au TCE, j'ai eu l'occasion de voir quelques opéras en
version de concert. Il y eut ainsi un Ariodante
avec une formidable Joyce DiDonato, un Pelléas et
Mélisande avec un superbe Laurent Naouri et un lamentable Fidelio.
Parmi mes bonnes résolutions de l'année dernière, il y avait celle de mieux comprendre la musique de Wagner pour ne pas passer à côté des Siegfried et Götterdämmerung que j'avais prévu de voir à l'Opéra Bastille. Au début du mois de janvier, j'acquis ainsi une édition de 1903 du Voyage artistique à Bayreuth d'Albert Lavignac. Après quelques semaines d'efforts, je réussis à me mettre en tête la plupart des leitmotivs de la Tétralogie, devenant par la-même ringopathe. Mon expérience de spectateur en a été complètement transformée et le plaisir renouvelé avec Parsifal au TCE, le programme Wagner de l'Orchestre Colonne, Tannhäuser à Bastille, le Ring Saga à la Cité de la musique (et la Citéscopie parallèle) et dernièrement avec Le Ring sans paroles, suite symphonique jouée par le Philharmonique de Radio France. J'ai comme l'impression que je n'en ai pas fini avec Wagner...
Par rapport aux années précédentes, j'ai augmenté sensiblement la proportion de concerts Pleyel dans mes choix. Je vois donc un peu plus de concerts symphoniques que précédemment. Un des plus fabuleux concerts auxquels j'aie assisté cette année a été le programme Rameau orchestral du Concert des Nations dirigé par Jordi Savall. Pour ce qui est du baroque, j'ai également passé de très bons moments à écouter Damien Guillon et Pierre Hantaï. J'ai par contre dû remettre en cause mes standards de qualité en réécoutant La Passion selon Saint Jean dirigée par Ton Koopman. En revanche, avec Haydn, aucun problème avec Le Concert Spirituel pour Die Schöpfung, L'Orchestre de Paris et le Quatuor Thymos à l'Athénée. Ce dernier concert était un programme de musique de chambre. Les autres concerts de musique de chambre auxquels j'aie assisté m'ont procuré un certain plaisir, comme celui de Lisa Batiashvili, François Leleux, Sebastian Klinger, Guy Ben-Ziony, Milana Chernyavska au TCE ou encore celui du Quatuor Pražák et de quelques autres dans un programme Hindemith/Schönberg.
Parmi les concerts symphoniques, je garde un souvenir émerveillé de trois concerts LSO/Gergiev : Le chant de la nuit (Mahler) et Symphonies nº6 et 10 (Chostakovitch). Le concert de l'Orchestre de Paris du 14 octobre à Pleyel m'a procuré des émotions très contrastées puisque j'ai pu d'une part entendre pour la première fois le concerto pour violon de Tchaikovski interprété par Leonidas Kavakos et d'autre part tenter de réprimer des gloussements à l'écoute de la symphonie de Hans Rott. Un autre grand moment pour moi a été la première écoute de La symphonie fantastique. Pour le reste, j'ai eu le plaisir de réentendre du Roussel dans Bacchus et Ariane dirigé par Yutaka Sado. La présence d'œuvres contemporaines aux programmes des concerts Colonne m'a donné l'occasion d'adhérer complètement à une œuvre contemporaine dès la première écoute : Melancolia (Kremski). Un phénomène semblable s'est produit avec La nuit transfigurée de Schönberg lors du concert de l'Orchestre de Paris dirigé par Pierre Boulez.
Pour ce qui est du ballet, je me suis pour ainsi dire limité à la programmation de l'Opéra de Paris. Je retiens la belle création de La Source, la reprise d'Onéguine, de Roméo et Juliette et la Coppélia de Lacotte dansée par les élèves de l'école de danse (tellement plus intéressante que celle dansée par le ballet de l'Opéra). Bien sûr, il reste quelque chose du passage du Bolchoï : Flammes de Paris, Don Quichotte. Enfin, c'est devenu une évidence, mais la grande révélation de la saison, pour moi, c'est Myriam Ould-Braham, formidable Juliette, Naïla et Olga.
Il me reste maintenant à évoquer ce qui n'appartient pas aux formes
classiques européennes
. Pour moi, cela se réduit essentiellement à
l'Inde. Toutefois, de la nuit soufie, c'est bien le chant
du marocain Marouane Hajji que je retiendrai. Maintenant, venons-en à
l'Inde... Depuis le récital de Srithika Kasturi Rangam à
Chennai en 2010, j'ai développé un certain goût pour le
bharatanatyam. J'ai profité de mon séjour dans le Sud de l'Inde
cet été pour voir quelques récitals (à Mumbai, Bangalore et Chennai). Au cours de
l'année, j'en aurai vu une douzaine. Comme il n'y en a plus aux Abbesses,
je me suis déplacé au Musée Guimet pour voir Urmila
Sathyanarayanan et Priyadarshini Govind, deux
récitals relativement décevants (pour des raisons différentes). Comme ce
n'était pas suffisant, je suis également allé au Centre Mandapa ; mes plus grandes
satisfactions sont venues des récitals qui s'y sont déroulés. Parmi les
danseuses vues cette année, je retiendrai deux noms : Lavanya
Ananth, Mallika Thalak. Elles correspondent toutes
les deux à l'idéal que je me fais de ce style de danse.
Je n'ai longtemps entendu la musique carnatique que comme une musique d'accompagnement pour des récitals de bharatanatyam. Lors de mon séjour à Chennai en août, je suis allé plusieurs soirs de suite assister à des concerts de chant carnatique. Le plus remarquable a été celui de Sri Mohan Santhanam au Vani Mahal. À force d'écouter ce type de musique, j'ai commencé à comprendre la forme générale que prenaient les improvisations et compositions. J'espère que le plaisir d'écoute n'en sera que meilleur quand je réentendrai Aruna Sairam au Théâtre de la Ville en avril 2012.
En Inde, les formes les plus raffinées de musique viennent du Nord, il faut bien l'admettre. Au cours de l'année 2011, j'eus l'occasion d'entendre du khyal lors d'un triple-concert au cours duquel s'étaient particulièrement distingués Ustad Ulhas Kashalkar et Pandit Ajoy Chakrabarty. Quelques mois plus tard, j'ai également pu réentendre la fille de ce dernier, Kaushiki Chakrabarty. La grande découverte de l'année, je la dois à Klari grâce à qui j'ai pu découvrir le chant dhrupad avec deux représentants de la dynastie Dagar : Wasifuddin Dagar et Sayeeduddin Dagar. (J'avais déjà entendu les Gundecha en 2008, mais j'en garde un amer souvenir.) Récemment, le concert du sitariste Shahid Parvez au Théâtre de la Ville m'a permis d'entrevoir de façon moins superficielle que je ne le faisais jusque là certaines similitudes formelles entre ces musiques (instrumentales ou vocales). J'espère bien passer suffisamment de temps à Kolkata l'été prochain pour assister à plusieurs concerts !
Bon, maintenant, je peux l'avouer à ceux qui ont lu jusqu'au bout : j'ai assisté à cent soixante-trois spectacles en 2011. L'année prochaine, il faudra donc véritablement songer à faire des choix (réduire un peu l'abonnement Pleyel, continuer à quasi-boycotter le TCE, se limiter à deux représentations d'un même ballet, se limiter à une seule représentation d'un opéra ?).
PS: Pour ce qui est des lectures, le bilan est sur le Biblioblog.
2011-12-02 01:48+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Garnier — 2011-12-01
Javier Camarena, Don Ramiro
Riccardo Novaro, Dandini
Carlos Chausson, Don Magnifico
Jeannette Fischer, Clorinda
Anna Wall, Tisbe
Karine Deshayes, Angelina
Alex Esposito, Alidoro
Jean-Pierre Ponnelle, mise en scène, décors et costumes
Grischa Asagaroff, réalisation de la mise en scène
Michael Bauer, lumières
Alessandro Di Stefano, chef de chœur
Bruno Campanella, direction musicale
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
La Cenerentola, Rossini
Je sors peu enthousiaste de la représentation de La Cenerentola qui vient d'avoir lieu à l'Opéra Garnier. La mise en scène est tradi-vieillote. Les décors sont semi-construits, mais il y a beaucoup de toiles peintes (qui ondulent quand un chanteur vient à les toucher). Par rapport à la fraîcheur de la production mise en scène par Irina Brook au TCE il y a quelques années (et que j'ai vue en 2010), c'est tristounet. On n'aurait pas perdu grand'chose à voir une version de concert à la place.
Le plus triste, c'est ce qui se passe dans la fosse. Avant même le début du spectacle, j'avais des craintes en découvrant le nombre réduit de premiers violons (8). L'entame du Sinfonia est très très lente et le volume sonore est très faible. Il y aura bien un petit crescendo et un léger accelerando, mais pas de risque d'hyperacusie ou d'excès de vitesse (non-sequitur : pourquoi ne pas regarder Poiret-Serrault dans le sketch Le permis de conduire un orchestre ?). J'ai des souvenirs bien plus vivifiants d'autres interprétations. La façon qu'a eu le chef Bruno Campanella de se retourner vers le public aussitôt la dernière note jouée pour ne pas laisser d'autre choix aux spectateurs que d'applaudir ce Sinfonia ne m'a pas particulièrement mis de bonne humeur.
Bien que l'effectif de l'orchestre soit réduit, le volume sonore émis par les chanteurs pendant une bonne partie du premier acte est trop faible : l'orchestre les couvre. Le tempo souvent trop lent à mon goût n'aide pas les chanteurs et on s'ennuierait presque, ce qui est tout à fait inattendu pour un opéra de Rossini...
Les chanteurs se libèrent quelque peu dans le deuxième acte. Les airs de Javier Camarena (Don Ramiro), Carlos Chausson (Don Magnifico), Riccardo Novaro (Dandini) et Alex Esposito (Alidoro) me plaisent beaucoup. Pendant l'entr'acte, je pouvais voir les musiciens autour du piccolo s'amuser de ce que la flûtiste répétât les premières notes de l'air Non più mesta. À la fin de l'opéra, son interprétation sera impeccable. La chanteuse Karine Deshayes (Angelina) l'a fort bien chanté (nettement mieux que dans la version DVD que je possède : je déteste ce que fait Cecilia Bartoli dans cet air...).
Si le deuxième acte ne m'a pas déplu, je ne pense pas que cette soirée entrera au Panthéon de mes soirées d'opéra...
2011-11-03 01:22+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2011-11-02
Laura Aikin, Lulu
Jennifer Larmore, Gräfin Geschwitz
Andrea Hill, Eine Theatergarderobiere, Ein Gymnasiast, Ein Groom
Johannes Koegel-Dorfs, Der Midizinalrat, Der Professor, Ein Polizeikommissär
Marlin Miller, Der Maler, Der Neger
Wolfgang Schöne, Dr. Schön, Jack
Kurt Streit, Alwa
Scott Wilde, Der Tierbändiger, Der Athlet
Franz Grundheber, Schigolch
Robert Wörle, Der Prinz, Der Kammerdiener, Der Marquis
Victor von Halem, Der Theaterdirektor, Der Bankier
Julie Mathevet, Eine Fünfzehnjährige
Marie-Thérèse Keller, Ihre Mutter
Marianne Crebassa, Die Kunstgewerblerin
Damien Pass, Der Journalist
Ugo Rabec, Ein Diener
Orchestre de l'Opéra national de Paris
Michael Schønwandt, direction musicale
Willy Decker, mise en scène
Wolfgang Gussmann, décors et costumes
Hans Toelstede, lumières
Lulu, Alban Berg
J'ai assisté aux première et cinquième représentations de la reprise de Lulu de Berg qui passe ces jours-ci à Bastille. Les détails de l'histoire sont assez touffus : lors des saluts, pas moins de seize chanteurs viennent saluer et parmi eux, certains cumulent deux voire trois rôles ! Quelques chanteurs paraissent au troisième acte dans des rôles qui font écho à d'autres vus au premier acte.
La musique est nettement plus accessible que ce à quoi je m'attendais : c'est cent fois plus agréable à l'oreille que le Mantovani d'Akhmatova. Ce qui est un peu gênant avec les deux représentations que j'ai vues, c'est que l'orchestre ne joue pas très fort. Ainsi, l'attention se porte beaucoup plus facilement sur l'action et le texte, au détriment de la musique, dont, à moins de se déconcentrer volontairement de l'action, on ne profite pleinement que pendant les interludes orchestraux. J'ai tout particulièrement apprécié celui qui se trouve au centre de l'œuvre et qui a une structure palindromique avec au milieu le motif de Lulu joué au piano.
Le premier élément de décor que l'on voit est l'escabeau sur lequel se tient Lulu alors que les spectateurs s'installent à leurs places (ou comme moi, à d'autres laissées vacantes). Cet escabeau se présente à l'œil comme un V renversé, avec des barreaux pour monter, mais aussi pour descendre. Visuellement, c'est tout comme le motif ascendant puis descendant de Lulu, et c'est aussi la trajecture de l'héroïne, femme fatale et cynique, dont les amants et maris se succèdent, jusqu'à sa déchéance finale (arrestation, choléra, prostitution, assassinat).
La mise en scène est très bien faite. Elle s'inscrit dans un décor constitué d'une grande pièce entourée d'un mur arrondi où s'alignent onze portes. En arrière-plan, des marches montent en amphithéâtre. De là-haut, on peut descendre par des échelles dans la pièce centrale. On verra même un chanteur sauter ; à peine arrivé, le personnage mourra quelques secondes plus tard ! Parmi les accessoires, un portrait en pied de Lulu, en plusieurs morceaux. Un de ses maris successifs était peintre ; il s'est suicidé.
Parmi les chanteurs, c'est bien sûr Laura Aikin (Lulu) qui fait la plus forte impression. Parmi les autres personnages, les plus émouvants furent pour moi ceux de la comtesse Geschwitz (Jennifer Larmore), lesbienne amoureuse de Lulu et d'Alwa (Kurt Streit), qui tout comme son père avant lui aime Lulu.
Ailleurs : Zvezdo.
2011-10-22 01:58+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Athénée Théâtre Louis-Jouvet — 2011-10-21
Murial Ferraro, Egisto
Charlotte Plasse, Alvida, Virtu
Anouschka Lara, Eurilla, Volutta
Dagmar Saskova, Moschino, Une Nymphe
Blandine Folio Peres, Rosilda, Silvia, Ozio
Christine Tocci, Lucinda, Une Nymphe
Lucile Richardot, Dorillo, Une Nymphe
Matthieu Chapuis, Zanni
David Witczak, Coviello
Marc Valéro, Narnese, Un berger
Jan Jeroen Bredewold, Silvano
Jérôme Correas, direction musicale
Jean-Denis Monory, mise en scène
Lorenzo Charoy, collaboration artistique
Françoise Denieau, chorégraphie
Gilles Poirier, assistant chorégraphie
Adeline Caron, scénographie et décors
Olivier Oudiou, lumières
Chantal Rousseau, costumes
Mathilde Benmoussa, maquillages et coiffures
Julies Coffinières, masques
Corinne Paccioni, assistante mise en scène
Les Paladins
L'Egisto, Marco Marazzoli et Virgilio Mazzocchi
Bilan très mitigé pour cet Egisto de Marco Marazzoli et Virgilio Mazzocchi présenté à l'Athénée environ trois siècles et demi après sa création à Rome. En 1646, ce fut paraît-il le premier opéra joué en entier au Royaume de France. La partition n'a été retrouvée que très récemment par Barbara Nestola.
La musique a commencé par me plaire. Du côté de la voix, il y a très peu
de numéros qui pourraient s'appeler airs
. Ainsi, on ne trouve pour
ainsi dire pas de répétitions de paroles (tant mieux !). La frontière est
ténue entre la façon de chanter comme dans les airs
, celle propre
aux récitatifs et les passages un peu plus parlés. Bref, en gros, entre les
intermèdès musicaux, c'est un long récitatif chanté qui, sans trop dévier,
se déplace parfois, brièvement, vers une sorte d'air ou vers une sorte de
dialogue.
Musicalement, donc, cela me plaisait franchement jusqu'à l'arrivée des
personnages bouffons, au service du noble désargenté Egisto (qui n'a rien à
voir avec l'Égisthe de
la mythologie Grecque). Le livret est certes comique, mais tout semble
terriblement surjoué. Cela donne un mélange entre Funès, Mr. Bean et
Danyboon. Cette façon de jouer la comédie m'a semblé très déplaisante, tout
particulièrement après l'entr'acte avec l'intermède de la Foire de
Farfa
précédant le troisième acte.
Le décor est pour ainsi dire le même que celui de La Flûte enchantée de Peter Brook, les tiges de bambou verticales étant remplacées par de hautes planches. Le problème, c'est que là où Brook les organisait pour suggérer quelque chose, ici, en dehors de la scène où elles représentent vraisemblablement une forêt, elles ne signifient en général rien.
Il faut ajouter à cela des costumes très très tradi', une mise en scène qui souligne le moindre micro-détail du livret touffu, auquel on a visiblement ajouté quelques gags. Les orchestres baroques passent en général beaucoup de temps à se réaccorder. C'est un fait. Ce soir, l'ensemble s'est accordé encore plus souvent que d'ordinaire, puisque l'action principale faisait partie d'une représentation à l'intérieur de la représentation, introduite par le prologue pendant lequel la Vertu choisit le rôle de la veuve Alvida, qui finira par épouser Egisto, lequel retrouvera sa fortune et la sœur Lucinda dont il avait été séparé. Forcément, au début de cette représentation dans la représentation, l'orchestre se réaccorde...
Pour moi, après un bon début, cette représentation a viré au cauchemar. Quel contraste avec le bonheur qu'avait été The Turn of Screw en ce même lieu la semaine dernière.
2011-10-20 01:59+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2011-10-19
Roberto Alagna, Faust
Paul Gay, Méphistophélès
Inva Mula, Marguerite
Tassis Christoyannis, Valentin
Angélique Noldus, Siebel
Marie-Ange Todorovitch, Dame Marthe
Alexandre Duhamel, Wagner
Rémy Corrazza, Faust II
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
Alain Altinoglu, direction musicale
Jean-Louis Martinoty, mise en scène
Johan Engels, décors
Yan Tax, costumes
Fabrice Kebbour, lumières
Patrick Marie Aubert, chef du chœur
Faust, Gounod
Au moins, je n'y aurai pas perdu trop d'argent : 15€ pour une place de
deuxième rang de galerie nº5. Je vois les deux tiers de l'orchestre et
presque toute la scène (à condition de me lever de temps en temps). Tout le
monde l'a déjà dit, la mise en scène, les décors et les costumes sont
abominables (je me contenterai de dire que l'entrée en scène du jeune Faust
m'a fait penser à une scène du Rocky Horror Picture Show). L'œuvre
en elle-même présente peu d'intérêt, au-delà du divertissement musical et
des tubes
qu'elle contient. Cela fait bizarre de se sentir comme
étranger à ce monument national qu'est le grand opéra français, alors que
le public manifeste un enthousiasme particulier à l'issue de cette deux
mille six cent soixantième représentation de Faust à l'Opéra de
Paris.
L'histoire n'est sans me rappeler celle de Yayati qui est racontée dans le Mahābhārata : pour continuer à jouir de ses plaisirs, Yayati demande à un de ses fils de lui prêter sa jeunesse.
J'ai apprécié les moments purements orchestraux (assez variés). Du côté de la distribution, l'ensemble est très bon. Je l'avais déjà entr'entendu dans d'autres rôles, mais ce soir, Paul Gay (Méphistophélès) a été pour moi une très belle découverte. Il passe même à l'applaudimètre devant Roberto Alagna (Faust). Superbes Angélique Noldus (Siebel) et Tassis Christoyannis (Valentin). D'Inva Mula (Marguerite), la chouchou du directeur de l'Opéra Nicolas Joel, j'avais préféré les prestations dans les rôles d'Antonia ou de Mimi.
2011-10-15 02:22+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Athénée Théâtre Louis-Jouvet — 2011-10-14
David Curry, Le narrateur et Peter Quint
Chantal Santon Jeffery, La gouvernante
Rachel Calloway, Mrs Grose, l'intendante
Liisa Viinanen, Miss Jessel, l'ancienne gouvernante
Matthieu Haering, Miles, le garçon
Agathe Becquart, Flora, la jeune fille
Jean-Luc Tingaud, direction musicale
Olivier Bénézech, mise en scène
Alain Lagarde, scénographie
Xavier Lauwers, lumières
Frédéric Olivier, costumes
Élisabeth Delesalle, maquillages
Sébastien Fèvre, assistant mise en scène
Élisabeth Brusselle, chef de chant
Orchestre-Atelier Ostinato
The Turn of Screw, Britten
Ce fut pour moi une fascinante soirée d'opéra au Théâtre de l'Athénée Louis-Jouvet avec Le Tour d'écrou de Britten. Quelques minutes avant le début de la représentation, un rideau de scène a été baissé puis immédiatement remonté, sans raison, laissant à penser que le Théâtre était hanté...
Après un prologue, de nombreuses scènes se suivent, espacées par des interludes orchestraux. La musique est jouée par l'Orchestre-Atelier Ostinato (que j'avais déjà entendu dans Orphée et Eurydice). L'effectif des musiciens est réduit (13, m'a-t-il semblé), mais l'orchestration est aux petits oignons. Certaines combinaisons d'instruments sont étonnantes ! (Ah, ces voix accompagnées par les timbales !)
Tout concourt à créer une atmosphère mystérieusement oppressante autour du huis-clos de la situation représentée dans cet opéra. Une jeune femme est embauchée comme gouvernante auprès de deux enfants (un garçon et une fille) sur qui ne veille alors que Mrs Grose, l'intendante. Avant, il y avait Mr Quint (responsable du domaine) et Miss Jessel (l'ancienne gouvernante), mais ils sont morts. La nouvelle gouvernante est laissée à elle-même, elle doit gérer la situation quoiqu'il arrive, l'oncle qui l'a embauchée ne voulant en aucun cas être dérangé. Très vite, elle remarque des présences qui troublent aussi les enfants. Ce sont les fantômes de Mr Quint et Miss Jessel. Avant de mourir, leur conduite avait été loin d'être exemplaire...
Les voix ne sont pas du tout sollicitées de la même manière que dans les autres opéras que je connais. Les paroles chantées comportent beaucoup de récits. Parfois, ils s'adressent à un autre personnage. Parfois, ils commentent la situation, s'adressent au personnage lui-même ou informent le spectateur. Les personnages des enfants sont interprétés par de jeunes chanteurs du Chœur maîtrisien du Conservatoire de Wasquehal. Ils ont tous les deux été formidables. Leurs voix forment un charmant mini-chœur au début, comme quand ils récitent leur leçon de latin. Plus loin, les rôles se différenciant, les deux voix prendront chacune son autonomie. Dans le rôle du garçon, j'ai particulièrement aimé la façon de faire s'évanouir le son de certaines syllabes finales en decrescendo. La voix de Rachel Calloway (Mrs Grose) convient parfaitement au rôle. J'ai aussi aimé celles des fantômes, et tout particulièrement celle de David Curry (Quint) dont les vocalises et appels au petit Miles hanteront le théâtre. Le rôle apparemment le plus exigeant est celui de la gouvernante, et Chantal Santon Jeffery m'y a fait une forte impression.
La mise en scène et la scénographie sont relativement simples. On entre et on sort. On fait descendre les lits des enfants depuis les cintres avant que leurs occupants s'y installent. On utilise l'imperméable de la gouvernante et une poupée pour construire une scène au bord de quelque lac. Le décor reste sombre. À cette sobriété s'ajoute un remarquable travail de direction d'acteurs et des lumières bien pensées et réalisées. L'émotion ne vient pas vraiment de prouesses vocales, plutôt des situations et des contrastes qui se créent entre les unes et les autres.
Je n'aurai malheureusement pas beaucoup d'occasions de retourner dans ce théâtre au cours de l'année. D'ailleurs, pour une raison d'agenda, je revends 15€ une place payée 18.40€ (23€ moins 20% de réduction abonné) pour L'histoire du soldat de Stravinski le samedi 16 juin 2012 à 20h. Le billet est au balcon, deuxième rang de face, en bout de rang, ce qui permet de ne pas trop être à l'étroit tout en ayant une bonne vue sur la scène ; la fosse d'orchestre n'est que partiellement visible.
Ailleurs : Zvezdo.
2011-10-10 01:17+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Cité de la musique — 2011-10-07 — 2011-10-09
Ivan Ludlow, Wotan, Wanderer
Fabrice Dalis, Loge, Mime
Nora Petročenko, Fricka, Helmwige
Donatienne Michel-Dansac, Freia, Gutrune
Alexander Knop, Donner, Gunther
Lionel Peintre, Alberich
Johannes Schmidt, Fafner, Hagen
Martin Blasius, Fasolt, Hunding
Mélody Louledjian, Woglinde, Gerhilde, Waldvogel
Jihye Son, Wellgunde, Sieglinde
Louise Callinan, Flosshilde, Erda, Waltraute
Marc Haffner, Siegmund
Cécile De Boever, Brünnhilde
Jeff Martin, Siegfried
Peter Rundel, direction musicale
Antoine Gindt, mise en scène
Remix Ensemble Casa da Música
Élodie Brémaud, collaboration à la mise en scène
Janick Moisan, assistanat à la mise en scène
Aleksi Barrière, Laurent Prost, dramaturgie, traduction, surtitres
Élise Capdenat, assistée de Piia de Compiègne, scénographie
Daniel Levy, lumière
Tomek Jarolim, création numérique
Fanny Brouste, assistée de Peggy Sturm, costumes
Véronique Nguyen, assistée d'Alexandre Bacquet, maquillage et coiffure
Martin Gautron, accessoires
Léo Warynski, conseiller musical et assistant du directeur musical
Fabrice Goubin, copie, corrections et adaptation
Nicolas Chesneau, Christophe Manien, Nicolas Fehrenbach, pianistes répétiteurs
Ring Saga : Das Rheingold, Die Walküre, Siegfried, Götterdämmerung, Wagner (version de Jonathan Dove et Graham Vick, 1990)
Outre les conférences de la Citéscopie “La Tétralogie de Wagner”, j'ai assisté entre vendredi et dimanche à une représentation des quatre opéras dans une version contractée et réduite pour 19 musiciens et 14 chanteurs. J'en sors globalement content, peut-être parce que contrairement à d'autres, je n'avais pas formé de trop hautes espérances. Peut-être aussi parce que j'ai préféré voir les verres à moitié pleins qu'à moitié vides. N'allant voir des opéras que depuis environ huit ans, il faut dire aussi que ce n'est que mon deuxième Ring après celui de l'Opéra Bastille de 2010 et de 2011, très décevant du point de vue scénique (mais fort appréciable musicalement parlant).
La mise en scène n'est pas désagréable à regarder. Les chanteurs jouent raisonnablement bien la comédie. Il n'y a ni trop de chahut ni trop de sur-place. Un placement au septième rang (donc au dernier rang du parterre de la Salle des Concerts dans cette configuration) me permet d'apprécier le jeu et l'expression faciale des uns et des autres, un plaisir qui me demande d'ordinaire de sortir mes jumelles. La scénographie est basée sur l'utilisation d'un plan légèrement incliné percé d'une ouverture transversale (au centre de la scène). Pour passer de gauche à droite et réciproquement, les chanteurs doivent enjamber le fossé. J'espère qu'aucun accident ne sera à déplorer lors les prochaines représentations. Les costumes et accessoires renvoient volontiers aux bandes dessinées de superhéros (notamment pour le costume des Géants). Dans l'ensemble, c'est assez lisible. Cependant, je ne comprends pas pourquoi on a inutilement rendu obscures certaines scènes. Ainsi, plusieurs combats de Siegfried se font à mains nues plutôt qu'avec l'épée. Dans la scène de l'enlèvement dans Le Crépuscule des dieux, Brünnhilde et Siegfried sont assis l'un et l'autre sur des sortes de sièges de bar placés de part et d'autre de l'espace scénique. Dans la scène finale, si on utilise de façon très jolie visuellement un grand drap animé de mouvements pour représenter les flots du Rhin est très esthétique (procédé similaire pour la représentation du géant Fafner dans Siegfried), la tentative ratée de s'emparer de l'anneau par Hagen et sa noyade dans le Rhin sont tout-à-fait illisibles. L'ambiance de chaque scène est rehaussée par l'utilisation d'un grand écran en fond de scène. Pendant l'essentiel du Ring Saga, cela m'a semblé complètement inutile. Cela ne trouve véritablement son utilité que lors de la Marche funèbre en l'honneur de Siegfried pendant laquelle des images tirées de tout ce qui précède sont passées en flashback.
Du côté de l'orchestre (qui d'après plusieurs comptages de spectateurs indépendants, moi y compris, comptait 19 musiciens et non 18 comme on le lit çà et là), il y a de quoi être charmé par les cuivres et les vents. La réduction qui tient la route du côté des cuivres (3 cors au lieu de 8 dans le prélude de l'Or du Rhin) passe moins bien chez les violons (1+1=2 au lieu de 16+16=32). Après avoir passé les trois premiers opéras en ne voyant que la tête du chef, j'ai pu voir l'orchestre lors de la dernière journée, ce qui m'a permis d'avoir un peu plus de bienveillance pour ces musiciens transformés en solistes dont chaque microcouac s'entend. Si la texture orchestrale n'est pas nouvelle dans les passages utilisant surtout les cuivres, les vents et les instruments à cordes les plus graves (violoncelles, contrebasse), il n'en va donc pas de même avec les autres (violons, alto). Le son des cordes devient plus rèche. Cependant, pour certains passages, les sonorités m'ont semblées tout-à-fait plaisantes. Ainsi furent les frémissements des cordes autour de l'apparition de l'Oiseau dans Siegfried. Dans le Salut au monde, cela aurait aussi été le cas si la harpe n'avait émis dans l'ensemble des représentations et cette séquence en particulier des sons particulièrement disgracieux. Je ne sais pas si c'est un problème de sonorisation de la harpe, mais j'avais l'impression que la harpiste devait en permanence forcer pour faire entendre son instrument, dont le son manquait donc beaucoup de délicatesse.
Il faut bien aussi parler des coupes. Si on est reconnaissant aux concepteurs de permettre au public de voir l'ensemble du Ring sur un week-end et qu'il n'est pas déraisonnable de passer sous silence certaines scènes (comme celle des Nornes dans le Prologue du Crépuscule des dieux qui raconte une histoire en dehors du temps principal de l'action, même si on ne peut pas forcément ne retenir d'une épopée que son action principale), certaines coupes engendrent des frustrations. Une d'entre elles est la coupe de certains passages dans la scène lors de laquelle Siegfried reforge Notung. Ainsi disparut le sympathique motif de la Fonte de l'acier qui procède du contraste entre les notes détachées de la deuxième mesure et les notes liées ensuite, comme soudées :
Ceci est bien sûr très anecdotique. Beaucoup moins le sont les coupes intervenues dans le Crépuscule des Dieux. Le plus frustant est la coupe de tout le très beau passage où avant d'être transpercé la lance de Hagen, Siegfried raconte sa vie et ses exploits à ceux qui sont encore ses compagnons de chasse. Ceci permet normalement de réentendre de nombreux motifs et d'apprécier de délicieux moments comme lorsque Siegfried reprend les phrases musicales de l'oiseau... Il ne reste plus que l'évocation de Brünnhilde (rappel du Salut au monde).
Avant cette scène, la rencontre entre Siegfried et les Filles du Rhin avait aussi été considérablement réduite (ce qui n'est pas forcément un mal). Juste après, on entend la Marche funèbre qui, sacrilège, est raccourcie. Heureusement, les cinq dernières minutes de l'ouvrage n'ont pas subi pareil triturage.
Si la mise en scène, l'orchestre et les coupes m'ont causé quelques contrariétés, je suis globalement plutôt content d'avoir assisté à ces représentations. En effet, une grande satisfaction est venue des chanteurs. Comme on peut le voir ci-dessus dans la distribution, certains chanteurs ont assurés deux voire trois rôles différents dans un ou plusieurs des opéras de ce Ring Saga.
Il est intéressant de voir comment une impression sur un chanteur peut évoluer d'un jour sur l'autre. Ainsi, pendant Das Rheingold, entre les deux géants Fasolt et Fafner interprétés respectivement par Martin Blasius et Johannes Schmidt, j'avais une nette préférence pour le premier. Quand il jouèrent séparément les rôles de Hunding, Fafner ou Hagen, je les ai trouvé tous les deux également convaincants. Dans l'ensemble de la distribution, mon coup de cœur va à Ivan Ludlow (Wotan) dont les récits étaient passionnants. La Fricka de Nora Petročenko était merveilleuse aussi, tout comme la Sieglinde de Jihye Son. Sans Cécile De Boever qui a été une formidable Brünnhilde tout du long des trois journées, la représentation du Crépuscule des Dieux eut perdu beaucoup de son intérêt. Dans une des scènes de Die Walküre, elle chantait comme si elle pleurait en même temps. L'effet était saisissant.
Certains chanteurs ont eu souvent du mal à passer l'orchestre. Le problème s'est surtout posé dans les scènes tirées des premier et troisième actes de Siegfried, et marginalement avec certains interprètes dans Götterdämmerung. Ceci a fait que l'opéra qui m'a semblé le mieux réussi et m'a procuré le plus d'émotions a été Die Walküre.
Les représentations de Strasbourg d'il y a une semaine ont été filmées. Elles peuvent être visionnées sur ArteLiveWeb.
Ailleurs : Musica Sola, Paris-Broadway, Palpatine, Bladsurb, Klariscope.
2011-10-10 01:07+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Après Tannhäuser jeudi, j'ai enchaîné de vendredi soir à dimanche soir les quatre opéras de la tétralogie du Ring (cf. entrée suivante). Les matinées de samedi et dimanche étaient par ailleurs occupées par des conférences musicologiques dans le cadre de la Citéscopie proposée en marge de ces concerts à la Cité de la Musique.
Les conférences étaient pour la plupart intéressantes. En voici un très succint résumé. Hélène Cao a discuté samedi des sources littéraires pour le Ring (principalement, l'Edda et les Nibelungen). On a ainsi entendu par exemple un enregistrement vocal avec une musique reconstruite de quelques strophes de l'Edda racontant la rencontre entre Sigurðr et Brynhildr dont le texte ressemblait très fortement à celui du Salut au Monde lors de la rencontre entre Siegfried et Brünnhilde dans Siegfried. Le dimanche, elle a parlé sur le thème Les sons et les sens du Ring. Il fut question bien sûr des motifs. Il aurait sans doute été préférable que cette conférence eût lieu samedi matin de façon à ce que ceci puisse servir de préparation à l'écoute des trois journées du Ring (à défaut du prologue). Il n'était pas question de faire un inventaire exhaustif des motifs, seulement d'expliquer certains mécanismes : motifs construits à partir de celui du Rhin, exemples de transformations de motifs, différents aspects harmoniques, mélodiques, rythmiques. Vu que j'avais déjà fait le travail de mémorisation des motifs, c'est surtout sur l'aspect harmonique des choses que cette conférence a commencé à m'ouvrir un peu les yeux .
Dimanche matin avait lieu une conférence de Philippe Godefroid Mettre
en scène le Ring aujourd'hui ?
. Si l'antisémitisme est une propriété
avérée de Wagner, je ne pense pas qu'il était nécessaire d'y consacrer plus
de la moitié de la durée de la conférence, qui s'est terminée par la
projection de plusieurs films issus de différents productions pour une même
scène de Siegfried : celle où le héros joue du marteau pour forger
l'épée Notung. Cela n'a guère permis que de visualiser différentes
conceptions esthétiques pour le décor et les costumes, puisque dans à peu
près tous les cas, Siegfried interprétait le Chant des soufflets
tout en tapant en rythme avec le marteau, Mime étant en train de préparer
une tambouille empoisonnée dans son coin. Forcément, si la partition
contraint ainsi les mouvements de Siegfried, le metteur en scène ne peut
pas faire grand'chose d'original, le seul cas intéressant montré étant
celui de Chéreau (Bayreuth 1976) où le marteau est hors-scène et le métal
passé dans une machine.
L'autre conférence du samedi, d'Emmanuel Reibel, était centrée sur la
dramaturgie. Elle était en trois parties : Traces du Märchenoper
et du Romantische Oper, le modèle du grand opéra français, et
approfondissement et parachèvement d'une dramaturgie narrative. Pour le
premier, de l'exemple de la Flûte enchantée, on peut remarquer une
similitude entre les Trois dames et les trois Filles du Rhin. Pour le côté
féérique, on remarque dans Siegfried la présence de l'Oiseau
(Waldvogel). La différence, c'est que chez Wagner, ces éléments ne sont pas
décoratifs, mais font avancer l'histoire. Du grand opéra français, Wagner a
gardé l'organisation en tableaux plutôt qu'en numéros musicaux (airs, duos,
etc). Il a aussi gardé les scènes où c'est la parole qui fait l'action
(paroles performatives) comme dans les serments. Dans la troisième partie,
il a expliqué que le livret wagnérien contenait beaucoup de récits (un
personnage raconte ce qu'il a fait). Entendre Die Walküre peu
après cette conférence était particulièrement saisissant puisque dans le
premier acte, Siegmund, Hunding et Sieglinde raconteront chacun leur
histoire. C'est aussi le procédé épique de la narration à l'intérieur de la
narration d'une histoire. L'orchestre joue un rôle de contrepoint
sémantique du texte
(l'orchestre peut ainsi faire allusion à un
personnage qui n'est pas sur scène). La conclusion était une triple
quasi-disparition, des chœurs (remplacés par l'orchestre), des ensembles
vocaux et du final d'acte (gratuitement spectaculaire : l'effet sans
cause
).
Dimanche en début d'après-midi avait lieu une table-ronde présentée par Timothée Picard à propos de l'ouvrage dont il a dirigé l'édition : Dictionnaire encyclopédique Wagner (Actes Sud/Cité de la musique). Il est intervenu avec deux de ses auteurs : Hélène Cao et Jean-François Candoni. Cela donnait bien sûr très envie, m'enfin, c'est quand même 79€ le pavé de 2469 pages.
2011-10-07 01:44+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2011-10-06
Christof Fischesser, Hermann
Christopher Ventris, Tannhäuser
Stéphane Degout, Wolfram von Eschenbach
Stanislas de Barbeyrac, Walther von der Vogelweide
Tomasz Konieczny, Biterolf
Eric Huchet, Heinrich der Schreiber
Wojtek Smilek, Reinmar von Zweter
Nina Stemme, Elisabeth
Sophie Koch, Venus
Sophie Claisse, Anne-Sophie Ducret, Virginia Levia, Xenia D'Ambrosio, Vier Edelknaben
Alix Le Saux/Laure Muller, Ein junger Hirt
Sir Mark Elder, direction musicale
Robert Carsen, mise en scène
Paul Steinberg, décors
Constance Hoffman, costumes
Robert Carsen, Peter Van Praet, lumières
Philippe Giraudeau, chorégraphie
Patrick Marie Aubert, chef du chœur
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
Maîtrise des Hauts-de-Seine, Chœur d'enfants de l'Opéra national de Paris
Tannhäuser, Wagner
Ce soir avait lieu la première de Tannhäuser à l'Opéra Bastille. L'opéra est très-accessible. Il est très facile de s'y retrouver dans les motifs (peu nombreux) et dont le sens est évident (pas comme dans le Ring...).
L'opéra présente l'histoire de Heinrich Tannhäuser qui passe le premier acte auprès de Vénus dans le Venusberg. Cela fait de lui un très mauvais chrétien et il a l'audace de défendre sa vision sensuelle de l'amour au deuxième acte au cours d'un concours dont le lot au vainqueur est Elisabeth. Avant lui, Wolfram en aura défendu une plus chaste image. Tannhäuser est puni. Qu'il fasse le pélerinage à Rome afin d'obtenir l'absolution. Au troisième acte, Elisabeth se languit de lui et, ne voyant pas Tannhäuser rentrer avec les autres pélerins, elle entreprend son dernier voyage. Tannhäuser arrive finalement, mais sans avoir obtenu l'absolution. Il cherche à retrouver Vénus qui vient le tenter à nouveau, mais à la mention du nom d'Elisabeth, il recueille en mourant les mérites du sacrifice d'Elisabeth.
La mise en scène de Robert Carsen est superbe. Au lieu de représenter des chanteurs, elle fait de Tannhäuser, de Wolfram et des autres des peintres. Dans le premier acte, il peint avidement un modèle ayant la tenue traditionnellement attribuée à Vénus. (Il est accompagné dans ses mouvements par un ballet de danseurs sur la musique de la Bacchanale du Venusberg, la version de l'opéra jouée étant celle de Paris, 1861, mais en allemand !) Le deuxième acte se passe dans un musée. Le concours est un vernissage dans lequel on acclame le talent de Wolfram et on dénonce le style de Tannhäuser. Il a pu paraître surprenant que les lumières de la salle ne fussent pas éteintes lors du début de cet acte. Peut-être l'intention du metteur en scène est-elle de donner au public l'opportunité de se mieux mirer comme dans un miroir tant l'aspect mondain costumes, légions d'honneur, petits-fours qui transpirait sur scène peut parfois ressembler au public de l'Opéra (surtout un soir de première). Le refus de la peinture de Tannhäuser trouvera un écho en les ridicules huées qui accompagnèrent les saluts du metteur en scène. Vers la fin de la représentation, je me disais que l'on avait réussi à nous immerger dans l'univers de la peinture sons nous montrer le moindre tableau...
Cette transposition se fait au prix d'une parfois peu honnête traduction
du livret apparaissant en surtitrage, les références au chant étant
remplacées par un mot plus général : Art
.
Du point de vue musical, cela m'a semblé superbe. Le chœur de l'Opéra
était dans un grand jour. C'est qu'il y a plus de chœurs dans cet opéra que
dans tous les autres opéras de Wagner entendus par moi réunis. Les
chanteurs des quatre rôles principaux m'ont tous fait au minimum une très
bonne impression. Ayant eu un petit coup de barre pendant le premier acte,
j'ai été dans l'incapacité de complètement apprécier Sophie Koch (Venus).
Nina Stemme (Elisabeth) faisait ses débuts à l'Opéra. Elle a reçu un
accueil très chaleureux du public. Christopher Ventris a été vaillant du
début à la fin dans le rôle de Tannhäuser. La plus grande satisfaction est
venue pour moi de Stéphane Degout que j'ai trouvé phénoménal dans le rôle
de Wolfram, autant dans son chant du concours
que dans la
Romance de l'Étoile après l'adieu à Elisabeth.
C'était la première étape d'un marathon wagnérien qui va se poursuivre ce week-end avec un Mini-Ring à la Cité de la musique.
2011-09-11 01:32+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Garnier — 2011-09-10
Klaus Florian Vogt, Tito
Hibla Gerzmava, Vitellia
Amel Brahim-Djelloul, Servilia
Stéphanie d'Oustrac, Sesto
Allyson McHardy, Annio
Bálint Szabó, Publio
Willy Decker, mise en scène
John Macfarlane, décors et costumes
Hans Toelstede, lumières
Alessandro Di Stefano, chef du chœur
Adam Fischer, direction musicale
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
La Clémence de Titus, Mozart
Après la rentrée à Bastille avec Salomé, c'était ce soir la première représentation de la saison à Garnier : La Clémence de Titus.
Les costumes ne font pas référence à l'époque romaine. Ils me rappellent
ceux qu'on pouvait voir dans Andrea Chénier. Bref, ils
renvoient plutôt à l'époque de la composition de l'opéra. Le décor est plus
ou moins conceptuel. Le sol est un rond en imitation marbre. Il est entouré
d'une structure en demi-cylindre penché qui donne l'impression d'être à
l'intérieur de la tour de Pise. Cette structure est en deux morceaux. Ils
peuvent être écartés pour permettre des entrées et sorties par l'arrière.
Au centre, un gros bloc parallélépipédique en marbre qui fait à première
vue penser à celui, noir, de 2001, l'Odyssée de l'espace. Il
s'agit en fait d'un projet de sculpture représentant Titus. Dans la
première scène, on écrit Titus
dessus. À la fin de l'opéra, le bloc
aura été sculpté pour représenter Titus et le nom qui n'était marqué que de
façon éphémère sera gravé en dur (en majuscules, avec un U
en forme
de U
et non de V
...). Entretemps, le bloc sera passé par des
phases intermédiaires. Je suppose qu'il faut comprendre que le caractère de
Titus est en formation et qu'il n'aura fait ses preuves comme souverain que
lorsqu'il aura pardonné à ceux qui avaient voulu sa mort. Alors, sa
sculpture monumentale pourra apparaître dans toute sa splendeur.
Un autre accessoire est manipulé presqu'en permanence : la couronne de Titus. D'autres que lui la voudraient bien. Lui hésite entre le pouvoir d'un côté et de l'autre l'amour et l'amitié. Donner la mort ou pardonner. Plaire au peuple ou persister à aimer Bérénice.
Pour ne pas déplaire aux Romains, il abandonne Bérénice (rôle muet interprétée par une comédienne non créditée) et décide d'épouser Servilia, qui aime Annio. Annio cache ses sentiments à Titus, mais Servilia avoue qu'elle aime déjà quelqu'un. Elle préfère laisser entendre à Titus d'honnêtes paroles déplaisantes plutôt que de lui plaire hypocritement. L'homme bon qu'il l'est l'en remercie. Son troisième choix est Vitellia. Celle-ci n'ayant pas supporté de n'avoir pas figuré dans les deux premiers choix, elle décide de comploter contre lui. Flattant Sesto (par ailleurs frère de Servillia et ami d'Annio), qui l'aime, elle arrive à le pousser à commettre l'irréparable. À la fin du premier acte, on comprend que Sesto n'a pas tué Titus, mais un autre homme qui portait son habit. Dans le deuxième acte, Titus finira par pardonner à tout le monde, Sesto ayant dans un premier temps endossé toute la responsabilité avant que Vitellia n'avoue elle-aussi.
Si c'est le dernier opéra seria de Mozart, l'intrigue est typique de ses opéras de jeunesse avec des histoires d'amour tordues qui se finissent bien façon deus ex machina (voir par exemple Lucio Silla).
Stylistiquement, je n'ai pas l'impression d'avoir découvert un autre Mozart que celui que je connaissais déjà. On retrouve ses effets habituels et la proximité furtive de certains passages avec d'autres déjà connus est assez frappante (notamment il y a un moment qui m'a beaucoup fait penser au tout début du Hm! hm! hm! hm! de La flûte enchantée). Cela dit, cela se laisse bien écouter. Le chef d'orchestre Adam Fischer, qui dirige de mémoire, paraît immédiatement très sympathique. Il bat la mesure de façon très claire, signale les entrées aux musiciens, félicite tel soliste pendant que le public applaudit un air. Le principal, c'est qu'il a réussi à maintenir mon attention pendant la durée de l'opéra, me faisant oublier que mes genoux cognaient contre le rebord du premier rang de l'amphithéâtre (au premier acte, le strapontin le plus à gauche, et la place voisine libérée à l'entr'acte pendant le deuxième).
La mise en scène n'a rien d'extraordinaire, mais elle se laisse regarder. Un point faible est l'usage un peu trop systématique de précipités. Certes, cela fait paraître d'assez jolis rideaux peints dans un style vaguement expressionniste. Je ne sais pas s'il est courant de représenter sur scène une Bérénice muette. En tout cas, j'ai trouvé que cela fonctionnait très bien. Le personnage de Titus passe un certain temps au sommet du bloc de marbre qui deviendra à la fin une statue à son effigie. Chanteurs ayant le vertige s'abstenir. Globalement, sans m'enthousiasmer, cette mise en scène ne m'a pas trop déplu.
Stéphanie d'Oustrac (Sesto) domine assez largement le plateau vocal. La dernière fois que je l'avais entendue, c'était dans Armide de Lully. J'ai été très content de la réentendre ce soir. Lors de son air Parto, parto au premier acte, j'ai eu comme l'impression que la soirée commençait véritablement. J'ai également eu un certain plaisir à réentendre Amel Brahim-Djelloul (Servilia). Dans le rôle secondaire de Publio, la basse Bálint Szabó m'a bien plu. Les trois autres chanteurs m'ont semblés plus inégaux au cours de la soirée, mais ils ont eu tendance à se bonifier après l'entr'acte. Le grand air de Vitellia (Hibla Gerzmava) au deuxième acte a effacé mon impression mitigée du premier acte. Je n'ai pas été complètement convaincu par Klaus Florian Vogt (Tito), mais c'est plus une question de goût personnel (je n'aime pas le timbre de sa voix) qu'autre chose. S'il a moins brillé au premier acte, c'est peut-être aussi tout simplement parce que son personnage y est plus fragile, moins déterminé qu'il ne le sera lors du deuxième acte, en particulier quand il devra prendre une décision à propos de Sesto.
2011-09-09 01:25+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2011-09-08
Angela Denoke, Salomé
Stig Andersen, Herodes
Doris Soffel, Herodias
Juha Uusitalo, Jochanaan
Stanislas de Barbeyrac, Narraboth
Isabelle Druet, Page der Herodias
Dietmar Kerschbaum, Erster Jude
Eric Huchet, Zweiter Jude
François Piolino, Dritter Jude
Andreas Jäggi, Vierter Jude
Antoine Garcin, Fünfter Jude
Scott Wilde, Erster Nazarener
Damien Pass, Zweiter Nazarener
Gregory Reinhart, Erster Soldat
Ugo Rabes, Zweiter Soldat
Thomas Dear, Ein Cappadocier
Grzegorz Staskiewicz, Ein Sklave
Pinchas Steinberg, direction musicale
André Engel, mise en scène
Nicky Rieti, décors
Elizabeth Neumüller, costumes
André Diot, lumières
Françoise Gres, chorégraphie
Dominique Muller, dramaturgie
Orchestre de l'Opéra national de Paris
Salomé, Richard Strauss
Ce soir, c'était la rentrée de l'Opéra de Paris, avec la première de Salomé à Bastille. J'avais déjà vu cet opéra dans une autre mise en scène (Lev Dodin). D'Angré Engel, j'avais aimé la mise en scène de La Petite Renarde rusée. Dans Salomé, le travail est beaucoup moins convaincant (et on peut se demander l'intérêt de cette reprise).
Le décorateur avait dû trouver que la scène de Bastille était trop grande. Ainsi, l'espace dans lequel les personnages peuvent évoluer n'est qu'un angle réduit. L'univers et dans une moindre mesure les costumes sont orientalisants.
Le premier problème que j'ai eu avec cette production (dans une moindre mesure aussi avec celle de Lev Dodin) est l'éclairage très réduit. À de nombreuses reprises, je ne voyais tout simplement pas qui chantait (malgré la réduction de l'espace scénique, il y avait un personnage tout à gauche, un autre tout à droite, d'autres au milieu, tous évoluant dans la pénombre). S'il se trouve quelques blafardes lampes, la lumière ne vient essentiellement que du personnage de Jochanaan. De sa prison, mais aussi de lui-même quand Salomé obtient de le voir. À ce moment-là, une porte sur le côté droit s'ouvre et laisse entrer une vive lumière. J'imagine que le metteur en scène a voulu donner en même temps l'impression d'une tempête de sable, mais les artifices utilisés semblent être les mêmes que ceux d'une tempête de neige.
La danse des sept voiles
est inexistante. Tranquillement assise,
Salomé semble attendre que cela se passe. À la fin, elle fait quelque pas
avec Herodes. Entretemps, elle aura enlevé ses chaussures. Dans cette
séquence, la seule idée, symbolique, est de faire venir un personnage (le
page de Herodias ?) pour essuyer avec un tissu blanc le sang qui était
resté après que le corps de Narraboth avait été emmené. C'est un peu
léger.
Bref, ce n'est pas avec les yeux qu'il faut apprécier cette représentation, mais avec les oreilles. L'orchestre dirigé par Pinchas Steinberg est tout simplement sublime. On peut apprécier cette musique dans sa continuité. La tension ne retombe jamais : longs trémolos des cordes, motifs joués par les vents qui s'insèrent très clairement, etc. J'ai presqu'eu l'impression de découvrir un nouvel opéra tant la richesse de cette musique était pour moi inouïe. Je suis donc très content d'avoir pu bénéficier d'un placement favorable du point de vue acoustique au tout dernier rang du deuxième balcon. (Ce placement empêche souvent de voir la partie supérieure des décors. Donc, j'ignore si la Lune, très présente dans le livret, était évoquée dans cette mise en scène.)
Du côté des chanteurs, il y a de quoi être largement satisfait, avec notamment Stanislas de Barbeyrac (Narraboth), Isabelle Druet (Page der Herodias), Juha Uusitalo (Jochanaan), et bien sûr Angela Denoke (Salomé).
2011-07-05 00:37+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2011-07-04
Aleksandrs Antonenko, Otello
Sergei Murzaev, Jago
Michael Fabiano, Cassio
Francisco Almanza, Roderigo
Carlo Cigni, Lodovico
Roberto Tagliavini, Montano
Tamar Iveri, Desdemona
Nona Javakhidze, Emilia
Chae Wook Lim, Un araldo
Andre Serban, mise en scène
Peter Pabst, décors
Graciela Galan, costumes
Joël Hourbeigt, lumières
Alessandro Di Stefano, chef de chœur
Marco Armiliato, direction musicale
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
Maîtrise des Hauts-de-Seine, Chœur d'enfants de l'Opéra national de Paris
Otello, Verdi
Je reviens de la première des représentations de cette série d'Otello où Tamar Iveri chante le rôle de Desdemona. J'ai déjà eu l'occasion de dire que je n'appréciais pas spécialement cette chanteuse. Pourtant, lors de la représentation de ce soir, j'ai vraiment apprécié son interprétation (qui semble tendre parfois à rapprocher Verdi de Puccini), nettement meilleure que celle de Renée Fleming... en particulier, dans la chanson du saule et la prière qui suit.
La mise en scène d'Andrei Serban est la meilleure des trois que j'ai vues de ce metteur en scène (après Lucia di Lammermoor et L'Italienne à Alger). Ce n'est pas extraordinaire, mais il y au moins quelques belles images, comme le feu de joie au premier acte. L'idée principale consiste à projeter des vidéos en surimpression sur les décors ou quelque grand voilage quand la situation le suggère ou quand des personnages ont des pensées en flashback. Au début, pendant la tempête, on voit ainsi des images que l'on aurait aussi bien pu voir au début du Tristan et Isolde avec les vidéos de Bill Viola. Cela dit, les feux d'artifice et les ciels bleus, à force, cela lasse un peu. Je ne sais pas exactement pourquoi j'aurais voulu que Otello étouffe Desdemona avec un oreiller, mais ici, il l'étrangle avec un voile blanc. Parmi les images frappantes : le décor de la chambre était complètement blanc, comme le costume de Desdemona lors de ce quatrième acte. La façon dont Otello transperce alors avec son épée des sortes de cloisons faites de voiles blancs encadrés était légèrement ridicule, mais la mise en scène ne m'a paru à aucun moment grotesque.
Grimé en Maure
, Aleksandrs Antonenko est un peu plus crédible
scéniquement que dans la version sans décor et
accessoire. Cela dit, son rôle est assez statique. Vocalement, il m'a
semblé un peu moins à l'aise que la première fois. Le Jago de Sergei
Murzaev n'a tout simplement rien à voir avec celui de Lucio Gallo. Sa
technique est toute différente, plus subtile que celle de Gallo, qui était
cependant meilleur comédien.
Pour ce qui est de l'orchestre, même depuis une place acoustiquement moins favorable que la première fois (mon replacement ninja au fond du premier balcon de face n'a tenu que jusqu'à la fin du premier acte où on a fait entrer des retardataires), cela m'a semblé sublime. Encore une fois bravo au chef Marco Armiliato. Les instruments à vents ont sonné formidablement bien lors de leur ensemble au début du quatrième acte et l'entrée des cordes s'est faite sans rupture. C'est cette même continuité wagnérisante qui m'avait séduit lors de la fois précédente.
2011-07-01 02:15+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2011-06-30
Torsten Kerl, Siegfried
Iain Paterson, Gunther
Peter Sidhom, Alberich
Hans-Peter König, Hagen
Katarina Dalayman, Brünnhilde
Christiane Libor, Gutrune, Dritte Norn
Sophie Koch, Waltraute
Nicole Piccolomini, Erste Norn, Flosshilde
Caroline Stein, Woglinde
Daniela Sindram, Zweite Norn, Wellgunde
Philippe Jordan, direction musicale
Günter Krämer, mise en scène
Jürgen Bäckmann, décors
Falk Bauer, costumes
Diego Leetz, lumières
Otto Pichler, chorégraphie
Stefan Bischoff, création images vidéo
Patrick Marie Aubert, chef du chœur
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
Götterdämmerung, Wagner
J'ai assisté ce jeudi à la dernière du Crépuscule des dieux à
Bastille. Mon impression a été tout autre que la première
fois. Cela tient peut-être moins à l'interprétation qu'à ma
disposition physique. Lors de la matinée
du 12 juin, j'étais souvent
au seuil de l'endormissement. Ce soir, à la fin, après minuit, j'aurais pu
sans problème enchaîner avec un autre opéra de Wagner.
Lors de cette dernière, je n'avais plus aucune attente vis-à-vis de la mise en scène. J'ai donc pu me concentrer sur la musique, délaissant même les sur-titres, et je ne me suis pas ennuyé une seule seconde. Du côté des voix, la distribution est sans failles. La Waltraute de Sophie Koch m'a ébloui. Pas de surprises avec Hans-Peter König (Hagen), tout simplement extraordinaire. Très bonnes prestations des autres chanteurs. J'attendais beaucoup de Katarina Dalayman (Brünnhilde). Si cela n'a pas été absolument parfait, je l'ai nettement préférée à Brigitte Pinter. Sa façon d'incarner le rôle m'a paru plus convaincante (dans les limites de la mise en scène de Krämer...). Sa voix m'a également semblé moins fragile. Si la scène finale ne m'a pas ému autant que je l'eusse espéré, il s'est trouvé d'autres moments qui m'ont procuré de bonnes émotions.
Du côté de l'orchestre, je peux retirer quelques uns des griefs qui étaient sans doute liés à une incapacité passagère d'écouter de la musique. Sans être uniformément enthousiaste du début à la fin, j'ai passé une très bonne soirée grâce à l'orchestre. J'ai retrouvé les sublimes clarinettes et hautbois dans l'interlude précédant la rencontre entre Waltraute et Brünnhilde. Le rappel par les violoncelles des adieux de Wotan dans cette scène m'a paru très émouvante. La mort de Siegfried a été superbe, tout comme les réminiscences qui avaient précédé (comme la reprise des motifs associés à l'Oiseau par l'orchestre et Siegfried). Le langage des motifs m'a été intelligible tout du long. Cependant, je n'ai pas été emballé par certains débuts de phrases des cuivres, en particuliers des cors, notamment quand ils ont repris le motif du Rhin. À la fin, les premières apparitions du motif de la Rédemption par l'Amour m'ont semblées un peu disgracieuses (parce qu'à moitié camouflées par le reste de l'orchestre). Toutefois, contrairement à ce qu'il m'avait semblé entendre lors de l'autre représentation à laquelle j'ai assisté, la dernière occurrence de ce motif a été très majestueuse.
Événement rare, le parterre a fait une véritable standing ovation aux artistes.
2011-06-21 01:18+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Théâtre du Châtelet — 2011-06-20
Plácido Domingo, Pablo Neruda
Charles Castronovo, Mario Ruoppolo
Amanda Squitieri, Beatrice Russo
Cristina Gallardo-Domâs, Matilde
Patricia Fernandez, Donna Rosa
Victor Torres, Giorgio
Laurent Alvaro, Di Cosimo
Pepe Martinez, Le Père de Mario
David Robinson, Le Prêtre, Cura
Randy Razafijaonimanana, Pablito
Orchestre Symphonique de Navarre
Chœur du Châtelet
Jean-Yves Ossonce, direction musicale
Alexandre Piquion, chef de chœur
Ron Daniels, mise en scène
Riccardo Hernandez, décors et costumes
Jennifer Tipton, lumières
Jesse Belsky, recréation des lumières
Philip Bussmann, projections vidéo
David Bridel, chorégraphie
Il Postino, Daniel Catán
Je reviens de la première française de l'opéra Il Postino adapté du film du même nom qui était lui-même adapté du livre Ardiente Paciencia d'Antonio Skármeta. Il s'agit d'une fiction imaginée à partir de la vie de Pablo Neruda. Pendant son exil en Italie au début des années 1950, il se serait lié d'amitié avec un postier, Mario, dans lequel il aurait fait naître un intérêt pour la poésie.
Neruda est avec Matilde. Mario séduit Beatrice, mais sa tante Donna Rosa veille. Il vont se marier, mais Mario va mourir lors d'une manifestation communiste qui dégénérera. Pendant ce temps, Neruda sera rentré au Chili, semblant oublier les moments passés avec eux en Italie. Quand il reviendra, il ne retrouvera que Beatrice et son fils, appelé Pablito en hommage au poète. (En trame de fond, il y a aussi un contexte politique de promesses électorales, qui, dans cette localité, tourne autour de la construction d'un réseau d'alimentation en eau digne de ce nom.)
Cette production d'opéra m'a semblé assez peu intéressante. Malgré un
hautbois quelque peu défectueux, on passe plutôt un bon moment avec une
musique douce aux oreilles (nonobstant l'utilisation du piano comme
instrument à percussions). La musique créée une atmosphère, mais elle ne
semble former qu'un arrière-plan pour les voix. La façon dont les voix
chantent (en espagnol) fait beaucoup penser aux opéras de Puccini (en
particulier La Bohème). J'ai trouvé que cela sonnait vraiment trop
à la manière de
, même si ce n'est pas particulièrement désagréable
(je ne snobe pas Puccini !).
Du côté des chanteurs, Plácido Domingo (Neruda) a encore de beaux restes ! et dans le rôle de Mario, Charles Castronovo est véritablement excellent. Je ne l'avais entendu jusqu'à maintenant que dans Mireille. Je suis moins convaincu par les deux sopranos Cristina Gallardo-Domâs (Matilde) et Amanda Squitieri (Beatrice) qui ont des voix puissantes, mais dont j'ai trouvé les aigus assez déplaisants.
La mise en scène est assez triviale. Il y a un certain gâchis dans l'utilisation des décors et accessoires. Toutes les cinq minutes environ, on vient déplacer des accessoires pour en remettre d'autres ou on fait un précipité pour installer un nouveau décor qui servira pendant cinq minutes. L'idée est sans doute de faire quelque chose d'un peu cinématographique (on note quelques travellings avant de décors de l'arrière de la scène vers l'avant). Enfin, bref, ce n'est pas très convaincant.
2011-06-18 18:04+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2011-06-17
Aleksandrs Antonenko, Otello
Lucio Gallo, Jago
Michael Fabiano, Cassio
Francisco Almanza, Roderigo
Carlo Cigni, Lodovico
Roberto Tagliavini, Montano
Renée Fleming, Desdemona
Nona Javakhidze, Emilia
Chae Wook Lim, Un araldo
Andrei Serban, mise en scène
Peter Pabst, décors
Graciela Galan, costumes
Joël Hourbeigt, lumières
Alessandro Di Stefano, chef de chœur
Marco Armiliato, direction musicale
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
Maîtrise des Hauts-de-Seine, Chœur d'enfants de l'Opéra national de Paris
Otello, Verdi (sans décors ni accessoires)
Une grève à l'Opéra a fait que cette représentation de l'Otello
de Verdi s'est faite sans décors. Le mouvement devait être plus étendu que
d'habitude puisque les chanteurs n'avaient à leur disposition aucun
accessoire. En sus, parmi eux, il y en avait au moins deux qui ne jouaient
pas (Otello et Desdemona). Scéniquement, c'était bien en dessous de ce qui
se voit dans les représentations d'opéras annoncées à l'avance comme étant
en version de concert
. Lors de la dernière série de représentations
de L'Italienne à Alger, j'avais trouvé que la
version sans décors avec mise en scène improvisée était meilleure que la
version normale (mise en scène par Andrei Serban). Je n'ai pas encore vu
sa mise en scène d'Otello, je pourrai comparer plus tard...
Le renoncement d'un certain nombre de spectateurs m'a permis, avec d'autres, de bénéficier d'un replacement de première catégorie au premier rang centré du premier balcon.
Du côté de la musique (l'orchestre de l'Opéra dirigé par Marco Armiliato), j'ai trouvé cette représentation sublime. Les sonorités de l'orchestre passent par de nombreux états au cours de l'opéra, les orchestrations des différents moments étant très variées, chacune convenant aux sentiments ou à la situation particulière. Dans la mise en musique du texte, on trouve peu de passages que l'on pourrait qualifier d'airs. On observe au contraire une grande continuité dans la musique, dont la tension ne retombe jamais. Bref, c'est assez wagnérien... L'atmosphère d'une phrase musicale confiée aux violoncelles me fait d'ailleurs penser à un passage similaire dans le premier acte de La Walkyrie. On trouve même des motifs, en tout cas au moins un, utilisé au dernier acte comme réminiscence de l'amour d'Otello et Desdemona avant que la jalousie n'y fît obstacle. Parmi les moments très forts, j'ai apprécié l'utilisation des contrebasses pour accompagner l'entrée en scène d'Otello alors qu'il va commettre l'irréparable.
S'il avait été un peu plus comédien, j'aurais été totalement convaincu par Aleksandrs Antonenko (Otello). Le jeu de Renée Fleming (Desdemona) a été également très en retrait, mais je n'ai pas beaucoup apprécié sa voix, qui quoique dotée d'un joli timbre, m'a semblée assez inconstante et peu puissante. Mon impression négative sur la première partie de la représentation s'est cependant un peu améliorée dans les deux derniers actes. J'ai lu beaucoup de commentaires assassins sur le baryton Lucio Gallo (Jago). Moi, je l'ai trouvé très bien. C'était aussi le seul à véritablement jouer son rôle, qui est tout en duplicité.
2011-06-13 00:16+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2011-06-12
Torsten Kerl, Siegfried
Iain Paterson, Gunther
Peter Sidhom, Alberich
Hans-Peter König, Hagen
Brigitte Pinter, Brünnhilde
Christiane Libor, Gutrune, Dritte Norn
Sophie Koch, Waltraute
Nicole Piccolomini, Erste Norn, Flosshilde
Caroline Stein, Woglinde
Daniela Sindram, Zweite Norn, Wellgunde
Philippe Jordan, direction musicale
Günter Krämer, mise en scène
Jürgen Bäckmann, décors
Falk Bauer, costumes
Diego Leetz, lumières
Otto Pichler, chorégraphie
Stefan Bischoff, création images vidéo
Patrick Marie Aubert, chef du chœur
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
Götterdämmerung, Wagner
Épisodes précédents :
Comme je l'avais fait pour le prologue et les deux premières
journées
du festival scénique du Ring, voici un résumé de
la dernière. Dans le prologue du Crépuscule des Dieux, trois
nornes se lamentent sur les fautes commises par Wotan : il a bu à une
source, il a fait tomber le frêne du monde, il a dompté le feu Loge. Elles
annoncent l'incendie du Walhalla. On retrouve ensuite Siegfried et
Brünnhilde là où on les avait laissés à la fin de Siegfried. On
assiste à une scène d'adieux, Siegfried s'en allant pour de nouveaux
exploits. Il laisse à Brünnhilde le soin de conserver l'anneau.
Au début du premier acte, de nouveaux personnages (Gibichungen, vivant au bord du Rhin) préparent un mauvais tour à Siegfried. Hagen, fils d'Alberich, voudrait que Gutrune et Gunther se marient. À Gunther, il vante les mérites de Brünnhilde, mais il dit aussi qu'elle réside dans un lieu inaccessible pour lui. La seule solution est que Siegfried aille l'y prendre pour lui. En échange, on lui donnera la main de Gutrune. (Ce qui intéresse Hagen, c'est bien sûr l'anneau !) Comme par hasard, Siegfried passe par là, on lui sert quelque breuvage enchanté, et il tombe immédiatement sous le charme de Gutrune. Il a complètement oublié Brünnhilde. Il accepte d'aller la chercher en prenant les traits de Gunther grâce au pouvoir du Tarnhelm. De leurs sangs mêlés, Gunther et Siegfried scellent un pacte. Mort à celui qui viendrait à le rompre. Nous sommes de retour au rocher de Brünnhilde, où celle-ci reçoit la visite de Waltraute, une autre Walkyrie. Les deux femmes ne peuvent se comprendre. Waltraute voudrait qu'elle rende l'anneau aux filles du Rhin, mais pour Brünnhilde, ce serait trahir Siegfried. C'est celui-là-même qui vient la trahir, comme il a été manigencé plus haut. Il lui arrache l'anneau des mains. Ils passent la nuit ensemble, mais l'honneur selon Siegfried est sauf puisqu'ils sont séparés l'un de l'autre par l'épée Notung.
Au début du deuxième acte, Alberich vient attiser les désirs de Hagen, l'incitant à tuer Siegfried. Plus tard, Siegfried, précédant Gunther et Brünnhilde revient chez les Gibichungen. Il explique à Hagen et Gutrune ce qui vient de se passer. On s'apprête à célébrer l'union de Gunther et Brünnhilde et de Gutrune et Siegfried. Quand le nom de Siegfried est prononcé, Brünnhilde comprend qu'elle a été trahie (pour l'enlever, Siegfried avait pris la forme de Gunther, elle ne pouvait donc pas le reconnaître, mais d'un autre côté, elle avait la promesse de Wotan que seul un vaillant héros pourrait traverser les flammes pour la rejoindre...). Brünnhilde décide de provoquer la zizanie. Elle s'étonne que ce soit Siegfried qui porte l'anneau à son doigt, vu que c'est Gunther qui est censé l'avoir enlevée. Siegfried est persuadé d'être tout ce qu'il y a de plus honorable, il ne comprend pas ce que dit la femme de Gunther. Ces paroles déclenchent la colère de Gunther, qui est attisée encore davantage par Hagen. Avec Brünnhilde, ils décident de tuer Siegfried. Elle leur indique que la seule manière est de l'atteindre dans le dos. Par égard pour Gutrune, on décide de faire passer le meurtre pour un accident de chasse.
Au troisième acte, lors de la chasse, Siegfried s'est détaché du groupe. Il se retrouve au bord du Rhin et rencontre les trois filles du fleuve. Celles-ci chantaient, espérant voir arriver celui qui leur rendrait l'anneau. Elles lui expliquent que l'anneau est maudit et que la seule manière de lever cette malédiction est qu'il leur donne l'anneau. Lui explique qu'il n'a pas appris la peur. Elles lui annoncent qu'il va mourir le jour-même. À un moment de la discussion, il offrirait bien l'anneau contre l'amour d'une des filles du Rhin, quoique ce soit inconvenant vis-à-vis de Gutrune. Après quelques hésitations, Siegfried garde finalement l'anneau. Hagen, Gunther et les autres chasseurs le rejoignent. On discute, on discute. Siegfried se retrouve à raconter son enfance... Il en vient à expliquer qu'il a obtenu la faculté de comprendre le langage des oiseaux en tuant le dragon Fafner. Il raconte ce que l'oiseau lui avait chanté dans Siegfried. Pour lui faire retrouver encore un peu mieux la mémoire, on lui faire boire un nouveau breuvage. Il prononce avec ardeur le nom fatidique de Brünnhilde. Hagen le tue d'un coup de lance dans le dos. Dans la dernière scène, on rentre de la chasse. Gutrune est inquiète. Serait-il arrivé quelque chose à Siegfried. On n'arrive pas à lui cacher longtemps la vérité. Elle se lamente du malheur apporté par Brünnhilde. Celle-ci demande qu'on dresse un bûcher funéraire. Avant de s'y jeter, elle lance un trait enflammé en direction du Walhalla... Le Rhin envahit les lieux. Les filles du Rhin s'emparent de l'anneau. Devenu fou, Hagen se précipite désespérémment dans le Rhin pour tenter de récupérer l'anneau, en vain.
Du côté de la mise en scène de Günter Krämer, si celles de Das Rheingold et de Die Walküre m'avaient déplu et si celle de Siegfried m'avai semblée assez satisfaisante, il y avait dans tous les cas de la matière (avec laquelle on pouvait ou non être en accord). Dans Götterdämmerung, il n'y a strictement rien et tout est extraordinairement statique. On n'observe aucune cohérence d'ensemble entre les quatre volets de la tétralogie, ou si on avait pu croire qu'il y en avait une, le metteur en scène montre que ce n'était qu'une vaste plaisanterie. Le fameux grand escalier qui reliait la terre au Walhalla reparait ici il me semble deux fois. Une fois quand Waltraute descend pour rencontrer Brünnhilde. C'est normal. Plus loin, le même escalier fait office de gradins pour le chœur en rang d'Oignon qui accueille l'arrivée de Gunther et Brünnhilde. Un troisième lieu de villégiature a été donné à Brünnhilde. Alors qu'on l'avait quittée sous une simple table dans Die Walküre, elle avait reparu couchée sur le grand escalier, légèrement en hauteur. Dans ce dernier volet, on la retrouve dans un nouveau lieu avec néanmoins toujours ladite table. Quand Waltraute viendra la voir, il y aura encore eu des changements, des meubles ayant été ajoutés faisant de Brünnhilde une parfaite bourgeoise.
Les Nornes sont habillées de sobres robes noires. Dans la deuxième partie du prologue, elles restent immobiles au fond de la scène. Vers la fin, elles passent par dessus leur robe le costume hideux des Filles du Rhin vu dans Das Rheingold. Quelques secondes plus tard, elles retrouvent leur costume précédent et font cependant quelques mouvements ondulatoires avec les mains derrière un grand écran vertical transparent où s'animent des images fluviales. Pourquoi pas. Mais pourquoi donc s'en vont-elles à peu près précisément au moment où les motifs présents dans la musique se mettent justement à évoquer le Rhin (Siegfrieds Rheinfahrt). À ce moment-là, un ballet ridicule est exécuté par des hommes habillés en femmes qui disposent des tables et des bancs (dont on ne fera aucun usage plus tard).
Le grand écran électrique transparent devient le principal ingrédient
scénographique de cette production. Cela fait d'ailleurs un peu peur dans
la première partie quand on voit ce haut échafaudage tourner avec tout le
décor autour d'un axe tandis que les nornes s'avancent. À la fin de
l'opéra, avant la réapparition des filles du Rhin, il n'y a en scène que
Brünnhilde, le grand écran et le corps de Siegfried. La scène m'a paru bien
ennuyeuse... Elle se termine en pied de nez : sur l'écran apparaissent des
images d'un jeu vidéo style Doom
où il faut dégommer le maximum de
dieux.
L'autre trouvaille a été de faire de Hagen un personnage en fauteuil
roulant, plus ou moins manipulé par Alberich, qui, scandâââle, prononce les
dernières paroles de l'opéra : Zurück vom Ring!
, alors que ce sont
les derniers mots de Hagen dans le livret.
Il y a peut-être une scène qui est à peu près réussie : celle où Siegfried prend la forme de Gunther grâce au Tarnhelm pour enlever Brünnhilde. Les interprètes de Siegfried et Gunther sont tous les deux en scène, Siegfried posté derrière Gunther en tenant le Tarnhelm devant lui pour dissimuler son visage à la vue de Brünnhilde. On pourrait penser que pour le metteur en scène, seul Siegfried est présent et Gunther n'est qu'une marionnette (incapable de faire du lip synch) apparue par le pouvoir du Tarnhelm, mézalor il est étrange que les interprètes de Brünnhilde et Gunther se retrouvent couchés collés l'un contre l'autre tandis que de l'autre côté de la scène Siegfried jure devant Notung qu'il reste à l'écart de l'épouse de Gunther. Ou bien il faut penser que Gunther est aussi présent avec Siegfried, mézalor on contredit la suite du livret puisque Gunther n'est censée rencontrer Brünnhilde que le lendemain.
Parmi les autres bizarreries, dans les moments qui précèdent le meurtre de Siegfried, celui-ci refuse de prendre le breuvage (du whiski probablement) que lui tend Hagen. Comment retrouve-t-il la mémoire sans ça ?
Pour moi, des quatre mise en scène que l'on a vu dans ce cycle, c'est indiscutablement celle qui est la plus ratée.
Du côté de la musique, alors que j'avais été véritablement enchanté par la prestation de l'orchestre dans Siegfried, je sors de cette représentation relativement déçu. Il s'est trouvé un certain nombre de passages où j'avais l'impression qu'il y avait des hésitations au démarrage et d'autres où des phrases musicales m'ont paru méconnaissables (exemples : motifs des Gibichungen, du meurtre, de la rédemption par l'amour), en tout cas moins claires que ce à quoi je suis habitué. Cette impression générale est peut-être liée au fait qu'il soit beaucoup fait usage des cuivres dans cet opéra. Parmi les bonnes choses, il y a eu les fabuleuses interventions des clarinettes puis des hautbois reprenant le motif de Brünnhilde, repris par l'orchestre et culminant en un rappel du Salut au monde avant l'entrevue de Brünnhilde avec Waltraute. Dans la marche funèbre de Siegfried, on a entendu un fort beau déploiement de décibels. (À noter aussi, cela dure une demi-heure de plus que la version Boulez/Chéreau !)
Du côté des voix, presque tous les rôles me semblent fort bien interprétés. Hans-Peter König est superbe en Hagen, comme Iain Paterson en Gunther. J'ai aussi aimé les Filles du Rhin, les Nornes, Gutrune, Waltraute. Même Torsten Kerl (Siegfried) que j'avais eu du mal à entendre dans Siegfried passe sans souci la rampe.
Mon principal problème avec cette représentation vient de l'interprète de Brünnhilde, Brigitte Pinter, qui a dû remplacer Katarina Dalayman (souffrante). Conditions peu idéales pour une prise de rôle ! J'ai été gêné par la voix un peu fatiguée qui ne tient pas toujours jusqu'au bout des phrases et qui est parfois recouverte par l'orchestre. Cela n'admet pas vraiment d'explication rationnelle et cela ne se commande pas, mais je suis très étonné de n'avoir absolument pas été ému par la scène finale.
PS : Mon avis sur l'orchestre s'est bonifié lors de la dernière représentation.
2011-05-24 02:00+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Théâtre des Champs-Élysées — 2011-05-23
Joyce DiDonato, Ariodante
Marie-Nicole Lemieux, Polinesso
Karina Gauvin, Ginevra
Sabina Puértolas, Dalinda
Nicholas Phan, Lurcanio
Matthew Brook, Le Roi
Paolo Borgonovo, Odoardo
Il Complesso Barocco
Alan Curtis, direction
Ariodante (Händel)
Superbe version de concert dans un TCE plein à craquer pour cet Ariodante. L'effectif orchestral est plutôt réduit. Au centre, un clavecin. À gauche, les violons (5+2). À droite, les deux violoncelles, le théorbe, la contrebasse et les deux altos. Au fond, les deux hautbois, les deux cors (naturels, donc buggés...) et le basson (formidable). Alan Curtis, le chef d'Il Complesso Barocco, a l'air de diriger des musiciens qui savent ce qu'ils ont à faire. Dans le fond, les altos se synchronisent par sourires interposés. Dans le style très reconnaissable de Händel, on entend néanmoins quelques effets qui m'étaient jusqu'alors inconnus.
Ariodante doit épouser Ginevra, la fille du roi, mais Polinesso, qui l'aime aussi, complote avec le complicité innocente de sa suivante Dalinda qui passe les habits de Ginevra. Tout le monde croit que Ginevra trompe Ariodante. On annonce qu'il s'est suicidé. Ginevra clame son innocence et veut se suicider aussi. En fait, personne n'est mort, sauf le méchant qui est tué et tout finit par s'arranger.
Absolument tous les chanteurs me font une bonne impression. Parmi eux, on trouve notamment Karina Gauvin (Ginevra) que j'entends pour la première fois. Si les chanteurs ont tous été copieusement applaudis, les suffrages du public se concentrent sur les interprètes des deux rôles travestis. Pour bien montrer qu'elle a un rôle de méchant, Marie-Nicole Lemieux (Polinesso) violente quelque peu les pupitres et sa partition. Elle m'a davantage convaincu ce soir que les deux autres fois que l'ai entendue.
La Reine de la soirée est incontestablement Joyce DiDonato (Ariodante). Comme sur la pochette de son dernier CD Diva Divo, elle a joué le jeu du travestissement en portant un costume masculin. D'un bout à l'autre de l'opéra, elle a réalisé prouesses vocales sur prouesses vocales. Mais comment fait-elle pour respirer ? Certains choix audacieux de dynamiques sont tenus sans accroc jusqu'au bout des phrases. Les stupéfiantes vocalises si typiquement händeliennes sont lancées avec autant de conviction que si elles véhiculaient un sens. J'avais déjà une opinion très-favorable de cette chanteuse (septième fois que je l'entends en concert) et me demandais où elle pourrait encore nous entraîner. Je crois qu'on n'a pas fini d'en entendre parler !
Je ne pense pas avoir précédemment vu le public réagir de façon aussi
chaleureuse lors d'un opéra (que ce soit en version scénique ou en version
de concert). Les applaudissements et bravos lancés après les airs de Joyce
DiDonato correspondent bien à l'idée que je me fais du mot
triomphe
.
(Le minutage 2×1h20 était quelque peu optimiste, puisque le concert programmé à 20h s'est terminé vers 23h45...)
2011-05-14 16:31+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2011-05-13
Christopher Maltman, Il Conte d'Almaviva
Dorothea Röschmann, La Contesse d'Almaviva
Julia Kleiter, Susanna
Erwin Schrott, Figaro
Isabel Leonard, Cherubino
Ann Murray, Marcellina
Maurizio Muraro, Bartolo
Robin Leggate, Don Basilio
Antoine Normand, Don Curzio
Christian Tréguier, Antonio
Zoe Nicolaidou, Barbarina
Olivia Doray, Carol García, Due Donne
Dan Ettinger, direction musicale
Giorgio Strehler, mise en scène et lumières
Humbert Camerlo, réalisation de la mise en scène et des lumières
Marise Flach, collaboration aux mouvements
Ezio Frigerio, décors
Ezio Frigerio, Franca Squarciapino, costumes
Vinicio Cheli, lumières
Jean Guizerix, chorégraphie
Alessandro Di Stefano, chef du chœur
Denis Dubois, clavecin
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
Les Noces de Figaro, Mozart
Les jours de grève des transports semblent coïncider avec mes tentatives pour aller voir Les Noces de Figaro à Bastille. En septembre/octobre, j'avais renoncé à aller une représentation sans les décors, faute de savoir si je pourrais rentrer chez moi après le spectacle. Hier, j'y suis allé malgré ce risque, et effectivement je ne suis arrivé à rentrer chez moi qu'à 5h15 (après deux heures d'attentes infructueuses à Denfert où j'ai vu passer trois noctiliens complets ; j'ai pris un noctilien d'une autre ligne qui me déposait à une dizaine de kilomètres de chez moi et il a bien fallu finir le trajet à pieds).
La mise en scène de Giorgio Strehler a été créée en 1973. La deuxième série de représentations commencée hier en constitue la vingtième reprise. C'est la première fois que je la vois. Il est évident qu'elle fonctionne bien. Les costumes sont traditionnels. Les décors d'Ezio Frigerio aussi. Les changements de décors après le premier et le troisième acte ont été interminables (on comprend que ce n'est pas simple à faire, mais à Bastille, on est tellement habitué à voir la scène se transformer complètement en quelques dizaines de secondes...). Une partie non négligeable du public a alors cru pouvoir sortir de la salle et revenir. Les premiers airs ont été systématiquement applaudis, ce qui a un peu cassé le rythme de la représentation, mais on est heureusement devenu un peu plus raisonnable. On a également entendu un spectateur pourrir complètement un des airs de Susanna en émettant des bruits de toux invraisemblablement forts.
Je ne suis pas des plus ardents admirateurs de Mozart. La musique de la première partie, et tout particulièrement le premier acte, m'a montré ceux des effets stylistiques du compositeur que je n'apprécie pas. Je n'ai pas été très enthousiasmé par cette musique, dirigée par Dan Ettinger, d'autant plus que dans les moments où la musique ne s'efface pas devant le chant ou y répond, l'orchestre, sans couvrir complètement les voix, ne laisse plus entendre grand'chose de distinct de celles-ci. Ce n'est à mon avis pas un problème des chanteurs, mais bien de la direction puisque dans les récitatifs, les chanteurs se font très bien entendre, et comme il m'est déjà arrivé, mais assez rarement, j'aurais parfois presqu'eu envie d'applaudir à la fin d'un récitatif... Après l'entr'acte, il m'a semblé que l'orchestre a joué nettement moins fort que lors de la première partie, ce qui a permis de mieux mettre en valeur les chanteurs, et pas seulement dans les récitatifs.
Même si je n'ai pas entendu la distribution A (octobre/novembre), il est
évident que cette distribution B
est tout sauf une distribution au
rabais. On y trouve ainsi notamment Erwin Schrott (Figaro), Julia Kleiter
(Susanna), Christopher Maltman (Almaviva), Dorothea Röschmann (La Contesse
d'Almaviva), Isabel Leonard (Cherubino). Dans les petits rôles, on trouve
quelques jeunes chanteuses de l'Atelier lyrique : Olivia Doray et Carol
García dans un duo, et surtout Zoe Nicolaidou (qui m'avait impressionné
dans le concert donné samedi
dernier au Studio Bastille pour l'opération Tous à l'opéra)
dans le rôle de Barbarina (qui a plusieurs récitatifs et un air en
ouverture du quatrième acte).
Pour le reste, à propos de la production, on a manifestement voulu accentuer dans l'éclairage le déroulement de cette folle journée. Ainsi, au premier acte, la pièce où évoluent les personnages est dans la pénombre. Dans le deuxième, la chambre de la contesse est éclairée par la gauche, tout comme le décor tout en profondeur du troisième acte. On retrouve la pénombre dans le quatrième acte. Cela fait quand même deux actes où on distingue à peine les chanteurs... On dira que je ne suis jamais content parce que j'ai trouvé très bizarre que l'on ait éclairé brutalement l'avant de la scène le temps où Figaro s'y est posté pour son air. (Parmi les effets lumineux involontairement étranges, on peut noter que les musiciens de l'orchestre et le chef ont éteint les lumières de leur pupitre au début au quatrième acte, ce afin que l'on comprenne bien qu'il faisait nuit. Mais quand le pupitre du chef d'orchestre est rallumé, l'œil du spectateur est comme agressé par le changement soudain d'intensité lumineuse...)
Mis à part ces bizarreries de lumières, j'ai vraiment adoré ce quatrième acte, où les personnages se jouent des tours les uns aux autres grâce au travestissement.
2011-05-08 20:32+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Athénée Théâtre Louis-Jouvet — 2011-05-08
Isabelle Druet, Didon
Arnaud Guillou, Énée
Camille Poul, Belinda
Edwige Parat, La seconde suivante
Anna Wall, L'enchanteresse
Agathe Boudet, Fiona Mc Gown, Les sorcières
François Rougier, Le marin
Antoine Strub, L'esprit
Sébastien d'Hérin, direction musicale
Bernard Lévy, mise en scène
Bérangère Gros, assistante à la mise en scène
Giulio Lichtner, scénographie
Christian Pinaud, lumières
Romain Vuillet, Jérôme Tuncer, vidéo
Fabienne Robineau, maquillages et coiffures
Atelier du Théâtre musical de Besançon, réalisation des décors
Pascal Doudement, réalisation de l'écorce de l'arbre
Atelier du Théâtre musical de Besançon, Atelier Lilas en scène, réalisation des costumes
Chœur AEdES
Les Nouveaux Caractères
Didon et Énée, Purcell
Deuxième spectacle pour moi à l'Athénée après le concert Humour noir. Cette fois-ci, la salle est pleine pour l'opéra de Purcell Didon et Énée. Vu le minimalisme de la mise en scène et des décors (à l'exception d'un tronc d'arbre qui descend des cintres pour la deuxième scène du deuxième acte), je pense que j'aurais autant préféré assister à une version de concert. Une traduction du texte est projeté au fond du décor, intégré à des animations vidéos.
La musique qui sort de la fosse est absolument superbe. Elle est jouée par un tout petit effectif musical (Les Nouveaux Caractères, sept musiciens). Le chef Sébastien d'Hérin (qui dirige depuis le clavecin) semble très attentif dans sa direction du chœur AEdES qui est sur le côté droit de la fosse. Certains rôles sont d'ailleurs interprétés par des membres du chœur, qui reviennent dans la fosse une fois leur rôle terminé.
Si les chanteurs m'ont semblé bons, vu la brièveté de l'œuvre, c'est surtout la musique qui m'a frappé. Isabelle Druet, qui interprétait le rôle de Didon, fera un récital le 21 mai à 15h dans le même théâtre (et vu la réduction qui était proposée aux spectateurs de cette représentation, il doit rester des places...).
2011-05-05 01:19+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
MC93 Bobigny — 2011-05-04
Alisa Kolosova, Orphée
Ilona Krzywicka, Eurydice
Olivia Doray, Amour
Geoffroy Jourdain, direction musicale
Dominique Pitoiset, Stephen Taylor, mise en scène
Dominique Pitoiset, scénographie
Axel Aust, costumes
Christophe Pitoiset, lumières
Cécile Kretschmar, création des maquillages
Franck Guillemain, réalisation et montage vidéo
Orchestre-Atelier Ostinato
Le Jeune Chœur de Paris
Orphée et Eurydice, Gluck (version Berlioz)
Je me suis rendu pour la première fois à la MC93 Bobigny pour assister à la deuxième production scénique de la saison pour l'Atelier lyrique de l'Opéra de Paris après Street Scene. La MC93 est accessible en métro, il n'y a qu'à marcher cinq minutes (fléchage indiscutablement spectaculaire) pour accéder à cette salle située boulevard Lénine. On y trouve une restauration à bas coût, une librairie et en entrant dans la salle de spectacle (environ 600 places), on est saisi par son côté monumental : des gradins à la pente prononcée, un décor brut et noir d'où débordent des tuyaux. La fosse d'orchestre est très profonde. C'est une gorge dont l'accès est protégé par une sorte de parapet dont la partie supérieure n'est qu'un épais câble métallique torsadé. La beauté de la salle n'est pas en mesure d'interférer avec la beauté de ce qui se passera sur scène !
La version de l'Orphée et Eurydice de Gluck jouée ce soir est celle adaptée par Berlioz, en français. L'absence de surtitrage se fait malheureusement sentir, que ce soit pour les trois chanteurs solistes ou pour le chœur. Cependant, chacun aura l'occasion de chanter des passages (notamment ceux qui se rapprochent du récitatif) dans lesquels le texte, quelque peu suranné, se fait entendre. Ayant déjà vu une version allemande, j'aimerais bien un jour voir une production scénique de la version d'origine en italien...
La mise en scène de Dominique Pitoiset et Stephen Taylor m'a paru assez intelligente. Le décor, unique, présente l'intérieur très-moderne d'un appartement. Des fauteuils, des armoires, des tiroirs, un réfrigérateur, un coin bar avec évier (fonctionnel !). La profession d'Orphée est signalée par la présence d'un pupitre et d'une harpe. Dans la première scène, les membres du chœur (habillés en noir et portant chacun une rose rouge) viennent présenter leurs condoléances à Orphée dont l'épouse est morte. Une rotation du décor permet ensuite de montrer son autre face : la salle de bain et la chambre à coucher. On comprend qu'Eurydice s'est suicidée. Des constatations légales sont en train de se faire.
Amour (jeune femme dynamique en perruque blonde, mais personnage plus sombre que dans d'autres versions) vient apporter quelque réconfort à Orphée. La solution pour lui semble être de partir dans un enfer artificiel (mélange alcool-drogues aidant). Le reste de l'histoire est connu...
Contrairement à certaines versions de l'opéra de Gluck, cette version-ci, je l'ai découvert au cours de la représentation, mais vu le parti pris de mise en scène, comment eût-il pu en aller autrement ? cette version-ci, disais-je, se finit très mal. Si j'ai bien compté, Eurydice sera morte trois fois et Orphée réussit à se suicider.
Au-delà du décor et des idées, le travail de mise en scène proprement dit est remarquable : le placement, les mouvements et l'attitude des membres du chœur sont saisissants (le genre de choses que je n'ai pas souvent le loisir de mesurer en vision directe, ce que j'ai pu apprécier ici depuis mon placement au quatrième rang !). Cela vaut aussi pour les trois solistes, mais vu son importance, c'est le plus frappant pour le rôle d'Orphée.
Du côté de la musique, cette version Berlioz semble contenir quelque fantaisie quasi-rossinienne, et en même temps tellement française, à la fin du premier acte. Passage a capella, vocalises redoutables pour Alisa Kolosova qui s'en sort plus que bien. (Après vérification, il s'agit de l'air Amour, viens rendre à mon âme.)
Malgré le petit bémol concernant le texte pas toujours intelligible, je suis plus que très agréablement surpris par la qualité de ce spectacle ! Et malgré un commencement à 20h30 (légèrement retardé), j'ai été tout étonné d'être rentré à Orsay dès 23h30.
2011-04-27 01:13+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Théâtre des Bouffes du Nord — 2011-04-26
Jean-Yves Aizic, Le pianiste et répétiteur
Jean-Sébastien Bou, Le baryton
Elizabeth Calleo, La cantatrice
Jeanne Cherhal, La chanteuse
Marie-Ève Munger, La colorature
Philippe Smith, Le metteur en scène
Frédéric Verrières, idée, musique
Bastien Gallet, livret
Guillaume Vincent, mise en scène
Marion Stoufflet, dramaturgie
James Brandily, scénographie
Sébastien Michaud, lumières
Fanny Brouste, costumes
Olivier Pasquet, musique électronique
Jean Deroyer, direction musicale
Ensemble Court Circuit
The Second Woman, Frédéric Verrières (création)
Je reviens de la création de l'opéra The Second Woman du jeune compositeur Frédéric Verrières au Théâtre des Bouffes du Nord.
Je suis assez partagé, puisque la première partie m'a beaucoup fait rire, mais ce n'était pas un opéra, en fait, c'était plutôt un anti-opéra. La deuxième partie était davantage musicale, mais il s'agit de musique zarbi pendant lequel le temps est un peu long (pourtant, au total la représentation, sans entr'acte, ne fait qu'un peu plus d'une heure et demie).
L'idée de l'opéra est inspirée du film Opening Night de John
Cassavetes (que je n'ai pas vu) et dans lequel Gena Rowlands joue dans une
pièce intitulée The Second Woman. Dans la première partie, on
assiste à des répétitions d'un opéra. La cantatrice Elizabeth (prénom de la
chanteuse qui interprète le rôle) est en retard, du coup, c'est la
chanteuse sympa Jeanne (Jeanne Cherhal) qui commence le spectacle en
interprétant une sorte de lamentation (qui reviendra de nombreuses fois).
Le metteur en scène sans idées entre. Elizabeth commence la chanson et
l'interprète de façon caricaturalement lyrique. On lui reproche son
vibrato, etc. Tout semble aller contre le genre de l'opéra. On
croit l'entendre chanter un air de Tosca (en tout cas, il semble
qu'on entende distinctement Scarpia
à un moment), puis c'est la
scène de la folie de Lucia di Lammermoor qui est pastichée. La
musique citée est cependant rendue assez méconnaissable (mais au moins dans
ce cas précis, l'orchestration est amusante). Le texte fait référence à une
sœur, Yelena. Une troisième chanteuse (la colorature, qui ne s'appelle pas
Yelena mais Marie-Ève) entre. On entend un peu du duo des fleurs de
Lakmé. Ah, et puis bien sûr, des vocalises de Zerbinetta dans
Ariadne auf Naxos !
Il y a en effet un raprochement évident à faire avec cet opéra de Strauss, puisque comme dans ce dernier, on trouve des réflexions sur l'opéra, la voix, la mise en scène, dans une première partie en forme de prologue qui comporte des parties parlées, avant que la musique prenne le dessus dans la deuxième.
L'histoire devient alors à moitié surréaliste. On ne sait plus très bien si on est pendant la répétition, dans le rêve de la cantatrice, etc. On est peut-être même dans une bobine de film puisque par exemple à un moment, un effet de lumières stroboscopiques fait voir un mouvement saccadé des personnages qui avancent, et qui se mettent à reculer, puis à avancer à nouveau en répétant leur texte...
Pendant que la cantatrice est ailleurs, Jeanne s'amuse à répéter une chanson avec un baryton un peu coincé. Il est amusant de la voir pasticher le style de Brigitte Bardot, de Britney Spears, de citer une émission de Taratata avec Yannick Noah... Toutes idées que le personnage du metteur en scène approuve.
C'est un curieux spectacle, certainement amusant et déroutant, avec une scénographie très réussie (qu'il est sans doute préférable de suivre depuis des places centrées au parterre). (Je dis déroutant, mais pas volontairement incompréhensible comme l'était la Passion de Pascal Dusapin, qui assistait à cette création.)
2011-04-21 16:46+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse
Ce n'était pas sans éprouver quelques contrariétés que j'avais rempli mon formulaire d'abonnement à l'Opéra pour l'année prochaine. J'avais coché tous les ballets (sauf le Roméo et Juliette de Sasha Waltz) et étais même allé jusqu'à sélectionner quelques opéras (notamment un Tannhäuser à Bastille).
Aujourd'hui, j'ai reçu mon récapitulatif de réservation. J'avais demandé, comme les années précédentes à être prioritairement aux troisièmes ou quatrièmes loges à Garnier, et que l'amphithéâtre ne soit envisagé qu'en tout dernier recours. Pour cette année, ces préférences avaient été prises en compte. Je n'ai eu qu'une place d'abonnement à l'amphithéâtre, pour Giulio Cesare où je m'étais en plus retrouvé derrière un grand chevelu. Un petit mot sur le récapitulatif de l'année dernière s'était excusé par avance du désagrément de ne pas voir tous mes vœux de placement satisfaits.
Sur le récapitulatif reçu aujourd'hui, pas moins de huit billets
réservés étaient à l'amphithéâtre. Une fois ou deux par an, cela peut
aller, mais à ce niveau, le déplaisir serait trop grand. Heureusement, il
faut confirmer son abonnement avant qu'il soit validé. Avant, cela
permettait aussi de faire d'éventuelles retouches et cela se passait plutôt
bien. Là, au téléphone, quand j'ai demandé s'il était possible de revoir le
placement, on m'a dit à peu près que La direction de l'Opéra a toujours
été très claire. Les préférences de placement ne sont respectées que dans
la mesure des disponibilités. Si cela n'a pas été le cas, c'est que c'était
vraiment impossible.
. L'impossibilité ainsi constatée d'évoquer des
retouches aux réservations cache plus certainement une volonté
d'efficacité
(traitement plus rapide des dossiers, moins de temps
passé au téléphone avec ces enquiquineurs) qu'un souci de la satisfaction
des désirs du spectateur (satisfaits fin juin plutôt que fin avril dans mes
souvenirs des années précédentes, ce qui permettait aussi de commencer à
payer l'abonnement un peu plus tard). En effet, comment expliquer sinon que
les dates retenues fussent systématiquement la première des trois que
j'avais données alors qu'il était évident que j'avais mis une priorité sur
le placement. (Je passe sur le fait que les billets qui m'avaient été
réservés à Bastille étaient absolument tous vers le fond du parterre, où
jusqu'à cette année ces places étaient vendues trois fois moins
chères.)
Heureusement, j'avais établi ma stratégie avant d'appeler. C'était soit négociation soit annulation. J'ai donc décidé d'annuler mon abonnement 2011/2012 à l'Opéra. Mes finances ne vont que s'en mieux porter ! Et tant pis si j'arrive pas à aller voir tous les ballets que je voudrais à 9€ ou 12€...
2011-04-16 02:11+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Théâtre des Champs-Élysées — 2011-04-15
Natalie Dessay, Mélisande
Simon Keenlyside, Pelléas
Marie-Nicole Lemieux, Geneviève
Laurent Naouri, Golaud
Alain Vernhes, Arkel
Khatouna Gadelia, Yniold
Nahuel di Pierro, Un médecin
Chœur de l'Orchestre de Paris
Orchestre de Paris
Louis Langrée, direction
Pelléas et Mélisande, Claude Debussy
Après la belle production présentée à l'Opéra Comique l'année dernière, c'était ce soir mon deuxième Pelléas et Mélisande, cette fois-ci en version de concert. J'étais dans des conditions de confort à peu près semblables à celles d'hier pour Parsifal, mais j'ai payé bien plus cher cette place d'abonnement...
La salle du TCE est pleine comme elle l'est rarement. Le deuxième balcon de côté est très bien rempli et il semble que quelques personnes se cachent derrière les meurtrières situées dans les hauteurs du théâtre.
Par rapport au Parsifal d'hier, les entrées et sorties sont un peu mieux gérées et les expressions faciales et les attitudes expriment davantage le sentiment particulier de chaque situation. Conformément à la tradition du TCE, pas de surtitres pour les opéras en français, mais le texte est presque tout le temps parfaitement intelligible. Il y a cependant des moments où le volume de l'orchestre fait que l'on entend encore le son des voix mais plus le sens des paroles.
Sur le papier, on a une distribution de rêve : Natalie Dessay (Mélisande), Simon Keenlyside (Pelléas), Laurent Naouri (Golaud), Marie-Nicole Lemieux (Geneviève), Alain Vernhes (Arkel). Les promesses sont bien tenues. J'ai été particulièrement content d'entendre pour la première fois Simon Keenlyside, qui avait une attelle au coude gauche. Le chanteur qui m'a fait la meilleure impression a été Laurent Naouri, phénoménal Golaud (voix puissante, belles dynamiques, texte parfaitement compréhensible, un jeu idéal compte tenu des limites de la version d'un concert). Dans le rôle de Mélisande, Natalie Dessay a fait une bonne prestation, notamment dans la première scène du troisième acte avec Simon Keenlyside. Il y a cependant des moments, en particulier au début de certaines phrases, où le timbre de sa voix est comme altéré, mais je suis néanmoins content de n'avoir à aucun moment éprouvé la désagréable tension ressentie lors de précédents concerts de cette chanteuse (Giulio Cesare, La Sonnambula) : la crainte que la voix exploserait en plein vol. Espérons que cela continue ! Alain Vernhes et Marie-Nicole Lemieux ont également été très bons, tout comme Nahuel di Pierro dans le rôle du médecin (et du berger) et Khatouna Gadelia dans celui d'Yniold.
À force de voir l'Orchestre de Paris, il y a des visages qui tendent à devenir comme familiers. J'ai été très impressionné par les cordes, dont j'ai apprécié la variété des ambiances sonores produites. Je n'ai pas été immédiatement emballé par les instruments à vents lors de la première apparition d'un motif caractéristique (dans les toutes premières mesures), je ne saurais pas exactement dire pourquoi, mais par la suite, je les ai appréciés aussi, et mon impression sur l'orchestre en général s'est encore fortifiée à mesure que les actes se succédaient. Le chef Louis Langrée avait l'air assez attentif aux chanteurs, se tournant parfois vers eux en faisant du lip sync. Les quelques moments forts vocaux sont bien mis en valeur, mais il est quelque peu dommage que l'enthousiasme communiqué à l'orchestre ait parfois nui à l'intelligibilité du texte. Mais dans l'ensemble, j'ai passé un très bon concert !
2011-04-15 02:46+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Théâtre des Champs-Élysées — 2011-04-14
Michael Volle, Amfortas
Steven Humes, Titurel
Kwangchul Youn, Gurnemanz
Nikolai Schukoff, Parsifal
John Wegner, Klingsor
Angela Denoke, Kundry, une voix du ciel
Kevin Conners, Premier chevalier
Levente Molnár, Second chevalier
Ulrich Reß, Kenneth Roberson, Ecuyers
Solistes du Tölzer Knabenchor, Ecuyers
Hanna-Elisabeth Müller, Laura Tatulescu, Gabriela Scherer, Evgeniya Sotnikova, Tara Erraught, Okka von der Damerau, Filles-fleurs de Klingsor
Orchestre de la Staatsoper de Munich
Chœur de la Staatsoper de Munich
Kent Nagano, direction
Parsifal (Wagner)
Je n'avais pas prévu d'aller écouter ce Parsifal au TCE, mais la possibilité d'obtenir des places de première catégorie (en l'occurrence, un premier rang de première loge de face) à 30€ m'avait décidé. Faute de temps, je m'y étais préparé plus sommairement que pour Siegfried, mémorisant quelques motifs parmi les plus importants comme La Cène, Le Graal, La Foi, La Lance, Kundry, Le baume, Parsifal...
Il vaut mieux avoir quelques points de repère pour pouvoir maintenir une activité intérieure et défier la fatigue pendant le concert, très long (début à 18h, fin de la standing ovation vers 23h30), le tempo étant d'ailleurs presque tout le temps très lent.
La grande surprise que j'ai eue lors du premier acte est venu du rôle de Gurnemanz qui y a une fonction qui fait penser à celle de l'Évangéliste dans les Passions de Bach. L'excellente basse Kwangchul Youn arrive à maintenir un intérêt constant pour ce rôle qui n'est a priori pas le plus flatteur (je garde également un très bon souvenir de la performance de ce chanteur dans le rôle de Wurm dans Luisa Miller en 2008). Kundry (Angela Denoke) sert les chevaliers du Graal et le premier d'entre eux (Amfortas) à qui elle administre un baume. Nous sommes en situation de crise : du fait de sa souffrance, il ne peut plus célébrer comme il faut le Graal, touché qu'il a été par la Lance (tout comme le Christ) après que Klingsor l'avait détourné de son vœu de chasteté. On annonce qu'un être innocent pourra récupérer cette Lance, c'est bien sûr Parsifal qui se fait remarquer lors de son entrée parce qu'il commet le sacrilège de tuer un cygne. De façon amusante, Wagner utilise le même motif que dans Lohengrin pour évoquer le cygne. Nikolai Schukoff n'est pas très convaincant dans son rôle au cours de ce premier acte. Il le sera bien davantage dans le deuxième où il va conquérir la Lance. Entretemps, il aura été tenté par les Filles-fleurs, puis par Kundry qui est maintenant sous l'emprise de Klingsor. Angela Denoke est tout aussi impressionnante dans ce rôle que dans Kátia Kabanová. Au troisième acte, on se retrouve au même endroit qu'au premier acte. Gurnemanz reconnaît en Parsifal celui qui va les sauver, Parsifal puis Kundry sont baptisés. Alors qu'Amfortas (remarquable Michael Volle) rappelle qu'il voudrait mourir pour ne plus souffrir de sa blessure, Parsifal entre pour le soigner en mettant la Lance en contact avec son flanc. Parsifal peut alors succéder à Amfortas en maître de cérémonie.
Par rapport à une version scénique, on y perd un peu en cohérence. Dans ce troisième acte, Angela Denoke ne reparaît que pour répéter le mot Dienen (servir) alors qu'à plusieurs reprises, on s'adresse à Kundry alors qu'elle n'est plus en scène. De même, au premier acte, l'interprète de Parsifal est sorti de scène après ses dernières paroles. Pourtant, il est censé assister silencieusement à la cérémonie qui se tient jusqu'à la fin de l'acte, où Gurnemanz lui dit d'aller voir ailleurs.
L'orchestre de l'opéra d'état de Munich dirigé par Kent Nagano a été remarquable. J'ai bien du mal à détailler tant j'étais comme hypnotisé par la musique. Comme je l'ai dit, à part Nikolai Schukoff en demi-teinte, les chanteurs ont tous été excellents. Par ailleurs, chose appréciable, et assez inhabituelle chez Wagner, l'œuvre comporte plusieurs chœurs (certains étant chantés depuis les coulisses) et fait aussi entendre six solistes en filles-fleurs lors du deuxième acte. Bref, cela a été un plus qu'excellent concert !
2011-04-10 02:57+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Comique — 2011-04-09
Sophie Karthäuser, Agathe
Andrew Kennedy, Max
Virginie Pochon, Annette
Gidon Saks, Gaspard
Matthew Brook, Kouno
Samuel Evans, Kilian
Robert Davies, Ottokar
Luc Bertin-Hugault, L'Ermite
Christian Pélissier, Samiel
Charmian Bedford, Katy Hill, Lucy Roberts, Louise Le Boutillier, Kate Symonds Joy, Vanessa Heine, Les demoiselles d'honneur
The Monteverdi Choir
Orchestre Révolutionnaire et Romantique
Sir John Eliot Gardiner, direction musicale
Dan Jemmett, mise en scène
Dick Bird, décors
Sylvie Martin-Hyszka, costumes
Arnaud Jung, lumières
Cécile Bon, chorégraphie
Philipp von Steinaecker, assistant musical
Meriam Korichi, collaboratrice à la mise en scène
Laetitia Mateos, assistante décors
Magali Perrin-Toinin, assistante costumes
Nathalie Steinberg, Martin Surot, chefs de chant
Le Freischütz, Weber (version Berlioz)
Je ne m'étais pas préparé particulièrement à ce Freischütz. J'en avais lu le livret il y a quelques mois. Je n'avais pas voulu écouter la musique pour en avoir l'entière surprise le soir de la représentation.
Je connaissais seulement l'ouverture. En fait, cette ouverture appartient à la catégorie des ouvertures best-of. On réentendra donc assez souvent des développements de passages déjà entendus dans l'ouverture. (Depuis ma place, je n'avais pendant l'ouverture vue que sur le timbalier qui avait tout juste le temps de régler ses timbales entre deux interventions.)
Il y a à peu près un an, j'avais entendu un extrait de cet opéra à la radio et cela m'avait beaucoup donné envie de l'entendre. J'avais donc de grandes attentes du côté musical. Je m'attendais à trouver quelque chose qui serait à tout moment hybride entre Mozart et les compositeurs allemands ultérieurs. En fait, pendant un acte et demi, j'ai un peu eu l'impression d'entendre du Mozart, et du Weber pour l'autre moitié du deuxième acte et le troisième.
Au premier acte, on apprend qu'Agathe, la fille de Kouno épousera le gagnant du concours de tir qui aura lieu le lendemain, le gagnant obtenant aussi la fonction héréditaire de Kouno auprès d'Ottokar. Max, l'amoureux d'Agathe, vient de subir sa première défaite contre le villageois Kilian. S'il commettait une aussi grande erreur le lendemain, il ne pourrait s'unir à Agathe. Pour augmenter ses chances, il se laisse influencer par Gaspard qui lui promet de lui fournir des balles enchantées. C'est en fait un agent du démon Samiel qui vient réclamer à Gaspard quelqu'offrande. La septième et dernière balle atteindra Agathe, sacrifiée pour lui. Au début du deuxième acte, Agathe discute avec son amie Annette qui essaie, sans bien convaincre, de lui remonter le moral suite aux mauvais présages qui se produisent. Contre l'avis d'Agathe, Max s'en va nuitamment à la Gorge-aux-Loups où Gaspard va fondre les sept balles enchantées. Elles seront gaspillées au début du troisième acte de sorte qu'il n'en restera plus qu'une à Max au moment où il devra faire preuve de son habileté. Au moment de tirer sur la colombe indiquée par Ottokar, Agathe viendra crier que la colombe, c'est elle (comme elle l'aura vu en rêve). Finalement, la balle atteint Gaspard. Tout le monde apprend que Max a pactisé avec le Diable. Suite à l'intervention d'un pieux ermite, Ottokar accepte que Max et Agathe se marient quand même, mais un an plus tard.
Il y a donc un certain contraste entre les situations mélodramatiques du
début et l'atmosphère fantastique qui apparaît lors de la scène de la
Gorge-aux-Loups. Cette scène m'a semblé très réussie. Gidon Saks (Gaspard)
qui paraissait un peu brouillon dans le premier acte y était beaucoup plus
convaincant, y compris dans les passages parlés, presque chuchotés de cette
scène. Le démonique Samiel apparaît sur scène, joué par Christian
Pélissier, le plus souvent silencieux lors des invocations de Gaspard, mais
quand il répète en écho Une
, Deux
, etc, à chaque fois qu'une
nouvelle balle est fondue, on peut entendre son impressionnante voix
caverneuse. J'ai bien aimé tous les autres chanteurs. La chanteuse qui m'a
fait la plus forte impression est Virgine Pochon (Annette) qui a
véritablement incarné son rôle (quelle présence scénique ! quel jeu !) et
sa partie vocale n'a pas l'air d'être des plus faciles ! Dans le rôle
d'Agathe, j'ai retrouvé Sophie Karthäuser qui avait été pour moi une des
rares consolations d'un Fidelio de sinistre
mémoire. La mise en scène a apparemment accentué le côté très sage de
ce personnage, ce qui ne donne pas à la chanteuse l'occasion de
briller
.
Pour décrire brièvement cette production, il suffit de dire qu'elle a été transposée dans le monde de la fête foraine. Kouno est à la tête d'un stand de tir. Agathe et Annette discutent devant leur roulotte ou à l'intérieur de celle-ci. Cela fait un tout petit peu peur au début de l'opéra, très vif, mais cela me semble une bonne idée. Mis à part l'affadissement du personnage d'Agathe, la mise en scène m'a semblé réussie. Il y a quelques passages étonnants, comme lorsque dans la scène de la Gorge-aux-Loups Max voit des apparitions de sa mère et d'Agathe, il est face au public et ces deux personnages traversent le fond de la scène, dans son dos ! Quand Max tire de son fusil au troisième acte, à sa droite Agathe et à sa gauche Gaspard tombent tous les deux alors que Max visait dans d'autres directions ! Sur le coup, on ne comprend pas bien l'influence de l'ermite qui est censé avoir protégé Agathe. Ce que j'ai trouvé assez frappant, c'est la façon dont on laisse mourir Gaspard sans se préoccuper le moins du monde de son sort. On se réjouit joyeusement qu'Agathe n'ait pas été touchée par le coup de fusil tandis que l'autre est en train de mourir ; on se réjouit même de ce que le diabolique soit puni.
À un moment, j'ai un peu buggé parce que j'ai eu l'impression d'entendre une musique que je connaissais déjà, ce qui était bizarre vu que je n'ai que l'ouverture dans ma discographie... En fait, très vite, j'ai reconnu L'Invitation à la valse du même Weber que je connaissais parce que c'est la musique du ballet Le spectre de la rose présenté à Garnier dans le programme Ballets russes en décembre 2009. Le programme explique que la tradition française voulant que les opéras inclussent des scènes de ballets, Berlioz avait inséré cette pièce de Weber (originellement pour piano et qu'il avait donc dû orchestrer). En dehors des applaudissements accompagnant la fin de quelques airs, du fait de la transformation (et réduction) des parties parlées en récitatifs par Berlioz, la musique se déroule presque sans interruption dans chacun des trois actes. Dans cette version française de l'opéra, on arrive à comprendre ce que chantent la plupart des chanteurs !
2011-03-31 07:53+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Lectures
Opéra Bastille — 2011-03-28
Janina Baechle, Anna Akhmatova
Atilla Kiss-B, Lev Goumilev
Lionel Peintre, Nikolai Pounine
Varduhi Abrahamyan, Lydia Tchoukovskaia
Valérie Condoluci, Faina Ranevskaia
Christophe Dumaux, Le Représentant de l'Union des écrivains
Marie-Adeline Henry, Olga
Paul Crémazy, Un sculpteur, un universitaire anglais
Vladimir Kapshuk, Un étudiant, deuxième universitaire
Ugo Rabec, Un agent
Sophie Claisse, Une femme du peuple
Laura Agnoloni, Une vieille femme du peuple
Emanuel Mendes, Solo ténor
Slawomir Szychowiak, Solo baryton
Pascal Rophé, direction musicale
Christophe Ghristi, livret
Nicolas Joel, mise en scène
Wolfgang Gussmann, décors
Wolfgang Gussmann et Susana Mendoza, costumes
Hans Toelstede, lumières
Patrick Marie Aubert, chef du chœur
Marguerite Borie, collaboration à la mise en scène
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
Akhmatova, Bruno Mantovani (création)
J'ai assisté lundi dernier à la création d'Akhmatova (Mantovani) à Bastille. Mes impressions sont sur le Biblioblog.
2011-03-13 00:36+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Garnier — 2011-03-12
Angela Denoke, Kátia
Vincent Le Texier, Saviol Dikoy
Jane Henschel, Kabanicha
Donald Kaasch, Tichon Kabanov
Jorma Silvasti, Boris Grigorievitch
Ales Briscein, Kudriach
Andrea Hill, Varvara
Michal Partyka, Kouliguine
Virginia Leva-Poncet, Glacha
Sylvia Delaunay, Fekloucha
Marie-Cécile Chevassus, Une femme
Ulrich Voss, Un homme
Tomas Netopil, direction musicale
Christoph Marthaler, mise en scène
Joachim Rathke, co-metteur en scène
Anna Viebrock, décors et costumes
Olaf Winter, lumières
Thomas Stache, chorégraphie
Patrick Marie Aubert, chef du chœur
Orchestre et chœur de l'Opéra national de Paris
Pierre Lénert, viole d'amour
Kátia Kabanová, Leoš Janáček
La production de l'opéra Kátia Kabanová qui passe actuellement à Garnier est une très belle réussite. Si mon impression était un peu mitigée après la répétition générale une semaine plus tôt, celle-ci s'est très nettement bonifiée lors de cette deuxième représentation. Il faut bien dire que lors du premier acte, il n'est pas évident de bien comprendre qui est qui, les chanteurs interprétant les rôles du mari et de l'amant de Kátia ne paraissant pas très jeunes (Janáček ayant projeté une partie de lui-même sur l'amant, cela ne choque pas pour ce rôle, mais pour le mari, tyrannisé par sa mère, cela passe un peu moins bien).
Le décor représente une cour avec fontaine bordée par un angle entre immeubles ayant un nombre visiblement variables d'étages (zéro depuis ma place de la générale, un lors de cette représentation ; en vrai, il y en a deux). Dans un recoin aveugle depuis ma troisième loge impaire est incrustée la chambre de Kabanicha, la belle-mère de Kátia. Les immeubles sont délabrés, si le couple Kabanicha-Saviol est censé être d'un statut social un peu élevé, on n'est visiblement pas dans la plus haute bourgeoisie.
Lors de cette représentation, la plus grande émotion est procurée par l'orchestre (dirigé par le jeune Tomáš Netopil), en très grande forme (tout comme hier quand je suis retourné voir Siegfried). L'impression a été toute autre que lors de la générale lors de laquelle il fallait compter avec les clic-clic des photographes. Certes, à certains pupitres, on papote et on somnole pendant les longues périodes de silence, mais je n'aurais pas remarqué ces choses si la beauté de la musique (extrêmement variée) n'avait été telle que j'ai souvent laissé s'égarer mon regard sur la fosse de façon prolongée. Les peu souvent sollicités trombones à coulisse font plaisir à entendre, tout comme la harpe, les instruments à vent, les cordes (quelques beaux moments avec les violoncelles et les contrebasses), les percussions, les cors, sans oublier la viole d'amour jouée depuis le premier étage du décor par Pierre Lénert (que je n'avais pas pu apercevoir lors de la générale depuis ma quatrième loge). De loin, on pourrait prendre l'instrument pour un violon, mais vu nombre invraisemblable de chevilles, cela ne peut être qu'une viole.
À propos de l'intrigue, c'est une histoire d'adultère. Kátia trompe son mari parti en voyage d'affaires. Lors d'un orage (c'est le titre de la pièce d'origine), elle avoue à tout le monde la chose. Nostalgique de sa jeunesse et du temps passé à l'église, elle est torturée par son péché. Devenue quasiment aliénée, elle se jette dans la Volga.
Deux autres couples jouissent sans complexe. Un des deux unit des vieux : la veuve Kabanicha et Saviol, l'oncle de le Boris (l'amant de Kátia). L'autre est beaucoup plus frais et insouciant : Varvara, la confidente de Kátia, et l'instituteur Kudriach.
Sans être absolument géniale, la mise en scène de Marthaler m'a beaucoup plu (surtout au deuxième passage, quand j'ai un peu mieux compris l'histoire). Lors de cette reprise, on peut constater avec plaisir qu'un plus que très honnête travail a été fait dans la direction des comédiens-chanteurs. Cet opéra tient en effet presque du théâtre vu qu'à la musique s'adjoint les intonations si particulièrement de la langue tchèque. C'est aussi une démonstration que l'on peut faire un bel opéra sans chercher la virtuosité vocale à tout prix. L'équilibre entre l'orchestre et les voix est parfait (alors que précédemment dans La petite renarde rusée du même Janáček, j'avais été gêné par la faiblesse relative du volume sonore des voix ; mais c'était à Bastille...). Cependant, parmi les rôles, il y en a un qui paraît très exigeant, c'est celui de Kátia. Angela Denoke y paraît épatante. (Il m'est impossible de détailler mes impressions sur les autres chanteurs ; je noterai simplement que j'ai aimé revoir un des jeunes membres de l'Atelier Lyrique, Michal Partyka, dans le rôle de Kouligine, un ami de Kudriach.)
Pour revenir à la mise en scène, tout le monde aura noté le sens pornographique du jet d'eau de la fontaine quand les couples s'échappent aux regards des spectateurs (ou non, suivant le placement pour le cas Kabanicha-Saviol). Lors du tableau de l'orage au troisième acte, les ruines dans lesquelles l'action est censée se passer sont signifiées par un comédien incarnant un fou furieux (alcoolique comme d'autres des personnages) qui casse un peu tout sur le plateau en criant des paroles incompréhensibles (couvrant largement le son du chœur qui se chante alors). Elle est aussi marquées par l'invasion de la scène par des détritus apportés par le vent.
Le plus surprenant dans cette mise en scène, c'est la façon dont les personnages se tournent vers le décor, dos au public, abandonnant Kátia qui va finir par se suicider. Cela donne l'impression très forte que c'est la société toute entière (nous, les spectateurs) qui constituons le tribunal où elle est jugée. Cela peut surprendre aussi, mais la façon dont Kátia se suicide est tout sauf spectaculaire : elle s'allonge tout simplement dans la fontaine (où se trouve déjà depuis le début un très-symbolique cygne blanc mort).
Ce n'est certainement pas le spectacle d'opéra le plus facile d'accès qui soit, mais c'est de la qualité ! La salle était particulièrement pleine et a ovationné les interprètes. (Comme lors de la générale, il y a eu un bug-flottement lors des saluts, cette fois-ci provoqué par un rideau coincé d'un côté à trois-quart de la hauteur.)
Ailleurs : David.
2011-03-11 01:32+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse
Je ne vais pas commenter en détail la programmation de l'Opéra de Paris ; d'autres, bien plus connaisseurs que moi, s'en sont déjà chargés : Rameau (Opéra, Danse), David.
S'il était peut-être encore permis d'en douter, il ne fait maintenant plus aucun doute que la direction de l'Opéra est de droite, hypocrite et décomplexée.
Depuis avant-hier, sur le site Internet de l'Opéra, on peut lire La
mission de l'Opéra national de Paris est d'amener la musique au plus grand
nombre
. L'année prochaine, le plus grand nombre ne pourra pas s'abonner
pour voir des opéras puisque le seuil tarifaire pour l'abonnement libre qui
était jusques alors de 35€ par opéra (en tarif R) passe à 55€ (et au risque
de se retrouver au tout dernier rang du parterre, l'horreur absolue). Comme
l'a noté David dans l'article cité ci-dessus, sans donner l'impression
d'augmenter les tarifs au niveau de la grille, on les a quand même
augmentés mécaniquement parce qu'un certain nombre de places glissent d'une
catégorie à l'autre (des places à 20€ passent ainsi à 35€, 55€ ou 75€ !).
On savait le système de réservation opaque ; il le devient encore plus. Les
quelques places à peu près raisonnables à 15€, on ne sait pas encore
vraiment comment on pourra se les procurer de façon sûre. Jusqu'à présent,
la méthode standard était d'aller à la file d'attente puisque ces places
n'étaient vendues qu'aux guichets. Maintenant, on lit Les places de
septième catégorie sont vendues notamment aux guichets
. (Par ailleurs,
le nombre de places debout à 5€ est à peu près divisé par deux et ces
places sont délocalisées dans les plus hautes galeries.)
Dans les deux doubles-pages (p. 122—125) de Legalese présentes
dans la brochure que je viens de recevoir, on ne voit pratiquement qu'une
énumération d'obligations s'imposant aux clients (vous avez bien lu, nous
ne sommes apparemment plus des spectateurs mais des clients) et
d'exonérations de responsabilités pour l'Opéra. Il y en a une dont il n'est
pas exclu que l'on entende parler : En cas d'annulation d'un spectacle
du fait de l'Opéra national de Paris, sauf cas de force majeure auxquels
sont expressément assimilés les cas de réquisition de l'Opéra par toute
autorité publique pour quelque motif que ce soit, et cas de grève
nationale, la valeur du prix facial du billet payé par le client à l'Opéra
national de Paris sera remboursée...
. Fin de la spécificité parisienne
des opéras sans décor mais avec costumes (dans une mise en scène improvisée
parfois meilleure que l'originale) ? Pas sûr, parce
qu'une phrase un peu plus haut nous dit que c'est un cas expressément
prévu. Ouf, on est rassuré.
On aura beau écrire de telles inepties dans des Conditions générales
de vente
, si de telles clauses sont illégales, elles sont nulles. Parmi
les autres clauses, on en trouve de manifestement illégales et se parant
pourtant des vertus de la loi du 27 juin 1919 puisque ce que cette loi
interdit, ce n'est pas de revendre des billets, mais de les revendre à un
prix supérieur au prix initial.
Les hausses et bouleversements de prix sont nettement moins choquants à Garnier qu'à Bastille. Vu les intentions présidant à la contruction de l'Opéra Bastille il y a plus de vingt ans, c'est un retournement assez paradoxal...
Plus de détails chez Rameau.
2011-03-08 02:08+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Comique — 2011-03-07
Blandine Staskiewicz, Cendrillon
Michèle Losier, Le Prince Charmant
Eglise Gutiérrez, La Fée
Ewa Podleś, Mme de la Haltière
Laurent Alvaro, Pandolfe
Aurélia Legay, Noémie
Salomé Haller, Dorothée
Laurent Herbaut, Le Roi
Vincent de Rooster, Le Doyen de la Faculté
Julien Neyer, Le Surintendant des plaisirs
Paul-Henri Vila, Le Premier Ministre
Elizabeth Calleo, Sylvaine Davené, Leila Zlassi, Claire Delgaro-Boge, Caroline ChampyTursun, Sophie Van de Woestyne, Six Esprits
Luciana Dariano, Alex Sander Dos Santos, Ana Mariolani, Danila Massara, Gudrun Skamletz, Danseurs
Orchestre et Chœur des Musiciens du Louvre-Grenoble
Marc Minkowski, direction musicale
Benjamin Lazar, mise en scène
Louise Moaty, collaboration à la mise en scène
Cécile Roussat et Julien Lubeck, chorégraphie
Adeline Caron, scénographie
Alain Blanchot, costumes
Christophe Naillet, lumières
Mathilde Benmoussa, maquillage
Thierry Collet, effets spéciaux
Micholas Jenkins, assistant musical et chef de chœur
Malanda Loumouamou, assistante scénographie
Nathalie Dang et Marine Thoreau La Salle, chefs de chant
Cendrillon, Massenet
J'espère que je n'assisterai pas de sitôt à une représentation d'un opéra aussi mauvais que ce Cendrillon de Massenet. Par rapport à Werther et Manon, la musique est franchement mauvaise. Le livret n'est pas mieux. C'est d'un niveau de niaiserie que je n'imaginais pas voir sur une scène d'opéra. Les effets manquent de finesse et de subtilité. Certes, il est évident que tout a été conçu spécialement pour le public de 1899 afin de déclencher des rires avec le personnage ridicule de Madame de la Haltière, des larmes lors d'une lamentation pathétique façon bondieuserie, l'admiration pour les vocalises insensées et complètement gratuites de la Fée.
Heureusement que la scénographie est féérique, avec de jolis effets spéciaux tournant autour des lumières électriques (qui étaient une nouveauté à l'époque de la création). Par exemple, j'ai bien aimé la scène du Chêne des Fées où Cendrillon et le Prince Charmant sont séparés par un rideau semi-opaque sur lequel un réseau de lumières représente l'arbre.
Fuyant le cirque général, les seuls personnages en lesquels je pouvais trouver refuge lors du premier acte étaient ceux de Cendrillon (Blandine Staskiewicz) et du Prince Charmant (chanté par la soprano Michèle Losier). Puis au troisième acte, je me régalerai avec le Pandolfe semi-incestueux de Laurent Alvaro, qui a d'ailleurs à un moment donné un passage parlé accompagné par l'orchestre, dépareillant avec les plus usuels récitatifs chantés. J'ai vu avec plaisir Blandine Staskiewicz pour la première fois dans un premier rôle manifestement très exigeant. (Je ne doute pas que son interprétation est très différente de celle de Judith Gauthier, les deux chanteuses alternant.)
Malgré l'aspect visuel féérique (les mouvements chorégraphiques et les scènes véritablement dansées, avec même des pointes !) et des chanteurs enthousiasmants, je suis très déçu par cet opéra qui ne m'a procuré aucune émotion. Bref, sur des sujets voisins, je préfère très largement The Fairy Queen (Purcell) et La Cenerentola (Rossini).
2011-03-02 10:50+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2011-03-01
Torsten Kerl, Siegfried
Wolfgang Ablinger-Sperrhacke, Mime
Juha Uusitalo, Der Wanderer
Peter Sidhom, Alberich
Stephen Milling, Fafner
Qiu Lin Zhang, Erda
Elena Tsallagova, Waldvogel
Katarina Dalayman, Brünnhilde
Philippe Jordan, direction musicale
Günter Krämer, mise en scène
Jürgen Bäckmann, décors
Falk Bauer, costumes
Diego Leetz, lumières
Otto Pichler, chorégraphie
Orchestre de l'Opéra national de Paris
Vladimir Dubois, cor solo
Siegfried, Wagner
Cette soirée de première avait plutôt mal commencé. Il y a eu un embouteillage à l'entrée de la porte 15. On a éteint les lumières alors qu'il restait une bonne vingtaine de personnes à placer (et ce n'étaient pas des retardataires : cela a bouchonné bien vingt minutes avant le lever de rideau). Avec le bruit de tous les fantômes qui cherchaient leurs sièges, je n'ai pas vraiment pu apprécier dans de bonnes conditions les premières minutes de musique qui évoquent notamment le Dragon.
Depuis L'Or du Rhin, le géant Fafner a en effet pris cette forme et veille sur le trésor qu'il a récupéré. Lors de La Walkyrie, Siegfried a été conçu par Siegmund et Sieglinde et il pu vivre grâce à l'aide prodiguée par Brünnhilde qui avait suivi l'ordre d'aider Siegmund que Wotan avait pourtant retiré. Elle en avait été punie ainsi : elle sommeillerait dans un endroit inaccessible aux peureux jusqu'à ce que Siegfried vienne la libérer.
C'est ainsi que va se conclure Siegfried. Avant cela, on aura eu un aperçu de son enfance avec Mime qui l'a recueilli dans le but de l'utiliser pour s'octroyer l'Anneau. Le jeune homme, vif, n'est pas très heureux avec lui. À la fin du premier acte, il forge Notung, l'épée de Siegmund que Wotan avait brisée et que Mime avait été incapable de reconstituer jusque là.
Au deuxième acte, il tue Fafner. En léchant quelques gouttes de sang du géant restées sur l'épée, il obtient la connaissance du langage des oiseaux. L'un d'entre eux lui fait un résumé de la tétralogie et lui explique que c'est le moment d'aller rejoindre sa future épouse.
Enfin, au troisième acte, il l'a réveille. Il l'a prend d'abord pour sa mère. Il ne comprend pas ce qui lui arrive. Il a peur. Il l'aime. Brünnhilde lui fait la suite du résumé, puis hésite à accepter son amour. Quand elle a renoncé à son statut d'autrefois pour celui de simple mortelle, les deux amoureux peuvent enfin être unis.
(J'ai résumé très grossièrement l'intrigue. Parmi les personnages
principaux, il faut aussi mentionner Wotan qui est Le Voyageur
qui
vient mettre son grain de sel un peu partout. Il vient fichtre les jetons à
Mime au premier acte. Il embête Alberich et Fafner au deuxième. Au
troisième, il réveille Erda de son sommeil infini, décide de laisser
Siegfried accomplir son destin, mais trouve quand même le moyen de le
contrarier en lui barrant provisoirement le chemin menant au séjour de
Brünnhilde ; il est vrai que Siegfried se comportait avec lui de façon un
peu fruste.)
Si je n'avais vraiment pas aimé les deux premiers volets de cette production Günter Krämer, je suis plus enthousiasmé par celui-ci. (Cela dit, je m'inquiète un peu sur la cohérence de l'ensemble des opéras de la tétralogie. Si pour le moment, on retrouve des éléments communs (l'escalier conduisant au Walhalla, les lettres Fraktur, le grand miroir), au niveau des costumes, on aura un peu tout vu. Peut-être faut-il y voir une dégradation progressive du statut des personnages (et des dieux en particulier) au fur et à mesure qu'on avance ?)
Le décor du premier acte représente l'endroit où vivent Mime et
Siegfried. Comme nous sommes chez les Nibelungen, on voit sur la gauche une
sorte de village de nains de jardins. Les deux semblent vivre en marge du
monde. Mime n'inspire pas confiance, le look de Siegfried fait un peu
junkie. On voit d'ailleurs une plantation de cannabis sur la
droite. Quand Wotan vient voir Mime pour lui demander l'hospitalité en
l'échange de la réponse à trois questions, il est habillé en clochard et à
l'attitude de Mime, il est manifeste qu'il sent très mauvais. Quand Wotan
se sera fait reconnaître, il enlèvera son pardessus pour laisser paraître
un costume grisâtre et un pantalon crotté. Plus tard, il paraîtra en noir
avec chapeau. Dans ce décor, il y a aussi un ascenseur par lequel descend
l'ours ami de Siegfried pour venir sur scène. On voit aussi un écran de
télévision noir et blanc, qui lorsque Mime voudra apprendre la peur à
Siegfried (parce que dans la malédiction de
brâhm...^W^W^W
prédiction funeste de Wotan, la tête de Mime
sera prise par celui qui ne connaît pas la peur), ceux qui ont de bons yeux
ou des jumelles verront un film mettant en scène quelque reptile. À la fin
de l'acte, le décor va se surélever pour laisser paraître la magnifique
forge située en-dessous. Le chant des soufflets
est facile à
reconnaître puisqu'on voit Siegfried actionner un soufflet avec le pied !
On entend un très joli motif joué par les cordes quand l'acier fond : des
notes détachées alternent, puis les notes deviennent liées. (On le réentend
au deuxième acte, je ne sais plus dans quel contexte, joué par des
instruments à vents.) Petit incident de mise en scène quand Siegfried
travaille le métal sur l'enclume en rythme comme le demande la partition :
il a cassé le marteau. Torsten Kerl en a saisi un autre, mais il ne faisait
plus du tout le même bruit !
Lors du deuxième acte, le sol est recouvert de feuilles. Des petits hommes verts (complètement nus) trimbalent le trésor de l'Or du Rhin en procession. Quand ils ouvrent les caisses, ce sont en fait des armes qu'ils sortent. Je ne suis pas sûr d'avoir bien compris tous ce qui se passait au niveau du décor, mais c'était certainement très-esthétique. Il m'a paru plausible que la sorte de dais un peu gris que l'on voit onduler au début de l'acte sur toute la largeur de la scène représente le dragon, mais je n'en suis pas sûr. Quand Fafner est tué et que Siegfried lèche son épée, on ne voit pas de sang ; je trouve que c'est un peu dommage. Je n'ai pas trouvé très convaincante la façon dont on a fait jouer le rôle de l'oiseau à un enfant (qui essaie de se faire comprendre de Siegfried en faisant des gestes des mains). Pourquoi n'avoir pas fait jouer ce rôle par la chanteuse Elena Tsallagova ? Quand les flammes qui entourent Brünnhilde sont évoquées, on les voit projetées sur un écran.
Visuellement, le début du troisième acte était très beau. Les nornes
parées de voiles sont installées à des tables comme dans une bibliothèque
(lumières vertes, la couleur qui domine cet opéra, jusqu'à avoir été
choisie pour être la couleur du programme, après l'or et le rouge pour les
deux précédents) et lisent ce qui doit être le livre de l'avenir. La scène
entre Siegfried et Wotan se passe à l'avant-scène, rideau baissé, ce qui
permet la mise en place du décor de la dernière scène. Il y a à ce
moment-là un temps mort dans la mise en scène : on a l'impression qu'il n'y
a pas que Brünnhilde qui doit être réveillée, mais aussi Siegfried. On
retrouve l'escalier qui conduisait au Walhalla aperçu dans les opéras
précédents. Le feu est visible sur les trois grosses lettres Ger
qui
jonchent l'escalier. Brünnhilde est installée à mi-hauteur sur une petite
plate-forme posée sur une marche. Il n'y a pas de cohérence avec le moment
où on l'a quittée dans La Walkyrie puisqu'elle s'était alors
réfugiée sous une table (un mouvement que je n'avais pas compris dans
l'instant...) Étant entendu que c'est un escalier qui relie la terre aux
nuées, qu'elle soit alors dans une position intermédiaire et que, devenue
résolument une simple mortelle, elle finisse, à la fin de l'opéra, en bas
de l'escalier avec Siegfried n'est pas si mal trouvé que ça.
Si je me suis plus facilement laissé convaincre par cette production, outre ses qualités, c'est peut-être aussi parce que l'essentiel de mon attention était tournée vers la musique. Je m'y étais préparé depuis janvier, voir notamment cette entrée. En lisant Le Voyage Artistique à Bayreuth, je me suis familiarisé avec les motifs principaux que l'on entend dans la tétralogie 1. La difficulté par rapport à un opéra isolé est que beaucoup de motifs ont déjà été introduits lors des opéras précédents et que Wagner en réutilise évidemment beaucoup !
Bien que lors des deux volets précédents je m'étais préparé aussi un tout petit peu en les visionnant en DVD, cette préparation plus poussée a complètement changé mon expérience de spectateur. C'est un contentement d'une nature très différente de ceux, plus immédiats, que peut me procurer l'écoute d'autres musiques, c'est plus contenu, mais c'est au moins aussi bon ! Quand on a le dictionnaire en tête, presqu'à chaque instant, quand l'orchestre s'anime, on comprend l'idée que le compositeur veut évoquer. Quand Mime et Wotan se posent à l'un et à l'autre des questions au premier acte, la réponse est déjà dans la musique au moment où la question est posée ! Quand on veut nous faire comprendre que le Voyageur est Wotan, on entend le motif du Walhalla (qui me semble dans Siegfried évoquer plus souvent Wotan que le Walhalla). Le motif qui traverse tout l'opéra et qui a été annoncé dès la fin de La Walkyrie, c'est le motif de Siegfried, gardien de l'épée :
Il y en a tant d'autres qui sont beaux qu'il n'y aurait aucun intérêt à les citer tous. Parfois, on entend un déluge de motifs où l'on ne sait pas très bien quand celui-ci ou celui-là commence ou finit. D'autres fois, on sent que le compositeur s'est amusé à en dévoyer quelques uns : ce qui m'a frappé lors de cette écoute, c'est l'aspect peu glorieux que prend à un moment donné du premier acte le motif de la Compassion (qui s'est surtout appliqué à Sieglinde vis-à-vis de Siegmund lors de La Walkyrie) : façon de nous dire que Mime n'était pas sans arrière-pensées quand il a recueilli Siegfried.
Sur l'interprétation de l'orchestre, j'ai été parfois un peu dubitatif lors du premier acte (par exemple, du côté des cuivres lors de la première mention du Walhalla). Lors des deux derniers actes, je me suis régalé comme jamais ! (Ceux qui doutent que Philippe Jordan puisse faire jouer l'orchestre ff seront peut-être surpris par le superbe crescendo qui accompagne le Salut au monde de Brünnhilde.)
Du côté du chant, cela a semblé assez inégal. J'ai été tout particulièrement impressionné par Stephen Milling (Fafner) et Katarina Dalayman (Brünnhilde). J'ai bien aimé Elena Tsallagova (L'oiseau), Qiu Lin Zhang (Erda) et Peter Sidhom (Alberich). Le Mime de Wolfgang Ablinger-Sperrhacke était plus que convaincant, mais il y a par exemple quelques moment du premier acte où les choix ou les impératifs d'interprétation m'ont un peu déplu (c'est parfaitement subjectif). À propos de Torsten Kerl (Siegfried) et Juha Uusitalo (Der Wanderer), si leur chant était intéressant à écouter quand l'orchestre était silencieux ou presque, quand le volume de l'orchestre se faisait plus fort, je ne les entendais pratiquement pas.
Les huées qui ont accompagné l'arrivée de l'équipe de production lors des saluts m'ont vraiment fait mal au cœur. C'est un peu tard pour acheter des places pour les représentations qui vont suivre (sur Internet, il n'en reste qu'à 160€ et 180€), mais cela vaut peut-être le coup de tenter les places à 5€.
PS: (Après la représentation du 11 mars où j'ai eu une place debout puis un strapontin au parterre.) La mise en scène paraît beaucoup plus belle et convaincante depuis le parterre. Ainsi, on n'est pas gêné par les quelques baissers de rideaux réduisant la profondeur lors de plusieurs scènes puisque celle-ci se fait moins sentir en vue rasante. Par ailleurs, le décor du deuxième acte, juste beau, devient intelligent : la sorte de dais représente la forêt, le bas flottant de ce dais délimite horizontalement la forêt et le monde souterrain, l'antre du dragon. Torsten Kerl (Siegfried) et surtout Juha Uusitalo (Der Wanderer) étaient en meilleure forme que lors de la première.
Ailleurs : David, Palpatine, Zvezdo, Paris — Broadway, Klari.
[1] Rétrospectivement, je pense que la méthode la plus simple pour ce faire serait de visionner un DVD ou d'écouter des CD en (re)lisant simultanément l'analyse musicale des opéras qui est faite dans Le Voyage Artistique à Bayreuth : tout apparaît clairement. Au besoin, on peut s'aider de l'aide-mémoire que je me suis fait. Retrouver en quelques secondes un motif dans le livre n'est pas très facile (que ce soit avec un vieux livre de 1903 ou un long fichier PDF). Par ailleurs, dans la réduction pour piano et voix de ce livre, si comme moi on est pas doué, on ne voit pas forcément immédiatement où est la substantifique moëlle du motif. J'ai essayé de ne garder que ce qui est important. Il n'est pas exclu que je me sois parfois trompé.
2011-02-28 01:13+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra national de Lorraine, Nancy — 2011-02-27
Isabelle Druet, Carmen
Chad Shelton, Don José
Changham Lim, Escamillo
Claudia Galli, Micaëla
Pascale Beaudin, Frasquita
Sylvia de La Muela, Mercédès
Jean-Vincent Blot, Zuniga
Philippe-Nicolas Martin, Moralès
Olivier Grand, La Dancaïre
Julien Dran, Le Remendado
Sandra Stauch, Denis Pigot, figurants
Claude Schnitzler, direction musicale
Carlos Wagner, mise en scène
Rifail Ajdarpasic, décors
Patrick Dutertre, costumes
Ana Garcia, chorégraphie
Fabrice Kebour, lumières
Orchestre symphonique et lyrique de Nancy
Chœur de l'Opéra national de Lorraine
Chœur de l'Opéra-Théâtre de Metz Métropole
Jeune ensemble vocal du Conservatoire régional du Grand Nancy
Carmen, Georges Bizet
Ce week-end, pour la première fois, j'ai pris un TGV pour aller assister à une représentation d'opéra. J'aurais sans doute mieux fait de faire l'aller-retour dans la journée, mais j'avais l'ambition de visiter un peu la ville. Le mauvais temps du samedi a limité mon ardeur exploratrice et je me suis contenté de visiter le musée des Beaux-Arts et quelques librairies, où j'ai presque réussi à me retenir d'acheter quoi que ce soit vu que je n'ai ajouté à mon bagage que sept gnossiennes (dont je découvre avec surprise que c'est de la musique essentiellement non mesurée !).
Dimanche après-midi, après avoir fait bombance (samedi soir, je m'étais
déjà régalé dans dans un restaurant pakistanais où j'ai pu faire
l'expérience que si on a l'audace de demander un biryani assez
épicé
, on peut manger un plat qui ramone la gorge et les voies
respiratoires ; aucun problème de toux à prévoir pour la représentation !),
après avoir mangé, disais-je donc, je me suis rendu à l'Opéra de Lorraine,
situé Place Stanislas, et dont l'architecture extérieure, comme pour bon
nombre de bâtiments aperçus, est désespérément carrée. (Dans la ville, dans
l'ensemble, on voit des rues se croisant à angles droits entourées
d'immeubles de faible hauteur. Un nombre invraisemblable d'édifices
religieux est à signaler.)
En arrivant, première bonne surprise : le programme ne coûte que 2€. Si quelques institutions parisiennes pouvaient adopter de tels tarifs (quitte à renoncer au papier glacé malodorant), je ne pense pas que quiconque s'en plandrait.
Si dès septembre dernier, j'avais décidé de venir, c'était pour assister à une des représentations de la série (à Metz et à Nancy) au cours de laquelle Isabelle Druet ferait sa prise du rôle de Carmen. (Je ne l'avais alors vue que dans Armide. Depuis, je l'ai vue dans Cadmus et Hermione et en récital.) Quelques commentaires lus ces derniers jours à propos de la mise en scène, de l'orchestre et des chanteurs (hors rôles de Carmen et Don José) avaient de quoi m'alarmer, mais mon impression a été toute contraire puisque j'ai été véritablement ravi par cette représentation.
Le fond de la salle et le rideau sont rouges, comme pour nous préparer aux grandes émotions qui vont suivre. Les sièges sont confortables (à peu près le modèle de ceux du parterre du TCE, si ce n'est qu'ils sont rabattables). À première vue, il semblerait qu'à moins peut-être d'être tout en haut, on a toutes les chances d'avoir une bonne visibilité.
Ce qui me frappe le plus dans cette production, c'est le noir qui se
décline dans tous ses aspects. L'atmosphère est très obscure. Pour une
fois, je ne me plaindrai pas d'un manque de luminosité puisque j'y voyais
très bien (premier balcon de côté, avec vue sur la moitié gauche de
l'orchestre, sur la harpe installée dans la loge de la préfète
, si
j'ose ainsi appeler la loge qui se trouve en face de la loge réservée à
Monsieur le préfet (cf. photo ci-contre).
Si des décalages se font parfois sentir, il m'a malgré tout semblé que l'orchestre symphonique et lyrique de Nancy a fait une prestation plus qu'honorable. J'ai entendu quelques détails dans la musique que je n'avais encore jamais soupçonné. Le jeu des choristes, comédiens, chanteurs et danseurs m'a aussi paru très bien réglé (on ne saurait reprocher aux plus jeunes enfants leurs hésitations dans le placement). À Paris, on ne voit pas toujours des productions dont les détails de mise en scène soient aussi fignolés... (Exemples qui viennent à l'esprit : Luisa Miller et La Fiancée vendue par Gilbert Deflo, Francesca Da Rimini par Giancarlo Del Monaco, La donna del lago par Lluís Pasqual.)
Visuellement, c'est donc le noir qui domine (même si à l'exception de Carmen, les cigarières sont en blanc, et les militaires sont en bleu). La structure du décor, unique, semble à tout moment appropriée. Au premier acte, les cigarières et les militaires sont séparés par une barrière métallique coulissante. Plus tard, au quatrième acte, un pan de décor viendra tourner et réaliser une autre séparation entre la corrida d'Escamillo (dont on n'entend que la clameur) et la scène de la mise à mort de Carmen, absolument inoubliable, comme le dit le directeur de l'Opéra de Metz Métropole dans l'intéressant reportage vidéo ci-lié (qui permet aussi d'admirer les lumières, mieux que je ne le pouvais depuis ma place situé sur le côté opposé). La cruauté est également au centre de cette production. Au troisième acte, les contrebandiers ne trafiquent pas de la marchandise ordinaire, puisque ce sont des passeurs. On voit ainsi avec effroi des familles prendre place dans de grandes caisses en bois. La cruauté prend aussi la forme d'un authentique feu lors de l'immolation du lieutenant à la fin du deuxième acte (mes souvenirs se brouillent, je ne suis pas tout à fait sur de l'identité de la victime). On voit aussi les contrebandiers traiter de façon peu amène trois malheureux douaniers.
Pour apprécier cette mise en scène, il faut cependant être capable
d'accepter l'utilisation de quelques arrêts sur images
fixant
certains personnages tandis que d'autres font évoluer l'action par ailleurs
et ne pas craindre l'intrusion de quelques éléments anachroniques sur
scène. L'amour de Don José au deuxième acte est ainsi représenté par des
ballons en forme de cœur. Lors de l'entrée d'Escamillo, on voit des flashs
d'appareils-photos modernes. Les caisses des contrebandiers sont poussées
par des transpalettes (la version intelligente de ce qui s'est vu dans le
Giulio Cesare passé à Garnier récemment). Dans
le duo puis trio des cartes, quand Frasquita et Mercédès disent à leur
cartes Parlez, mes belles de l'avenir... Dites-nous qui nous trahira
,
elles portent le jeu de cartes à leurs oreilles comme elles feraient d'un
téléphone portable.
Bref, c'est peu dire que j'ai adoré cette mise en scène, du début à la fin, où Don José, transformé en boucher puis en taureau, gagne son duel contre une Carmen qui a passé le costume d'un torero. Pour ma part, je pardonnerai volontiers à Carlos Wagner d'avoir remplacé la fleur jetée par Carmen à Don José par un cigare ! (Cela dit, un cigare, c'est 100% végétal, non ?)
Lors de ces deux heures et demie de musique qui ne sont pas interrompues
par des passages parlés, puisqu'on a choisi la version avec récitatifs
chantés, j'ai apprécié la prestation de tous les chanteurs. Pour celle
d'Isabelle Druet, c'est une évidence. L'ayant vue dans des rôles ou
situations plus joyeux
, j'attendais avidemment de la voir incarner
ce rôle qui change dramatiquement dès la fin du deuxième acte. Certes, dans
cette production, on a construit une Carmen beaucoup moins sexy
que celles incarnées par Anna Caterina Antonacci à Londres ou à l'Opéra Comique. S'il est aussi vrai que la gestique et les
poses que la mise en scène lui font prendre paraissent parfois un peu
forcées (quoique moins que ce à quoi se laisse souvent aller Natalie
Dessay), cela reste on ne peut plus convaincant. En Don José, Chad Shelton
l'est également. À la fin de son air La fleur que tu m'avais
jetée, il réalise un aigu cristallin sur Et j'étais une chose à
toi
, un si bémol aigu [...] en falsetto
explique le
chef Claude Schnitzler dans la vidéo sus-liée. Ce qui m'a aussi marqué, à
la toute fin de cet air sur la syllabe t'ai
de Carmen, je
t'aime
(qu'on entend à 11:30 dans le reportage), c'est la ressemblance
avec l'harmonie du Cygne de Lohengrin. (Quand je vous dis que la
wagnérite, c'est une véritable maladie, il faut me
croire.) L'Escamillo de Changham Lim n'est pas du tout catastrophique comme
je le craignais. Sa diction est tout ce qu'il y a de plus intelligible et
si sa voix était un peu couverte lors de son premier air, c'était tout
simplement parce que l'orchestre impétueux a joué un peu trop fort. J'ai
aussi été scotché par l'interprétation de Claudia Galli dans le rôle de
Micaëla. Il est vrai que sa voix a mis un petit moment à s'échauffer et que
les mouvements que lui imposait la mise en scène faisaient parfois
faiblir sa voix. Pourtant, au troisième acte, lors de l'air Je dis que
rien ne m'épouvante, elle a été sen-sa-tion-nelle. L'émotion du
personnage s'est traduite dans son interprétation sans nuire en rien à la
justesse et à l'intelligibilité du chant. Elle détrônerait presque dans mon
panthéon personnel Anna Moffo dont je chéris l'interprétation de cet air.
(Le récitatif qui se trouve au début de cet air a malheureusement été
complètement gâché par un odieux chœur de tousseurs.)
C'est flou, mais c'est la moins pire des photographies prises lors des saluts.
Sur la Place Stanislas, c'est tout comme s'il ne s'était rien passé au cours de l'après-midi !
(Les quelques autres photographies
sont là.)
PS: Dans ce compte-rendu déjà trop long, j'ai oublié de préciser que les airs de Carmen avaient été interprétés dans des tempi plutôt lents.
PS2: De belles photographies du spectacle sur le site du décorateur.
2011-02-22 21:46+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Culture indienne
Cela fait un peu plus d'un mois que je me prépare aux représentations des opéras Siegfried et Götterdämmerung auxquelles je vais assister en mars et en juin. J'ai lu Le Voyage Artistique à Bayreuth. Pour avoir en tête le décodeur, je réécoute chacun des opéras de la tétralogie et note l'endroit où les motifs principaux apparaissent (que ce soit dans l'enregistrement dont je dispose ou dans la partition d'orchestre), et puis en tire un petit aide-mémoire (source Lilypond) pas encore tout à fait fini.
Ensuite, imaginez que pour me changer les idées, je sorte de sa pochette le CD de la musique du génial film Sita sings the Blues. Il s'y trouve une musique qui n'a absolument rien à voir avec Wagner, normalement, n'est-ce pas ? On y entend en alternance des chansons d'Annette Hanshaw (c'est d'abord pour ça que j'ai commandé le CD) et des titres plus modernes. J'écoute le CD et patatras, dans le morceau qui apparaît à l'entr'acte du film (Intermission, Nik Phelps & the Sprocket Ensemble), la musique a priori la plus innocente qui soit, il me semble entendre très distinctement les cinq premières notes de ça :
Dans le contexte du film (avec un bruit de fond supplémentaire), cela apparaît vers 4:03 dans cet extrait quand Sita passe devant l'écran. Dans la bande originale écoutable sur Deezer, cela paraît au bout de vingt secondes.
Halluciné-je ? Veut-on nous faire comprendre qu'à ce moment-là du film, Sita est soumise à son époux Rama ?
Bon, je retourne visionner le deuxième acte de Siegfried...
2011-02-10 01:45+0100 (Orsay) — Culture — Opéra
Opéra Bastille — 2011-02-09
Svetla Vassileva, Francesca
Louise Callinan, Samaritana
Wojtek Smilek, Ostasio
George Gagnidze, Giovanni Lo Sciancato
Roberto Alagna, Paolo il Bello
William Joyner, Malatestino dall'ochio
Grazia Lee, Biancofiore
Manuela Bisceglie, Garsenda
Carol Garcia, Adonella
Andrea Hill, Altichiara
Cornelia Oncioiu, La Schiava
Alexandre Kravets, Ser Toldo Berardengo
Yuri Kissin, Il Giullare
Alexandre Duhamel, Il Torrigiano
Nicolas Marie, Il Balestriere
Ook Chung, La Voce del prigioniero
Cyrille Lacrouts, violoncelle solo
Orchestre de l'Opéra national de Paris
Daniel Oren, direction musicale
Giancarlo Del Monaco, mise en scène
Carlo Centolavigna, décors
Maria Filippi, costumes
Hans-Rudolf Kunz, lumières
Patrick Marie Aubert, chef du chœur
Francesca Da Rimini, Zandonai
Est-il possible de s'ennuyer davantage à l'opéra qu'avec la Francesca Da Rimini qui passe actuellement à l'Opéra Bastille ?
Rien qu'à lire le synopsis de l'opéra, il y a de quoi être affligé. Il ne se passe rigoureusement rien pendant le premier acte. Le décor est fleuri-mignon. La mise en scène inexistante. Les chanteurs (et tout particulièrement Roberto Alagna) ne jouent pas du tout la comédie. La musique est assez originale. C'est parfois un peu dégoulinant de sentiments, mais on trouve quelques beaux passages symphoniques, comme lors de la fin de ce premier acte.
Je ne sais pas qui a eu l'idée imbécile de faire deux entr'actes pour aboutir à ce découpage absurde : 35 minutes, 25 minutes, 90 minutes. Un entr'acte à la fin d'un acte où il ne s'est rien passé, ce n'est pas terrible. On ne peut même pas commenter la voix du grand Roberto, puisqu'il n'a pas encore ouvert la bouche (mais un spectateur heureusement resté unique a applaudi son entrée en scène).
Le deuxième acte manque de lisibilité. On est au milieu d'une bataille, mais on ne comprend pas vraiment ce qui se passe, si ce n'est que Francesca et sa suivante se prennent pour Isolde et Brangäne, puisque Franscesca remet à Paolo il Bello une coupe (de vin de Grèce). (Je suppose que si le frère de Paolo débarque littéralement d'un bateau, c'est pour appuyer la référence à Tristan. Ah, ah, trop drôle !) Dans le troisième acte, on découvre que Paolo n'est peut-être pas un Tristan mais plutôt un Lancelot : les deux sont inspirés par la lecture d'un livre relatant les amours de ce dernier. Ils finissent par se faire embrocher par les frères de Paolo. C'est que Franscesca était mariée avec l'un d'entre eux et qu'ils sont plutôt violents.
Il reste un peu de bonne musique, plusieurs duos entre Roberto Alagna (Paolo) et Svetla Vassileva (Francesca). Je suis plus enthousiasmé par cette dernière (et, dans les rôles plus secondaires, par Grazia Lee). Sans avoir démérité (par son chant), même s'il était parfois un peu couvert par l'orchestre (qui m'a bien plu, chapeau à Daniel Oren), Alagna ne m'a pas fait une impression absolument éblouissante. Il faudrait le voir dans un opéra plus connu...
2011-02-02 02:12+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Garnier — 2011-02-01
Lawrence Zazzo, Giulio Cesare
Christophe Dumaux, Tolomeo
Varduhi Abrahamyan, Cornelia
Isabel Leonard, Sesto
Natalie Dessay, Cleopatra
Nathan Berg, Achilla
Dominique Visse, Nireno
Aimery Lefèvre, Curio
Emmanuelle Haïm, direction musicale
Laurent Pelly, mise en scène et costumes
Chantal Thomas, décors
Agathe Mélinand, dramaturgie et collaboration à la mise en scène
Joël Adam, lumières
Alessandro Di Stefano, chef des chœurs
Chœur de l'Opéra national de Paris
Orchestre du Concert d'Astrée
Giulio Cesare, Händel
Je reviens de la sixième représentation de la nouvelle production de Giulio Cesare in Egitto, la troisième consécutive pour moi (j'y suis retourné samedi après y être déjà allé jeudi) et la troisième et deux tiers interprétée par Natalie Dessay.
Je suis à une place quasi-symétrique de celle de samedi : première loge 11, place 5, une place d'où l'on voit très bien si l'on consent à se tenir debout. La représentation est filmée (est-ce pour une captation DVD ? des essais pour la retransmission du 7 février ?).
Pas plus cette fois-ci que les précédentes je n'ai eu le sentiment que que la mise en scène fonctionnait (j'ai repéré un truc rigolo non remarqué les deux fois précédentes : parmi les musiciennes de scène habillées en robe à paniers se cache Atsushi Sakaï, un excellent gambiste rendu méconnaissable par le déguisement !). Natalie Dessay et Jane Archibald ont des façons bien différentes d'incarner le rôle de Cleopatra. Jane Archibald jouait le rôle de façon plutôt sérieuse tout du long. Chez Natalie Dessay, qui en rajoute un peu beaucoup, le rôle d'abord léger devient plus sérieux à mesure qu'on avance dans l'opéra. Les plus fins observateurs des premières représentations avaient remarqué que Natalie Dessay portait une poitrine postiche, qui est par moments découverte (il s'agit en fait d'un costume ayant la couleur de la peau) ; Jane Archibald n'a apparemment pas utilisé de tels artifices.
Du côté des voix, j'ai toujours autant apprécié Isabel Leonard (Sesto), Varduhi Abrahamyan (Cornelia) et Lawrence Zazzo (Giulio Cesare). Restait l'inconnue Natalie Dessay. Pendant le premier acte, une petite gêne dans sa voix se laissait souvent percevoir en début de vers. Cependant, même un peu modifiée et malgré la tension de tout le monde, je trouve toujours que c'est un plaisir unique que de l'entendre chanter. Si comme je dis plus haut, elle en rajoute un peu du côté de son jeu, quand elle chante, c'est pour de bonnes raisons qu'elle capte toute l'attention ! Au deuxième acte, elle s'est apparemment un peu plus lâchée : son Venere Bella fut très beau. Bizarrement, Emmanuelle Haïm a semblé faire signe au public d'arrêter d'applaudir à la fin de cet air (pourtant, c'était safe, Giulio Cesare était derrière la porte, attendant de faire son entrée). Plus loin, son Se pietà a été absolument superbe. (Mais il faudrait enfermer le spectateur qui a crié Bravo ! beaucoup trop tôt lors du baisser de rideau.) Au troisième acte, son Da tempeste a été un peu hésitant au début, mais cela s'est très bien fini avec un très beau duo avec Lawrence Zazzo.
Le public m'a semblé carrément frigorifié. À la fin de plusieurs airs du premier acte qui eussent pourtant mérité un tel hommage, il n'y eu aucune interruption pour des applaudissements. À la fin de la représentation, le nombre de baissers/levers de rideau a été moindre que d'ordinaire et les lumières ont été rallumées très vite. Cela dit, quand Emmanuelle Haïm a rejoint les chanteurs pour saluer, Natalie Dessay et elle n'ont plus arrêté de discuter, se désintéressant totalement des saluts.
2011-01-28 02:39+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Garnier — 2011-01-27
Lawrence Zazzo, Giulio Cesare
Christophe Dumaux, Tolomeo
Varduhi Abrahamyan, Cornelia
Isabel Leonard, Sesto
Jane Archibald, Cleopatra
Nathan Berg, Achilla
Dominique Visse, Nireno
Aimery Lefèvre, Curio
Emmanuelle Haïm, direction musicale
Laurent Pelly, mise en scène et costumes
Chantal Thomas, décors
Agathe Mélinand, dramaturgie et collaboration à la mise en scène
Joël Adam, lumières
Alessandro Di Stefano, chef des chœurs
Chœur de l'Opéra national de Paris
Orchestre du Concert d'Astrée
Giulio Cesare, Händel
Je reviens d'une représentation de Giulio Cesare in Egitto (Händel) à l'Opéra Garnier. Ce fut particulièrement fatigant du fait de mon placement à l'amphithéâtre. Mon strapontin s'avère plus confortable que le siège voisin vacant, quoiqu'on y voie moins bien. (Place d'abonnement payée 45€, je suis sûr que je serai plus à l'aise lors des deux prochaines représentations dans des petites places à 10€, même en restant assis...)
La mise en scène est ratée. Elle est de Laurent Pelly, il y a donc quelques idées rigolotes, mais pour le reste, on a une mise en scène et des décors qui sont presque sans rapport avec l'intrigue. Cela se passe dans un musée, manifestement en Égypte. Les personnages de l'opéra investissent la réserve. Ils sont parfois encadrés ou encagés (dans une boîte en verre avec une légende écrite en arabe en-dessous). Quand ils ont besoin d'accessoires (comme un couteau), ils se servent dans le bric-à-brac. Les manutentionnaires du musée prennent parfois part à l'action. Cela ne me convainc pas terriblement. Gros point noir du côté des lumières. J'en ai rarement vu d'aussi mauvaises. Je ne dis pas qu'il n'y a pas eu parfois des images non désagréables à voir, mais pour la nième fois, quand je vais à l'opéra, j'aime que les chanteurs ne soient pas constamment dans la pénombre.
La soirée est heureusement rachetée par la musique ! Écoutant pas mal de Wagner ces jours-ci, j'ai cependant du mal à ne pas trouver qu'il y a beaucoup de répétitions, dans le texte, et dans la musique, avec cette forme de l'aria de capo. Certains airs me paraissent donc quelque peu interminables, mais c'est apparemment la loi du genre et ce n'est pas désagréable quand ce qui se fait entendre plaît à mes oreilles. La musique est interprétée par Le Concert d'Astrée dirigé par Emmanuelle Haïm qui fait ses débuts à l'Opéra. Dans le rôle de Jules César, Lawrence Zazzo que je n'avais pas revu depuis cinq ans est très bien (certains commentateurs regrettent un manque de projection ; je n'ai pour ma part ressenti aucune gêne pour l'entendre). Dans celui de Cléopatre, Jane Archibald a remplacé Natalie Dessay (elle la remplacera aussi le 29 janvier). Quelques hurluberlus l'ont huée lors des saluts alors qu'elle a fait une excellente prestation. Dans le rôle secondaire de Nireno, Dominique Visse ne chante pas beaucoup, et ne fait heureusement pas trop de pitreries, parce que c'est d'un fatigant... Christophe Dumaux s'en sort très bien dans le rôle de Tolomeo. Si Varduhi Abrahamyan est très convaincante en Cornelia (épouse de Pompée dont la tête a été offerte en cadeau à César au début de l'opéra), la révélation de la soirée vient d'Isabel Leonard dans le rôle de Sesto (le fils de Pompée).
2010-12-31 23:59+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Lectures — Culture indienne
Cette année, sauf erreur de comptage, j'ai vu environ 107 spectacles (dont 26 à l'Opéra Garnier, 20 à l'Opéra Bastille, 14 Salle Pleyel, 10 au Théâtre des Champs-Élysées et 8 au R. K. Swamy Auditorium à Mylapore...). Sur l'ensemble, j'en ai chroniqué 77. Comme il ne serait pas très raisonnable d'augmenter encore ces nombres, à l'avenir, il faudra bien faire des choix.
Du côté des spectacles en rapport avec l'Inde, j'ai eu l'occasion de diversifier un peu les genres et les lieux. Voir des spectacles en Inde pendant de courts séjours demande un peu d'organisation et un peu de chance. Pour ce qui est du bharatanatyam, le spectacle de Srithika Kasturi Rangam vu à Chennai a été énorme choc pour moi : c'est le récital qui m'a fait comprendre que cette danse pouvait être véritablement narrative. Les nombreux autres récitals vus m'ont un peu mieux familiarisé avec le langage de cette danse. Pour ce qui est du kuchipudi, j'ai vu deux très beaux récitals cette année : Smt. Radha Prasanna à Chennai et Shantala Shivalingappa aux Abbesses. Mon dernier séjour à Kolkata m'a donné l'occasion d'entendre la jeune Gaayatri Kaundinya interpréter le Raga Maru Bihag, ma première rencontre vraiment réussie avec la musique vocale du Nord de l'Inde. À Mumbai, j'ai pu entendre Aruna Sairam dans un superbe programme de musique carnatique. Certes, j'ai aussi vu Amitabh Bachchan au TCE, mais comme ce spectacle ne m'a pas laissé un souvenir impérissable, cela ne pourra plus guère que me servir à impressionner d'éventuels Indiens qui me demanderaient si j'ai entendu parler d'Amitabh Bachchan...
Du côté de l'opéra, je retiendrai notamment les productions suivantes qui m'ont fait découvrir quelques œuvres du répertoire : Norma mise en scène par Peter Mussbach, Les Contes d'Hoffmann mis en scène par Robert Carsen, Pelléas et Mélisande à l'Opéra Comique, Don Giovanni au TCE, Eugène Onéguine à Bastille, Ariadne auf Naxos à Bastille. Cette année, j'ai également pu voir le prologue et la première journée de la Tétralogie de Wagner : Das Rheingold à Bastille, Die Walküre à Bastille. J'espère avoir le temps de mieux me préparer aux deux derniers opéras pour mieux en apprécier la musique de Wagner et la mise en scène de Günter Krämer. S'ils ne sont pas les plus intéressants qui soient dans l'absolu, deux opéras m'ont enthousiasmé parce qu'ils ont confirmé mon goût pour la voix de Natalie Dessay (La Sonnambula à Bastille, id. (deuxième)) ou éveillé mon intérêt pour celle de Joyce DiDonato (La donna del lago à Garnier, id. (suite)), une chanteuse que j'ai aussi eu l'occasion d'entendre deux fois au TCE en récital. Si je n'ai pas pu entendre Jonas Kaufmann dans Werther, j'ai beaucoup apprécié son interprétation de La Belle Meunière. Une production aux dimensions modestes m'a particulièrement enthousiasmé : Une Flûte Enchantée aux Bouffes du Nord.
Mon goût pour le ballet s'est confirmé. Parmi les moments forts de cette année, il y a eu Le spectacle de l'école de danse de l'Opéra (dans lequel j'ai particulièrement apprécié Piège de lumière de John Taras), Dorothée Gilbert dans Le Concert de Jerome Robbins, La Bayadère à Garnier, Kaguyahime à Bastille (où j'ai préféré Alice Renavand à Agnès Letestu dans le rôle de la princesse), Le défilé du ballet et Roland Petit à Garnier (Nicolas Le Riche dans Le Jeune Homme et la Mort, la musique de Dutilleux dans Le Loup, Isabelle Ciaravola dans Le Rendez-Vous), Parzival à Garnier (où j'ai découvert Harmonielehre de John Adams), Le Lac des cygnes à Bastille et enfin Le Sacre du Printemps à Garnier.
Pour ce qui est de mes lectures, les bilans sont sur le Biblioblog. Cette année, contrairement à l'année dernière, je n'ai lu que 62 livres. Il faut dire que depuis un peu plus de six mois, cette activité est concurrencée par un début d'apprentissage du piano, qui avance tout doucement...
2010-12-23 01:11+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Amphithéâtre de l'Opéra Bastille — 2010-12-22
Jeff Cohen, direction des études musicales
Irène Bonnaud, mise en scène
Claire Le Gal, scénographie
Nathalie Prats, costumes
Daniel Lévy, lumières
Jean-Marie Piquemal, chorégraphie
Sophie-Aude Picon, assistante à la mise en scène
Olivia Doray, Rose Maurrant, Une Lycéenne
Ilona Krzywicka, Mrs Maurrant
Zoe Nicolaidou, Mae Jones, Une Lycéenne, La Première Nurse
Chenxing Yuan, Mrs Fiorentino
Marianne Crebassa, Mrs Olsen
Carol García, Jenny Hildebrand
Letitia Singleton, Mrs Jones, La Seconde Nurse
Manuel Muñez Camelino, Abraham Kaplan, Lippo Fiorentino
Cyrille Dubois, Sam Kaplan, Daniel Buchanan
Alexandre Duhamel, Mr Olsen
Michal Partyka, Henry Davis
Damien Pass, Mr Maurrant, Dick McCann
Florian Sempey, Harry Easter, Mr Jones
Chloé Ghisalberti, Alphonse Cemin, piano
Lorenzo Di Toro, Ygo Mahieux, pianistes-chefs de chant
Songs from Street Scene: An American Opera, Kurt Weill
Aujourd'hui, c'était seulement la deuxième fois que j'allais à l'amphithéâtre Bastille. Je ne me souvenais même plus comment on y accédait. À peu près au même moment, les retardataires de la représentation d'Ariadne auf Naxos arrivaient (et certain se mit encore plus en retard en se trompant de file...). En fait, c'était tout simple, on y descend par le hall où j'ai le temps de dire bonjour à d'autres qui vont au même spectacle que moi. Je n'aurais probablement pas sélectionné ce spectacle si la place ne m'avait pas été proposée gratuitement comme dédommagement pour une place de spectacle qui m'avait déjà été remboursée (la représentation des Noces de Figaro qui se fit sans décors et pour laquelle j'avais craint de ne pas trouver de RER à l'heure du retour, du fait des grèves d'alors). Ce n'est que la cinquième fois que je vais à l'Opéra en quatre jours (voir ici, là, sans oublier une séance de rattrapage de Balanchine/Brown/Bausch avec notamment Jérémie Bélingard en Apollon et Alice Renavand en Élue).
Le programme a de quoi faire un peu peur a priori puisqu'il s'agit d'un opéra de Kurt Weill, un compositeur de la première moitié du vingtième siècle, dont je connaissais l'existence, mais auquel je n'avais jamais été confronté en concert. Si c'est parfois un peu dissonnant, c'est en fait très accessible. J'ignore si on a eu l'opéra en entier ou seulement des extraits, le titre du spectacle étant Songs from Street Scene: An American Opera. Cela se passe à New York, dans un immeuble d'un quartier pauvre. Commérages, amourettes, rêveries, pauvreté, alcoolisme, violence, on trouve un peu de tout (il y a même une référence au communisme, pas franchement bienvenu aux États-Unis d'Amérique). Les scènes se suivent, mais l'ensemble est très cohérent, avec en fil conducteur la relation entre Sam (Cyrille Dubois) et Rose (Olivia Doray). Sam va peut-être s'en sortir grâce aux études, Rose est confrontée à des parents qui se déchirent, Mrs Maurrant (Ilona Krzywicka) et Mr Maurrant (Damien Pass). Cela se termine en crime passionnel. L'histoire commence un soir et se finit le lendemain matin. Au cours de la nuit, un accouchement aura aussi eu lieu dans l'immeuble et une famille sera expulsée.
C'était un fort beau spectacle (cette représentation était la quatrième et dernière). Le décor est une estrade en bois qui se termine par le mur de l'immeuble (en bois et les détails, comme l'entrée, sont tracés en blanc à la craie) auquel conduisent quelques marches et dont dépassent deux balcons. Les chanteurs sont jeunes, pour la plupart en cours de formation à l'atelier lyrique de l'Opéra. Non seulement ils chantent bien et jouent leurs rôles de manière convaincante dans cette mise en scène d'Irène Bonnaud, mais ils dansent aussi parfois sur une chorégraphie de Jean-Marc Piquemal. La voix parlée est aussi travaillée dans les dialogues (en français) qui ont été manifestement un peu adaptés (le rôle d'une étrangère étant interprété par Chenxing Yuan, on a ajouté un peu de chinois !).
Bien que je ne sois pas arrivé parmi les premiers et malgré le placement libre, j'ai trouvé à m'installer légèrement de côté, au premier rang ! Un coup d'œil à gauche et je pouvais voir la chef de chant Chloé Ghisalberti interpréter la musique au piano, à quatre mains avec Alphonse Cemin pendant certains morceaux. J'ai été impressionné la diversité des différents morceaux qui composent ce spectacle et par la faculté de la pianiste à les rendre. C'est très américain. À un moment, je crois reconnaître dans la musique une référence à Summertime.
Bien sûr, ce n'est pas aussi bouleversant qu'une excellente
représentation d'opéra grandeur nature
, mais cela fait quand même
bien plaisir de voir ces jeunes chanteurs communiquer leur enthousiasme au
public.
2010-12-21 01:42+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2010-12-20
Franz Mazura, Der Haushofmeister
Martin Gantner, Ein Musiklehrer
Sophie Koch, Der Komponist
Stefan Vinke, Der Tenor (Bacchus)
Xavier Mas, Ein Tanzmeister
Vladimir Kapshuk, Ein Perückenmacher
Vincent Delhoume, Ein Offizier
Yuri Kissin, Ein Lakai
Jane Archibald, Zerbinetta
Ricarda Merbeth, Primadonna (Ariadne)
Elena Tsallagova, Najade
Diana Axentii, Dryade
Yun Jung Choi, Echo
Edwin Crossley-Mercer, Harlekin
François Piolino, Scaramuccio
François Lis, Truffaldino
Michael Laurenz, Brighella
Orchestre de l'Opéra national de Paris
Philippe Jordan, direction musicale
Laurent Pelly, mise en scène et costumes
Michel Jankeliowitch, réalisation de la mise en scène
Chantal Thomas, décors
Joël Adam, lumières
Agathe Mélinand, dramaturgie et collaboration à la mise en scène
Franziska Roth, responsable des études musicales
Ariadne auf Naxos, Richard Strauss
Si j'avais passé un bon moment pendant la première représentation de la série, c'était très peu en comparaison de la représentation d'Ariadne auf Naxos d'hier soir. Ce n'est pas ça qui va faire baisser le niveau de mon addiction pour l'opéra.
Si j'avais eu quelques moments de fatigue la première fois, cette
fois-ci j'étais concentré tout du long. Quelle musique merveilleuse, c'est
un enchantement absolu du début à la fin. Je n'ai rien à redire sur le
prologue dans lequel Sophie Koch était formidable. Le début de l'opéra
proprement dit m'a plu encore davantage. Le chœur
de Nayade, Dryade
et de l'Écho fonctionne très bien. Cela ne m'avait pas frappé la première
fois, mais quel beau rôle que celui de l'Écho (Yun Jung Choi) qui reprend
souvent des mélodies en vocalises. Ce n'était pas visible depuis ma place
impaire, mais cette fois-ci, depuis le côté pair, j'ai pu voir l'Écho dans
un coin en train de tricoter de la laine ! Plus loin, l'air de Zerbinetta
(Jane Archibald) m'a semblé encore mieux assuré que lors de la première ;
je ne l'avais pas remarqué la première fois, mais on la voit à un moment
sortir de la scène pour draguer un des personnages du prologue. Les
tousseurs sont toujours aussi pénibles, mais je ne sais par quel mystère je
ne les ai plus du tout entendus à partir du milieu de l'opéra, je devais
être complètement sous l'empire de la remarquable tragédienne qu'est
Ricarda Merbeth (Ariane).
Ma seule crainte venait de la prestation de Stefan Vinke dans le rôle de Bacchus. Il me semble que cela n'a pas été parfait, mais qu'est-ce que cela a été mieux que le soir de la première ! La mise en scène du personnage a un air un peu vieillot (je plante mes pieds, je brandis un bras, je chante fort), mais c'est sans doute fait exprès. L'équilibre entre les voix de Bacchus et d'Ariane était excellent dans le final, un sommet musico-émotionnel. Dans cette mise en scène, Ariane finit seule ; ce Bacchus n'était qu'une illusion...
L'orchestre est sagement resté dans la fosse pendant les applaudissements finaux et a même applaudi son chef Philippe Jordan. Cela fait plaisir de voir qu'il y a aurait une certaine entente entre les uns et les autres.
2010-12-13 20:41+0100 (Oberwolfach) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2010-12-11
Franz Mazura, Der Haushofmeister
Martin Gantner, Ein Musiklehrer
Sophie Koch, Der Komponist
Stefan Vinke, Der Tenor (Bacchus)
Xavier Mas, Ein Tanzmeister
Vladimir Kapshuk, Ein Perückenmacher
Vincent Delhoume, Ein Offizier
Yuri Kissin, Ein Lakai
Jane Archibald, Zerbinetta
Ricarda Merbeth, Primadonna (Ariadne)
Elena Tsallagova, Najade
Diana Axentii, Dryade
Yun Jung Choi, Echo
Edwin Crossley-Mercer, Harlekin
François Piolino, Scaramuccio
François Lis, Truffaldino
Michael Laurenz, Brighella
Orchestre de l'Opéra national de Paris
Philippe Jordan, direction musicale
Laurent Pelly, mise en scène et costumes
Michel Jankeliowitch, réalisation de la mise en scène
Chantal Thomas, décors
Joël Adam, lumières
Agathe Mélinand, dramaturgie et collaboration à la mise en scène
Franziska Roth, responsable des études musicales
Ariadne auf Naxos, Richard Strauss
J'étais avant hier soir à la première représentation de la reprise d'Ariadne auf Naxos à l'Opéra Bastille. Je connaissais l'histoire d'Ariane à Naxos (pour avoir lu récemment une traduction d'un extrait des Noces de Thétis et de Pélée de Catulle), mais je découvrais la structure de l'opéra le soir même.
Au cours de cet opéra, trois grandes chanteuses vont s'illustrer. Dans le prologue, Sophie Koch va jouer le rôle du Komponist qui a composé un opéra Ariadne auf Naxos tout spécialement pour les festivités organisées par l'homme le plus riche de Vienne. On voit passer la prima donna, mais on découvre aussi Zerbinetta qui a aussi été invitée à jouer son propre rôle pour un baisser-de-rideau qui racontera ses amours multiples. Le compositeur est horrifié que son art jouxte de telles niaiseries. À la fin du prologue, dans un coup de théâtre, le majordome annonce que le comte a décidé un changement de programme : la pièce bouffone ne sera jouée ni avant ni après l'opéra, mais en même temps. Consternation, mais il faut bien obéir au maître. Des tensions naissent : ni le ténor qui chante Bacchus ni la prima donna qui chante le rôle d'Ariane ne veulent voir les airs coupés.
Après l'entr'acte, le rideau se lève sur un décor qui pourrait être le
décor précédent en cours de construction (ou de destruction). Deux
chanteuses vont s'illustrer de fort belles façons, opposées autant sur la
forme que sur le fond. Ariane est la femme d'un seul homme, Thésée, qui l'a
abandonnée sur l'île. Elle se lamente sur son sort ; Naïade, Dryade et
l'Echo ne peuvent que le constater. Zerbinetta débarque en bikini et paréo,
accompagnée de quatre galants. Ils essayent d'attirer l'attention d'Ariane,
mais celle-ci est ailleurs. Elles ne peuvent de toute façon pas se
comprendre, Zerbinetta changeant sans cesse d'homme (quoiqu'elle admette en
avoir parfois deux en même temps). Les vocalises de Jane Archibald dans ce
rôle sont très spectaculaires. Dans le rôle beaucoup plus dramatique
d'Ariane, Ricarda Merbeth est également éblouissante. Son air Es gibt
ein Reich contient déjà un bon nombre de passages musicaux qui
reviennent au cours de l'opéra, dont la musique n'est pas sans rappeler
parfois Salomé. L'orchestre que dirige Philippe Jordan est très
réduit et l'orchestration distingue nettement les passages dramatiques et
ceux bouffe
de Zerbinetta et ses quatre compagnons (notamment par
l'utilisation des instruments à clavier).
La mise en scène n'est pas inintéressante, mais ce n'est pas ma préférée parmi celles de Laurent Pelly (dont j'avais adoré la mise en scène du Roi malgré lui). Les lumières de Joël Adam, elles sont très belles (ce qui compense avec le décor en parpaings).
Le grand drame de cette représentation d'opéra a été la prestation de
Stefan Vinke dans le rôle de Bacchus (et au premier acte celui du ténor).
Bien que je découvrisse l'opéra en direct, il m'a semblé qu'il y avait un
problème et jamais cela ne m'avait semblé aussi flagrant lors d'une
représentation d'opéra. Cependant, il y a eu quelques passages où il était
tout sauf ridicule, espérons que cela s'améliorera lors des prochaines
représentations (je vais y retourner deux fois...). Pour reprendre le fil
de cette Ariane..., Bacchus débarque après avoir fui Circé. Ariane
le prend pour Thésée ou pour la mort. Elle accepte son étreinte et s'en
retrouve métamorphosée, comme soulagée. Enfin, Zerbinetta revient pour
rappeller ce qu'elle avait déjà dit : Lorsqu'un nouveau dieu arrive,
nous nous abandonnons sans un mot !
.
Malgré le problème avec l'interprète du ténor (et aussi un peu avec le Tanzmeister), j'ai apprécié ce spectacle. L'idée de faire coexister deux types de personnages de mondes opposés est assez amusante. Je ne trouve cependant pas que ce soit le chef d'œuvre absolu comme je l'ai lu dans les textes très-enthousiastes du programme. L'intrigue de la partie mythologique est vraiment très réduite et l'intervention de Zerbinetta est faite dans une unique élan. Après son premier passage (mais quel passage !), la mise en scène nous la montre en train de conduire le minibus pour sortir du décor (et ne plus revenir qu'à la toute fin). Cependant, au cours de la soirée, on aura été rassasié par les performances de trois chanteuses dans des styles très différents, ce qui est en soi assez exceptionnel. Dans le prologue, on pouvait également apprécier d'autres personnages, comme celui, parlé, du majordome (Franz Mazura), ou celui du Musiklehrer (Martin Gantner). Très belles prestations aussi des trois chanteuses jouant les rôles de Najade (Elena Tsallagova), Dryade (Diana Axentii) et de l'Echo (Yun Jung Choi).
Le volume sonore peu imposant et la beauté de la musique faisaient que
la présence de tousseurs dans la salle était particulièrement pénible, tout
comme l'individu (probablement unique) qui a crié Bouh !
à la toute
fin juste avant la première salve d'applaudissements.
2010-12-08 01:50+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse
Opéra Garnier — 2010-12-08
Oleg Bryjak, Krušina
Isabelle Vernet, Ludmilla
Inva Mula, Mařenka
Michael Druiett, Mícha
Marie-Thérèse Keller, Háta
Andreas Conrad, Vašek
Piotr Beczala, Jeník
Jean-Philippe Lafont, Kecal
Heinz Zednik, Le Maître de manège
Valérie Condoluci, Esmeralda
Ugo Rabec, L'Indien
Gilbert Deflo, mise en scène
William Orlandi, décors et costumes
Roberto Venturi, lumières
Micha Van Hoecke, chorégraphie
Guy De Bock, réalisation de la chorégraphie
Alessandro Di Stefano, chef de chœur
Constantin Trinks, direction musicale
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
La Fiancée vendue, Smetana
Je ne sors pas franchement enchanté de la deuxième représentation de La Fiancée vendue de Smetana (apparemment le premier opéra en langue tchèque). L'histoire est mignonne. Mařenka (Inva Mula) et Jeník (Piotr Beczala) s'aiment, mais les parents de Mařenka ont accepté de la donner en mariage arrangé à l'idiot Vašek (Andreas Conrad), fils de Mícha (Michael Druiett). C'est Kecal (Jean-Philippe Lafont) qui s'occupe des négociations pour le compte de la mère de Vašek, Háta (Marie-Thérèse Keller). Il faut convaincre Jeník de renoncer à Mařenka. Contre de l'argent, il accepte de signer un papier comme quoi il laisse Mařenka au fils de Mícha. C'est une ruse, parce qu'il est rigoureusement exact qu'il est le fils de Mícha : il a été chassé de la maison par Háta quand elle a épousé Mícha devenu veuf. Tout se termine bien. Cependant, la pauvre Mařenka a longtemps cru qu'elle avait été trahie, vendue par Jeník. On a aussi beaucoup ri au dépens de Vašek, qui s'est aussi ridiculisé en se faisant embobiner par une Esmeralda (Valérie Condoluci) pour jouer le rôle d'un ours dans un cirque, dans lequel on trouve aussi un faux amérindien (Ugo Rabec) et un directeur qui parle trop (Heinz Zednik).
La musique est belle, très rythmée. Depuis ma troisième loge excentrée, j'avais une vue plongeante sur l'orchestre. Je ne pouvais donc pas ignorer qu'une des violonistes était sur une autre planète pendant l'ouverture, complètement décalée (coups d'archets pas très synchro ni dans le même sens que les voisins), manifestant toujours de la surprise quand elle voyait les autres violonistes se préparer à se remettre à jouer ; et elle en riait avec sa voisine !
Si le décor (unique) et le rideau de scène faits dans un style naïf coloré sont mignons, si les mouvements du chœur sont bien maîtrisés et les danses rigolotes (les chorégraphies de Micha Van Hoecke ont une grande importance dans ce spectacle), je reste déçu par la mise en scène de Gilbert Deflo (qui avait déjà sévi dans Un bal masqué et dans Luisa Miller) dans cette production, reprise de l'ère Mortier (dans le programme, on a gardé la mise en page d'origine, mauvaise odeur du nouveau papier en plus). Dans la première partie (deux premiers actes), c'est particulièrement frappant. Malgré une sincérité évidente, les gestes des chanteurs sont souvent hésitants, maladroits. Quand ils chantent, ils restent debouts, immobiles. Tout repose sur charisme et le jeu un rien exagéré d'Inva Mula (chanteuse fétiche du nouveau directeur : en deux ans, c'est le quatrième opéra dans lequel je la vois à l'Opéra après Mireille, La Bohème et Les Contes d'Hoffmann, j'en ai peut-être raté). Cela s'appuie aussi sur le personnage de Kecal, mais si les grimaces et la présence scénique y sont manifestes, je suis moins convaincu par la voix de Jean-Philippe Lafont. À cette exception près, j'ai aimé les prestations vocales de la plupart des autres chanteurs, tout particulièrement Inva Mula, Piotr Beczala et Andreas Conrad pour les rôles principaux, mais aussi Marie-Thérèse Keller et Valérie Condoluci pour les autres.
Un des plus beaux numéros musicaux de l'opéra intervient au troisième acte quand Kecal et les parents de Mařenka et de Vašek annoncent à Mařenka qu'elle a été trahie par Jeník. Il se trouve là un chœur a cappella de toute beauté, tout comme la scène de désespoir subséquente de Mařenka.
Bref, c'est un spectacle un peu paradoxal, avec pas mal d'aspects enthousiasmants (au point qu'une partie du public va pousser des cris lors des saluts) mais aussi un désagréable arrière goût du fait de la mise en scène.
2010-12-04 18:55+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse
Opéra Comique — 2010-12-04
André Morsch, Cadmus
Claire Lefilliâtre, Hermione
Arnaud Marzorati, Arbas, Pan
Jean-François Lombard, Nourrice, Dieu champêtre
Isabelle Druet, Charite, Mélisse
Arnaud Richard, Draco, Mars
Camille Paul, Amour, Palès
Geoffroy Buffière, Le Grand Sacrificateur, Jupiter
David Ghilardi, Le Soleil, Premier Prince Tirien
Romain Champion, Premier Africain, Envie
Vincent Vantyghem, Second Prince Tirien
Luanda Siqueira, Junon, Aglante
Eugénie Warnier, Pallas
Tarik Bousselma, Second Africain
Jeroen Bredewold, Échion
Eugénie Lefebvre, L'Hymen
Catherine Padaut, Vénus
Le Poème Harmonique, Danseurs, chœur et orchestre
Vincent Dumestre, direction musicale
Benjamin Lazar, mise en scène
Gudrun Skamletz, chorégraphie
Louise Moaty, collaboration à la mise en scène
Adeline Caron, scénographie
Alain Blanchot, costumes
Christophe Naillet, lumières
Mathilde Benmoussa, maquillage
Antoine Fontaine, réalisation des toiles peintes
Daniel Bargier, chef de chœur
Cadmus et Hermione, Jean-Baptiste Lully
Cette année, je vais très peu fréquenter l'Opéra Comique à cause de l'opacité de leur système de réservation. Comme leur site Internet s'était débloqué au bout de quelques semaines, j'avais quand même réussi à réserver une ou deux places de plus. Je ne sais pas comment cela se fait, mais pour 40€, je tombe presque tout le temps sur un troisième rang de premières loges de face (18.5), ce qui est presqu'idéal si les têtes de devant ne sont pas trop hautes, ce qui était le cas hier soir lors d'une représentation de Cadmus et Hermione de Lully, le premier opéra de l'histoire de la musique française.
Depuis ma place, j'ai une vue frontale sur la scène et peut
voir les écrans latéraux où parait le texte de Quinault, qui, nous dit le
programme, a pas mal modifié le mythe raconté par Ovide. Sur ces écrans,
l'orthographe est moderne. La prononciation, elle, ne l'est pas ! Les
s
, x
ou z
finaux sont prononcés, tout comme certains
ent
finaux qui d'ordinaire sont muets, oi
est souvent
prononcé ouè
, la nasalisation des voyelles est quelque peu
différente de ce qu'on entend d'habitude. Par exemple Et c'est pour
obéir / aux oracles des dieux / Qu'il faut m'arrester en ces lieux.
sera prononcé Et c'est pour obéir / aux oracles des dieusses / Qu'il
faut m'arrêter en ces lieusses.
, ou Chantons la gloire de son
cours.
prononcé Chantons la glouère de son cource.
. Cela
surprend au début, mais on finit par s'y habituer. Sans être limpide comme
dans un Pelléas et Mélisande, le texte est relativement
intelligible, en tout cas davantage que dans mes expériences précédentes
avec des tragédies lyriques de Lully.
Il y a relativement peu de parties musicales que l'on pourrait qualifier
d'airs
. Ce qu'on entend est plus proche du récitatif. Au cours du
prologue et des cinq actes, on assiste aussi à de nombreuses scènes
dansées. Tout ceci est tellement français... La distribution vocale est
assez homogène. On entend notamment André Morsch (Cadmus), Claire
Lefilliâtre (Hermione) dans les deux premiers rôles, et aussi Arnaud
Marzorati (Arbas, Pan) et Isabelle Druet (Charite, Mélisse). Arbas est un
suivant de Cadmus, fier mais couard ; les scènes comiques de l'opéra
reposent sur lui. Charite est une compagne d'Hermione, et c'est me
semble-t-il le seul rôle ayant à chanter plusieurs airs
. Il va sans dire que je suis content d'y avoir entendu
Isabelle Druet. Comme Arnaud Marzorati, elle joue extrêmement bien.
Parfois, alors qu'elle est muette, elle parvient à exprimer la pensée de
son personnage par des mouvements presqu'imperceptibles.
Si la prononciation a apparemment été pensée dans l'idée d'une recréation de l'œuvre en essayant de se placer dans le contexte de l'époque (1673), c'est aussi le cas pour le reste. Les musiciens du Poème harmonique dirigés par Vincent Dumestre (que je ne pouvais voir depuis ma place) utilisent des instruments qui ont été faits aux dimensions appropriées. L'éclairage est assez original aussi. Là encore, de ma place, je ne voyais pas tous les artifices, mais les comédiens, chanteurs et danseurs étaient situés derrière une ouverture cachée par un panneau de bois d'où s'échappait de la lumière. Le programme n'est pas très explicite sur le sujet, mais il n'est pas impossible que cet éclairage ait été réalisé à la bougie... Ce qui est certain, c'est que l'éclairement du décor vacillait parfois de façon irrégulière. Du coup, afin qu'ils soient bien visibles, les chanteurs sont toujours de face, au centre de la scène. Cependant, il ne s'agit pas d'une négation du théâtre : les mouvements expressifs des bras notamment empêchent la représentation de tomber dans la monotonie. Par ailleurs, les costumes sont très colorés et tous les chanteurs ont des coiffes et autres ornements capillaires extravagants.
Bref, c'est un charmant spectacle qu'icelui. Curieusement, alors que la fin du spectacle était programmée pour 22h15, la deuxième partie reprend à 22h10 après l'entr'acte, pour une toute petite demi-heure. Bizarre découpage !
2010-11-17 22:44+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2010-11-16
Scott Macallister, Albrecht von Brandenburg
Matthias Goerne, Mathis
Thorsten Grümbel, Lorenz von Pommersfelden
Wolfgang Ablinger-Sperrhacke, Wolfgang Capito
Gregory Reinhart, Riedinger
Michael Weinius, Hans Schwalb
Antoine Garcin, Truchsess von Waldburg
Eric Huchet, Sylvester von Schaumberg
Melanie Diener, Ursula
Martina Welschenbach, Regina
Nadine Weissmann, Die Gräfin von Helfenstein
Vincent Delhoume, Der Pfeifer des Grafen
Orchestre et chœur de l'Opéra national de Paris
Christophe Eschenbach, direction musicale
Olivier Py, mise en scène
Pierre-André Weitz, décors et costumes
Bertrand Killy, lumières
Joseph Hanimann, dramaturgie
Wissam Arbache, collaborateur à la mise en scène
Jochen Rieder, maestro suggeritore
Patrick Marie Aubert, chef du chœur
Mathis der Maler, Hindemith
J'ai assisté hier soir à la première de Mathis der Maler de Hindemith à Bastille. Cet opéra, dont Hindemith a rédigé lui-même le livret, est inspiré par la vie du peintre du Retable d'Issenheim exposé à Colmar (je cite la Wikipédia germanophone puisque c'est la seule que j'aie vue qui montre les trois vues possibles sur le retable). Pendant les trois heures que dure cet opéra, je me suis parfois désintéressé des surtitres. J'ai donc dû manquer quelques subtilités. D'après ce que j'en ai compris sur le moment et des extraits que j'ai eu le temps de lire depuis, cela m'a semblé un texte beau et riche.
Les décors étant de Pierre-André Weitz comme pour L'Orestie que j'avais vu à l'Odéon, je m'attendais certes à un décor tout en transformations, mais pas à quelque chose d'aussi impressionnant ! Pourtant, cela avait commencé assez sobrement. En effet, pendant tout le spectacle, on voit à l'avant-scène un simple lit à gauche, un tas de gros livres au milieu et un chevalet à droite. Mathis (Matthias Goerne) entre sur le plateau de scène qui est essentiellement vide en portant une lumière qu'il pose au centre. (Il y a eu un cafouillage au tout début de la représentation, peut-être un problème d'éclairage dans la fosse d'orchestre qui a fait que la représentation s'est interrompue au bout de quelques dizaines de secondes. Mathis a reculé vers l'arrière de la scène et la représentation a recommencé depuis le début ; c'est la première fois que je vois un tel bug dans un spectacle.) Il s'installe sur son lit et commence à avoir des visions : une structure de décor ayant la forme du retable apparaît (un grand panneau central, deux sur les côtés et une partie basse) et des comédiens prennent une pose figurant une des vues possibles sur le retable que l'on aperçoit en ombres chinoises. Cette vue évoque principalement la Crucifixion (dans la partie basse, le corps du Christ en slip est amené au tombeau). Il est dommage que dans le programme (12€) qui fait plus de 200 pages, s'il est vrai que l'on trouve quelques reproductions de bonne qualité de quelques parties du retable, pour certaines d'entre elles, seuls certains détails sont montrés (parfois trop agrandis au point de paraître pixelisés), alors même que des textes du programme font référence à d'autres détails...
L'histoire que raconte cet opéra mêle des éléments très différents. Une des directions est celle de la révolte des paysans contre le pouvoir de leurs maîtres et du clergé. Mathis accepte que Schwalb, le chef des paysans, et sa fille Regina se réfugient chez lui avant de repartir. Dans un autre tableau (le quatrième), il s'opposera au contraire aux excès de ces batailles en sauvant la comtesse Helfenstein qui était un peu plus que violentée par les combattants. Il n'est pas étonnant de voir des drapeaux rouges brandis par les paysans dans cette révolte. Ce qui ne paraît pas choquant non plus dans cette mise en scène, vu la période où Mathis le Peintre a été composé et les problèmes qu'eut Hindemith avec le régime national-socialiste, c'est que le pouvoir qui réprime la révolte soit en uniformes nazis (on voit même un tank ! et dans le fond, on aperçoit parfois l'image d'une ville en ruines, s'agirait-il de photographies ayant suivi les bombardements de Mayence lors de la deuxième guerre mondiale ?). Ce sont les mêmes qui organisent des autodafés de livres luthériens. En effet, la ville de Mayence est alors divisées entre papistes et luthériens. Le riche bourgeois Riedinger, luthérien convaincu, voudrait voir le luthérianisme se développer. Il tente de convaincre Capito, le conseiller du cardinal Albrecht, de l'intérêt qu'il y aurait à faire en sorte que celui-ci se convertisse et se marie avec sa fille Ursula. Il n'est alors question que de politique et d'argent, puisque le cardinal manquant de liquidités, un riche mariage le sauverait financièrement parlant. Celui-ci ne voit d'abord que l'intérêt du gain éventuel, mais si ce personnage semble un catholique plutôt progressiste (il aime sincèrement l'art par dessus tout : quand il commande un tableau, il veut que le peuple soit ému et que celui-ci ne se demande pas si c'est par la scène religieuse qu'il représente ou par le talent de l'artiste), un mariage, ce serait aller trop loin. Dans le grand moment vocal de cet opéra, Ursula (Melanie Dieter) va néanmoins convertir Albrecht à sa foi et celui-ci va décider d'abandonner les richesses pour vivre austèrement (on voit une très intelligente transformation du décor au moment de cette conversion : l'imposant décor doré symbolisant le catholicisme se retourne pour devenir noirâtre). La duplicité de Riedinger apparaît explicitement dans le texte puisqu'il n'était pas tant intéressé par le fait de convertir le cardinal que par celui de lui faire accepter sa fille et son argent de sorte que les luthériens eussent un symbole qui pût faire progresser la Réforme.
Les décors de ce spectacle sont spectaculaires. Dans le deuxième
tableau, on voit apparaître de grands éléments de décors. Ils sont très
mobiles, y compris verticalement, puisqu'à certains moments, le décor a
jusques à trois étages ! Dans le troisième tableau (celui de l'autodafé),
on voit ainsi apparaître les caves de Riedinger (à qui on a promis qu'on ne
fouillerait pas sa bibliothèque trop en profondeur), alors que les nazis
sont à l'extérieur, à l'étage du dessus. Certains décors ne sont pas faits
pour être réalistes
, comme celui qui voit le cardinal déposer une
relique dans un reliquaire doré dans un mur concave tout aurant doré. Ils
ne sont pas tous très pratiques, puisque dans les scènes où apparaît le
décor du premier tableau, les personnages ayant à se déplacer de l'avant
par l'arrière ou réciproquement doivent pas mal se baisser pour traverser
ce qui correspond à la partie basse du retable.
Au cours de la soirée, de nombreuses images du retable sont évoquées. Outre celles déjà mentionnées, on trouve le Concert des Anges qui est représenté, entre autres, par une comédienne prenant une pose semblable à celle que l'on peut voir sur le tableau. La fenêtre que l'on aperçoit au fond de l'Annonciation est utilisé comme motif dans la façade des décors dorés. Depuis le deuxième balcon, je ne voyais pas toujours toute la partie supérieure de la scène, mais dans le décor conceptuel doré (où a été déposé le reliquaire), il m'a semblé apercevoir une moyenne boule dorée installée en haut comme une lumière : cela fait beaucoup penser à celle que l'on voit dans la Résurrection. À un moment, un des gardiens romains (détail de cette Résurrection) est représenté par un homme en armure, de façon assez peu convaincante par rapport à d'autres images vues dans ce spectacle (mais cependant très au-dessus du niveau de ce qui était fait dans La donna del lago !).
L'image la plus frappante de cet opéra (qui est celle utilisée en couverture du programme et sur le site de l'Opéra) représente La Tentation de Saint Antoine. Mathis est identifié à ce personnage. Diverses créatures monstrueuses viennent le hanter. D'autres douées de parole viennent le tenter en utilisant divers arguments (dont trois jeunes comédiennes en petite tenue). Elles sont identifiées à certains personnages rencontrés au cours de l'opéra. La plus présente est Ursula (dont je n'ai pas dit qu'elle était amoureuse de Mathis, qui s'en est détourné pour Regina). Dans la foulée, le livret évoque la visite de Saint Antoine à Saint Paul (identifié au cardinal, qui a abandonné la vie sociale).
Le dernier tableau commence par une très belle scène entre Ursula et
Regina. Il y est entre autres question d'un ruban. Au début de l'opéra,
Ursula avait donné un ruban à Mathis. Quand Regina avait débarqué chez lui
avec son père, elle avait chanté pour Mathis une chanson Un chevalier
s'en vint à cheval à la fontaine, auprès de la jeune fille.... Le chevalier
lui offrit un ruban de soie...
. Pas insensible, Mathis avait rendu son
geste conforme au texte de la chanson. À l'approche de la mort des
personnages, Regina souhaite pouvoir reconnaître Mathis au royaume des
morts. Elle donne le ruban à Ursula (qui reste silencieuse à la nouvelle de
cette trahison) pour qu'elle le lui donne comme un signe qui le distinguera
des autres.
Ensuite, cela traîne un peu en longueur. À la fin, Mathis range sa
chambre, emporte quelques symboles (un livre, le ruban, un drapeau rouge,
etc.) et s'approche d'une ouverture au centre de la scène. Le texte dit
En route donc pour ce dernier bout de chemin, je veux franchir le seuil
avec légèreté. Tout comme mes fruits se sont détachés de moi, je veux
donner à la terre cette dernière feuille de l'automne mûr.
. Je me dis
alors irrésistiblement qu'il va les lancer à travers l'ouverture avant d'y
sauter lui-même. La suite me donnera raison sur le premier point, mais
l'extinction des lumières aura lieu sans qu'eût lieu le saut qui eût
constitué le climax de cet opéra. Curieusement, quand Matthias Goerne est
venu saluer, il boitait. Je me demande ce qui a bien pu se passer.
Au premier visionnage, il est difficile de se concentrer sur tous les
aspects de l'opéra en même temps. Vocalement, le chanteur qui m'a le plus
enthousiasmé est Melanie Diener (Ursula), notamment dans la scène de la
conversion d'Albrecht. C'était la première fois que je voyais Matthias
Goerne. Ma première impression dégagée dans le premier tableau où j'avais
du mal à simplement l'entendre est plus mitigée ; dans les passages où
l'orchestre était silencieux ou presque, il a cependant eu indéniablement
de très beaux passages. Lors d'un de ses airs
, Scott Macallister
(Albrecht) m'a semblé laisser un peu trop éclater les émotions de son
personnage au détriment de son chant. Pour le reste, je ne sais pas trop
que dire sur les voix en général puisqu'entre la lecture des surtitres,
l'éclairage un peu sombre et le grand nombre de personnages sur scène, à
pas mal de moments, je ne voyais pas qui chantait (même avec les
jumelles...).
Si cet opéra date du XXe, il n'y a vraiment aucune raison d'avoir peur en se disant que ce sera bizarre... Cette œuvre de Hindemith n'est pas plus difficile à entendre que d'autres œuvres de styles plus classiques (certes, ce n'est pas du Rossini !). Certains passages empruntent d'ailleurs à d'autres styles, comme la chanson populaire (cf. la chanson du ruban) ou le chant grégorien.
Ce que j'ai le plus aimé dans ce spectacle, c'est la manière de mettre en scène des images du retable d'Issenheim. Le tour de force de machinerie autour des décors fait aussi fort impression. Parmi les points négatifs, je noterais l'éclairage de la scène de l'attaque du chateau de Königshofen par les paysans. Certes, là encore, les éléments de décors mobiles représentant le château bien amoché sont spectaculaires, mais les paysans sont éclairés comme des fugitifs le seraient par des projecteurs. Le problème, c'est qu'il y a une multitude de tels projecteurs, que les zones éclairées n'arrêtent pas de bouger ad nauseam et surtout qu'il en est ainsi pendant toute la scène. La mise en scène, si elle est toujours cohérente avec le livret, n'est pas non plus parfaite de mon point de vue puisque j'ai parfois eu du mal à voir qui chantait. C'est que pendant leurs passages chantés, les chanteurs sont souvent assez statiques. Le positionnement du chœur dans certaines scènes m'a aussi semblé étrange aussi, comme dans la scène de l'autodafé. Cela dit, globalement, j'ai trouvé cette production vraiment très intéressante (ce n'est sans doute pas étranger au fait que ce soit mon plus long billet de blog sur une représentation d'opéra).
2010-11-10 02:39+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Théâtre
Théâtre des Bouffes du Nord — 2010-11-09
Franck Krawczyk, piano
Antonio Figueroa, Tamino
Agnieszka Slawinska, Pamina
Leila Benhamza, La Reine de la Nuit
Betsabée Haas, Papagena
Virgile Frannais, Papageno
Patrick Bolleire, Sarastro
Jean-Christophe Born, Monostatos
William Nadylam, Abdou Ouologuem, comédiens
Peter Brook, mise en scène
Peter Brook, Franck Krawczyk, Marie-Hélène Estienne, adaptation
Christophe Capacci, conseiller artistique
Philippe Vialatte, lumières
Une Flûte Enchantée, librement adaptée d'après la partition de Mozart et le livret de Emanuel Schikaneder
Je reviens absolument enchanté du Théâtre des Bouffes du Nord où avait lieu ce soir la première d'Une Flûte Enchantée mise en scène par Peter Brook. Cet homme est un génie !
L'opéra de Mozart a été adapté par Peter Brook, Marie-Hélène Estienne et par Franck Krawczyk qui a adapté la partition qu'il interprète au piano. Cela commence ainsi par quelques accords de l'Ouverture, puis très vite on entend l'appel à l'aide de Tamino (Antonio Figueroa). Point de trois dames pour le secourir : c'est Papageno (Virgile Frannais) qui entre en scène...
Si j'ai eu quelques frayeurs à propos du niveau des chanteurs au tout début, j'ai très vite été rassuré. Les jeunes chanteurs qui composent la distribution sont aussi d'excellents comédiens. Il y a une fraîcheur et une espièglerie dans l'attitude de Tamina, qui est interprétée par Agnieszka Slawinska qui décèle un délicieux accent à la Romy Schneider pendant les passages parlés (en français). Après l'air (impeccable) de la Reine de la Nuit (Leila Benhamza), on la voit évoluer. Ce n'est plus une enfant. On la verra ensuite avec une cape rouge. Parmi les nuances intéressantes apportées par cette version, j'ai aimé l'attitude de séduction plus qu'ambiguë de la Reine de la Nuit envers Tamino. Sarastro (Patrick Bolleire) apparaît comme un sage bienveillant et sympathique. L'interprète fait entendre de très beaux graves. Les deux scènes où apparaissent ensemble Papageno et Papagena (Betsabée Haas) sont délicieuses. Des idées qui par d'autres metteurs en scène eussent peut-être paru vulgaires passent ici très bien. Il faut en effet noter que quelques pincées d'humour ont été ajoutées au livret...
Ce qui surprend le plus au début de ce spectacle, c'est le rôle multiple voué au comédien William Nadylam. C'est un personnage qui parle autant au public qu'il interagit avec les autres personnages. Une sorte de récitant qui n'interromprait pas l'action dramatique. C'est aussi un magicien, un machiniste. Bref, un homme bien mystérieux. La distribution est complétée par un autre comédien, Abdou Ouologuem, dont le rôle est plus secondaire, et par Jean-Christophe Born (Monostatos).
En m'installant à ma place et en regardant vers le fond rugueux-rougeâtre du plateau de scène, je remarquais que l'espace vide ne comportait que quelques tiges de bambou dressées verticalement, chacune sur un petit support. Je me demandais ce que le metteur en scène en ferait. Elles constituent un des rares éléments de décor de cette production. Suivant l'arrangement qu'elles font, elles peuvent en fait représenter des colonnes, des portes que Tamino n'arrive pas à franchir, les montants du lit de Pamina et bien d'autres choses encore. C'est très convaincant. L'impression faite est rehaussée par les lumières très cohérentes de Philippe Vialatte. Par exemple, quand Tamino et Papageno sont dans le noir, l'obscurité quasi-complète est faite dans le théâtre ! Les lumières appuient aussi des effets de mise en scène quasi-cinématographique, en flash-back, comme lorsque Pamina fait sa première apparition.
J'ai rarement été autant saisi par un spectacle d'opéra. Le fait que les chanteurs-comédiens soient aussi près des spectateurs y est sans doute pour quelque chose (quoiqu'à l'échelle du théâtre, j'étais plutôt loin puisqu'au sixième rang), mais ce ne serait rien sans l'exceptionnel travail de mise en scène.
Pas moins de quarante-cinq représentations sont programmées jusqu'au 31 décembre (plusieurs distributions tournent). Il reste des places dans la dernière catégorie pour pas mal de dates ; pour en avoir de meilleures, il semble qu'il faille plutôt viser les dates à la fin du mois de décembre.
2010-10-19 23:58+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2010-10-16
Philippe Jordan, direction musicale
Luca Ronconi, mise en scène
Ugo Tessitore, collaboration artistique
Margherita Palli, décors
Silvia Aymonino, costumes
Gianni Mantovanini, lumières
Alessandro Di Stefano, chef du chœur
Orchestre et chœur de l'Opéra national de Paris
Maîtrise des Hauts-de-Seine, Chœur d'enfants de l'Opéra national de Paris
Il Trittico, Puccini
Juan Pons, Michele
Marco Berti, Luigi
Eric Huchet, Il Tinca
Mario Luperi, Il Talpa
Sylvie Valayre, Giorgetta
Marta Moretto, La Frugola
Hyung-Jong Roh, Venditore di canzonntte
Anne-Sophie Ducret, Un'amante / Una Voce interna
Gregorz Staskiewiecz, Un'amante / Una Voce interna
Il Tabarro
Tamar Iveri, Suor Angelica
Luciana D'Intino, La Zia Principessa
Barbara Morihien, La Badessa
Louise Callinan, La Suor Zelatrice
Marie-Thérèse Keller, La Maestra della novize
Amel Brahim-Djelloul, Suor Genovieffa
Claudia Galli, Suor Osmina
Olivia Doray, Suor Dolcina
Zoe Nicolaidou, Prima Cercatrice
Carol García, Seconda Cercatrice
Cornelia Oncioiu, La Suor Infermiera
Chenxing Yuan, Una novizia
Anne-Sophie Ducret, Prima conversa
Marina Haller, Seconda conversa
Suor Angelica
Juan Pons, Giannia Schicchi
Ekaterina Syurina, Lauretta
Marta Moretto, Zita
Saimir Pirgu, Rinuccio
Eric Huchet, Gherardo
Barbara Morihien, Nella
Alain Vernhes, Betto
Mario Luperi, Simone
Roberto Accurso, Marco
Marie-Thérèse Keller, La Ciesca
Yuri Kissin, Maestro Spinelloccio
Christian Helmer, Amantio di Nicolao
Ugo Rabec, Pinellino
Alexandra Duhamel, Guccio
Gianni Schicchi
Samedi dernier, alors que des troubles autour de la manifestation débordait
paraît-il jusque dans le hall de l'Opéra Bastille, j'assistais à une
représentation du Triptyque de Puccini. Je dis paraît-il
parce que je n'ai remarqué de casse ni en entrant peu avant 19h ni en me
baladant lors les entr'actes ni en sortant.
D'après les informations lues dans le programme, le projet de Puccini semble avoir évolué puisque seul le dernier des trois opéras présentés au cours de la soirée rentre dans le cadre du projet initial autour de l'œuvre de Dante.
Comme les deux autres, le premier opéra Il Tabarro dure un peu moins d'une heure. Il est situé sur une péniche amarrée à Paris. C'est un drame de la jalousie : la femme (Giorgetta) du patron aime un des marins (Luigi), le mari (Michele) le tue. Un niveau supplémentaire de profondeur psychologique vient du fait que le couple avait perdu un enfant. J'avais fait la connaissance de quelques admirateurs de Sylvie Valayre un peu avant la représentation. De mon côté, c'était la première fois que je l'entendais. Si elle m'a fait bonne impression, c'est Marco Berti (Luigi) qui m'a le plus impressionné. J'ai aussi apprécié Marta Moretto dans un des rôles secondaires.
Le deuxième opéra commence par un son de cloche. Suor Angelica est une histoire autour de la perte d'un enfant (illégitime), mais il est surtout question de religion. La question de la damnation en cas de suicide, c'est un sujet que je trouve assez peu intéressant. Le rôle éponyme était chanté par Tamar Iveri, dont je ne fais pas partie des admirateurs. La seule scène qui m'ait intéressé est celle où la tante de Sœur Angelica vient lui rendre visite pour ordonner à celle qui a déshonoré sa famille d'abandonner sa part d'héritage. Les dialogues témoignent une violence verbale assez sophistiquée. La mezzo-soprano Luciana D'Intino incarne de façon très convaincante ce rôle de méchante. Dans les rôles des sœurs, il est difficile de reconnaître quelques chanteuses comme Amel Brahim-Djelloul ou Cornelia Oncioiu tant les costumes sont uniformes et couvrants. C'est la première fois qu'au moment des saluts on se sent obligé d'applaudir continûment puisque les chanteuses qui défilent un peu trop vite sont pratiquement indistinguables.
Bien sûr, si ce deuxième opéra est décevant, la musique de Puccini et l'orchestre de l'Opéra de Paris dirigé par Philippe Jordan parviennent heureusement à retenir l'attention.
À mon goût, le meilleur des trois opéras est le troisième Gianni Schicchi. C'est très certainement l'opéra le plus drôle que j'aie vu. Buoso Donati est mort et tous les membres de sa famille espèrent s'approprier la meilleure part de l'héritage. Mais le défunt l'aurait léguée à des moines... On trouve le facheux testament. Gianni Schicchi, d'un niveau social moindre, entre en scène et finit par proposer une solution : à l'extérieur, tout le monde ignore que Donati est mort, qu'il se fasse passer pour le mort, dicte un nouveau testament devant un notaire et le tour sera joué. Ce qu'ils ne savent pas encore, c'est qu'il va se léguer la meilleure part à lui-même. Il s'agit d'une sorte de vengeance, puisque la famille avait considéré que sa fille Lauretta n'était pas d'une assez bonne famille pour épouser le jeune Rinuccio.
Le texte, la façon dont il est mis en musique, les mimiques des chanteurs, la mise en scène, la voix contrefaite de Gianni Schicchi quand il imite celle du mort, tout concourt au caractère comique de cette pièce. Le temps ne se suspend que pour l'air de Lauretta O mio babbino caro, chanté par Ekaterina Syurina. D'ailleurs, la façon dont cet air intervient abruptement est presque parodique. À la fin, Gianni Schicchi s'adresse directement au public. Conscient qu'il va aller en enfer, il espère finir par obtenir des ménagements. Dans ce rôle-là, Juan Pons était beaucoup plus enthousiasmant que dans son rôle de Michele dans Il Tabarro !
2010-10-06 23:18+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse
Théâtre des Champs-Élysées — 2010-10-06
Barbara Hannigan, Lei
Georg Nigl, Lui
Sasha Waltz, création chorégraphique, mise en scène, décors
Franck Ollu, direction musicale
Thilo Reuther, décors, lumières
Hussein Chalayan, costumes
Thierry Coduys, dispositif électroacoustique
Ilka Seifert, dramaturgie
Sasha Waltz & Guests
Vocalconsort Berlin
Ensemble Modern
Passion, Pascal Dusapin.
La création chorégraphique de l'opéra Passion de Pascal Dusapin par Sacha Waltz & Guests est certainement le spectacle au cours duquel je me suis le plus ennuyé et qui me laisse la plus grande impression d'incompréhension.
L'opéra
met en jeu deux personnages Lei (Barbara Hannigan) et Lui
(Georg Nigl). La seule chose que l'on comprend, mais c'était annoncé, c'est
que cela a un rapport avec Orphée et Eurydice. Il y a quelques autres
personnages, mais ils ont une fonction non déterminée.
Du point de vue musical, c'est assez heurté. On entend des effets
spéciaux électroacoustiques
, la musique étant parfois amplifiée et
spatialisée. Des micros servent à donner parfois beaucoup de volume aux
respirations saccadées des personnages. Quelques courts passages choraux
ravivent parfois mon attention.
Cette Passion, c'est à peu près comme assister à un spectacle de danse contemporaine avec une bande-son qui serait jouée en direct. Ce n'est pas exactement ce que j'attends d'un opéra, d'autant plus que la chorégraphie de Sasha Waltz ne me parle pas du tout.
Le spectacle était annoncé chanté en italien, surtitré en
français
. En arrivant dans la salle, j'ai remarqué qu'il n'y avait pas
de dispositif de surtitrage. La représentation n'a donc pas été surtitrée,
ce qui n'a évidemment pas aidé à la compréhension. En sortant, je déplie la
feuillette avec la distribution que j'avais rangée sans la lire, et j'y lis
avec effroi que c'était fait exprès :
Pour que votre attention ne soit pas dérangée et que vous puissiez pénétrer totalement dans le monde d'émotions créé par Sasha Waltz, nous avons décidé, en accord avec Pascal Dusapin, de ne pas surtitrer Passion, dont le texte en italien vous sera aisément compréhensible.
Ben voyons !
2010-10-01 02:17+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Garnier — 2010-09-30
Marco Vinco, Mustafà
Jaël Azzaretti, Elvira
Cornelia Oncioiu, Zulma
Riccardo Novaro, Haly
Lawrence Brownlee, Lindoro
Vivica Genaux, Isabella
Alessandro Corbelli, Taddeo
Denis Dubois, clavecin
Andrei Serban, mise en scène
Marina Draghici, décors et costumes
Andrei Serban, Jacques Giovanangeli, lumières
Niky Wolcz, chorégraphie
Alessandro Di Stefano, chef de chœur
Maurizio Benini, direction musicale
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
L'Italienne à Alger, Rossini
Sans les décors et dans une mise en scène improvisée, c'était mieux.
Ce soir et jeudi de la semaine dernière, je suis allé voir
L'Italienne à Alger de Rossini à l'Opéra. Jeudi 23, jour de grève,
la production s'était jouée essentiellement sans décors. Les solistes et un
tout petit nombre de figurantes évoluaient devant un rideau de scène. Le
chœur (exclusivement masculin) venait parfois se mettre en rangs au fond.
Peu de changements de costumes pour les chanteurs et quelques accessoires
tout au plus. J'ai cependant trouvé que c'était mieux qu'avec la mise en
scène originale d'Andrei Serban dans les décors et costumes de Marina
Draghici. Lors de cette version semi-scénique, on avait en effet droit à
une sorte de théâtre chanté sans trop d'effets spéciaux, la musique faisant
le spectacle, le texte réservant quelques surprises comiques. À noter
aussi, ce soir-là, il y avait eu des ratés de sur-titrage, le début étant
complètement massacré, avec un effet comique involontaire : alors que
Lindoro entrait en scène, se souvenant d'Isabella, Languir pour une
belle
, c'est le texte du personnage de Mustafà J'en ai assez de
cette femme
qui parut ! J'avais aussi pu voir de très près les
chanteurs puisqu'à l'entr'acte, j'avais migré avec une camarade d'opéra à
la loge de l'Impératrice.
Pour situer l'histoire, une Italienne, Isabella (Vivica Genaux),
débarque à Alger pour délivrer Lindoro (Lawrence Brownlee), qui a été fait
esclave par le bey Mustafà (Marco Vinco). Ce dernier n'a plus dans son
sérail de femme qui le satisfasse. En particulier, il veut se débarrasser
de son épouse Elvira (Jaël Azzaretti) en la remariant avec Lindoro
(irrésistible texte : Ma come ? Ei non è Turco. — Che importa a me ?
— Ma di Maometto la legge non permette un tal pasticcio. — Altra legge io
non ho, che il mio capriccio.
). Il demande à son capitaine Haly
(Riccardo Novaro) de lui trouver une Italienne. Isabella et un soupirant,
Taddeo (Alessandro Corbelli), sont fait prisonniers. S'ensuivent diverses
intrigues, promotions fantoches (Taddeo est fait Kaïmakan et Mustafà
Pappataci), au bout desquelles Isabella repart avec Lindoro, Elvira avec
Mustafà et Zulma (Cornelia Oncioiu), la servante d'Elvira, avec Haly.
Je disais donc que le spectacle que j'ai vu ce soir n'a vraiment rien à voir avec celui de la semaine dernière. Autant visuellement (costumes des eunuques et des naufragés, décors) que dans les mouvements sur scène des chanteurs. Certes, le but d'Andrei Serban (dont je n'avais pas trop aimé la Lucia di Lammermoor en septembre 2006) semble avoir été de faire rire, mais il en a fait un peu trop. En résumé, le film, c'est King Kong rencontre le Titanic dans un Harem. J'allais oublier, il y a aussi des chimères Rambo/Capitaine Crochet. L'intrus, c'est évidemment King Kong... On se demande bien ce qui est passé par la tête du metteur en scène.
Au début, Mustafà est représenté en émir, fantaisistement dictatorial.
On verra quelques jeunes femmes chargées de ses plaisirs, et d'autres
habillées tout en noir, voilées. Au cours de l'opéra, il se métamorphose,
change sans cesse de turban et à la fin, on oublierait presqu'on assiste à
une turquerie
. Le personnage a perdu sa colère quand il se rend
compte qu'on s'est moqué de lui en le faisant Pappataci (Mange
et tais-toi
) à grand renfort de figurants dansants habillés aux
couleurs de l'Italie (dont trois ont des costumes/accessoires comme des
excroissances représentant un Chianti, une Pizza, un lit à la mode romaine.
On lui a en effet fait accroire qu'être réduit aux trois fonctions manger,
boire, dormir étaient une grande distinction en Italie.
Vocalement, j'ai aussi préféré la représentation du 23. Lawrence Brownlee était particulièrement épatant dans son air Languir per una bella, quoiqu'il le chantât d'un bout à l'autre sans bouger d'un centimètre son pied posé sur une marque au sol ! Tous les chanteurs m'avaient fait une bonne impression. À propos de Vivica Genaux, j'apprécie la façon dont elle s'incarne visiblement dans ses personnages (que ce soit Angelina, Juno/Ino ou Isabella). J'aime comme elle chante, mais le timbre de sa voix malheureusement me déplaît. Ce soir, la plupart des chanteurs m'ont semblé en petite forme.
Le passage le plus étonnant musicalement et théâtralement de ce drame
joyeux se trouve à la fin du premier acte. Les sept personnages ont
subitement l'impression de devenir fous et ils le disent en utilisant des
onomatopées din din
, crà crà
, bum bum
ou tac
tà
. Dans le même temps, ils font des gestes mécaniques (mention
spéciale pour Lawrence Brownlee et son marteau qui fait tac tà
),
tandis qu'Elvira, qui se met à faire des vocalises en se donnant des airs
de Castafiore est interrompue par Taddeo.
La mise en scène utilise les parties excentrées du plateau... Du coup, pendant certains airs, j'ai dirigé mon regard vers la fosse pour observer la battue de Maurizio Benini et ses indications de nuance. Visiblement, quand leur bouche n'est pas vouée à leur instrument, les deux clarinettistes du fond se racontent des blagues (vu les gestes associés, cela devait avoir un rapport avec l'extravagant turban que portait Alessandro Corbelli une fois qu'il a été fait grand Kaïmakan).
Côté public, ce soir a été une drôle de soirée. Des grandes entreprises ont réservé des soupers dans le grand foyer. Les bars, et subséquemment le champagne, envahissent les environs immédiats des premières loges (où mon fond de loge à 10€ s'est transformé en deuxième rang). Plus de robes de soirée que d'ordinaire. De loin, la Rotonde du Glacier avait l'air d'être privatisée pour quelque cocktail. À l'entr'acte, j'ai préféré aller me dégourdir les jambes à l'étage du dessus...
2010-09-18 03:24+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2010-09-17
Nadine Denize, Madame Larina
Olga Guryakova, Tatiana
Alisa Kolosova, Olga
Nona Javakhidze, Filipievna
Ludovic Tézier, Eugène Onéguine
Joseph Kaiser, Lenski
Gleb Nikolski, Le Prince Grémine
Jean-Paul Fouchécourt, Monsieur Triquet
Ugo Rabec, Zaretski
Yves Cochois, Le lieutenant
Vincent Morell, Solo ténor
Orchestre, chœur de l'Opéra national de Paris
Vasily Petrenko, direction musicale
Willy Decker, mise en scène
Wolfgang Gussmann, décors et costumes
Hans Toelstede, lumières
Athol Farmer, chorégraphie
Patrick Marie Aubert, chef du chœur
Monica Waitzfelder, réalisation de la mise en scène
Евгений Онегин (Eugène Onéguine), Tchaikovski
Le programme annonce que ce n'est pas un opéra, mais des scènes
lyriques en trois actes et sept tableaux
. Pourtant, pour un spectacle
qui n'en est soi-disant pas un, je trouve que c'est un fort bel opéra que
cet Eugène Onéguine dont la production qui est reprise depuis ce
soir à l'Opéra Bastille m'a enthousiasmé.
Avant toutes choses, on ne saurait trop recommander la lecture du roman en vers de Pouchkine dont cet opéra tire son sujet (et un certain nombre de vers). J'espère avoir le temps de le relire avant de retourner voir une autre représentation...
Le spectacle ne m'a pas plu instantanément. Lors des premières minutes, il faut se faire à une langue russe chantée sans trébuchement ; les lumières sont alors comme trop souvent sombres ; le décor semi-unique recèle des pentes peinturlurées dans des tons voisins du jaune.
Mon intérêt est monté à partir du deuxième tableau, celui où Tatiana écrit sa lettre à Onéguine. Dès lors, j'ai commencé à apprécier le travail du metteur en scène Willy Decker, le chant et surtout la musique de Tchaikovsky (dirigée par Vasily Petrenko). À l'exception de la célèbre Polonaise, je ne connaissais aucun des numéros musicaux. J'ai particulièrement aimé l'orchestration qui offre une place de choix aux instruments à vents et qui se fait amusante en présentant des phrases musicales découpées en petits morceaux répartis à différents instruments qui se répondent.
La mise en scène a ceci d'intéressant qu'elle tend à se faire oublier. On est pris dans les actions, les paroles ou les pensées des personnages. C'est presque sans qu'on s'en rende compte que des accessoires (tables, chaises, etc.) se trouvent installés dans le décor. Le fait que les transitions entre les différents tableaux soient réalisées dans un flot continu d'action contribue à cette illusion. Ainsi, à peine Tatiana a-t-elle fini de rédiger sa lettre que la gouvernante vient la lever et qu'elle se retrouve en face d'Onéguine qui la repousse. Curieusement, je m'attendais à ce que l'entr'acte intervînt à la fin du deuxième acte, c'est-à-dire après la mort de Lenski, conséquence absurde de la décision d'Onéguine de l'embêter en séduisant Olga lors d'un bal. En fait, le cinquième tableau représentant le duel entre Onéguine et Lenski arrive après la pause, dans un décor dont la couleur est dorénavant grisâtre. Quand Lenski est tombé, je m'imaginais qu'Olga viendrait se lamenter sur son corps comme dans le ballet de Cranko, mais non, la femme que l'on voit arriver dans une sorte de fondu enchaîné théâtral est Tatiana, alors que se fait entendre la Polonaise. Des femmes habillées en noir entrent en scène. Sont-elles en deuil ? C'est l'impression première. En fait, sans l'avoir remarqué, nous sommes maintenant à Saint Pétersbourg, chez le vieux Prince Grémine qui a épousé Tatiana. Quelques années se sont écoulées, Onéguine a erré, il est maintenant dans la demeure d'un ami dont il ignore le mariage...
Trois chanteurs se distinguent tout particulièrement. Pour moi, la plus forte impression est venue de la basse Gleb Nikolski (Le Prince Grémine), qui n'a qu'un air, mais quel air ! Dans le rôle de Tatiana, j'ai apprécié la soprano Olga Guryakova. Hormis Ugo Rabec qui avait le rôle du témoin de Lenski, le seul chanteur que j'avais déjà entendu était Ludovic Tézier, il était comme toujours excellent. Je viens d'ailleurs de m'apercevoir que c'était l'artiste lyrique que j'avais vu et entendu le plus souvent en concert : dix fois (devant Natalie Dessay et Anna Caterina Antonacci que j'ai vues chacune huit fois).
Si j'ai été impressioné par ces trois-là, les autres sont très loin d'avoir démérité. Il y avait aussi Joseph Kaiser en Lenski (je me disais bien que sa tête me disait quelque chose : il interprétait Tamino dans la version filmée de La flûte enchantée de Kenneth Branagh), Jean-Paul Fouchécourt en irrésistible Monsieur Triquet, la jeune Alisa Kolosova (Olga), Nona Javakhidze (Filipievna) et Nadine Denize (Madame Larina).
2010-07-12 23:34+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2010-07-12
Jean-Philippe Lafont, Le garde-chasse (baryton)
Michèle Lagrange, Sa femme, la chouette (soprano)
Luca Lombardo, L'instituteur (ténor)
Gregory Reinhart, Le prêtre (basse)
Paul Gay, Harašta (baryton-basse)
Adrina Kucerova, La renarde (soprano)
Hannah Esther Minutillo, Le renard (mezzo-soprano)
Nicolas Marie, L'aubergiste (ténor)
Anne-Sophie Ducret, La femme de l'aubergiste (soprano)
Letitia Singleton, Le chien (soprano)
Elisa Cenni, Le coq, le geai (soprano)
Natacha Finette Constantin, La poule huppée (soprano)
Ghislaine Roux, Le pivert (mezzo-soprano)
Paul Crémazy, Le moustique (ténor)
Slawomir Szychowiak, Le blaireau (baryton)
Michael Schǿnwandt, direction musicale
André Engel, mise en scène
Nicky Rieti, décors
Elizabeth Neumuller, costumes
André Diot, lumières
Françoise Grès, chorégraphie
Dominique Muller, dramaturgie
Alessandro Di Stefano, chef des chœurs
Orchestre, chœur de l'Opéra national de Paris
Maîtrise des Hauts-de-Seine
Chœur d'enfants de l'Opéra national de Paris
Příhody Lišky Bystroušky (La Petite Renarde rusée), Leoš Janáček
Je reviens de la dernière représentation de La Petite Renarde rusée (Příhody Lišky Bystroušky) de Janáček à l'Opéra Bastille. J'avais déjà vu cette production d'opéra l'année dernière, dans une distribution légèrement différente.
Cela raconte l'histoire d'une renarde qui est capturée par un garde-chasse et qui lui joue des tours. Elle veut semer la zizanie dans le poulailler contre le pouvoir du coq. Les prolétaires poules étant trop bêtes, elle décide de les massacrer. Plus tard, elle rencontre un renard. À leur mariage, toutes sortes d'animaux viennent les féliciter. Au dernier acte, on découvre leur progéniture. La renarde qui pensait être plus rusée qu'un braconnier se fera tuer d'un coup de fusil. À la fin, un cycle de la nature s'est écoulé : c'est une descendante de la renarde qui vient se chamailler avec le garde-chasse. (J'ai simplifié au peu, il y a d'autres personnages humains et une multitude de personnages animaliers.)
Cette production d'opéra est très belle. Il est dommage que cela ne soit pas davantage connu : un vendeur de programmes m'a confié qu'il resterait 1400 places de libres. S'il est vrai que je ne pratique pas ce sport très souvent, je n'ai pas hésité une seule seconde à l'idée de me replacer au centre du parterre (ma place au deuxième balcon étant très excentrée). Les décors (notamment le rideau de scène), les costumes, les lumières sont magnifiques. La musique est superbe (et parfois amusante quand elle imite le bruit des animaux). Le jeu des chanteurs-comédiens (dont un certain nombre d'enfants) est très bon. Cependant, la faiblesse des voix est une très grosse déception, comme l'année dernière. Il ne s'agit que d'un problème de volume sonore. Alors que l'orchestre ne joue pas particulièrement fort, les voix des chanteurs sont le plus souvent tout à fait inaudibles. Le problème se pose autant avec Adriana Kucerova (La Renarde) cette année que l'année dernière avec Elena Tsallagova (qui m'avait aussi semblé meilleure comédienne). Jean-Philippe Lafont (Le Garde-chasse), appréciable aussi par sa présence scénique, est un des rares à arriver à se faire entendre.
Pour moi, c'était le dernier spectacle avant les vacances. Cette année, l'Opéra de Paris aura été mon plus grand pourvoyeur de divertissement : trente-huit spectacles !
2010-07-11 00:40+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Garnier — 2010-07-10
Javier Camarena, Giacomo V (Uberto di Snowdon)
Simon Orfila, Duglas d'Angus
Colin Lee, Rodrigo di Dhu
Karine Deshayes, Elena
Daniela Barcellona, Malcolm Groeme
Diana Axentii, Albina
Jason Bridges, Serano
Philippe Talbot, Bertram
Lluís Pasqual, mise en scène
Ezio Frigerio, décors
Franca Squarciapino, costumes
Vinicio Cheli, lumières
Montse Colomé, chorégraphie
Alessandro Di Stefano, chef du chœur
Roberto Abbado, direction musicale
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
La donna del lago, Rossini
Avant la représentation précédente de La Donna del
lago, j'étais passé à la billeterie afin de m'acheter une place à 7€
pour la dernière représentation. Le billet comportait la mention Scène
non visible
, ce qui était heureusement inexact. Depuis la plus mauvaise
place de cette première loge 14, je voyais un petit coin de la scène, entre
les têtes de devant et d'en biais. J'ai donc passé l'essentiel du premier
acte en position debout, une alternative à la chaise qui me permettait de
voir bien.
À l'entr'acte, je rencontre une amie de files d'attente qui m'informe qu'il reste un peu de place à la loge impératrice... J'ai pu m'y installer confortablement sur un coin de banquette. On y est invraisemblablement proche des chanteurs. Dans le champ de vision, j'avais aussi un peu des coulisses, ce qui m'a permis d'éclaircir le mystère de la musique jouée des coulisses. Ce qui m'avait surpris était que le chef arrêtait ses mouvements quand elle se faisait entendre. Depuis ma place, j'ai pu observer furtivement un groupe de musiciens qui semblait obéir aux mouvements d'une autre personne physique. Pendant les chœurs, je voyais aussi des bras s'agiter dans un coin...
Lors de cette dernière représentation, un petit groupe de fans de Karine Deshayes était dans cette loge impératrice. Lors des saluts, l'un d'entre eux lui a même jeté un bouquet de fleurs !
2010-07-08 01:22+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Garnier — 2010-07-07
Javier Camarena, Giacomo V (Uberto di Snowdon)
Simon Orfila, Duglas d'Angus
Colin Lee, Rodrigo di Dhu
Karine Deshayes, Elena
Daniela Barcellona, Malcolm Groeme
Diana Axentii, Albina
Jason Bridges, Serano
Philippe Talbot, Bertram
Lluís Pasqual, mise en scène
Ezio Frigerio, décors
Franca Squarciapino, costumes
Vinicio Cheli, lumières
Montse Colomé, chorégraphie
Alessandro Di Stefano, chef du chœur
Roberto Abbado, direction musicale
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
La donna del lago, Rossini
Neuvième représentation de La Dame du lac à l'Opéra Garnier. J'y suis allé une troisième fois après les représentations des 14 et 21 juin, non pas pour apprécier encore davantage la mise en scène, mais pour entendre Karine Deshayes et Javier Camarena dans les rôles d'Elena et Giacomo/Uberto.
Cette fois-ci, j'ai un deuxième rang de troisièmes loges de côté impair. C'est un peu excentré, mais pas trop. Je vois la moitié droite de la scène.
Je retrouve les lumières vraiment lamentables de ce spectacle. On n'y
voit rien. J'avais noté la non-différentiation visuelle de Rodrigo du
personnage secondaire Serano
. Comme Javier Camarena apparaît barbu
comme les deux autres dans cette deuxième série de représentations, il y a
en fait trois personnages (Giacomo, Rodrigo et Serano) que ni les costumes
ni la pilosité ne distinguent clairement (Giacomo porte souvent une cape
bleuâtre, mais ce critère n'est pas infaillible).
J'ai été très content de réentendre Javier Camarena (déjà entendu dans le rôle d'Elvino dans La Sonnambula et dans celui du conte d'Almaviva dans Il Barbiere di Siviglia). Par ailleurs, c'était la première fois que j'entendais Karine Deshayes, qui si elle ne m'a pas autant impressionné que Joyce DiDonato, m'a cependant fait une excellente impression. Je n'ai pas regretté de m'être levé pour mieux voir la dernière scène qui se passe à la cour du roi Giacomo. Le trio du deuxième acte entre Javier Camarena, Karine Deshayes et Colin Lee a été un autre moment fort de la soirée, de même que l'air de Daniela Barcellona au deuxième acte.
À part ça, je ne sais pas ce qui s'est passé, mais au cours du premier acte (1h40), la loge où je me trouvais (j'étais au deuxième rang, avec deux néerlandophones devant) a vu paraître trois fois des personnes seules ou accompagnées venues voir si on y voyait quelque chose. J'aimerais bien qu'on m'explique pourquoi on laisse rentrer ainsi des gens n'importe quand et n'importe comment. Si je trouve un peu pénible qu'il faille se faire ouvrir sa loge avant le spectacle, qu'elles soient fermées de l'extérieur, cela devrait au moins permettre de n'être plus dérangé une fois le spectacle commencé. Apparemment, je me trompais.
Il y a un dernier mystère à propos de cette production. Au cours du
deuxième acte, arrivée au palais du roi, Elena s'écrie Quel beau
concert
tandis qu'elle entend de la musique, et en particulier la voix
de Giacomo, qui vient des coulisses. Ce que je me demande, c'est si la
musique que l'on entend est pré-enregistrée. En effet, lors des saluts, on
ne voit pas de musiciens de scène paraître, et surtout, pendant ces phrases
musicales, le chef d'orchestre s'arrête de diriger, alors qu'il pourrait
très bien diriger des musiciens cachés via un écran de
contrôle.
Pendant l'entr'acte, il m'a semblé que plusieurs portes qui sont d'ordinaires fermées étaient ouvertes. J'ai pu déambuler dans une zone dont j'avais remarqué la forme arrondie depuis l'extérieur, côté rue Halévy, mais sans jamais pouvoir y entrer : la rotonde du Glacier, qui abrite notamment des bustes et des tapisseries.
2010-07-01 03:00+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Théâtre des Champs-Élysées — 2010-06-30
Richard Croft, Jupiter
Peter Rose, Cadmus, Somnus
Danielle de Niese, Semele
Vivica Genaux, Juno, Ino
Sébastien Droy, Apollo
Jaël Azzaretti, Iris
Stephen Wallace, Athamas
Claire Debono, Cupid
Christophe Rousset, direction musicale
David McVicar, mise en scène
Tanya McCallin, décors
Brigitte Reiffenstuel, costumes
Paule Constable, lumières
Andrew George, chorégraphie
Les Talens Lyriques
Chœur du Théâtre des Champs-Élysées
Semele, Händel.
Je reviens de la première de la reprise de Semele de Händel au
TCE. Ce n'est que le deuxième opéra de ce compositeur que je voie après
Agrippina en 2003. De ce compositeur, je suis en effet plus
accoutumé aux oratorios et œuvres assimilées : Messiah (5 fois),
Israel in Egypt, Athalia, Ode for Saint Cecilia's
Day, Dixit Dominus, Acis and Galatea,
Solomon. À vrai dire, le programme annonce qu'il s'agit d'un opéra
en trois actes à la manière d'un oratorio
. Cela se fait très
lourdement sentir pendant le premier acte où il ne se passe essentiellement
rien. Le contexte de l'opéra est que Sémélé (Danielle de Niese) est forcée
par son père Cadmus (Peter Rose) à épouser Athamas (Stephen Wallace) qui
est convoité par sa sœur Ino (Vivica Genaux). La cérémonie est interrompue.
On apprend que Jupiter (Richard Croft) a pris l'apparence d'un aigle pour
enlever Sémélé. Jusque là, les personnages se sont comportés comme des
autistes, en particulier Athamas qui mésinterprète les réactions de Sémélé
et Ino. Ils s'écoutent chanter et restent impassibles aux paroles des
autres. C'est déroutant. À ce stade, je me demande bien pourquoi on appelle
ça opéra
!
Jusque là, j'aurais été assez déçu s'il n'y avait pas eu le plaisir de l'oreille (et aussi des yeux, il faut bien le dire) pour l'air The morning lark to mine accords his note interprété par Danielle de Niese seule devant un rideau et mimant de ses mains les mouvements d'une alouette. Viendra ensuite le superbe récitatif accompagné de Peter Rose Wing'd with our fears and pious haste.
Je commence à me dire que l'on entre véritablement dans l'opéra à la toute fin du premier acte quand Claire Debono chante dans son air Endless pleasure, endless love les plaisirs célestes de Sémélé.
Viendront ensuite les deuxième et troisième acte, toujours dans le même décors, dont le rond central a été incliné et dont l'éclairage a changé la couleur. Junon (Vivica Genaux, qui interprète deux rôles) et Iris (Jaël Azzaretti) conspirent contre Sémélé. Pour rejoindre ses appartements, il faut endormir ses gardes. C'est là qu'intervient Somnus, le Sommeil, superbement interprété par la basse Peter Rose (qui joue aussi deux rôles), qui s'endormirait bien tout en chantant ses airs si Iris et Junon baissaient leur vigilance. Ayant pris l'apparence d'Ino (l'illusion est parfaite vu que Vivica Genaux joue les deux rôles, quoiqu'avec des maquillages différents), Junon flatte les envies de Sémélé qui se verrait bien immortelle. Qu'elle se mire dans un miroir embellissant (Myself I shall adore, voir une interprétation par Carolyn Sampson du tube de cet opéra) et qu'elle demande à Jupiter de se montrer sous sa forme divine. Ce que Sémélé découvrira trop tard, c'est qu'elle ne peut être que réduite en cendres dans l'opération.
De retour au monde humain, Ino apprend aux autres que par la volonté de Jupiter, c'est elle qui doit épouser Athamas tandis qu'Apollon (Sébastien Droy) descend annoncer que des cendres de Sémélé et de la cuisse de Jupiter naîtra Bacchus. Le chœur du TCE qui s'est montré excellent se lance alors dans une bacchanale...
Du côté des voix, ma seule déception vient du contre-ténor Stephen Wallace, dont la voix ne monte guère jusqu'au dernier rang du deuxième balcon et qui n'est pas très convaincant scéniquement parlant. On ne l'entend que pendant le premier acte et à la fin du troisième. Les autres m'ont tous fait une très bonne impression. Même si elle ne chante pas beaucoup, Claire Debono est beaucoup présente sur scène depuis la fin du premier acte jusqu'au bout : elle tient une canne et avance à tâtons, et quand Sémélé s'abstente un moment, Jupiter en profite pour l'assaillir...
Du point de vue de la mise en scène, en dehors du premier acte, le seul passage qui m'a un peu déplu ou en tout cas beaucoup étonné est la mort de Sémélé ou plutôt l'apparition que j'imaginais indiscutablement spectaculaire de Jupiter. Les éclairs interrompant le mariage au premier acte étaient beaucoup plus impressionnants. Là, on le voit dans le même habit de nuit quelque peu ridicule et Sémélé descend dans une trappe dont on voit sortir des vapeurs.
Globalement, je suis assez enthousiasmé par ce spectacle, qui doit aussi beaucoup à la musique interprétée par Les Talens Lyriques dirigés par Christophe Rousset. Le public a d'ailleurs applaudi chaleureusement tous les artistes, y compris le metteur en scène David McVicar (la dernière fois que je l'avais vu, en 2004, sa mise en scène du Couronnement de Poppée avait reçu un accueil assez houleux).
2010-06-28 11:32+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Comique — 2010-06-27
Phillip Addis, Pelléas
Karen Vourc'h, Mélisande
Marc Barrard, Golaud
Markus Hollop, Arkel
Nathalie Stutzmann, Geneviève
Dima Bawab, Yniold
Luc Bertin-Hugault, Un médecin
Pierrick Boisseau, Un berger
Max Delor, Agnès Aubé, Martine Demaret, Sophie Dumont, Figurants
Chœur accentus
Orchestre Révolutionnaire et Romantique
Sir John Eliot Gardiner, direction musicale
Stéphane Braunschweig, mise en scène et scénographie
Thibault Vancraenenbroeck, costumes
Marion Hewlett, lumières
Pieter Jelle de Boer, chef du chœur
Pelléas et Mélisande, Claude Debussy
Dernier passage à l'Opéra Comique de la saison et avant longtemps. Il fait horriblement chaud à l'intérieur de la salle. Des éventails en plastique sont cependant gracieusement mis à la disposition du public par le cabinat d'avocats Orrick Rambaud Martel.
Les sur-titres ne sont pas visibles de ma place en loge de face ; regarder les écrans latéraux impose de détourner le regard de la scène. Ce n'est sans doute pas seulement que j'aie visionné un Pelléas et Mélisande en DVD au cours de la semaine si je n'éprouve aucun besoin de lire le texte au fur et à mesure qu'il est prononcé par les chanteurs. Quel choc ! Il s'agit du premier opéra à l'écoute duquel on n'a aucun effort à faire pour entendre ce que disent les interprètes (auquel le compositeur, Debussy, demandait lors de la création d'oublier qu'ils étaient chanteurs). C'est en effet véritablement à du théâtre mis en musique que l'on assiste.
En très court, Golaud (Marc Barrard) épouse Mélisande (Karen Vourc'h) après l'avoir rencontrée dans une forêt où ils se sont tous les deux perdus. Quand ils sont arrivés chez Arkel (Markus Hollop), le grand-père de Golaud, un amour naît entre Mélisande et Pelléas (Phillip Addis), le demi-frère de Golaud. Mais, ils mourront tous les deux : Pelléas au quatrième acte quand Golaud les aura surpris, Mélisande au cinquième après qu'elle aura mis au monde une fille dont la paternité est douteuse.
Les décors existent en deux versions : en grand format, et en petit
format, façon jouet pour le petit Yniold. Ils sont constitués de sortes
d'anneaux de Saturne en pente et excentrés. Au centre est inséré soit un
phare soit rien. C'est très cohérent avec le livret qui évoque la lampe
au sommet de la tour qui regarde la mer
que Golaud demande dans une
lettre, lue par Geneviève (Nathalie Stutzmann), qu'on allume pour lui afin
qu'il sache s'il est bienvenu ou non (il a désobéi en épousant Mélisande).
La tour
apparaît ensuite plusieurs fois dans le livret. C'est aussi
à travers une fenêtre de ce phare qu'à la fin du troisième acte, Yniold
(Dima Bawab), installé(e) sur les épaules de Golaud, espionnera à sa
demande ce que font Pelléas et Mélisande à l'intérieur de la chambre. C'est
avec une grande surprise qu'on découvre au deuxième acte, dans la scène de
la fontaine (où en jouant avec Pelléas, Mélisande égare son anneau de
mariage), que cette fontaine est un trou au milieu de ce même dispositif
scénique en pente. Golaud, qui s'est blessé à la chasse pendant ce temps,
se retrouve impuissant, les bras bandés au torse, quand il remarque que
Mélisande a perdu son anneau. Quelques accessoires (fauteuil roulant,
perfusion, couveuse) conformes à l'environnement hospitalier contemporain
sont utilisés pour représenter cette blessure de Golaud, mais aussi
l'infirmité d'Arkel et plus tard la maternité de Mélisande. Par ailleurs,
le fond et les côtés de la scène sont constitués de grands volets, dont une
des rares ouvertures possibles est très en hauteur. Cela appuie le
sentiment de claustration et de manque de lumière qu'éprouve Mélisande. Les
lumières de ce spectacle (Marion Hewlett) sont d'ailleurs excellentes
(alors même que l'univers est sombre, on a trouvé le moyen de varier
l'éclairage avec cette contrainte tout en faisant en sorte que je distingue
toujours très bien les chanteurs, alors même que j'ai oublié de prendre mes
jumelles).
Tout est fait dans cette mise en scène de Stéphane Braunschweig pour
rendre l'histoire intelligible ; c'est très réussi. Le seul aspect qui
m'ait un peu déplu est l'utilisation peut-être excessive du procédé
théâtral consistant à faire regarder les personnages vers des objets
fictifs qui ne sont pas dans le décor (il doit y avoir un mot grec savant
pour dire ça, mais je ne m'en souviens plus). C'est d'ailleurs ainsi que
commence l'opéra, alors que Mélisande et Golaud se rencontrent devant le
rideau de scène baissé. Golaud remarque un objet qui brille ainsi au
fond de l'eau
. Il s'agit de la couronne de Mélisande. On n'en saura pas
plus. Les deux personnages regardent alors vers la fosse d'orchestre. C'est
à la limite de me faire un peu peur pour la suite dans le sens d'une mise
en image conceptuelle
, mais pour ce passage-là, c'est une idée très
bien trouvée. À d'autres moments, je serai un peu moins convaincu. Cela
dit, alors même que cette production respecte presqu'autant que possible le
texte, il est raisonnable de considérer que l'on peut se passer de quelques
éléments de décor que le texte ne mentionne qu'une seule fois.
Cet opéra est tellement différent de tous les autres qu'il est difficile d'avoir une opinion sur les voix. Le fait que les sur-titres m'aient semblé tout à fait superflus et que je ne me sois pas du tout ennuyé est le signe que cela devait être plus que bien. Je dirai juste que Philip Addis (Pelléas) était étincelant et que Karen Vourc'h rendait bien la fragilité juvénile de Mélisande.
D'après le programme, cela devait durer 2h50 entr'acte comprise. Compter
plutôt 3h30. Si la musique ne s'arrête jamais à l'intérieur d'un acte, les
coupures entre les cinq actes étaient un peu interminables. Peut-être que
les instruments de l'Orchestre Révolutionnaire et Romantique de John Eliot
Gardiner devaient absolument être réaccordés toutes les demi-heures ? En
tout cas, je n'ai pas été frappé par la continuité scénique
qui
était annoncée. Si le découpage des trois premiers actes correspond sans
doute à celui de la pièce de Maurice Maeterlinck, les nombreux changements
de décors à l'intérieur de chaque acte font que s'il n'y avait pas de pause
à la fin du premier et du deuxième acte, on ne se rendrait pas compte de ce
découpage interne et la continuité serait plus frappante.
2010-06-22 02:37+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Garnier — 2010-06-21
Juan Diego Flórez, Giacomo V (Uberto di Snowdon)
Simon Orfila, Duglas d'Angus
Colin Lee, Rodrigo di Dhu
Joyce DiDonato, Elena
Daniela Barcellona, Malcolm Groeme
Diana Axentii, Albina
Jason Bridges, Serano
Philippe Talbot, Bertram
Lluís Pasqual, mise en scène
Ezio Frigerio, décors
Franca Squarciapino, costumes
Vinicio Cheli, lumières
Montse Colomé, chorégraphie
Alessandro Di Stefano, chef du chœur
Roberto Abbado, direction musicale
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
La donna del lago, Rossini
Troisième représentation de La donna del lago à Garnier, la deuxième à laquelle j'assiste après la première.
Au guichet, la semaine dernière, un panneau annonçait que toutes les
dates de ce spectacle étaient complètes. C'était pour décourager ceux qui
n'étaient pas venus à Opéra exprès pour tenter le coup, les autres auront
essayé d'amadouer le guichetier Il ne vous reste vraiment plus rien pour
La Dame du lac
. Il s'avèra que tiens, donc, curieusement, on
en a encore, et même qu'il y avait l'embarras du choix sur les dates
possibles. (Lors de la représentation, je n'ai pas pensé à regarder si les
stalles sans visibilité avaient trouvé preneurs.)
En arrivant à la station Auber, j'entends une voix chanter, plutôt pas mal du tout, l'air de Violetta Attendo, attendo du troisième acte de La Traviata. Je pense à sortir exceptionnellement une pièce quand je me rends compte qu'il n'y a pas de sébile et que c'est aujourd'hui la Fête de la Musique.
Ma place à 21€ en fond de premières loges (de trois-quarts) a vu sa valeur augmenter de 233% quand à 19h31, je me suis dit que le premier rang de la loge semblait rester vacant et qu'il convenait que j'invitasse les deux spectatrices qui n'osaient pas le faire d'elles-mêmes d'avancer d'un rang, afin que je pusse faire de même. Une balletomane japonaise nous a rejoint et a été ravie de voir la qualité de sa place enfler dans les mêmes proportions que la mienne.
Je n'ai pas grand'chose à ajouter à ce que j'ai déjà dit sur cette production. Cela fait peut être un peu moins mal à voir la deuxième fois. Placé côté jardin (impair) plutôt que côté cour, je peux observer ce que je n'avais pas pu voir :
Quelle armure vois-je !;
Du côté des voix, je suis toujours enchanté par les trois mêmes : Joyce DiDonato, Juan Diego Flórez, Daniela Barcellona. Dans le rôle de Rodrigo, Colin Lee se donne manifestement à fond, mais sa voix est vraiment trop distordue quand il monte dans les aigus pour que ce soit agréable à écouter (cela ressemble alors plus à de la vocalise qu'à du chant, je ne sais pas ce que la partition dit que cela doit être).
Contrairement à ceux de la première, et paraît-il de la deuxième, les spectateurs de cette troisième représentation n'ont hué personne.
2010-06-15 03:08+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Garnier — 2010-06-14
Juan Diego Flórez, Giacomo V (Uberto di Snowdon)
Simon Orfila, Duglas d'Angus
Colin Lee, Rodrigo di Dhu
Joyce DiDonato, Elena
Daniela Barcellona, Malcolm Groeme
Diana Axentii, Albina
Jason Bridges, Serano
Philippe Talbot, Bertram
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
Lluís Pasqual, mise en scène
Ezio Frigerio, décors
Franca Squarciapino, costumes
Vinicio Cheli, lumières
Montse Colomé, chorégraphie
Alessandro Di Stefano, chef du chœur
Roberto Abbado, direction musicale
La donna del lago, Rossini
La Dame du lac était avec La Somnambule un des spectacles d'opéra de la saison que j'attendais le plus. Par chance, je me suis vu attribuer un ticket pour la première, le jour où cet opéra de Rossini entre au répertoire de l'Opéra de Paris. Ma place est cependant excentrée : troisième loge nº6, juste à côté d'un pilier, vue plongeante sur la fosse d'orchestre. Les places sans visibilité de derrière sont occupées par des touristes japonaises, dont les contorsions pour essayer d'y voir quelque chose font un peu de bruit. Puis, plongé dans l'opéra, je n'y fait plus attention. En fait, elles se sont éclipsées au cours du premier acte. Grave erreur, car c'était bien un spectacle d'opéra où les voix étaient tellement belles qu'il n'y aurait pas grand dommage à se contenter d'entendre le spectacle, sa partie visuelle étant par ailleurs assez ringarde...
Le décor principal représente une porte avec une voûte étroite donnant sur des marches descendant sur ce qu'on imagine être le lac Katrine. (La vue d'ensemble ressemble très vaguement à celle de la porte Tilon-ki-Pol à Jaisalmer qui donne sur un lac de bien moindre étendue que celui du poème de Walter Scott.) Le décor en deux parties peut s'ouvrir par le milieu. Il renferme des galeries sur plusieurs étages, des escaliers. Au niveau le plus bas, des portes permettant au chœur d'entrer. Mon point de vue ne me permettait pas de voir le décor du fond de la scène. Les costumes des protagonistes principaux ont l'air recouverts de dorures, on dirait des brocarts.
Voilà pour les côtés positifs du visuel. Le reste fait assez mal à voir.
Des projections vidéo sur l'ovale délimité par les marches figurent les
eaux ondulantes du lac. Une trappe située au centre de la scène permet de
faire monter et descendre des accessoires et des protagonistes. On verra
ainsi ce qui est censé représenter la vue de face d'une barque apparaître.
Pourquoi pas, mais très vite, on comprend que le but n'est pas de créer
l'illusion d'une action réaliste vu qu'un personnage s'éloignera sans
hésitation de la barque pour marcher sur l'eau. Cette trappe sera beaucoup
utilisée, à des fins donc essentiellement symboliques, telle une apparition
mystérieuse d'une harpe vers la fin du deuxième acte. Ce n'était pas un
signe que l'action se passait en Irlande (on est en Écosse), mais cela
annonçeait un numéro musical où la harpe aurait une grande importance (la
place de la harpiste était restée vide jusque là), et était probablement
aussi une référence au premier mot harp
du poème.
Avant d'aller plus loin, un bref aperçu de l'histoire. Le roi James V d'Écosse se perd lors d'une partie de chasse. Enfin, c'est ce qu'il feint lorsqu'il aperçoit Elena, la fille de Douglas, dont il est immédiatement épris. Incognito, il prend le nom d'Uberto. Il ignore qu'il a deux rivaux : Roderick, qui mène une rébellion contre le roi et qui s'est fait promettre la main d'Elena par son père, et Malcolm qui a l'avantage d'être aimé d'Elena en retour. À la fin du premier acte, Elena ne semble pas très enthousiaste à l'idée de se marier avec Roderick, alors qu'une bataille se prépare contre les troupes royale. Au deuxième acte, alors qu'Elena est réfugiée dans un lieu isolé pendant les combats, le roi, toujours déguisé, vient déclarer son amour. Elle lui répond qu'elle en aime un autre. Alors, Roderick débarque et se montre très jaloux. Un duel entre Roderick et Uberto aura lieu ; Roderick sera tué. Pendant ce temps, Douglas a été vaincu. Elena vient retrouver Uberto pour lui demander de l'introduire auprès du roi pourqu'elle obtienne la grâce de son père. Elle est évidemment très surprise quand elle comprend qu'Uberto est le roi et très heureuse quand il pardonne tout le monde pour la rébellion et accorde à Malcolm d'épouser Elena.
Si aucun des chanteurs n'a démérité, trois d'entre eux ont été absolument magnifiques : Joyce DiDonato (Elena), Juan Diego Flórez (Giacomo V/Uberto), Daniela Barcellona (Malcolm). Dans tous les opéras que j'ai vus avec Joyce DiDonato, il y a toujours un rôle travesti (Romeo, Idamante). Pour une fois, elle avait un rôle féminin, et quel rôle ! Elle a de nombreux passages très virtuoses tout au long de l'opéra, et le final est absolument incroyable, effervescent. Pendant une bonne partie du premier acte, il y a des échanges de virtuosités avec Juan Diego Flórez que j'entendais pour la première fois et dont j'ai aimé la voix chaleureuse. Dans le rôle travesti, Daniela Barcellona montre un timbre de voix vraiment agréable. J'ai cru que les applaudissements après son air au premier acte ne s'arrêteraient jamais !
Enfin, quelques mots sur la mise en scène de Lluís Pasqual. J'ai trouvé
que c'était principalement de l'opéra à l'ancienne, avec des chanteurs
faisant face au parterre, également répartis sur la largeur de la scène.
Cela ressemble un peu trop à un opéra en version de concert. D'ailleurs,
les membres masculins du chœur étaient en smoking... alors
qu'a priori, ce sont des guerriers. Il y avait bien une poignée de
figurants muets en habits de guerre au premier plan, mais c'était
essentiellement décoratif. De même, on verra quelques danseurs mettre un
peu d'animation là-dedans, mais on se demande bien pourquoi. Autre
curiosité, en regardant le spectacle d'un œil distrait, on pourrait penser
que Joyce DiDonato a des dons d'ubiquité ou de téléportation. On voit en
effet à plusieurs reprises apparaître sur scène, en particulier dans les
galeries, une femme portant un costume très-semblable au sien et ce, un
instant après que la chanteuse a descendu par la trappe, ou alors même
qu'elle est aussi sur scène. Il me semble qu'Uberto avait aussi un double,
mais je ne suis pas très sûr. La façon dont se termine le duo entre
Roderick et Uberto (arbitré par Elena qui défaille) n'est pas non plus
convaincante. Ils se défient en duel. On donne une épée à Uberto pour qu'il
puisse se défendre, et à la fin de l'air, ils courent tous les deux vers le
fond de la scène pour se mettre à l'abri de nos regards, peut-être par
souci de bienséance ? Je n'ai pas très bien vu ce qui se passait ensuite au
fond de la scène quand les guerriers de Douglas est mise en déroute. Une
dernière source d'amusement : quand les bardes chantent à la fin du premier
acte Un rayon annonciateur d'une immense splendeur montre déjà le
chemin...
, on voit un lustre descendre des cintres. Ce lustre, et
d'autres, reparaîtront dans la scène finale dans le palais du roi.
Bref, je ne suis pas du tout convaincu par cette mise en scène, qui s'est fait huer lors des saluts. Néanmoins, à part les quelques curiosités susceptibles d'engendrer quelque distraction, rien n'empêche vraiment de ce concentrer sur le chant et la musique, et de les apprécier. C'est déjà ça.
2010-06-08 02:17+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Théâtre des Champs-Élysées — 2010-06-07
Nicolas Rivenq, Don Giovanni
François Lis, Il Commendatore
Sandrine Piau, Donna Anna
Donát Havár, Don Ottavio
Véronique Gens, Donna Elvira
Laurent Naouri, Leporello
Christian Helmer, Masetto
Ingrid Perruche, Zerlina
Jean-Claude Malgoire, direction musicale
Pierre Constant, mise en scène
Grégory Voillemet, assistant à la mise en scène
Roberto Platé, décors
Jacques Rouveyrollis, lumières
Jacques Schmidt, Emmanuel Peduzzi, costumes
Béatrice Massin, chorégraphie
Ensemble vocal de l'Atelier Lyrique de Tourcoing
La Grande Écurie et la Chambre du Roy
Don Giovanni, Mozart.
Je reviens du TCE où se jouait la première de la reprise de la production de Don Giovanni de Pierre Constant, décor unique de Roberto Platé, direction musicale par Jean-Claude Malgoire de La Grande Écurie et la Chambre du Roy, avec l'Ensemble vocal de l'Atelier Lyrique de Tourcoing et quelques solistes enthousiasmants.
N'étant pas un très grand admirateur de Mozart, je ne vais que très-occasionnellement voir ses opéras. Don Giovanni n'est que le troisième après Die Zauberflöte et Idomeneo.
Je profite pour l'avant-dernière fois du placement que j'ai eu la plupart du temps au TCE cette année : au dernier rang du deuxième balcon, plein centre. Le décor unique, qui est apparemment utilisé pour les trois opéras de la trilogie Da Ponte présentée ces jours-ci, est multi-usages. Une porte escamotable au fond, des ouvertures sur les côtés, une fenêtre, un dalle au centre de la scène permettant d'accueillir la tombe d'Il Commendatore (François Lis). L'opéra est situé à Séville. Les costumes y font penser, sans pour autant que ce fait passe écrase tout.
À part ça, l'action est rondement bien menée dans cet opéra... Don Giovanni (Nicolas Rivenq) veut toutes les femmes. Il en convoite au moins quatre : Donna Anna (Sandrine Piau) et sa servante, Donna Elvira (Véronique Gens), Zerlina (Ingrid Perruche). Leporello (Laurent Naouri) participe, quelque peu désabusé, aux intrigues ourdies par son maître.
Hormis Laurent Naouri et François Lis que j'avais déjà vus dans ces conditions, c'est la première fois que je voyais les autres dans un opéra en version scénique. Si j'ai aimé les prestations de tous ces chanteurs, j'ai été tout particulièrement été impressionné par les qualités de Véronique Gens, son chant, son attitude (malgré l'austère robe noire qu'elle porte à la fin, peu pratique pour venir saluer...). Elle joue vraiment bien celle qui, malgré toutes les tromperies, voudra toujours croire que Don Giovanni peut l'aimer sincèrement. Sandrine Piau me fait aussi une très bonne impression, notamment dans son grand air au deuxième acte. Ingrid Perruche incarne la belle paysanne pas si naïve que ça et qui pourtant échangerait bien des faveurs contre une promotion sociale.
Le duo de comédiens-chanteurs de Laurent Naouri et Nicolas Rivenq est très vivant. En vérité, leurs personnages conduisent l'action de tous les autres et ces artistes-là le font très bien, et parfois de façon très spectaculaire.
Ce ne peut-être pas mon spectacle lyrique préféré de la saison (c'est qu'il y a de la concurrence avec notamment La Bohème, Platée, The Fairy Queen, Norma, La Sonnambula, La Cenerentola, Les Contes d'Hoffmann), mais je trouve qu'il est quand même sacrément bien...
2010-06-06 02:33+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2010-06-05
Robert Dean Smith, Siegmund
Günther Groissböck, Hunding
Thomas Johannes Mayer, Wotan
Ricarda Merbeth, Sieglinde
Katarina Dalayman, Brünnhilde
Yvonne Naef, Fricka
Marjorie Owens, Gerhilde
Gertrud Wittinger, Ortlinde
Silvia Hablowetz, Waltraute
Wiebke Lehmkuhl, Schwertleite
Barbara Morihien, Helmwige
Helene Ranada, Siegrune
Nicole Piccolomini, Grumgerde
Atala Schöck, Rossweisse
Philippe Jordan, direction musicale
Günter Krämer, mise en scène
Jürgen Bäckmann, décors
Falk Bauer, costumes
Diego Leetz, lumières
Otto Pichler, mouvements chorégraphiques
Orchestre de l'Opéra national de Paris
Die Walküre, Wagner
Avant de passer à Bastille (où les forces de l'ordre occupent les marches de l'Opéra, les sans-papiers étant sur le trottoir), je suis allé faire un dernier tour à l'exposition Miniatures et peintures indiennes à la BnF (dernier jour : ce dimanche).
À 18h, début de la deuxième représentation de La Walkyrie dans la nouvelle production de Günter Krämer. Les commentaires sur la mise en scène à propos de la première étaient très-unanimement négatifs. La mise en scène et les décors ne m'ont pas du tout plu. Il faut attendre la toute fin de l'opéra pour voir une belle image, encore qu'elle soit gâchée par un dernier soubresaut de la mise en scène...
Sieglinde a été contrainte d'épouser Hunding. Un jour, elle accueille un homme, qu'elle va aimer et qui va s'avérer être son frère jumeau Siegmund. Hunding est le premier à remarquer la ressemblance entre les deux. Il défie l'importun en duel. Les règles de l'hospitalité exigent que les hostilités ne commencent que le lendemain. À la fin du premier acte se trouve mon passage préféré de cet opéra : le long duo entre Sieglinde et Siegmund. Elle lui révèle l'existence d'une épée (qui sera nommée Nothung), durablement plantée dans un arbre, mais que personne n'a jusques à maintenant réussi à enlever. Cette arme est celle qui devrait permettre à Siegmund de vaincre Hunding.
Au Walhalla, Wotan confie à la Walkyrie Brünnhilde la mission d'aider Siegmund dans ce combat, mais son épouse Fricka le force à changer son ordre : Siegmund et Sieglinde ont bafoué le lien sacré du mariage dont elle est la protectrice (que Wotan, qui tel Jupiter ou Zeus est le premier à enfreindre). En expliquant sa nouvelle mission à Brünnhilde, il fait au passage un résumé du prologue (L'Or du Rhin). Brünnhilde vient expliquer à Siegmund qu'il va mourir parce que Wotan a désenchanté l'épée. Abasourdie par son attachement à Sieglinde, elle décide de les aider (respectant ainsi l'ordre que lui avait donné Wotan avant qu'il ne change d'avis). Siegmund sera effectivement tué au combat contre Hunding (Wotan étant intervenu pour briser l'épée), mais Brünnhilde s'en est allée avec Sieglinde.
Le troisième acte commence avec la Chevauchée des Walkyries. Dans cette production, les Walkyries purifient et raniment des guerriers morts au combat (ils sont nus et ensanglantés). Brünnhilde les rejoint avec Sieglinde. Elle demande de l'aide pour que Sieglinde puisse s'enfuir. Comme il s'agit d'aller contre les volontés du père (Wotan), aucune ne veut donner son cheval. Quand Brünnhilde annonce que Sieglinde est enceinte, l'opposition se fait un tout petit peu moins forte : on indique à Sieglinde dans quelle direction elle doit s'en aller, vite avant que Wotan n'arrive. Celui-ci maudit Brünnhilde. Elle est déchue de son statut de Walkyrie. Il va l'endormir et elle devra épouser et obéir à celui qui la découvrira. En insistant beaucoup, Brünnhilde arrive à obtenir que celui-là ne soit pas un lâche : son sommeil sera gardé par les flammes.
J'ai particulièrement aimé les prestations vocales de Ricarda Merbeth
(Sieglinde) et Robert Dean Smith (Siegmund), notamment à la fin du premier
acte. Dans les autres rôles principaux, j'ai été impressionné par Katarina
Dalayman (Brünnhilde) et Thomas Johannes Mayer (Wotan). Il y avait aussi
Yvonne Naef (Fricka), Günther Groissböck (Hunding) et huit Walkyries. Le
chef d'orchestre Philippe Jordan et l'orchestre de l'Opéra de Paris ont été
applaudis comme jamais (en fait, des Bravo
se sont fait entendre
avant-même que la musique ait commencé).
Si musicalement, c'était très beau, visuellement, cela l'était beaucoup moins. Cela commence par une scène de massacre (où des guerriers s'acharnent particulièrement sur une femme) pendant l'ouverture. Les morts vont rester là pendant tout le premier acte. Autant je peux comprendre qu'on ait envie d'évoquer la violence passée entre les différents clans qui s'affrontent, autant cela fait bizarre de voir par exemple Sieglinde enjamber des cadavres. En outre, à titre d'exemple d'une des manières les plus grossières qui se puissent concevoir pour desservir la musique, on verra, et surtout on entendra, dans la deuxième moitié de ce premier acte de l'eau ruisseler sur une surface faisant toute la largeur du plateau de scène.
Au deuxième acte, on se goinfre de pommes au Walhalla. On est loin de la délicatesse avec laquelle Freia les amassait dans l'Or du Rhin. Dans son long duo avec Siegmund, Brünnhilde aligne des pommes au sol pour faire un grand cercle... La façon dont Siegmund (et Hunding) meurt est très confuse. Il se fait entourer par les hommes de Hunding en habits militaires. Wotan vient toucher sa lance qui est plantée à l'avant-scène. Les militaires desserrent les rangs. On voit Siegmund allongé avec ce qui pourrait être un fusil à baïonnette planté dans le ventre. Ce n'est vraiment pas convaincant. En effet, on ne voit pas Hunding combattre et l'intervention de Wotan n'est suggérée que par un contact avec sa lance à l'écart de l'action.
À propos du troisième acte, je n'ai rien contre la séance de remise en état de marche des guerriers par les walkyries. Néanmoins, à l'arrière de la scène, derrière un rideau semi-transparent (où l'on verra quelques lignes d'une écriture manuscrite indéchiffrable par moi), on aperçoit des figurants portant des masques évoquant apparemment des chevaux en train d'exécuter des mouvements chorégraphiques un peu ridicules (je pense qu'on n'en aurait pas voulu au metteur en scène de ne pas rappeler qu'il s'agissait d'une chevauchée). Plus tard, on voit Wotan poser un corps entouré d'une couverture sur une table. Qui est-ce ? Siegmund ? Mystère. Passons. De façon incompréhensible, le rideau est baissé pour un interlude musical au terme duquel on retrouve en scène les mêmes protagonistes : Wotan, Brünnhilde et la table. À la fin de l'opéra, Brünnhilde s'allonge sur la table et semble s'endormir. Le lieu difficile d'accès où elle va reposer se dévoile progressivement dans un tableau vraiment superbe, mais, alors qu'en principe, tout est accompli, Brünnhilde descend de la table et finalement, se dit que c'est mieux de s'allonger dessous.
Cela dure 3h45 sans compter les deux entr'actes de 45 et 30 minutes. Vu que le spectacle commence à 18h, on sort presque à une heure raisonnable.
PS: Il ne s'agit là que de mon avis subjectif sur cette représentation. Je découvre les opéras de la tétralogie au fur et à mesure (je vais essayer d'intercaler quelques lectures avant de voir Siegfried l'année prochaine) et n'ai pas beaucoup d'éléments de comparaison. D'autres plus expérimentés ont vraiment aimé. Pour ma part, peut-être ai-je été tellement déçu par la mise en scène du premier acte que je n'ai ensuite plus vu que les défauts. (À propos de cet premier acte, le décor me semble difficile à lire depuis le deuxième balcon : peut-être ma vue baisse-t-elle, mais même avec les jumelles, je ne parvenais pas à bien voir les empilements façon trophée de chasse du décor qui se passe chez Hunding. A posteriori, il me semble évident qu'il s'agissait de casques de guerriers tués lors de conflits précédents.).
2010-06-02 12:35+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Ou pourquoi on ne trouvera guère ici de comptes-rendus de spectacles de l'Opéra Comique l'an prochain...
La vente de places de spectacles est un jeu qui peut parfois être un peu
compliqué, plus sophistiqué que le principe du premier arrivé, premier
servi
.
Dans mon expérience, la palme du système le plus compliqué est remportée haut la main par l'Opéra de Paris. En simplifiant un peu, les différentes manières d'y réserver une place sont, dans un ordre correspondant essentiellement à la chronologie et aux priorités :
L'avantage que je tire de ce système est que si je n'inclus pas un spectacle dans mon abonnement, je sais que j'aurai encore la possibilité d'acheter des places plus tard. Si je n'ai pas envie de payer trop cher (par exemple, parce qu'il ne restera plus de places dans la catégorie la moins chère vendue sur Internet), il me reste encore la possibilité d'aller faire la queue au guichet le jour de la mise en vente.
Le jeu
est très compliqué, mais pourtant, ses règles sont
compréhensibles pour le lecteur attentif de la brochure de l'Opéra de Paris
(toutes les informations ne sont pas sur le site Internet, voyez ici pour le calendrier de mise en vente sur Internet et aux
guichets pour la saison 2010/2011). Bien sûr, on ne vous dira pas dans la
brochure que si la vente aux guichets commence bien à 10h30, les portes
auront ouvert à 9h30 et que des fous auront attendu dans le froid depuis 6h
ou bien avant...
Les systèmes de vente du Théâtre des Champs-Élysées, de la Salle Pleyel
et du Théâtre du Châtelet sont apparemment moins compliqués. En gros, il y
a les abonnements (qui ne donnent droit qu'à un certain sous-ensemble des
catégories de places), et puis il y a une date de mise en vente des places
de toutes les catégories : premier arrivé, premier servi
.
Il me semble que jusques à l'année dernière, l'Opéra Comique rentrait
dans ce groupe de maisons qui à partir d'une certaine date (vers juin)
mettent en vente leurs billets à l'unité, notamment sur Internet. C'est par
ce moyen que j'ai acheté toutes mes places à l'Opéra Comique. À la lecture
de la brochure de cette année (très alléchante : j'étais presque tenté par
un abonnement Tutti 8
pour voir tous les opéras programmés, quitte à
ce que ce soit dans une catégorie de prix supérieure à celle que je
pratique habituellement, hausse de prix en partie compensée par les
réductions accordées), il me semble que rien ne laissait présager que cela
changerait. Or, hier, à 11h, la réservation n'était pas proposée pour tous
les opéras et rumeurs
, quand cela a été possible, il y a eu des
messages d'erreurs, et quand ceux-ci se sont dissipés, il apparut
clairement que seules les trois premières catégories de places étaient
proposées à la vente sur Internet. Bref, les règles du jeu ont été
modifiées sans avis préalable (et a posteriori, on ne trouve aucun
message sur le site Internet de l'Opéra Comique disant que les places de
catégories 4, 5, 6, ce n'est pas sur Internet qu'on les trouve). Si cela
avait été annoncé, et clairement, je n'aurais rien trouvé à redire : je
n'aurais juste pas pu aller à faire la queue hier à l'Opéra Comique,
j'aurais peut-être trouvé une autre solution, ou je me serais tout
simplement résolu à payer plus cher. Je veux bien que le système de vente
soit complexe, pourvu que la règle du jeu soit publique. Cette année, cela
n'a pas été le cas, et je trouve que c'est une attitude tout à fait
méprisable de la part de cette institution que je trouvais jusque là des
plus sympathiques (bonne programmation, accueil bienveillant, un beau
design et un contenu intéressant pour les brochures de programme,
un site Internet non bridé).
J'aurais sans doute boycotté totalement l'Opéra Comique l'année prochaine pour cette raison s'ils n'avaient pas programmé Le Freischütz, mais j'ai tellement envie d'entendre cet opéra (même chanté en français et avec des passages parlés dans la tradition française de l'Opéra Comique plutôt qu'avec des récitatifs) que je ferai une petite exception (ajout du 29 juin : un tout petit peu plus, ayant découvert par hasard que le site avait été débridé).
Du coup, cela me libère un peu de budget pour les Concerts Philippe Maillard (que j'ai un peu délaissés ces dernières années puisque leur brochure est une des dernières à sortir), dont la programmation vient d'être annoncée.
2010-05-14 19:25+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Théâtre
Opéra Garnier — 2010-05-13
Martin Haselböck, direction musicale
John Malkovich/Michael Sturminger, mise en scène
Birgit Hutter, costumes
Christoph Willibald Gluck, Luigi Boccherini, Wolfgang Amadeus Mozart, Joseph Haydn, Ludwig van Beethoven, Carl Maria von Weber, musique
John Malkovich, comédien
Bernarda Bobro, soprano
Aleksandra Zamojska, soprano
Orchester Wiener Akademie
La comédie infernale, confessions d'un seriel killer, théâtre musical de Michael Sturminger et Martin Haselböck
Il est des spectacles de l'Opéra qui sont bien cachés dans le programme.
Les aurait-on repérés dans la brochure que, la campagne d'abonnements
passée, il faudrait encore s'en souvenir le moment venu pour faire une
réservation. Ce n'était pas mon cas en ce qui concerne le spectacle La
comédie infernale, confessions d'un serial killer. Lors d'une visite
récente sur le site de l'Opéra, le titre aura sans doute paru dans la liste
des spectacles pour lesquels des billets étaient mis en vente et par
curiosité, j'aurai cliqué et saisi ainsi l'occasion de voir depuis les
premières loges
John Malkovich sur la scène du Palais Garnier.
Il s'agit d'un spectacle de théâtre musical inspiré par la vie et la mort de Jack Unterweger, un serial-killer autrichien ayant été condamné vers 1974, qui fut gracié et relâché en 1990 à la suite de pétitions en faveur d'un homme qui était devenu écrivain en prison. Quand des meurtres semblables aux précédents — prostituées étranglées dans leurs soutiens-gorge — surviendront, il sera à nouveau condamné en 1994. S'étant suicidé avant d'avoir pu faire un éventuel appel de cette condamnation, il jouit de la présomption d'innocence...
Alors qu'il a menti toute sa vie et qu'il est aux Enfers depuis une
quinzaine d'année, Jack Unterweger décide d'écrire la vérité dans un livre
Confessions d'un serial-killer
et, suivant la recommandation de ses
éditeurs, il se donne en spectacle pour vanter les mérites de son livre.
Différentes femmes ayant gravité autour de lui s'incarnent sur scène à ses
côtés en interprétant des airs d'opéra de Gluck, Boccherini, Vivalvi,
Mozart, Beethoven, Haydn et Weber correspondant à la situation dramatique.
La partie musicale est assurée par l'Orchester Wiener Akademie dirigé par
Martin Haselböck (qui a une drôle de manière de diriger ses cuivres : il
lance très-ostensiblement sa main dans la direction de celui qui doit
jouer) et les deux sopranos Bernarda Bobro et Aleksandra Zamojska. Si la
voix de la deuxième m'a paru manquer un peu de puissance dans son premier
air, l'autre m'a bien plu, notamment dans la scène de Bérénice
Berenice, che fai de Haydn.
Le personnage qu'interprète John Malkovich est drôle, dans un genre très
cynique. Les rires sont parfois un peu à contretemps, vu que le texte parlé
de Michael Sturminger est en anglais the international language of
love
, surtitré en français. À un moment donné, il s'énerve contre son
ordinateur (un Mac donné par son éditeur ; il préférerait un PC) alors
qu'il va lire des extraits de la page Wikipédia le
concernant et ironiser à propos des erreurs qu'elle contiendrait. Je ne
suis pas mécontent d'avoir assisté à ce spectacle de théâtre lyrique d'un
peu moins de deux heures.
2010-05-08 02:46+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2010-05-07
Laura Aikin, Olympia
Inva Mula, Antonia
Béatrice Uria-Monzon, Giulietta
Ekaterina Gubanova, La Muse/Nicklausse
Giuseppe Filianoti, Hoffmann
Cornelia Oncioiu, Une Voix
Rodolphe Briand, Spalanzani
Jason Bridges, Nathanaël
Alain Vernhes, Luther, Crespel
Léonard Pezzino, Andres, Cochenille, Frantz, Pitichinacio
Franck Ferrari, Lindorf, Coppélius, Dr Miracle, Dapertutto
Vladimir Kapshuk, Hermann
Yuri Kissin, Schlemil
Jesus Lopez-Cobos, direction musicale
Robert Carsen, mise en scène
Michael Levine, décors et costumes
Jean Kalman, lumières
Philippe Giraudeau, mouvements chorégraphiques
Patrick Marie Aubert, chef de chœur
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
Les Contes d'Hoffmann, Offenbach
Je n'avais encore jamais vu la production du dernier opéra d'Offenbach qui repasse ce mois-ci à l'Opéra Bastille. La mise en scène de Robert Carsen des Contes d'Hoffmann est absolument superbe. C'est assurément un des tout meilleurs spectacles d'opéra que j'aie vu.
L'opéra se passe pendant une représentation de Don Giovanni dans laquelle chante Stella, la femme dont est éprise Hoffmann. Ainsi, tout naturellement, les décors font de l'opéra dans l'opéra. Durant le prologue, on voit ainsi le décor de l'opéra de Mozart faire un travelling latéral. Quand il en sort, on voit les coulisses, ainsi que Hoffmann et ses amis en train de bien boire. Alors qu'il leur raconte l'histoire de Kleinzach à la cour d'Eisenach, son esprit se fixe sur trois femmes qu'il a aimées : Olympia, Antonia, Giulietta. Chacune est évoquée pendant un acte. Pour nous accompagner ainsi qu'Hoffmann dans ce retour en arrière, la Muse d'Hoffmann a pris l'apparence de Nicklausse, un ami d'Hoffmann.
Dans l'acte d'Olympia, le monde de l'opéra sera présent via des musiciens et un chef côté cour tandis que les invités de Spalanzani dansent dans de riches costumes. Hoffmann tombe amoureux de l'automate Olympia, une authentique poupée.
Dans celui d'Antonia, les personnages évoluent dans un décor de fosse d'orchestre et de scène d'opéra. La défunte mère d'Antonia était cantatrice : sa voix se fera entendre depuis cette scène alors qu'elle porte une robe à crinoline. Comme elle, Antonia mourra d'avoir trop chanté.
Enfin, dans celui de la vénale Giulietta, nous voyons la scène par l'arrière, avec des rangées de fauteuils dans le fond. Ces rangées peuvent osciller latéralement de façon à faire penser aux gondoles de Venise. À un moment, les chanteurs chantent pour nous, puis ils se tournent pour saluer les faux spectateurs. Les fauteuils étant de couleur rouge, on se croirait presque à un concert Salle Pleyel.
L'épilogue referme l'opéra conformément aux commencements. Ainsi, Hoffmann reprend où il en était de l'histoire de Kleinzach, la Muse remet ses habits antiquisants (et sa lyre). Elle s'en va avec Hoffmann sur la scène nue.
Tout ceci est servi avec d'excellents chanteurs. J'ai tout particulièrement apprécié Giuseppe Filianoti (Hoffmann), Ekaterina Gubanova (La Muse/Nicklausse), Laura Aikin (Olympia), Inva Mula (Antonia) et Franck Ferrari (Lindorf, Coppélius, Dr Miracle, Dapertutto).
L'opéra fantastique
ayant été créé après la mort du compositeur,
de nombreux remaniements ayant été faits en préparation de la création et
l'orchestration ayant dû être terminée par Ernest Guiraud, les commentaires
que j'avais déjà lus sur cet opéra ainsi que ceux du programme donnent
l'impression que l'ensemble est un sacré plat de spaghettis qui doit être
recomposé pour chaque production de cet opéra, au fil des différentes
traditions d'interprétations et de découvertes nouvelles de documents de
l'époque. Parmi les différentes curiosités, on peut noter qu'il existe des
versions avec passages parlés alors que dans d'autres (comme dans cette
production), ceux-ci sont transformés en récitatifs. Par ailleurs, la
longueur de l'acte d'Antonia est très variable : lors de la création, il
avait carrément été supprimé. Il souffre de la comparaison avec les actes
d'Olympia et d'Antonia ; musicalement, on a néanmoins la Barcarolle et
l'air de Dapertutto Scintille diamant (dont j'avais entendu parler
comme n'étant pas authentique
, mais que j'ai découvert avec surprise
au cours de la représentation). De même, je ne connaissais pas le sextuor
qui commence par Hélas ! mon cœur s'égare encore (tiens, en fait
peut-être que si, mais avec d'autres paroles...).
Parmi mes morceaux préférés dans cet opéra, il y a l'air de Nicklausse Vois sous l'archer frémissant. Si j'ai aimé le chant d'Ekaterina Gubanova, j'ai été très surpris, voire traumatisé, par les choix de direction du chef d'orchestre (Jesus Lopez-Cobos) : les violons se retrouvaient parfois escamotés par le volume sonore d'autres instruments.
Une nouvelle fois, le public scolaire s'est montré pénible. Une bonne
proportion des derniers rangs étaient occupés par des élèves. Sur ma
droite, il a fallu une petite remarque chuchotée bien sentie pour que je
n'entende plus le commentaire en direct de l'opéra. Par-devant moi, un
écran de téléphone portable est allumé : une fille y joue à un
casse-briques. Au moins, elle le fait silencieusement... Dans les
catégories d'âge plus évoluées, derrière moi, à propos de Nicklausse,
j'entends notamment On dirait que c'est une femme, non ?
. À ma
gauche, un couple devise sans trop faire de bruit, mais quand la demoiselle
a besoin d'un mouchoir, j'ai droit à l'attrapage de sac à main, l'ouverture
de fermeture éclair, le fouillage de sac... la fermeture éclair qui se
clôt, etc. Au secours !
2010-04-30 12:23+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2010-04-29
Kim Begley, Edward Fairfax Vere
Lucas Meachem, Billy Budd
Gidon Saks, John Claggart
Michael Druiett, Mr Redburn
Paul Gay, Mr Flint
Scott Wilde, Lieutenant Ratcliffe
Andreas Jäggi, Red Whiskers
Igor Gnidii, Donald
Yuri Kissin, Dansker
François Piolino, The Novice
John Easterlin, Squeak
Franck Leguérinel, Bosun
Chae Wook Lim, First Mate
Jian-Hong Zhao, Second Mate
Paul Crémazy, Maintop
Vladimir Kapshuk, The Novice's Friend
Guillaume Petitot-Bellavène, Arthur Jones
David Fernandez Gainza, Gunner's Mate
Christian-Rodrigue Moungoungou, Voice Answering from the Distant Boat
Andrea Nelli, Sailor
Robert Catania, Solo ténor
Lucio Prete, Solo baryton
Shin Jae Kim, Solo basse
Jeffrey Tate, direction musicale
Francesca Zambello, mise en scène
Alison Chitty, décors et costumes
Alan Burrett, lumières
Patrick Marie Aubert, chef de chœur
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
Maîtrise des Hauts-de-Seine / Chœur d'enfants de l'Opéra national de Paris
Billy Budd, Britten
L'Opéra de Paris a semble-t-il eu du mal à remplir la salle de Bastille pour les représentations de Billy Budd de Britten. C'est dommage, car si la musique de Britten est certes parfois quelque peu déroutante, c'est une belle production d'opéra.
Adapté d'une nouvelle de Melville, cet opéra raconte un épisode de la vie à bord de L'indomptable, en guerre contre les Français. Des années après, le capitaine Edward Fairfax Vere (Kim Begley, Loge dans Das Rheingold récemment) se souvient de 1797. Le jeune, beau, loyal et bon Billy Budd avait été enrôlé sur le navire ; son seul défaut est qu'en cas d'émotions fortes, il se met à bégayer. À l'opposé, le Mal est représenté par le maître d'armes John Claggart. Il est attiré par lui, mais il affirme vouloir détruire l'incarnation de ces qualités qui lui sont étrangères dans le très beau passage du premier acte Handsome... O beauty, o handsomeness, goodness! Would that I ne'er encountered you!. Il conspire contre Billy Budd en essayant de le faire passer pour un déloyal, susceptible de lancer une mutinerie.
La proximité d'un navire français empêche temporairement à Claggart de dénoncer Budd au capitaine. L'équipage se prépare au combat. Les canons n'ont pas la portée suffisante pour atteindre l'ennemi et le vent insuffisant empêche de le rattraper. Aucun Français ne sera maltraité dans cet opéra. Claggart est maintenant libre de lancer son foudre sur Billy Budd. Le capitaine ne peut croire à ses contes. Quand Budd doit écouter en sa présence les fausses accusations du maître d'armes, son bégayement l'empêche de répondre. Ce qu'il aurait voulu dire en mots, il l'exprime de son poing. Claggart s'effrondre raide mort sous le coup. Alors qu'il sait Billy Budd innocent, il laisse son procès se faire. Budd sera pendu. Alors que Vere se reproche son attitude, Billy Budd le bénit. À sa mort, la confusion règne dans l'équipage. Dès années plus tard, Vere se dit qu'il aurait pu le sauver.
Contrairement au deuxième acte pendant lequel je n'ai pas vu le temps passer, le premier acte m'a semblé un petit peu long. Le décor unique est un carré de parquet incliné dont un angle est dirigé vers la salle. Sur la droite, un mat dont la forme fait penser à une Croix de Lorraine. La référence au christianisme est assez évidente. Les lumières, très belles, accentuent explicitement la forme de croix en la projetant en ombre sur le sol ; au milieu de son torse nu, une ligne verticale et une autre horizontale inscrivent une forme de croix sur le corps du héros. Au deuxième acte, on découvre qu'une subdivision du carré de parquet le long d'une diagonale permet de modifier l'inclinaison de la partie dirigée vers la fosse. Quand elle est relevée, les hommes d'équipage peuvent s'y préparer au combat. Cela permet aussi à la scène de la confrontation entre Claggart et Budd de se tenir dans un espace plus confiné. La réduction de l'espace scénique pour les besoins des différentes scènes est en fait réalisé de diverses manières : un rideau de scène peut être descendu pour ne laisser qu'un petit coin pour l'air de Claggart du premier acte, les lumières peuvent laisser dans l'obscurité tout sauf ce même coin à un autre moment. Bref, la mise en scène (de Francesca Zambello) s'inscrit très intelligemment dans le décor et les lumières, ce qui donne un cadre visuellement beau pour ces deux fois 1h20 de musique continue.
2010-04-25 12:32+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Bien que n'ayant aucune formation musicale, je constate qu'à force d'aller à des concerts, il m'est devenu assez facile de reconnaître le style de quelques compositeurs. Quand je branche la radio sur France Musique et que je tombe au milieu d'un extrait, je ne peux donc m'empêcher, si je ne reconnais pas le morceau directement, d'essayer de déterminer le compositeur ou au moins la période. Souvent, ça marche.
Parfois, le détecteur bugge complètement, comme avec l'extrait d'opéra sur lequel je suis tombé hier. Par certaines fioritures, ça me fait penser que ç'a été écrit à l'époque de Mozart, sinon par lui-même. Je me rends compte que c'est chanté en allemand : les possibilités sont réduites. La tournure que prend l'extrait me ferait plutôt penser à Wagner. Je me retrouve ainsi à attendre compulsivement que l'extrait se termine pour savoir quel est ce compositeur qui m'a mis dans une contradiction assez opposant lamentablement Mozart et Wagner...
Conclusion : il s'agissait d'un extrait (chanté par Karita Mattila) d'un opéra créé en 1821 : Der Freischütz de Weber. Je ne connaissais que L'invitation à la valse (utilisée dans le ballet Le spectre de la rose) et l'ouverture de cet opéra, qui sera joué à l'Opéra-Comique l'année prochaine dans l'adaptation française de Berlioz.
2010-04-13 02:59+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Comique — 2010-04-13
Marie Lenormand, Mignon
Ismael Jordi, Wilhelm Meister
Malia Bendi-Merad, Philine
Nicolas Cavallier, Lothario
Blandine Staskiewicz, Frédérick
Christophe Mortagne, Laërte
Frédéric Goncalves, Jarno
Laurent Delvert, Un serveur
Chœur accentus
Orchestre Philharmonique de Radio France
François-Xavier Roth, direction musicale
Jean-Louis Benoit, mise en scène
Laurent Peduzzi, décors
Thibaut Welchlin, costumes
Dominique Bruguière, lumières
Laure Talazac, maquillage
Christophe Grapperon, chef de chœur
Mignon, Ambroise Thomas
Deux-mille-soixante-troisième représentation de Mignon à l'Opéra Comique. Bien que les chanteurs sur scène se fussent écriés que le théâtre prenait feu, il était évident que c'était pour de faux, contrairement à la soirée du 25 mai 1887 au cours de laquelle la deuxième salle Favart fut détruite.
Quand on regarde le passé, il est toujours étonnant de voir que des spectacles qui furent populaires au point que la millième d'un opéra fut jouée du vivant de son compositeur, que la deux-millième eut lieu en 1955 et qu'entretemps, il est presque devenu une rareté.
Le personnage de Wilhelm Meister (adapté de Goethe) hésite entre deux femmes. L'une est Mignon, un jeune enfant qui a oublié ses origines. Elle est l'esclave de Jarno. Elle rapporte quelque revenu en exécutant la danse des œufs. Elle se rebelle. Wilhelm passe par là, rachète sa liberté. Elle devient son page. Ainsi accoutrée, elle l'accompagne à une représentation donnée par la comédienne Philine. Le cœur de Wilhelm balance entre les deux, quand il voit pour la première fois Mignon dans une robe empruntée à sa rivale. Philine triomphe sur scène. Mignon en est jalouse. Elle la maudit. Alors que le théâtre commence à brûler, Philine envoie Mignon rechercher un bouquet de fleurs. Wilhelm vient sauver Mignon et les deux s'en vont. Mignon retrouve le lieu où elle a véçu, son père et, happy ending, épouse Wilhelm.
Vu son caractère androgyne, le rôle de Mignon, surtout au début, n'est pas des plus brillants. Le tube de cet opéra, c'est l'air de Philine Je suis Titania (on joue Shakespeare sur scène...). On en entend d'ailleurs la musique assez longuement dès l'ouverture. Néanmoins, on a l'occasion de bien apprécier le chant des principaux chanteurs : Malia Bendi-Merad (Philine), Marie Lenormand (Mignon), Ismael Jordi (Wilhelm Meister), Nicolas Cavallier (Lothario), Blandine Staskiewicz (Frédérick). Ces deux derniers sont les seuls de la distribution que j'avais déjà entendu. Nicolas Cavallier, déjà vu en Escamillo (Carmen), interprétait ainsi le père de Mignon, parcourant les routes à la recherche de celle qu'il ne peut plus reconnaître vu qu'il a perdu la mémoire. Blandine Staskiewicz, vue dans Norma, jouait le rôle travesti d'un amant jaloux de Philine. Ces chanteurs furent tous très bons. Un petit bémol cependant pour Ismael Jordi dont la prononciation du français n'était pas toujours parfaite.
Du point de vue musical, c'était très bien. Dans la fosse, se trouvait
en effet l'Orchestre Philharmonique de Radio France, dirigé par
François-Xavier Roth. J'avais déjà vu ce chef, de dos, diriger la musique
d'Altre Stelle dont je n'avais pas vraiment
apprécié le son. Dans cette production, revenant semble-t-il à des
traditions françaises oubliées en matière de direction, il dirige face au
parterre, les musiciens jouant pour la scène
.
La mise en scène, très classique (cela se passe à l'époque où c'est censé se passer, les didascalies du livret sont respectées, la robe blanche est blanche, etc.) est très belle à regarder pendant les passages les plus animés de l'opéra, comme les danses bohémiennes du premier acte et la représentation du Songe d'une nuit d'été insérée dans le deuxième acte.
Bref, un beau spectacle. J'étais exactement à la même place que lorsque j'avais vu L'Amant jaloux, à savoir un troisième rang de loge de face. Comme la dernière fois, quelques spectateurs bruissant, telle la spectatrice ancienne qui prend un temps fou à enlever le plastique autour d'un bonbon pour la gorge, quelques dizaines de secondes à peine après l'entr'acte (mieux vaut préférer un bruit pas discret mais bref à un long bruit qui ne s'avèrera pas plus discret...). Ma voisine de gauche ne trouvera pas mieux non plus que d'ouvrir la porte de la loge quand le chœur (accentus) se mettra à chanter depuis l'extérieur de la salle au troisième acte. D'ailleurs, il était amusant de voir le chef continuer à diriger, probablement pour la caméra qui devait fournir un visuel au chœur (on ne me fera pas croire qu'on procédait ainsi au XIXe !). Parmi les autres bruits parasites, notons aussi le remplissage et le déplacement des sacs-poubelles du bar voisin.
2010-04-05 01:15+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse
Théâtre du Châtelet — 2010-04-04
Adina Aaron, Treemonisha
Christin-Marie Hill, Monisha
Xolela Sixaba, Ned
Stanley Jackson, Remus
Stephen Salters, Zodzetrick
Jacques-Greg Belobo, Simon
Jean-Pierre Cadignan, Luddud
Janinah Burnett, Lucy
Loïc Félix, Cephus
Mlamli Lalapantsi, Andy
Krister St. Hill, Parson Alltalk
Joël O'cangha, Le contremaître
Ensemble Orchestral de Paris
Chœur du Châtelet
Kazem Abdullah, direction musicale
Sergei Pavlov, chef de chœur
Roland Roure, conception scénographique, dramaturgie, décors et costumes
Blanca Li, mise en scène et chorégraphie
Jacques Rouveyrollis, lumières
Robert Nortik, réalisation vidéo
Treemonisha, Scott Joplin (orchestration de Gunther Schuller)
Impossible de rentrer chez soi sans garder en tête le chœur Aunt Dinah has blowed de horn.
S'il est difficile d'avoir vécu au vingtième siècle sans avoir entendu le Maple Leaf Rag ou The Entertainer, il est moins connu que leur auteur Scott Joplin mourût sans avoir pu faire représenter son deuxième opéra Treemonisha (la partition de son premier opéra A Guest of Honor a été perdue).
Le clavier à écran ayant très bien marché, je me suis précipité au lendemain de la première sur le site Internet du théâtre du Châtelet pour acheter des places. Ce soir, j'étais donc à l'avant-dernier rang du parterre pour assister à ce spectacle, dont, fait rare sur les scènes d'opéra, les chanteurs produisent plus de mélanine que la moyenne.
Si l'ouvrage paraît inégal, il s'agit d'un très bon spectacle, qui est sans doute plus susceptible que les autres spectacles lyriques de plaire au plus grand nombre. Le compositeur utilise des rythmes très différents, des récitatifs, de longs airs et de superbes chœurs.
Visuellement, c'est superbe d'un bout à l'autre, grâce aux décors, aux projections vidéo et aux numéros dansés. Au centre du décor du premier acte se trouve un arbre. Celui auprès duquel s'apprête à cueillir des feuilles pour se faire une couronne comme les autres filles. Sa mère adoptive Monisha l'en défend : elle lui révèle que, bébé, elle avait été trouvée auprès de cet arbre et adoptée par elle et son mari Ned. Elle doit aller dans la forêt pour trouver un autre arbre. Elle est enlevée par Zodzetrick, un sorcier abusant de la crédulité de la communauté en vendant des gri-gris. Elle est malmenée lors de la Danse des ours maléfiques, mais elle est sauvée par son ami Remus qui en ayant pris l'apparence d'un épouvantail a été confondu avec le diable. Les cueilleurs de coton se réjouissent de la fin de leur journée. Le retour de Treemonisha fait la joie de ses parents (au fond de la scène, on aperçoit une projection d'une animation très colorée d'une maison). Alors que Zodzetrick se ferait presque lyncher par les villageois, elle demande qu'on lui pardonne. On désigne triomphalement Treemonisha comme chef de la communauté, elle qui a gagné la sagesse par l'éducation (qu'elle avait reçue enfant de la famille qui employait sa mère).
Le livret (du compositeur) n'est pas un sommet de poésie. Cela se fait sentir assez lourdement dans l'air de Remus Wrong is never right. Cela dit, on a déjà vu bien pire (Un ballo in maschera). Au moins, pendant cet air, nul besoin de sur-titres ! Les voix solistes ne sont pas utilisées de façon très spectaculaire dans les deux premiers actes (le plus bel air du premier acte est la sorte de sermon que fait le bien-nommé Parson Alltalk interprété par Krister St. Hill). Cependant, sur la fin, Monisha, Ned, Andy et Treemonisha auront chacun l'occasion de bien faire entendre leur voix. Dans la distribution de ce soir, il y avait Adina Aaron (Treemonisha), Stanley Jackson (Remus), Xolela Sixaba (Ned) qui sont très bons. Dans le rôle de Monisha, Christin-Marie Hill est beaucoup moins convaincante. D'après mon informatrice, Grace Bumbry chante ce rôle mardi soir...
2010-03-18 00:30+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Comique — 2010-03-17
Magali Léger, Léonore
Daphné Touchais, Isabelle
Maryline Fallot, Jacinte
Brad Cooper, Don Alonze
Frédéric Antoun, Florival
Vincent Billier, Don Lopez
Le Cercle de l'Harmonie
Jérémie Rhorer, direction musicale
Pierre-Emmanuel Rousseau, mise en scène et costumes
Thibaut Welchin, décors
Claudine Crauland, costumes
Gilles Gentner, lumières
Atsushi Sakaï, assistant musical
Charlotte Rousseau, assistante mise en scène
Christophe Manien, chef de chant
L'amant jaloux ou les fausses apparences, André Ernest Modeste Grétry
Après avoir vu Zoroastre, Le Roi malgré lui, Carmen et The Fairy Queen, j'ai encore vu ce soir un formidable spectacle à l'Opéra Comique. J'avais sélectionné L'Amant jaloux ou les fausses apparences d'André Grétry sur la seule foi du nom d'une interprète (Magali Léger, précédemment entendue dans le rôle de Minka dans Le Roi malgré lui).
Créé à Versailles en 1778, L'Amant jaloux se passe à Cadix. À vingt ans Léonore (Magali Léger) est veuve et pour des raisons financières son père Don Lopez (Vincent Billier) ne voudrait pas la voir se remarier. Elle voit en cachette Don Alonze (Brad Cooper) qui est très jaloux. La sœur de celui-ci, Isabelle (Daphné Touchais), est la meilleure amie de Léonore. Elle est sauvé des assauts de brigants par Florival (Frédéric Antoun), un Français qui va faire la guerre au Portugal. Ils se donnent rendez-vous, mais suite à un malentendu avec Jacinte (Maryline Fallot), la femme de chambre, il croit qu'elle est la fille de Don Lopez et qu'elle s'appelle Léonore. La suite est par conséquent un tout petit peu quiproquée. Don Alonze doute de la constance de Léonore. Celle-ci décide de renoncer l'amour et de lui jouer une leçon, mais bien sûr, à la fin, ils se réconcilieront ; Don Alonze d'abord désargenté héritera et pourra épouser la fille de l'avare Don Lopez sans dot.
Pour la première fois, je me suis retrouvé au troisième rang des
baignoires de face. Vu la taille plutôt réduite de la salle, c'est presque
comme si on était à l'orchestre, n'étaient les étroits piliers et l'étage
du dessus qui empêche de voir la partie supérieure de la scène, mais pas
les sur-titres, puisqu'ils sont aussi diffusés sur des écrans latéraux. La
diction des chanteurs fait que le texte est intelligible, très
distinctement dans les passages parlés (sans musique), mais aussi les
passages chantés. Toutefois, l'accent australien de Brad Cooper (Don
Alonze) déshomogénéise quelque peu la distribution vocale, mais sa
prononciation du texte reste très-honorable (il s'est cependant un peu
oublié sur le premier on
de D'une ardeur si constante / Voilà
donc le retour
.).
Interprétée par Le Cercle de l'Harmonie dirigé par Jérémie Rhorer, la
musique de Grétry fait penser à celle de Haydn, donc j'aime. Le texte, s'il
contient quelques rimes un peu faciles sans doute destinées à détendre
l'atmosphère, comme moi
qui rime avec foi
, se laisse entendre
sans aucun déplaisir.
Dans les prestations vocales, deux airs se distinguent. On entend ainsi à la fin du deuxième acte la belle sérénade de Florival Tandis que tout sommeille / Dans l'ombre de la nuit. Le plus enthousiasmant est néanmoins celui du début du deuxième acte, chanté par Léonore : Je romps la chaîne qui m'engage. À côté, l'air de la Reine de la Nuit de La Flûte enchantée semblerait presqu'une partie de plaisir. Ce qui rehausse encore la difficulté de cet air magnifiquement interprété par Magali Léger réside dans la mise en scène. En effet, en chantant cet air, la chanteuse s'installe dans une baignoire. Au début, je me suis dit qu'elle ne devait pas contenir d'eau... mais si, quand elle s'en est aspergée les épaules, le doute n'était plus permis. J'espère au moins qu'elle était chaude.
La mise en scène de Pierre-Emmanuel Rousseau ne va pas contre l'atmosphère espiègle créée par la musique et le texte. Cela commence dès l'ouverture. On y voit d'abord d'éblouissants projecteurs sur la scène vide. Tout doucement, les décors descendent des cintres. Puis, après que le public a pu apprécier les dessous du théâtre, le rideau tombe (ce qui ne manque pas d'amuser le public) avant de remonter pour la première scène. Les décors tout comme les costumes renvoient au XVIIIe, à l'exception d'un voile de style indien qui masque Isabelle aux regards de son frère Don Alonze.
Pour une fois, je n'ai pas stressé pour rejoindre la station Opéra et ma correspondance de RER, vu que le spectacle ne dure que 1h20.
2010-03-14 03:50+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2010-03-13
Falk Struckmann, Wotan
Samuel Youn, Donner
Marcel Reijans, Froh
Kim Begley, Loge
Peter Sidhom, Alberich
Wolfgang Ablinger-Sperrhacke, Mime
Iain Paterson, Fasolt
Günther Groissböck, Fafner
Sophie Koch, Fricka
Ann Petersen, Freia
Qiu Lin Zhang, Erda
Caroline Stein, Woglinde
Daniela Sindram, Wellgunde
Nicole Piccolomini, Flosshilde
Philippe Jordan, direction musicale
Günter Krämer, mise en scène
Jürgen Bäckmann, décors
Falk Bauer, costumes
Diego Leetz, lumières
Otto Pichler, mouvements chorégraphiques
Orchestre de l'Opéra national de Paris
Das Rheingold, Wagner
Je reviens de la troisième représentation de l'opéra Das Rheingold de Wagner dans la nouvelle production proposée par l'Opéra de Paris. Après Lohengrin et Tristan und Isolde, Das Rheingold est le troisième opéra de Wagner dont j'assite à une représentation. J'ai acheté récemment les DVD de la production du centenaire du Ring des Nibelungen de Boulez/Chéreau au festival Bayreuth afin de me préparer à la tétralogie dont la première moitié est présentée cette saison.
L'histoire ne ressemble guère à une histoire habituelle d'opéra ! Dans
ce prologue
du festival scénique du Ring, on assiste à 2h20
de musique continue. Après un étonnant prélude représentant les mouvantes
eaux du Rhin, les filles de ce fleuve se moquent du Nibelung Alberich qui
voudrait les séduire. Elles laissent entendre que le trésor qu'elles
gardent ne peut être gagné que par un homme qui aurait renoncé à l'amour et
qu'avec cet or, un anneau aux pouvoirs universels pourrait être forgé, ce
que s'empresse de faire Alberich. Dans la deuxième scène, Wotan, son épouse
Fricka et d'autres dieux pensent au palais que viennent de leur construire
les géants. Ceux-ci doivent recevoir Freia, la sœur de Fricka, en
rétribution. Fricka s'y oppose. Il faut trouver un substitut qui satisfasse
les géants. Loge arrive alors pour dire qu'en parcourant le monde, il n'a
rien trouvé de satisfaisant, mais qu'on pourrait voler le voleur Alberich.
Wotan et Loge descendent dans le monde des Nibelungen dominé par Alberich
pour ce faire. Pendant ce temps, Alberich a fait fabriquer par Mime un
heaume lui permettant de changer d'apparence selon sa volonté. Loge obtient
de lui qu'il en fasse la démonstration. Il apparaît d'abord en dragon, puis
en crapaud. Sous cette dernière forme, Wotan et Loge n'ont guère de mal à
le capturer. Dans la dernière scène, le captif est forcé d'abandonner son
or, son heaume et son anneau. Les géants arrivent ensuite pour se faire
payer. Ils rendent Freia à condition que l'or en cache complètement la vue.
Pour boucher les interstices, Wotan est obligé de céder non seulement l'or,
mais aussi le heaume et l'anneau, ce qu'il n'aurait pas fait sans les
insistances de Fricka et l'intervention d'Erda qui annonce le crépuscule
des dieux. Les dieux se dirigent enfin vers le palais, le Walhalla, tandis
que Loge refuse de les suivre.
Si pour le moment Lohengrin reste l'opéra de Wagner que j'aie le plus apprécié, la musique du Rheingold ne m'a pas déplu et hormis certains leitmotivs, j'ai particulièrement aimé les passages avec les trois filles du Rhin. Si j'ai trouvé que parfois, Peter Sidhom (Alberich) avait quelque mal à se faire entendre jusqu'au tout dernier rang du deuxième balcon où j'étais assis, j'ai plutôt apprécié les différentes prestations vocales, en particulier celle de Kim Begley (Loge).
Il n'en va pas de même des autres aspects de la production à propos desquels mon impression est plus mitigée. Si le travail de mise en scène à proprement parler me semble plutôt très bon, et les décors inégaux, les costumes paraissent à première vue complètement ratés.
Le ratage des costumes commence par ceux des filles du Rhin, roses avec
en surimpression des marques pour les tétons, le nombril et le pubis. Les
faire paraître sur des balançoires n'est pas une idée très convaincante. On
est loin des souvenirs de Bayreuth de Camille Saint-Saëns lus dans le
programme (15€, je plaisante avec le vendeur pour me plaindre qu'à ce
prix-là, on pourrait espérer trouver une belle photographie en
couverture) : Elles se poursuivent en nageant, car nous sommes au fond
du Rhin ; et rien ne peut faire comprendre comment elles sont suspendues au
milieu de l'eau : c'est le triomphe de l'illusion scénique.
. Plus tard,
on voit les dieux paraître avec un couche de costumes imitant la nudité de
la partie supérieure du corps, ce qui les fait paraître plus musclés. Les
géants et leurs serviteurs sont habillés en tenue de commando (peut-être
que cette bizzarerie trouvera sa cohérence dans les trois opéras qui
suivront) ; leur entrée en scène est indiscutablement spectaculaire. La
plus grotesque tenue est celle de Loge qui est habillé et maquillé en
clown. Certes, il a un rôle un peu à part et n'hésite pas à dénigrer Wotan
et les autres, mais en faire un clown semble un peu exagéré.
La mise en scène de la troisième scène est assez intéressante par la façon de représenter le monde ouvrier des Nibelungen, qui travaillent la boule d'or qu'Alberich avait volée dans la première scène. Les influences sont alors à chercher dans Metropolis de Fritz Lang dont le programme rappelle des images (évidemment, en noir et blanc, ce qui montre l'absurdité de la hausse du prix du programme pour ce spectacle). Malheureusement, cette scène est un peu gâchée par les transformations d'Alberich. Il doit en effet se transformer en dragon et en crapaud, ce qui est un défi au metteur en scène. Günter Krämer a choisi de représenter le dragon et le crapaud par des dizaines de figurants en costumes lumineux. Le timing n'est pas terrible : les figurants-crapauds continuent à défiler vers la sortie pendant encore longtemps après qu'Alberich, visible sur scène, a été capturé.
Le programme donne une deuxième source probable d'inspiration
iconographique : Les dieux du stade de Leni Riefenstahl...
Peut-être est-ce l'explication pour le costume des dieux. Si Wagner a
fasciné Hitler et si Wagner était ouvertement antisémite, n'est-il pas
permis de représenter cet Anneau du Nibelung sans faire des
références aussi intempestives à la période nazie ? Dans cet ordre d'idées,
on verra apparaître à deux reprises Germania
écrit dans une fonte
imitant les formes des caractères gothiques (mais sans être de l'alphabet
gothique pour autant, sinon les spectateurs français ne déchiffreraient
pas).
Parmi les bons points, j'ai apprécié le traitement scénique des fruits
que Freia a l'habitude de cueillir et qui permettent aux dieux de préserver
leur corps des atteintes du temps. On la voit ainsi rassembler les fruits.
Plus tard, quand les dieux ressentent le manque, on les voit se battre pour
prendre possession des quelques spécimens, un signe annonciateur de leur
crépuscule
.
2010-03-11 19:30+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse
L'information n'étant apparemment pas trouvable sur le site de l'Opéra de Paris, je reproduis ici le calendrier des ouvertures de réservation sur Internet et aux guichets qui apparaît page 127 de la brochure.
Spectacle | Internet | Guichets |
Concerts, récitals | 21 juin | 2 juillet |
Le Vaisseau fantôme | 21 juin | 2 juillet |
L'Italienne à Alger | 21 juin | 5 juillet |
Eugène Onéguine | 21 juin | 2 juillet |
Roland Petit | 21 juin | 12 juillet |
Le Triptyque | 30 août | 10 septembre |
Paquita | 30 août | 13 septembre |
Les Noces de Figaro | 30 août | 24 septembre |
Ballet de Hambourg | 30 août | 27 septembre |
Mathis le peintre | 30 août | 1er octobre |
Le Lac des cygnes | 11 octobre | 22 octobre |
La Fiancée vendue | 11 octobre | 18 octobre |
Balanchine/Brown/Bausch | 11 octobre | 25 octobre |
Ariane à Naxos | 11 octobre | 19 novembre |
Madame Butterfly | 8 novembre | 26 novembre |
Giulio Cesare | 8 novembre | 22 novembre |
Francesca Da Rimini | 8 novembre | 10 décembre |
Caligula | 8 novembre | 6 décembre |
Siegfried | 8 novembre | 14 janvier |
Le Crépuscule des Dieux | 8 novembre | 14 janvier |
Luisa Miller | 13 décembre | 21 janvier |
Kátia Kabanová | 13 décembre | 24 janvier |
Coppélia | 13 décembre | 31 janvier |
Akhmatova | 13 décembre | 21 janvier |
Spectacle de l'école de danse | 13 décembre | 7 février |
Roméo et Juliette | 3 janvier | 18 mars |
Tosca | 3 janvier | 25 mars |
Mats Ek | 3 janvier | 28 mars |
Ballet du Théâtre Bolchoï (Flammes de Paris, Don Quichotte) | 3 janvier | 4 avril |
Rain | 3 janvier | 28 mars |
Otello | 7 mars | 13 mai |
Così Fan Tutte | 7 mars | 16 mai |
L'Anatomie de la sensation | 7 mars | 20 mai |
Les enfants du paradis | 7 mars | 23 mai |
2010-03-10 20:20+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse
Je suis allé hier à la présentation de la nouvelle saison de la Salle Pleyel. On montre son carton
d'invitation à l'entrée et on peut récupérer les brochures. À part ça, la
séance présente peu d'intérêt : les responsables de la salle, de
l'Orchestre de Paris et de l'Orchestre philharmonique de Radio-France
discutent de leur programmation, des nouveaux-chefs, etc. Heureusement que
les éclairages sont suffisants pour faire passer le temps en feuilletant
les brochures. Une heure plus tard, un moment musical
, le trio pour
clarinette, violoncelle et piano de Fauré par Paul Meyer, François Salque
(qui est devenu père quelques heures avant) et Eric Le Sage. Je me suis
plutôt ennuyé, la faute à fatigue et à Fauré. Croisé Palpatine
et Mimy
qui se sont laissés entraîner dans un restaurant indien. Je n'ai pas assez
de recul pour commenter la programmation en général. Je note juste que le
ballet royal du Cambodge viendra donner deux représentations de La
légende de l'Apsara Méra.
La programmation de l'Opéra de Paris vient de tomber aussi. Ma première impression, c'est qu'en dehors des deux productions de Luisa Miller et de Tosca que j'ai déjà vues, j'irai bien voir absolument tous les spectacles d'opéra et de danse... Au niveau prix, je vois une petite inflation dans les tarifs des ballet (mes chères places à 21€ passent à 23€), une grosse inflation pour les places à 10€ qui passent à 15€ (on en entendra parler dans les files d'attente), mais les places à 20€ et 35€/40€ ne bougent heureusement pas. Apparemment, il n'y a que les places les plus chères qui baissent : création d'une catégorie Optima à Bastille plus chère que l'ancienne première catégorie, mais baisse assez significative des tarifs des catégories 1—5.
En ce qui me concerne, avant de bloquer des dates, j'attends la programmation du TCE qui sera annoncée samedi, mais le 15 ou le 17 avril 2011 est déjà réservé puisqu'on verra Louis Langrée diriger l'Orchestre de Paris pour un Pélleas et Mélisande en version de concert avec une distribution de rêve (Dessay, Keenlyside, Lemieux, Naouri, Vernhes).
2010-03-08 18:44+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse
C'était mieux avant.
À la fin de la saison 2008/2009, après que j'avais envoyé mon formulaire d'abonnement, l'enthousiasme déclenché par La fille mal gardée me fit me dire que finalement, j'irai voir tous les spectacles de ballet de l'Opéra de Paris cette année. Il restait quelques spectacles à réserver. Comme je vise les places à 21€, la seule option raisonnable pour ce faire était d'attendre les ouvertures de réservations sur Internet.
Les fois précédentes, à savoir le 9 novembre et le 11 janvier, j'avais
déjà constaté que le site de l'Opéra malfonctionnait. Aujourd'hui encore,
cela m'a exaspéré. Ce n'est écrit nulle part, mais apparemment, l'ouverture
des réservation commence à 9h. Dès cette heure-là, le site est
inutilisable. Un système rudimentaire de queue
a été mis en place.
On nous demande de répondre à une question Captcha et on nous indique
un temps d'attente qui s'écoule et oscille.
À la première tentative, deux minutes d'attente, mais la connexion est
interrompue constamment. Un peu plus tard, le temps d'attente annoncé d'une
vingtaine de minute se trouvera multiplié par deux à l'arrivée. Je me
retrouve alors avec un accès précaire au site de l'Opéra, dont l'essentiel
de la mise en forme a disparu, ce qui rend certaines opérations
impossibles. De fait, quand je tape mon numéro de spectateur, puis demande
l'accès à la billetterie et sélectionne ballet
(ce qui est un
marathon en soi, vu que la connexion peut être interrompue à tout moment,
ce qui impose de cliquer sur le bouton Retry
jusqu'à ce que ça tombe
en marche : si on ne fait rien pendant cinq minutes, le site considère
qu'on a abandonné...), je peux voir apparaître La petite danseuse de
Degas. Là, l'erreur serait de cliquer sur le titre, cela ne ferait en
effet qu'afficher la description du spectacle, et il faudrait tout
recommencer pour réserver un billet. Non, je ne suis pas un bleu et je
clique sur le bouton Réserver
. Et là, au lieu de me proposer de
choisir entre les différentes dates, on me demande à nouveau de rentrer mon
numéro de spectateur. Au bout de la sixième fois que le site m'a demandé
mon numéro de spectateur, je me dis que cela ne pouvait pas être moi qui
fusse buggé. Le site a planté encore un peu plus et je me suis retrouvé
dans la queue. Après le déjeuner, j'ai réessayé et cela a fini par
fonctionner.
C'est la troisième fois de suite que la vente sur Internet se passe vraiment mal. Avant le changement de système, ce n'était pas aussi pire. Il faudrait vraiment que quelque chose soit fait. Si ce n'est qu'un problème de charge des serveurs, il suffirait d'espacer un peu plus dans le temps les mise en vente, à savoir ne pas mettre en vente huit séries de spectacles en même temps comme ce fut le cas le 11 janvier.
L'interface est malpratique au possible. Dans l'ancien système, quand on
avait sélectionné un spectacle, pour chaque date, on voyait l'intervalle de
prix des places encore disponibles. Actuellement, cela affiche de 21.00€
à 87.00€
, même s'il ne reste plus que des places de première catégorie.
Vu le temps que prend le chargement d'une misérable page Web sur le site,
cela fait perdre un temps fou. Une fois la date et la catégorie
sélectionnée, on voit normalement une liste des différentes zones dans
lesquelles il reste des places, comme Quatrièmes loges de côté
,
Amphithéâtre
, etc. Souvent, rien ne s'affiche et on est obligé de
valider pour voir le placement, ce qui bloque temporairement la place et
fait encore perdre du temps. Corriger ces défauts de conception de
l'interface réduirait sans doute un peu la charge du site...
2010-02-01 15:09+0530 (சென்னை) — Culture — Musique — Opéra — Voyage en Inde VIII
Théâtre des Champs-Élysées — 2010-01-30
Antonino Siragusa, Don Ramiro, ténor
Stéphane Degout, Dandini, baryton
Pietro Spagnoli, Don Magnifico, baryton
Carla Di Censo, Clorinda, soprano
Nidia Palacios, Tisbe, mezzo-soprano
Vivica Genaux, Angelina, mezzo-soprano
Ildebrando D'Arcangelo, Alidoro, basse
Michael Güttler, direction musicale
Irina Brook, mise en scène
Noëlle Ginefri, décors
Sylvie Martin-Hyszka, costumes
Arnaud Jung, lumières
Cécile Bon, chorégraphie
Concerto Köln
Chœur du Théâtre des Champs-Élysées (Stephen Betteridge)
La Cenerentola, Rossini.
Samedi soir, quelques heures avant de prendre un
Noctambus^W
bus de nuit^W^W^W
Noctilien pour
l'aéroport CDG, je suis allé au Théâtre des Champs-Élysées pour assister à
la première représentation de La Cenerentola dans la production
mise en scène par Irina Brook (fille de Peter Brook) qui est reprise à
nouveau.
Il s'agit indiscutablement du plus drôle spectacle d'opéra que j'aie vu. Bien sûr, cet opéra est un des opéras comiques de Rossini, mais le début de la représentation fait craindre d'assister à un opéra d'esthétique deschiesne, le décor figurant le Bar Magnifico où Angelina (Vivica Genaux) en miss Ugly fait tout le travail, méprisée qu'elle est par son (beau ?)-père et ses deux demi-sœurs Clorinda (Carla Di Censo) et Tisbe (Nidia Palacios). Don Magnifico (Pietro Spagnoli) porte un maillot de foot (de la Lazio), son jeu est très exagéré, on dirait un acteur de film muet... La beaufitude et le look Deschiens ne seront pas les seules cibles de la farce, on s'amusera aussi aux dépens des jet-setteurs, du cultureux branché, de l'art contemporain, de la presse people, etc. Le lieu est très flou lui aussi, on est à Rome (en tout cas en Italie), à Paris, à New-York.
Contrairement à certaines transpositions pas toujours très cohérentes, ici, tout colle très bien à l'histoire, à la lettre du livret, avec quelques gags supplémentaires, comme celui qui consiste à faire accroire qu'un personnage chanté par un chauve (Antonino Siragusa) se fait passer pour un autre d'apparence chevelue (Stéphane Degout). En effet, Don Ramiro veut épouser une femme qui ne se soucierait pas de son argent. C'est donc le valet Dandini qui vient sonder l'âme des filles de Magnifico. La seule scène qui m'ait paru étrange est celle où Dandini et Magnifico sont en chaise longue, une serviette blanche lacée à la ceinture. Sans doute un clin d'œil à la scène du Barbier de Séville où Figaro fait son office de barbier.
Du conte original de Cendrillon, il ne reste plus beaucoup de la partie magique. Cet élément est incarné par le curieux personnage d'Alidoro (Ildebrando D'Arcangelo). En remercîment de l'aumône accordée par Angelina, il œuvre pour que Don Ramiro la choisisse et punisse ses sœurs. Son intervention muette pendant le sextuor du deuxième acte est à hurler de rire. Les six autres personnages sont figés pendant le sextuor, comme des somnambules. Très espiègle, il leur fait faire des gestes ridicules avec leurs mains.
Pour ce qui est de la musique, le Concerto Köln est dirigé par le jeune chef Michael Güttler. À propos des voix, j'ai trouvé que Vivica Genaux manquait un peu de puissance pendant les premières scènes chez Magnifico quand l'orchestre jouait forte (sans que ce soit très gênant : dans la plupart des passages, l'orchestre n'est qu'un accompagnement du chant). Cependant, elle a été formidable dans sa longue séquence à la fin (qui ressemble beaucoup à son homologue du Barbier de Séville). Grand rossinien, Antonino Siragusa est un Don Ramiro enthousiasmant, tout particulièrement pendant ses airs du deuxième acte, très applaudis.
Voilà un très beau spectacle. Malgré une histoire mettant en scène sept
personnages principaux (dont deux certes, ceux des sœurs d'Angelina, sont
quasi-confondus), ce n'est pas cérébral comme un Wagner ou un Strauss et on
aurait presque des scrupules à se laisser aller à une cette facilité
(encore plus axée sur le chant que ne l'est Bellini), mais c'est cela
aussi l'opéra. En sortant, j'entends dire Ç'aurait plu aux
gosses.
.
2010-01-29 01:02+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2010-01-28
Michele Pertusi, Il Conte Rodolfo
Cornelia Oncioiu, Teresa
Natalie Dessay, Amina
Marie-Adeline Henry, Lisa
Javier Camarena, Elvino
Nahuel Di Pierro, Alessio
Jian-Hong Zhao, Un Notaro
Evelino Pidò, direction musicale
Marco Arturo Marelli, mise en scène, décors et lumières
Darmar Niefind, costumes
Patrick Marie Aubert, chef de chœur
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
La Sonnambula, Bellini
Jeudi soir, deuxième de La Sonnambula. Place d'abonnement dans la catégorie juste au-dessus de celle de lundi. Bout de rang 8 du deuxième balcon de côté (jardin). Un angle de vue comparable à celui que j'avais lundi, sans balcon au-dessus et personne derrière (il y a une cloison).
L'annonce que Natalie Dessay est toujours souffrante n'engendre que des applaudissements, la phrase prononcée ayant commençé par une locution suggérant qu'elle se finirait bien. De l'art d'annoncer une mauvaise nouvelle à 2700 personnes. Contrairement à lundi où cette difficulté passait presqu'inaperçue, ce soir, elle était souffrante et cela s'entendait. Pas tant dans les parties les plus virtuoses de ses airs, que dans les récitatifs, chantés bien sûr, que comporte l'opéra.
Qu'il doit être difficile de choisir entre renoncer à chanter au risque de décevoir les nombreux spectateurs et chanter tout de même en désespérant de ne pas être au meilleur de soi.
Quoique les autres chanteurs fussent très bons, ces imperfections eussent fait que cette soirée n'eût été qu'en demi-teinte s'il ne se fît ouïr l'air final Ah ! non giunge uman pensiero, où après avoir rapidement passé une robe rouge en coulisses, la chanteuse se place seule en scène devant un rideau imitant celui de l'Opéra Garnier (où, parfois, comme ce soir, les étoiles sont applaudies à leur entrée en scène). Cela a été plus court, mais je me suis retrouvé à peu près dans le même état que lundi.
⁂
Je ne sais pas depuis combien de temps le réglage des oculaires correspondant aux deux yeux s'était défait, mais au début du deuxième acte, ce n'était plus tenable, j'ai identifié le problème et en prenant soin de faire le réglage œil après œil, j'ai retrouvé une image très nette, me permettant de voir vraiment très bien le visage des chanteurs. Ces jumelles, achetées environ 25€ il y a un an et demi, furent un très bon choix d'équipement.
Dans Le Monde, Renaud Machart moque gentîment la mise en scène :
Pour cette production louée à l'Opéra de Vienne, le metteur en scène Marco Arturo Marelli a transposé l'action, sise dans un village, dans un sanatorium de luxe en montagne. Ce qui est assez piquant quand le Comte Rodolfo, revenu au bercail après une longue absence, s'exclame, alors qu'il est devant un bar et des tabourets Art déco :
Le moulin ! La fontaine ! Le bois ! (...) Je vous reconnais, lieux charmants.
Il oublie malicieusement de préciser qu'au moment où Rodolfo le dit, il ne regarde pas le bar, mais le tableau qui se trouve accroché au-dessus et représente un paysage villageois.
À propos de cette mise en scène, j'avais remarqué qu'un détail avait été
changé par rapport au livret, à savoir que l'objet qui trahit Lisa et ses
jeux folâtres avec le comte n'était pas un fichu mais un soulier (elle a
aussi égaré un bas...). N'entendant pas l'italien, je ne sais pas si le mot
vel
a été changé. En tout cas, pour l'amateur français d'opéra
italien qui se soucierait encore des paroles, on a pris garde à l'Opéra de
Paris de faire paraître le mot soulier
dans les sur-titres (c'est à
peu près le seul moment de la soirée où j'ai formé le dessein de les
lire).
2010-01-26 02:00+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2010-01-25
Michele Pertusi, Il Conte Rodolfo
Cornelia Oncioiu, Teresa
Natalie Dessay, Amina
Marie-Adeline Henry, Lisa
Javier Camarena, Elvino
Nahuel Di Pierro, Alessio
Jian-Hong Zhao, Un Notaro
Evelino Pidò, direction musicale
Marco Arturo Marelli, mise en scène, décors et lumières
Darmar Niefind, costumes
Patrick Marie Aubert, chef de chœur
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
La Sonnambula, Bellini
Ce lundi, lors de la première de La Sonnambula à l'Opéra Bastille (véritable première : c'est l'entrée au répertoire de l'Opéra de cette œuvre de Bellini créée en 1831), on annonce que Natalie Dessay est souffrante depuis quelques jours, brouhaha dans la salle, mais qu'elle assurera son rôle. L'opinion générale est qu'elle a fait un peu mieux qu'assurer. C'est carrément l'extase !
C'était le moment de la saison opératique que j'attendais le plus avidement. Le moins que je puisse dire est que je n'ai pas été déçu par ce spectacle d'opéra, parmi les plus belles choses qui se puissent entendre. J'ai déjà eu l'occasion de discuter de l'intrigue et des œuvres qui par transpositions successives ont conduit à cet opéra 1. Je n'y reviens plus.
La mise en scène de Marco Arturo Marelli n'est pas désagréable à regarder. Le décor (unique) est une vaste salle d'un hôtel dans les Alpes suisses. C'est cohérent avec le livret qui fait de Lisa une aubergiste. Ce qui l'est moins, dans cette approche visuellement réaliste, c'est de n'avoir pas suggéré la chambre de Rodolfo où, après sa première crise de somnambulisme, Amina s'endort. On la voit ici s'allonger dans la salle de banquet. Lors des apparitions d'Amina, les témoins chantent parfois en regardant dans la direction opposée, ce qui produit un effet peu crédible. Comme il l'explique dans le programme, une des idées du metteur en scène est de rapprocher ce séjour suisse d'une retraite effectuée par le compositeur quelques mois avant de composer son ouvrage (il pensait alors écrire un (H)Ernani). Ce n'est que marginalement visible dans la mise en scène, mais il faudrait imaginer que Rodolfo est un compositeur. Bref, si elle n'est pas génialissime, cette mise en scène n'est en rien déplaisante (pas de quoi justifier les huées, quelqu'éparses qu'elle fussent, qui accompagnèrent l'arrivée de l'équipe de production lors des saluts).
Ce n'est je crois que la deuxième fois qu'un opéra me met dans des états pareils. La première fois, c'était lors de la première de Padmâvatî au Châtelet. La jouissance était alors davantage visuelle que musicale, même si l'impressionnisme de Roussel exacerbait mon sentiment général à propos de cet opéra-ballet. Ce soir, c'était avant tout la voix de Natalie Dessay qui détenait la faculté de déclencher des réactions jubilatoires. Lors de la retransmission du Met, cela ne m'avait tout à fait atteint que lors de l'avant-dernier air Ah ! no credea mirarti (j'avais même été plus impressionné par le rôle d'Elvino chanté par Juan Diego Flórez). Dans la salle de l'Opéra Bastille, l'effet de la voix de Natalie Dessay a été immédiat, dès les premiers airs du premier acte, dont je perçois enfin l'immense beauté. S'il n'est sans doute pas aussi enthousiasmant qu'un Flórez ou un Meli, Javier Camarena fait un bon Elvino. Les autres chanteurs, notamment Michele Pertusi (Rodolfo), assurent très-convenablement leur rôle aussi bien par leur chant que par leur jeu.
À voir, à revoir. (Cette production sera filmée. Une retransmission radiophonique est prévue le 27 février sur France Musique.)
[1] Un des textes du programme (tiré des mémoires de l'épouse du librettiste Felice Romani) confirme d'ailleurs que l'idée de faire de Rodolfo le père d'Amina était bien de lui, qu'il avait écrit une scène où Rodolfo révélait sa paternité à la présumée orpheline. Le seul vestige de cet ajout envisagé à l'intrigue se trouve allusivement dans les paroles de Rodolfo :
Elle est fort gentille et gracieuse
Laisse-moi te regarder. Oh, quel joli minois !
Tu ne sais pas combien ces beaux yeux
Font doucement battre mon cœur,
Comme tu rappelles à mes pensées
Une adorable beauté.
Elle était, ah ! telle que tu es,
Au matin de sa vie.
2010-01-23 01:39+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Théâtre du Châtelet — 2010-01-22
Lina Tetriani, Norma
Paulina Pfeiffer, Adalgisa
Nikolai Schukoff, Pollione
Nicolas Testé, Oroveso
Blandine Staskiewicz, Clotilde
Luciano Botelho, Flavio
Ensemble Matheus
Chœur du Châtelet
Jean-Christophe Spinosi, direction musicale
Nicholas Jenkins, chef de chœur et assistant du chef d'orchestre
Peter Mussbach, mise en scène et décors
Daniela Juckel, décors
Andrea Schmidt-Futterer, costumes
Alexander Koppelmann, lumières
Axel Bott, dramaturgie
Norma, Bellini
Je n'étais pas retourné au théâtre du Châtelet depuis un an et demi. La dernière fois, c'était pour un concert du dimanche matin avec Le Concert français dirigé par Pierre Hantaï et la fois précédente, c'était pour Padmâvatî de Roussel.
Cette fois-ci, c'est pour Norma de Bellini, qui, hasard du calendrier intervient presqu'en même temps que la production de La Sonnambula du même compositeur à l'Opéra Bastille.
Les décors du metteur en scène Peter Mussbach et de Daniela Juckel sont conceptuels. Un grand vide bordé de trois murs. Une grande boule, représentation d'une divinité lunaire, est un totem que déplacent les Gaulois. Les membres du chœur, des comédiens et une acrobate restent sur scène en permanence. Ils portent des costumes ternes. Les couleurs changeantes des murs, des éléments de décor, des costumes, sont presqu'entièrement le fruit des lumières. La scène sera ainsi toute verte, toute rouge, bleue, etc, suivant la situation. Ce procédé est d'autant plus éclatant quand une tâche de lumière colorée suit un personnage, en l'occurrence Oroveso (Nicolas Testé), le chef des druides. C'est le père de Norma (Lina Tetriani), sorcière-prêtresse censée annoncer l'oracle aux Gaulois. Elle a eu deux enfants (interprétés par des sortes de poupées !) du proconsul romain Pollione (Nikolai Schukoff) dont la moitié haute du corps est dorée par le maquillage. Celui-ci doit rentrer à Rome, et plutôt que Norma, c'est la jeune Adalgisa (Paulina Pfeiffer) qu'il aimerait emmener. Norma est jalouse, elle veut mener sa vengeance à son terme en se servant du pouvoir que sa religion lui donne sur les Gaulois. Norma envisagera de sacrifier ses enfants (comme Médée...), puis annoncera à son peuple qu'il faut non seulement sacrifier à leur divinité le profanateur Pollione, mais aussi une jeune fille qui s'est compromise avec lui. Jusqu'au dernier moment, elle hésitera. Finalement, elle se dénoncera elle-même pour rejoindre Pollione dans la mort. Ce dernier loue une femme qu'il perd. Je me demande un moment s'il pense à Adalgisa ou à Norma, mais il semble bien qu'il s'agisse de Norma, bien plus forte qu'il l'avait pensée.
Musicalement, c'est très beau. Autant je n'avais pas du tout été convaincu par l'Ensemble Matheus dirigé par Jean-Christophe Spinosi dans L'Oratorio de Noël, autant dans Bellini, cela rend bien. Les chanteurs des trois ou quatre rôles principaux sont bons. Bien sûr, quand le public a entendu des centaines de fois l'air Casta Diva chanté par Maria Callas (le nombre de films qui l'utilisent dans leur bande son est assez invraisemblable), il est difficile que la comparaison ne paraisse pas défavorable (simplement parce que les détails d'interprétation sont différents, et qu'on pourrait attribuer à une faute ou une faiblesse ce qui n'est qu'un choix, pas forcément moins pertinent). Lina Tetriani, qui a été annoncée souffrante à l'entr'acte, s'en est très bien sortie. Dans ses airs, Nikolai Schukoff montre ses talents de bel cantiste. La première scène du deuxième acte met en scène un superbe duo entre Norma et Adalgisa, cette dernière étant prête à sacrifier son amour de Pollione pour son aînée.
Une partie du public a lancé des huées à la fin du premier acte et lors des saluts. Je ne sais pas si cela visait Spinosi ou bien le metteur en scène qui n'était pas là pour saluer. Pour ma part, j'ai trouvé que cette production était réussie.
PS: L'utilisation de toute la profondeur du plateau fait qu'il vaut mieux être au centre pour bien profiter de cette mise en scène, ce qui était mon cas vu que j'étais au premier balcon, plein centre, avec néanmoins devant moi un pilier, qui n'est pas très gênant : à un moment, Norma et Adalgisa étaient toutes les deux côté cour dans l'axe du pilier, mais par vision stéréoscopique, Adalgisa de l'œil gauche, Norma de l'œil droit (à moins que ce ne soit le contraire), je les voyais toutes les deux simultanément (cela marche bien sûr aussi derrière des jumelles).
2010-01-22 02:05+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Théâtre — Lectures
Opéra Comique — 2010-01-21
Lucy Crowe, Soprano, Juno
Andrew Foster-Williams, Bass, Coridon, Winter, Hymen, Sleep
Claire Debono, Mystery, First Fairy, Nymph, Spring
Miriam Allan, Anna Devin, Claire Debono, Maud Gnidzaz, Fairies
Ed Lyon, Tenor, Adam, Secrecy
Sean Clayton, Tenor, Summer
Callum Thorpe, Bass
Emmanuelle de Negri, Soprano, Night, The Plaint
Robert Burt, Mopsa
Andrew Davies, Phoebus
David Webb, Autumn
Helen Jane Howells, Eve
William Gaunt, Theseus
Robert East, Egeus
Alice Haig, Hermia
Nicholas Shaw, Lysander
Gwilym Lee, Demetrius
Jo Herbert, Helena
Roger Sloman, Starveling
Robert Burt, Flute
Desmond Barrit, Bottom
Paul Mc Cleary, Quince
Brian Pettifer, Snug
Jack Chissick, Snout
Sally Dexter, Titania
Jotham Annan, Puck
Finbar Lunch, Oberon
Laura Caldow, Omar Gordon, Samuel Guy, Anthony Kurt-Gabel, Jarkko Lehmus, Caroline Lynn, Maurizio Montis, Sarah Storer, Danseurs
Adel Aïssani, Riad Ghelazi, Lucien Pech, Indian Boy (en alternance)
Les Arts Florissants
William Christie, direction musicale
Jonathan Kent, mise en scène
Paul Brown, décors et costumes
Mark Henderson, lumières
Kim Brandstrup, chorégraphie
Francesca Giplin, assistante mise en scène
Joanna O'Keeffe, assistante chorégraphie
François Bazola, chef de chœur
Sophie Decaudaveine, conseillère linguistique
The Fairy Queen, Purcell
Les spectacles à l'Opéra Comique qu'il m'a été donné de voir rivalisent d'adresse à m'enthousiasmer. Le dernier en date est The Fairy Queen, semi-opéra de Purcell, dont la partition a été perdue pendant deux siècles ! Je ne m'étais pas renseigné sur cette œuvre. Je découvre ainsi qu'un semi-opéra est un spectacle intermédiaire entre le théâtre et l'opéra. À vrai dire, les musiciens, les comédiens et les chanteurs ne sont pas les seuls à rassasier les sens du spectateur puisqu'on verra aussi évoluer des danseurs !
Le livret est inspiré (vaguement nous dit le metteur en scène Jonathan Kent) de la pièce de Shakespeare Le songe d'une nuit d'été. Tout se passe dans un décor unique mais multiforme. Il commence par figurer l'intérieur du duc Theseus, puis il se déstructure pour représenter la forêt où les amoureux Lysander et Hermia ont promis de se rejoindre, suivis de près par Helena qui n'est point aimée de Demetrius en retour. La reine des fées et Oberon se disputent. Puck, le serviteur d'Oberon, se trompe de destinataire pour les charmes que lui suggère son maître, ce qui fait que la reine des fées se trouvera en amour avec le tisserand Bottom transformé en âne et que Lysander et Demetrius vont fuir Hermia pour se disputer Helena. Quand le jour paraîtra, tout sera rentré dans l'ordre et les personnages auront eu l'impression de faire un songe.
Tout ce spectacle est so British. Par exemple, les artisans jouent une pièce de théâtre inspirée de la légende de Pyrame et Thisbé racontée par Ovide. Les artisans jouent tellement mal leur pièce à l'intérieur de la pièce que c'en est à hurler de rire. Le comédien qui interprète Bottom (Desmond Barrit) est très impressionnant.
Le décor est unique, mais cela bouge beaucoup. Une trappe permet de rapides et multiples apparitions-disparitions de personnages. On a presque peur pour les danseurs qui arrivent à ne pas tomber dans le trou. Certains, comme Phoebus et Juno sont suspendus dans les cieux.
Le spectacle est très long : cela commence à 20h et finit peu avant minuit, avec un seul entr'acte d'une demi-heure. Bref, il ne s'en ai pas fallu de beaucoup pour que j'arrive à prendre le dernier RER B (qui, n'étant omnibus qu'à partir de Massy-Palaiseau, est plus rapide que ceux qui précèdent). Long, mais en rien ennuyeux.
2010-01-21 01:46+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Lectures
Opéra Bastille — 2010-01-20
Andrew Richards, Werther
Ludovic Tézier, Albert
Alain Vernhes, Le Bailli
Andreas Jäggi, Schmidt
Christian Tréguier, Johann
Sophie Koch, Charlotte
Anne-Catherine Gillet, Sophie
Alexandre Duhamel, Brühlmann
Olivia Doray, Kätchen
Michel Plasson, direction musicale
Benoît Jacquot, mise en scène
Charles Edwards, décors et lumières originales
Christian Gasc, costumes
André Diot, lumières
Orchestre de l'Opéra national de Paris
Maîtrise des Hauts-de-Seine / Chœur d'enfants de l'Opéra national de Paris
Werther, Massenet
L'opéra Bastille voit se succéder les Werther maudits. L'an dernier, Villazón avait annulé la première. Cette année, pour la représentation de ce soir, Jonas Kaufmann a été remplacé par Andrew Richards qui a interprété fort honorablement le rôle de Werther dans l'opéra éponyme de Massenet.
J'avais plutôt apprécié la production de Jürgen Rose. Celle dont l'Opéra a fait l'acquisition, mise en scène par Benoît Jacquot au Royal Opera House (2004), m'a enthousiasmé bien au-delà. Le seul faux pas me semble résider dans le port de lunettes teintées par Werther lors de son entrée en scène. Bagatelle.
Les quatre décors (un par acte) sont en pente. Le mur d'enceinte et la porte d'entrée sur le domaine du bailli, les abords du temple (que l'on ne voit pas), le salon de Charlotte, la chambre de Werther. Les costumes sont classiques. Albert est en rouge, Werther en bleu, Charlotte en blanc, Sophie en violet. Si on excepte le début du troisième acte, trop sombre, j'ai trouvé que l'utilisation des lumières était extrêmement pertinente.
Depuis la dernière fois, j'ai pris le temps de lire le roman épistolaire de Goethe, Les souffrances du jeune Werther, que j'ai lu dans la sublime version française que constitue la traduction de Charles-Louis de Sévelinges, rendue plus élégante par Pierre Leroux qui n'entendait pas l'allemand et revue récemment par Christian Helmreich, Le Livre de Poche, collection Les Classiques de Poche. À ma surprise, Sophie, la sœur cadette de Charlotte, est un personnage qui n'apparaît que dans l'opéra. Elle est interprétée par Anne-Catherine Gillet, qui m'avait impressionné dans l'air de Micaëla de Carmen. C'est d'ailleurs dans cette Carmen que j'avais entr'aperçu Andrew Richards. Il n'avait pu assurer son rôle de Don José que pendant les deux premiers actes et avait été remplacé par un ténor brésilien anonyme.
Son interprétation du rôle de Werther est tout à fait convaincante. Toutefois, la prononciation de certaines voyelles lui pose occasionnellement quelques problèmes. Charlotte est interprétée par Sophie Koch que je n'avais entendue qu'une seule fois, dans le final de la neuvième symphonie de Beethoven en 2005 au TCE avec l'Orchestre Lamoureux. La tension dramatique et l'importance de ce rôle augmentent à chaque acte jusqu'à la scène finale, très lyrique.
Dans le rôle d'Albert, on trouvera cette année aussi Ludovic Tézier. Par rapport au roman, Albert est plus en retrait. On ne saura pas grand'chose de lui si ce n'est qu'il est l'homme que Charlotte avait promis d'épouser à sa mère sur son lit de morte. Dans le roman, on le voit volontiers philosopher avec Werther, qui est fasciné par le suicide... Dans cette version toutefois, un détail dans l'attitude d'Albert laisse à penser qu'il est parfaitement conscient de l'usage que Werther entend faire des pistolets qu'il lui prête pour un prétendu voyage. Dans le roman, seule Charlotte semblait envisager la fatale issue.
Les amateurs du son de la harpe seront comblés dans les derniers actes. Le directeur musical Michel Plasson (76 ans !) a manifestement plus de mal à marcher qu'à diriger l'orchestre de l'Opéra. En tout cas, il fait de la musique de Massenet un délice de musique continue, seulement interrompu par les deux entr'actes.
La représentation du 26 janvier sera retransmise en direct sur Arte et sur Internet (ArteLiveWeb).
PS: Il m'a semblé que le surtitrage a été remonté, le rendant seulement à moitié visible depuis le rang 7 du premier balcon de côté. Cela paraît curieux par rapport à l'utilisation de l'espace scénique : seule la moitié de la hauteur disponible était utilisée, de sorte qu'il n'eût résulté aucune gêne de ce qu'on descendît légèrement l'appareil.
2009-12-19 02:35+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse
Opéra Bastille — 2009-12-18
Marcelo Alvarez, Andrea Chénier
Sergei Murzaev, Carlo Gérard
Micaela Carosi, Maddalena di Coigny
Francesca Franci, La Mulatta Bersi
Stefania Toczyska, La Contessa di Coigny
Maria José Montiel, Madelon
André Heyboer, Roucher
Igor Gnidii, Il Romanziero (Pietro Fléville)
Antoine Garcin, Fouquier-Tinville
David Bizic, Il Sanculotto Mathieu
Carlo Bosi, Un Incredibile
Bruno Lazzaretti, L'Abate
Ugo Rabec, Schmidt
Lucio Prete, Il Maestro di Casa
Guillaume Antoine, Dumas
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
Giancarlo Del Monaco, mise en scène
Carlo Centolavigna, décors
Maria Filippi, costumes
Wolfgang von Zoubek, lumières
Laurence Fanon, chorégraphie
Patrick Marie Aubert, chef du chœur
Daniel Oren, direction musicale
Andrea Chénier, Umberto Giordano
C'est un très beau spectacle d'opéra que la production d'Andrea Chénier d'Umberto Giordano qui passe actuellement à l'Opéra Bastille. Le style de la musique de Giordano fait parfois penser à celle de Puccini. Ceux qui aiment le son de la harpe seront servis.
Les décors sont superbes. Le premier tableau représente une fête chez la
comtesse de Coigny en 1789. Un sofa est déplacé par des serviteurs (au
passage, dans la traduction du livret que j'ai lue, ce mot était
orthographié sopha
). Les lumières du lustre sont allumées. La fille
de la comtesse, Maddalena, entre avec sa servante, la mulâtre Bersi. Elle
doit s'habiller avant que les invités arrivent. Ceux-ci ont des costumes
d'époque et des coiffures extravagantes. Un mini-spectacle de ballet et de
musique se déroule sur une petite scène au fond de la scène. Considérant
son sort et celui de son père, le serviteur Gérard se désole du caractère
héréditaire de sa condition. Des pauvres viennent manifester leur faim et
le décor commence à se disloquer. Entretemps, le poète André de Chénier
aura séduit Maddalena par ses vers, qui outre son inclination pour elle
décèlent des critiques de la noblesse et du clergé. L'atmosphère
révolutionnaire se met en place.
Au cours du deuxième tableau, autant Maddalena que Chénier sont menacés. Nous sommes en 1794, c'est la Terreur. De grands mouvements de foule, des têtes défilent sur des piques, des drapeaux tricolores flottent, plus tard on entendra la Carmagnole et la Marseillaise. Gérard est devenu un leader révolutionnaire. Chénier est trop modéré. Maddalena tente d'entrer en contact avec lui, alors que celui-ci envisage de quitter le pays. Ils sont surpris par un espion. Dans le feu de l'action, Chénier blesse Gérard, qui ne le dénonce pas.
Au troisième tableau, Gérard change d'attitude. Il est lui aussi épris
de Maddalena. Il pense à se débarasser de Chénier. Il écrit des accusations
pour le tribunal révolutionnaire. Au cours de ce tableau, le bel air de
Madelon qui fait enrôler son petit-fils contre les contre-révolutionnaires
et les autres ennemis de la Révolution. Marie-Aude Roux, dans Le
Monde, semble déplorer que cet air soit statique. Pourtant, Madelon
étant censée vivre ses derniers jours, il n'est pas aberrant qu'on la fasse
asseoir. Cela dit, que Gérard soit assis pendant son grand air dans ce
tableau est plus gênant (certes, il est blessé, mais il tient sur ses
jambes). Vient ensuite les procès. Les juges ont les spectateurs dans le
dos. Ils font face au chœur qui s'est installé dans une sorte de théâtre à
l'italienne (j'aimerais bien savoir quel est le modèle de ce décor ; à
moins que les tribunaux révolutionnaires eussent réquisitionnés des lieux
insolites, cela paraît curieux). Gérard a été rejoint par Maddalena. Il a
encore changé d'avis. Il va prendre la défense de Chénier qui a pour sa
part réussi, contrairement à la tradition de 1794, à prendre la parole lors
de son propre procès. Le grand'inquisiteur^W
accusateur public
Fouquier-Tinville reprend les accusations qu'avaient faites Gérard à son
compte. Chénier est condamné à mort malgré les protestations du public.
La fin est un sommet de lyrisme. Maddalena décide de rejoindre Chénier dans la mort. En corrompant son gardien, elle se substitue à une femme condamnée à mort en même temps que Chénier. Après un superbe duo d'amour, il courent littéralement à la mort ensemble.
Cela doit être unde des premières fois que je vois une production d'opéra qui propose des images conforment au cadre historique de l'intrigue (l'autre exception serait Don Carlo). Si cela serait ridicule pour une opéra-comique comme Le Roi malgré lui, pour un sujet aussi unique que celui de la Révolution française, même si ce n'est sans doute pas la seule option (j'ai cru comprendre que ce n'est pas ce qui avait été fait pour la dernière production de Fidelio à l'Opéra de Paris), cela semble un choix tout à fait défendable. Bref, je suis très content du travail de mise en scène de Giancarlo Del Monaco et des décors de Carlo Centolavigna.
Du côté des voix, on est bien servi avec les trois rôles principaux : Andrea Chénier (Marcelo Alvarez), Maddalena di Coigny (Micaela Carosi) et Carlo Gérard (Sergei Murzaev). Je n'ai pas d'éléments de comparaison vu que j'entendais cet opéra pour la première fois. Pour une raison qui m'échappe, le chef d'orchestre Daniel Oren a été la cible de quelques huées, heureusement couvertes par les applaudissements.
2009-12-09 01:48+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse
Opéra Garnier — 2009-12-08
Xavier Mas, Thespis
Marc Labonnette, Un Satyre
Aimery Lefèvre, Momus
Mireille Delunsch, Thalie, La Folie
Judith Gauthier, L'Amour, Clarine
Paul Agnew, Platée
Alain Vernhes, Cithéron
François Lis, Jupiter
Yann Beuron, Mercure
Doris Lamprecht, Junon
Laurent Pelly, mise en scène, costumes
Chantal Thomas, décors
Laura Scozzi, chorégraphie
Joël Adam, lumières
Agathe Mélinand, dramaturgie et collaboration à la mise en scène
Nicholas Jenkins, chef du chœur
Jory Vinikour, responsable des études musicales
Marc Minkowski, direction musicale
Chœur et musiciens du Louvre-Grenoble
Platée, Jean-Philippe Rameau
Je reviens de l'Opéra Garnier où avait lieu ce soir la troisième représentation de la reprise de la production de la comédie lyrique Platée de Rameau mise en scène par Laurent Pelly.
Pour la première fois, je me retrouve à l'amphithéâtre. Si on fait plus d'un mètre soixante, on n'a pas de place pour les genoux. Si on en fait moins, les pieds ne touchent pas le sol. On en ressort tout cabossé. Bref, à éviter. Le seul avantage est que l'on a un des meilleurs rapport visibilité/prix. Depuis le centre de l'avant-dernier rang, j'avais vue sur toute la scène. Ce qui était ennuyeux, c'est que l'écran des surtitres était situé juste derrière le grand panneau supérieur de la scène (où est écrit la date de la fondation de l'Académie Royale de Musique). De là, on ne pouvait lire que la ligne du bas. Seul un effet de parallaxe permettait peut-être aux spectateurs des étages inférieurs de lire les surtitres. Je trouve ce genre de bugs d'organisation tout à fait ahurissants.
Heureusement, je connaissais déjà l'histoire (ayant reçu il y a quelque temps un DVD de cette production en prêt) et les chanteurs arrivaient vraiment à se bien faire entendre. Les décors de Chantal Thomas (à ne pas confondre avec ses quasi-homonymes) sont faits de rangées de sièges de théâtre (peut-être est-ce en relation avec Thespis, un précurseur du théâtre, qui intervient dans le prologue). Platée, interprétée par Paul Agnew, est une grenouille à qui on fait accroire que Jupiter s'est épris d'elle. Celui-ci voit là un moyen de s'amuser de la jalousie excessive de Junon. À la fin, tout le monde aura ri au détriment de la grenouille.
Les costumes de Laurent Pelly sont charmants. Le plus étonnant est celui du personnage de la Folie (Mireille Delunsch) : une robe couverte de partitions plus ou moins flottantes. En pleine folie créatrice, elle en déchirera même quelques unes. Les costumes de la grenouille sont intéressants aussi ; le visage de Paul Agnew est complètement fardé. Jupiter (François Lis) et Junon (Doris Lamprecht) brillent en mauve.
L'ouvrage comporte de nombreuses et variées parties dansées (chorégraphie de Laura Scozzi). Le vent est ainsi figuré par une scène de danse où des danseuses ont les cheveux qui tombent à l'horizontale. On verra aussi des couples faire de la danse assez acrobatique. Les nombreuses suivantes de la Folie ont aussi plusieurs scènes de danse amusantes.
Tout est motif à l'amusement. La musique, le texte et tout le reste. Ainsi, entre le deuxième et le troisième acte, une grenouille descendra d'une baignoire pour rejoindre l'orchestre, embêter les musiciens et même diriger l'orchestre du Louvre-Grenoble ordinairement dirigé par Marc Minkowski.
2009-11-14 17:33+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse
Opéra Bastille — 2009-11-13
Thomas Moser, Herodes
Julia Juon, Herodias
Camilla Nylund, Salomé
Vincent Le Texier, Jochanaan
Xavier Mas, Narraboth
Varduhi Abrahamyan, Page der Herodias
Wolfgang Ablinger-Sperrhacke, Erster Jude
Eric Huchet, Zweiter Jude
Vincent Delhoume, Dritter Jude
Andreas Jäggi, Vierter Jude
Gregory Reinhart, Fünfter Jude
Nahuel Di Pierro, Erster Nazarener
Ugo Rabec, Zweiter Nazarener
Nicolas Courjal, Erster Soldat
Scott Wilde, Zweiter Soldat
Antoine Garcin, Ein Cappadocier
Grzegorz Staskiewicz, Ein Sklave
Alain Altinoglu, direction musicale
Lev Dodin, mise en scène
David Borovsky, décors et costumes
Jean Kalman, lumières
Yury Visalkov, chorégraphie
Mikhail Stronine, dramaturgie
Valery Galendeev, collaboration à la mise en scène
Orchestre de l'Opéra national de Paris
Salomé, Richard Strauss
Je viens de relire le texte de la pièce d'Oscar Wilde, Salomé, écrite directement en français. On le trouve sur Gallica et dans le programme de la production présentée à l'Opéra Bastille, en face de la traduction de Hedwig Lachmann. En effet, à quelques modifications et coupes près, c'était essentiellement le texte de l'opéra de Strauss qui j'ai lu en surtitres pendant de la représentation d'hier.
L'opéra raconte l'amour de Salomé pour Jochanaan (Jean le Baptiste), qui la repousse, lui qui est obnubilé par l'arrivée du Messie. Hérode, son beau-père doublement incestueux la fait danser après avoir juré lui donner ce qu'elle voudrait après. Salomé insiste pour obtenir la tête de Jochanaan dans un bassin d'argent. Avant cela, il faut la lui couper, ce que Hérode n'est pas près à faire, craignant le saint homme qu'il a enfermé afin de le protéger des Juifs (qui n'ont l'air d'accord sur rien si ce n'est qu'il faut le leur remettre). Une fois qu'elle a récupéré la tête, Salomé délire et peut faire ce que Jochanaan vivant lui refusait, à savoir l'embrasser. Finalement, Hérode ordonne que l'on tue aussi Salomé.
La musique de cet opéra, avec ses motifs à la Wagner, est envoûtante. Si je ne connais pas suffisamment la langue allemande pour vraiment suivre ce qui se dit, je me suis surpris à en comprendre parfois quelques expressions.
Avant de voir l'opéra, sachant que la voix du jeune syrien (Narraboth)
intervient seulement quelques secondes après que la musique a retenti pour
dire Wie schön ist die Prinzessin
, je me demandais comment l'entrée
en scène aurait lieu. En effet, dans beaucoup de productions d'opéra en
général, on entend une ouverture, rideau baissé, et quand celle-ci se
termine, le rideau est levé, le décor et les personnages apparaissent en
pleine lumière. Ce n'était évidemment pas possible ici. Dans cette
production, on a coupé toutes les lumières du théâtre pour permettre aux
chanteurs de se positionner dans le décor qui sinon était visible. Ainsi,
la musique, les lumières et le chant se sont mis en route en même temps. En
ce qui concerne les lumières, davantage de luminosité n'aurait pas été un
mal : pendant la première demi-heure, entre les personnages secondaires que
sont Narraboth, le page de Hérodias (qui comme tous les pages est chanté
par une femme) et les soldats, il n'était pas évident de voir qui chantait,
même avec les jumelles...
Alors que la Lune auquel le texte fait référence se meut au fond du
décor (qui comporte côté jardin un escalier et la cellule métallique
escamotable où Jochanaan est enfermé), la situation dramatique se clarifie
quand elle se recentre sur Jochanaan et Salomé, puis les mêmes, Hérode et
Hérodias. La danse des sept voiles tombe à plat (au passage, la mention des
sept voiles
apparaît dans le texte de Wilde, mais pas dans le livret
de l'opéra). Si un effet comique est créé par le côté lubrique de Hérode et
Hérodias qui tente de masquer sa fille à sa vue, la danse de Camilla Nylund
n'est guère convaincante.
Les tergiversations qui conduisent à la décapitation de Jochanaan sont peut être un peu longues, Hérodias qualifie même Hérode de ridicule avec les paons qu'il se propose d'offrir à Salomé en remplacement de la tête qu'elle demande qu'on coupe. Cela ne crée qu'une encore plus grande attente pour l'impressionnante scène finale où Salomé soliloque face à la tête inerte.
2009-11-13 01:15+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2009-11-12
Massimo Giordano, Rodolfo
David Bizic, Schaunard
Inva Mula, Mimi
Wojtek Smilek, Colline
Ludovic Tézier, Marcello
Matteo Peirone, Benoît
Rémy Corazza, Alcindoro
Natalie Dessay, Musetta
Pascal Meslé, Parpignol
Andrea Nelli, Sergente dei doganieri
Marc Chapron, Un doganiere
Myoung-Chang Kwon, Un venditore ambulante
Daniel Oren, direction musicale
Jonathan Miller, mise en scène
Dante Ferretti, décors
Gabriella Pescucci, costumes
Guido Levi, lumières
Alessandro Di Stefano, chef de chœur
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
Maîtrise des Hauts-de-Seine / Chœur d'enfants de l'Opéra national de Paris
La Bohème, Puccini
Je suis retourné ce soir voir La Bohème, ce qui m'a aussi donné l'occasion de finir de lire le programme. Cette fois-ci, je suis au deuxième balcon, dernier rang légèrement de côté.
C'est loin, il faut les jumelles pour distinguer quelqu'expression sur le visage des chanteurs. Malgré cela, c'est un vrai plaisir d'être là. Les conditions d'écoute sont merveilleuses. La musique paraît beaucoup plus claire. Je n'ai vraiment pas entendu la même chose que la semaine dernière où j'étais au premier balcon. Bravo à l'orchestre de l'Opéra et à Daniel Oren.
Si j'y suis allé deux fois, c'est qu'il y avait essentiellement deux distributions différentes dans les deux premiers rôles. Si j'avais apprécié Stefano Secco et été un peu déçu par Tamar Iveri, les solistes de ce soir ont fait une très forte impression. A priori, je pouvais craindre de n'entendre pas un volume sonore suffisant depuis les places les plus éloignées du théâtre. Quand Massimo Giordano (Rodolfo) a commencé à chanter, cette crainte s'est évanouie. Il faisait ses débuts à l'Opéra de Paris avec cette production. Quels débuts ! Dans le rôle de Mimi, Inva Mula que j'avais déjà entendue dans Mireille était magnifique. C'était la dernière de Ludovic Tézier dans le rôle de Marcello pour ce passage ; les prochaines représentations seront assurées par Dalibor Jenis. Natalie Dessay a été une bonne actrice qui chante :
Musette : (Maintenant il s'agit de me débarasser du vieux)
(feignant d'éprouver une vive douleur)
Aïe !Alcindoro : Qu'est-ce ?
Musette : Une douleur ! Une brûlure !
Alcindoro : Où cela ?
Musette : Au pied !
S'il y a un seul détail que je n'aime pas dans les prestations de
Natalie Dessay, c'est que, parfois, quand le rôle fait qu'elle doit crier,
un affreux bruit strident sort de sa bouche (le cas a dû se présenter au
moins dans Lucia di Lammermoor et dans La fille du
régiment). Le Aïe
d'il y a une semaine rentrait dans cette
catégorie. Celui de ce soir était nettement moins déplaisant. L'effet
comique de la situation était peut-être mieux rendu aussi.
C'était une des plus belles soirées d'opéra que j'ai eues. Il est rare d'entendre quatre chanteurs aussi irréprochables dans les quatre rôles principaux d'un opéra, évoluer dans d'aussi beaux décors et une aussi belle musique.
2009-11-04 17:20+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2009-11-03
Stefano Secco, Rodolfo
David Bizic, Schaunard
Tamar Iveri, Mimi
Giovanni Battista Parodi, Colline
Ludovic Tézier, Marcello
Matteo Peirone, Benoît
Rémy Corazza, Alcindoro
Natalie Dessay, Musetta
Pascal Meslé, Parpignol
Andrea Nelli, Sergente dei doganieri
Marc Chapron, Un doganiere
Myoung-Chang Kwon, Un venditore ambulante
Daniel Oren, direction musicale
Jonathan Miller, mise en scène
Dante Ferretti, décors
Gabriella Pescucci, costumes
Guido Levi, lumières
Alessandro Di Stefano, chef de chœur
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
Maîtrise des Hauts-de-Seine / Chœur d'enfants de l'Opéra national de Paris
La Bohème, Puccini
J'étais hier soir à l'Opéra Bastille pour voir La Bohème de Puccini. C'était la troisième représentation de cette saison, et au total la quatre-vingt-troisième dans cette mise en scène de Jonathan Miller à l'Opéra de Paris. J'ai été rejoint quelques minutes avant le début par Akynou. Depuis le milieu du rang 7 du premier balcon de côté, nous voyons les surtitres sans avoir à nous affaler sur nos sièges : l'information qu'un vendeur m'avait donnée selon laquelle le surtitrage avait été baissé un petit peu s'avère exacte.
Les chanteurs des quatre rôles principaux étaient Stefano Secco (Rodolfo), Tamar Iveri (Mimi), Ludovic Tézier (Marcello) et Natalie Dessay (Musetta). C'était la quatrième fois que j'entendais le ténor Stefano Secco. Comme toujours, il a été excellent. De même pour Ludovic Tézier à ceci près que je le voyais pour la septième fois. Lors du premier acte, la soprano Tamar Iveri n'était pas très enthousiasmante ; elle le fut davantage par la suite. Le deuxième acte est superbe. C'est aussi celui où le rôle de Musetta dans lequel Natalie Dessay faisait ses débuts était le plus consistant. Sans compter les CD, DVD et retransmission sur écrans de cinéma, c'est seulement le deuxième rôle d'opéra dans lequel je l'entends. Même si le rôle de Musetta est bien plus petit que celui de Lucia di Lammermoor qu'elle incarnait sur la même scène il y a trois ans, c'est toujours un plaisir de l'entendre.
Grâce à la musique de Puccini, aux chanteurs, aux superbes décors de Dante Ferretti, voilà une très belle production d'opéra.
2009-11-02 20:29+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Je viens d'apprendre que la Fnac Bastille fermera fin décembre. Qu'après ce genre d'opérations on ne s'étonne pas que les gens n'achètent plus de disques.
2009-10-25 02:03+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2009-10-24
Robert Dean Smith, Paul
Ricarda Merbeth, Marietta
Stéphane Degout, Frank/Fritz
Doris Lamprecht, Brigitta
Alexander Kravets, Graf Albert
Elisa Cenni, Juliette
Letitia Singleton, Lucienne
Alain Gabriel, Victorin
Serge Luchini, Gaston
Pinchas Steinberg, direction musicale
Willy Decker, mise en scène
Meisje Barbara Hummel, réalisation de la mise en scène
Wolfgang Gussmann, décors, costumes
Wolfgang Goebbel, lumières
Athol Farmer, chorégraphie
Patrick Marie Aubert, chef des chœurs
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
Maîtrise des Hauts-de-Seine / Chœur d'enfants de l'Opéra national de Paris
Die tote Stadt, Erich Korngold
Je reviens de l'Opéra Bastille, où je n'avais mis les pieds pour assister à une représentation depuis cinq mois.
J'ai donc vu Die tote Stadt, opéra d'Erich Korngold. Le nom du compositeur ne dit peut-être pas grand'chose à grand'monde. Pourtant, on lui doit la musique de quelques films classiques comme Les aventures de Robin des bois (avec Errol Flynn).
L'histoire est un peu compliquée. À vrai dire, il ne se passe pas grand'chose de réel. On est en plein onirisme. Presque tout se passe dans un rêve (plutôt un cauchemar) de Paul. Il habite Bruges et a consacré une pièce de sa maison à la mémoire de sa défunte épouse. En apercevant une femme qui lui ressemble beaucoup, il croit avoir l'impression qu'elle revit. Cette femme, une danseuse, envahit son rêve. Ils se désirent, mais il n'est attirée par elle que parce qu'elle ressemble à sa femme, ce qu'elle ne peut accepter : elle se moque de lui. À la fin, il l'étrangle... Finalement, tout se termine bien : il se réveille, la danseuse revient le voir, comme si de rien n'était. Il finit par abandonner sa maison (il y a d'ailleurs un vrai suspense à la toute fin de l'opéra : de quel côté de la porte finira-t-il ?).
La mise en scène du premier acte est très statique. Aux deuxième et
troisième, elle devient beaucoup plus intéressante. Le décor principal
représente une pièce dans la maison de Paul. Un portrait de sa femme est
visible. Quand il se met à rêver, une reproduction de cette pièce apparaît
au fond de la scène. Malheureusement pour les spectateurs du deuxième
balcon dont je faisais partie, on ne voyait de là que la moitié basse de
cet élément du décor où évoluaient des personnages, puisqu'un rideau opaque
situé en haut de la scène réduisait l'angle solide de visibilité. Pour
souligner le flou onirique, le plafond et les murs étaient quelque peu
déstructurés, en particulier, le plafond blanc de la pièce bougeait dans
tous les sens, cachant aussi un peu ce qu'il y avait derrière. Je ne
comprends pas comment on peut faire aussi peu de cas des spectateurs,
comment est-il possible que personne n'ait dit : Stop ! Si on persiste à
faire ça, on gâche le spectacle pour 20-25% des spectateurs. Remontons ces
machins dans les cintres.
.
Ce point noir est compensé par la qualité des autres aspects de la mise en scène, et bien sûr par la musique. La musique est agréable à écouter. Elle fait souvent penser à Strauss et à Wagner, c'est dire si cela peut être exigeant pour les chanteurs. Les deux interprètes principaux (Robert Dean Smith, Ricarda Merbeth) faisaient leurs débuts à l'Opéra avec cette production et ils ont été formidables.
2009-10-15 06:47+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Qu'il est décevant de recevoir une annonce Natalie Dessay :
J-6 avant le nouvel album
pour découvrir, à la lecture de la liste
des titres, qu'il n'y a rien de nouveau dans ce disque, toutes ces scènes
de la folie figurant dans des disques que les dessayöphiles ont déjà dans
leur discothèque. La scène de la folie de Lucia di Lammermoor et
d'I puritani (Elvira) sont dans Airs d'opéras italiens.
La version française extraite de Lucie de Lammermoor est dans
Le miracle d'une voix (et dans l'enregistrement intégral de cet
opéra), tout comme Glitter and be gay (Cunégonde) et Ombre
légère (Dinorah). La scène de la folie d'Ophélie est dans Airs
d'opéras français.
Vu les noms des chefs d'orchestre, il semble qu'il s'agisse bien des mêmes enregistrements que ceux déjà publiés. Comment recycler du (pas si) vieux pour faire du soi-disant neuf.
Bien sûr, ce n'est pas ça qui me fera commencer à détester Natalie Dessay. Je me réjouis de l'entendre bientôt dans La Bohème, Das Weihnachts-Oratorium et La Sonnambula (œuvres que j'apprécie, pas comme Ein deutsches Requiem). Que ceux qui ne connaissent pas Natalie Dessay la découvrent avec ce disque, c'est tant mieux, mais il eût été plus élégant de ne pas prendre les autres pour des c....
2009-09-27 02:25+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Garnier — 2009-09-26
Inva Mula, Mireille
Charles Castronovo, Vincent
Franck Ferrari, Ourrias
Alain Vernhes, Maître Ramon
Sylvie Brunet, Taven
Sébastien Droy, Andreloun
Nicolas Cavallier, Maître Ambroise
Amel Brahim-Djelloul, Clémence
Anne-Catherine Gillet, Vincenette
Ugo Rabec, Le Passeur
Christian Rodrigue Moungoungou, Un Arlésien
Sophie Claisse, Une Voix d'en-haut
Alexandre Duhamel, L'Écho
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
Nicolas Joel, mise en scène
Ezio Frigerio, décors
Franca Squarciapino, costumes
Vinicio Cheli, éclairages
Patrick Segot, chorégraphie
Patrick Marie Aubert, chef du chœur
Marc Minkowski, direction musicale
Mireille, Charles Gounod
Après avoir vu l'exposition, je suis allé ce soir voir une représentation de Mireille, opéra méconnu de Gounod, qui s'installe pour la première fois à l'Opéra. Il n'était pas gagné que je puisse entrer, vu que je n'ai pas encore payé mes places. Pourtant, ce n'est pas faute d'y avoir mis de la bonne volonté et du temps. Un formulaire d'abonnement envoyé fin mars/début avril, traité en juin. Entretemps, aucune somme n'a été débitée sur mon compte. Quelques coups de téléphone en septembre pour s'en étonner. À mon arrivée à Garnier, la queue pour retirer des billets est étonnamment longue. Je ne suis manifestement pas le seul dans ce cas. Le duplicata de billet est écrit à la main sur un tout petit bout de papier, numéroté 49979. Aimant bien utiliser mes billets d'opéra comme marque-pages, j'ai perdu une occasion de me ravitailler.
Je ne connais pas du tout Gounod. Dans ma discothèque, je n'ai que la valse Je veux vivre de Roméo et Juliette chantée par Natalie Dessay et l'air des bijoux de Faust (cf. Castafiore) par Anna Moffo. A fortiori, je découvrais cet opéra Mireille dont j'avais cependant eu le temps de lire le livret. Une histoire apparemment typique d'opéra où la soprano et le ténor s'aiment mais où le baryton veut les en empêcher.
La particularité de cet opéra est que l'action est située en Provence.
Il s'agit d'une adaptation d'un poême de Frédéric Mistral. Mireille et
Vincent s'aiment, mais Vincent est de moindre niveau social, il n'est que
vannier. Ils jurent de faire le pèlerinage aux Saintes-Maries si l'un d'eux
venait à souffrir. Lors d'une fête à Arles, Ourrias obtient la main de
Mireille de son père, mais Mireille refuse. Ourrias et Vincent se battent.
Vincent est blessé. Ourrias veut fuir en traversant une rivière, mais le
bateau coule. Effrayée par la relation que lui fait Vincenette (la sœur de
Vincent) de la blessure de Vincent, Mireille entreprend le pèlerinage. Elle
est frappée par le Soleil dans le désert de la Crau. Lorsqu'elle arrive à
l'église, Vincent l'attend, elle se met à délirer, son père tente de se
faire pardonner et la donne à Vincent, mais il est trop tard
.
Je suis plutôt content de ce spectacle. J'ai apprécié la musique fleurie
de Gounod. Une petite déception avec le décor du deuxième acte. Je
m'attendais à voir les arênes d'Arles comme il est prévu que ce deuxième
acte se passe. Dans cette production, le décor champêtre ne change pas
entre le premier et le deuxième acte (l'opéra en compte cinq). Au troisième
acte, le tableau de la noyade d'Ourrias est sombre et de jolis mouvements
de lumières donnent l'illusion que l'eau peinte du décor est recouverte de
mouvantes vagues. J'imaginais cependant que cette scène serait plus
effrayante (un chœur chante Les trépassés sortent glacés du gouffre
sombre !
), comme une traversée du Styx.
Malgré un français imparfait, la soprano Inva Mula a fait une très belle performance, notamment dans la scène de la Crau. J'ai entendu pour la première fois le ténor Charles Castronovo ; il m'a fait une très bonne impression. J'ai réentendu Sylvie Brunet dans un rôle sombre, celui de la sorcière Taven, qui fait ce qu'elle peut pour protéger Mireille et Vincent ; charmant air Voici la saison, mignonne, où les galants font leur choix. Après Padmâvatî, il y avait là une occasion de la voir à nouveau manipuler un trident (la scène où Padmâvatî embrochait son époux Ratan-Sen était assez spectaculaire). Amel Brahim-Djelloul (Clémence) a un trop petit rôle. J'apprécie toujours autant le timbre de la voix d'Anne-Catherine Gillet (Vincenette) que j'avais beaucoup aimée dans l'air air Je dis que rien ne m'épouvante dans Carmen. Toutes les deux faisaient leurs débuts à l'Opéra de Paris. J'en oublie quelques autres, comme l'éternel Alain Vernhes, qui a la voix la plus puissante du lot.
Conseil de placement à Garnier : éviter les deuxièmes rangs de loges. Si j'y avais fait davantage attention, j'aurais fait changer cette place pour ne pas être au deuxième rang d'une troisième loge : on ne voit pas toute la scène et même pour le milieu de la scène, il faut compter sur une configuration compatible des têtes des personnes situées devant. Pour voir mieux, mieux vaut être placé devant quitte à ce que ce soit un peu plus haut.
2009-09-11 20:45+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Expositions — Lectures
Profitant d'un petit déplacement à Paris, je suis passé à l'Opéra dans le but de voir l'exposition Gounod, Mireille et l'Opéra organisée conjointement par l'Opéra de Paris et la BnF. L'opéra Mireille de Gounod est en effet programmé pour l'ouverture de la saison, et ceux qui ont encore la télévision pourront le constater en direct sur France 3 lundi prochain.
Vu que je n'étais jamais allé à l'Opéra Garnier qu'à l'occasion de représentations, je ne savais pas trop quel chemin prendre. La Bibliothèque-musée de l'Opéra (rattachée à la BnF) étant le lieu putatif de l'exposition, je suis entré par la façade occidentale vu que celle-ci se trouve dans le pavillon de l'Empereur. À l'accueil et au contrôle de sécurité, on ne semble pas franchement au courant de l'existence de l'exposition, mais la carte de la BnF semble valoir sésame pour entrer (comme pour les autres expositions organisées par la BnF), et je me retrouve laché dans les escaliers latéraux de l'Opéra, avec pour indication qu'il faudrait aller au deuxième étage.
Je me retrouve ainsi devant une exposition permanente, où je vois notamment un portrait d'Albert Roussel, mais point de Gounod. Plus loin une belle porte en bois peu accueillante. Par chance, un employé en sort. Le temps de discuter avec lui de l'emplacement de l'exposition (première personne rencontrée qui semble au courant), j'aperçois l'intérieur, assez impersonnel, de la bibliothèque. L'exposition commence à l'étage d'en-dessous.
L'exposition n'intéressera sans doute que les passionnés d'opéra. On y trouve quelques affiches de différentes reprises de Mireille, quelques documents autographes de Gounod (peu lisibles !), un buste, un laissez-passer de l'Empereur pour Gounod, des photographies d'interprètes d'opéras de Gounod, des esquisses ou maquettes de décors, etc. et une pipe.
Si l'entrée fut gratuite, la sortie ne l'a pas été. On est en effet obligé de passer par la boutique, et si j'ai ainsi eu l'occasion d'acheter en avance le programme de Mireille (dans lequel on trouve un catalogue des documents présentés dans l'exposition, avec quelques reproductions en pleine ou double page), ce qui est neutre pour moi, je suis tombé par malheur pour ma bourse devant un DVD de L'Amour de loin de Saariaho, dont j'avais lu le livret par hasard il y a quelques mois après l'avoir acheté dans une gare. Comme on m'a adressé deux fois la parole en anglais comme si cela allait de soi, je suppose que la proportion de clients étrangers est assez élevée.
Le programme (12€, 200 pages en papier glacé !) de Mireille revient longuement sur les nombreuses modifications dont la partition a été la cible, afin, selon ses instigateurs de proposer une fin qui plût davantage au public et de rajouter du brillant (et un commentateur glose en disant que cela permettait surtout à l'épouse du directeur de théâtre, Marie Caroline Miolan-Carvalho de mieux briller...). Contrairement à ce qui se fait d'habitude, on ne trouve aucun document relatif à cette nouvelle production, hormis un texte du chef d'orchestre Marc Minkowski. Globalement, cela donne envie de se plonger dans le poème de Mistral, Mirèio. Aussi, cela me rappelle que je réentendrai avec plaisir Anne-Catherine Gillet (qui fera ses débuts à l'Opéra), Amel Brahim-Djelloul (idem), Sylvie Brunet, Nicolas Cavallier et d'autres.
2009-06-23 03:13+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Comique — 2009-06-19
Anna Caterina Antonacci, Carmen
Andrew Richards, Don José (actes 1 & 2)
Fabiano Cordero, Don José (actes 3 & 4)
Anne-Catherine Gillet, Micaëla
Nicolas Cavallier, Escamillo
Virginie Pochon, Frasquita
Annie Gill, Mercédès
Françis Dudziak, La Dancaïre
Vincent Ordonneau, Le Remendado
Matthew Brook, Zuniga
Riccardo Novaro, Moralès
Simon Davies, Lillas Pastia
Lawrence Wallington, Un guide
Sir John Eliot Gardiner, direction musicale
Adrian Noble, mise en scène
Mark Thompson, décors et costumes
Jean Kalman, lumières
Orchestre Révolutionnaire et Romantique
The Monteverdi Choir
Maîtrise des Hauts-de-Seine
Carmen, Georges Bizet
Je suis allé ce soir à l'Opéra Comique pour assister à une représentation de Carmen. Après Zoroastre et Le Roi malgré lui, cet opéra complète la série des trois opéras que j'avais décidé d'aller voir cette année à l'Opéra Comique. Les trois ont été de grandes réussites. J'y retournerai un peu plus souvent l'an prochain.
Avec La flûte enchantée, Armide et Werther,
Carmen était un des opéras de la saison que j'attendais le plus.
N'ayant alors pas trop d'idées sur les qualités respectives des places de
la Salle Favart, j'avais pris à l'ouverture des réservations l'an dernier
une place dans une très bonne catégorie afin d'être tranquille. Un premier
rang de loge de côté (en fait presque de trois-quarts) au deuxième balcon
(qui serait le premier balcon si le premier balcon avait été appelé
corbeille
).
Bien sûr, je voulais voir Anna Caterina Antonacci dans ce rôle. Depuis
Agrippina en 2003, c'est probablement la chanteuse que j'aie le
plus souvent entendue en concert : sept fois. Dès que Sir John Eliot
Gardiner a posé le pied devant son pupitre, il commence à diriger le
prélude sans même attendre que les applaudissements se soient dissipés.
Après que le rideau sur lequel est écrit Carmen
en lettres rouge
sang s'est levé, le premier acte commence avec le chœur Sur la place,
chacun passe dont j'aime particulièrement la sonorité des premières
notes. Puis, après l'apparition de Micaëla à la recherche de José viendra le
chœur des gamins, qui, contrairement à ce que j'avais noté, n'est pas
interprété par le chœur Sotto Voce, dont je parlais dès le
début de ce weblog, mais par la Maîtrise des Hauts-de-Seine. Les
costumes, les loques, que portent les enfants nous transportent dans un
quartier pauvre de Séville, où les luisantes cigarières en tenue
décontractée s'affairent en sous-sol. Quand la cloche aura sonné,
Carmen finira par paraître et l'ardent jeu de la séduction pourra commencer
avec l'air L'amour est un oiseau rebelle, etc.
Le décor est en forme de fer à cheval rouge, placé à l'étage. On peut se figurer qu'il s'agit de l'enceinte d'une arène, ce en quoi le décor se transformera effectivement au quatrième acte (même si l'arène où brillera Escamillo sera en réalité hors-scène). La mise en scène d'Adrian Noble est excellente. On y trouve de superbes mouvements d'ensemble des chœurs. Dans ce genre, la scène qui suit le moment où Carmen a blessé au visage le Manuelita est impressionnante. Le combat d'Escamillo et de José à l'arme blanche est très bien chorégraphié, Nicolas Cavallier (Escamillo) ferait presque penser à Jean Marais. Sa façon de chanter ce rôle d'Escamillo, torero matamore, est parfaitement adaptée. Un petit bémol au sujet des souliers des choristes : en frappant le sol, ils faisaient vraiment trop de bruit, au point de gêner certains passages musicaux, fussent-ils secondaires.
Anna Caterina Antonacci m'enthousiasme toujours autant. Sa diction française est impeccable. Elle joue aussi très bien la comédie. Elle est secondée par Andrew Richards (Don José), qui sera remplacé pour les deux derniers actes par un ténor brésilien dont je n'ai pas retenu le nom. C'est dommage qu'il ait dû renoncer, je l'aimais bien. Toutefois, il aura un peu manqué de puissance pendant son duo avec Micaëla (Anne-Catherine Gillet). Dès le début de l'opéra, cette dernière me fait une très bonne impression. Mais le meilleur est à attendre : au troisième acte, elle est éblouissante dans Je dis que rien ne m'épouvante, le plus bel air de l'opéra. Une voix puissance capable d'exprimer de riches émotions.
Bref, un formidable spectacle, qui passera dans certains cinémas le 25 juin et sera diffusé sur France Musique le 30 juin.
Ailleurs : Akynou.
2009-05-23 01:19+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2009-05-22
Adina Nitescu, Tosca
Aleksandrs Antonenko, Mario Cavaradossi
James Morris, Scarpia
Wojtek Smilek, Cesare Angelotti
Christian Jean, Spoletta
Matteo Peirone, Il Sagrestano
Yuri Kissin, Sciarrone
Christian Tréguier, Un Carceriere
Stefan Solyom, direction musicale
Werner Schroeter, mise en scène
Alberte Barsacq, décors et costumes
André Diot, lumières
Alessandro Di Stefano, chef des chœurs
Monica Weitzfzelder, assistante à la mise en scène
Orchestre et Chœurs de l'Opéra national de Paris
Maîtrise des Hauts-de-Seine / Chœur d'enfants de l'Opéra national de Paris
Tosca, Giacomo Puccini
Comme Yohan, j'avais manqué Tosca l'année dernière du fait d'une grève, de RER en ce qui me concerne, alors que l'Opéra de Paris était lui aussi perturbé par un mouvement social. Cette production étant reprise pour la nième fois avec n grand cette année, j'avais inclus cet opéra à mon abonnement.
La représentation de ce soir était donc ma première occasion de voir un opéra de Puccini. J'avais déjà écouté Tosca au disque en préparation de la représentation à laquelle j'avais prévu d'assister l'année dernière, et avais aussi, plus récemment, écouté Madama Butterfly et visionné La Bohème. Ces trois opéras permettent de s'habituer au son particulier de Puccini.
Depuis mon dernier rang de premier balcon, au centre, j'ai besoin des jumelles pour distinguer quelqu'expression sur le visage des interprètes. La mise en scène et le décor ont peut être une part de responsabilité dans le fait qu'ils paraissent si petits. J'avais apprécié l'idée de réduire l'espace scénique dans Macbeth. Ici, les chanteurs évoluent dans un vaste espace sombre et austère, dépourvu d'inutile. Toutefois, le feuilletage du programme permet d'observer que la peinture de Marie-Madeleine (premier acte) est plus jolie que dans certains passages précédents de cette production !
Le drame se passe au moment de la bataille de Marengo. Scarpia lutte contre les républicains, comme Angelotti, que Cavaradossi a caché (pas pour longtemps, il se suicidera quand il sera découvert), mais il est en fait plus intéressé par Tosca, l'amante de Cavaradossi, et il fera pression sur elle en le torturant puis en la poussant à lui offrir son corps pour qu'il épargne Cavaradossi. Après lui avoir fait signer un laissez-passer, elle le poignarde. Le lendemain, à l'aube, un simulacre d'exécution de Cavaradossi doit avoir lieu. En fait, les balles sont réelles, Cavaradossi ne se relève pas ; Tosca, qui est maintenant recherchée pour le meurtre de Scarpia, se suicide.
Les trois rôles principaux de Tosca sont Floria Tosca (Adina Nitescu), Mario Cavaradossi (Aleksandrs Antonenko) et Scarpia (James Morris). J'ai apprécié les trois chanteurs et parmi eux tout particulièrement Adina Nitescu. Peut-être davantage encore que le chant, j'ai aimé la musique de Tosca, une continuité parsemée de leitmotivs.
2009-05-12 00:36+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Théâtre des Champs-Élysées — 2009-05-11
Susan Gritton, soprano (Philidel, Nereid, Venus)
Deborah York, soprano (Philidel, Cupid, Nereid, She)
Mélodie Ruvio, mezzo-soprano
Anders J. Dahlin, haute-contre
James Gilchrist, ténor (Comus)
Andrew Foster-Williams, basse (Grimbald, Genius, Aeolus, Pan, He)
Le Concert Spirituel
Hervé Niquet, direction
King Arthur, Henry Purcell.
Je reviens du Théâtre des Champs-Élysées où avait lieu ce soir une représentation du King Arthur de Purcell, avec le Concert Spirituel dirigé par Hervé Niquet, dont j'avais apprécié l'interprétation de la Messe en si mineur l'année dernière Salle Pleyel.
La terminologie de semi-opera
semble très bien choisie.
Comme les passages parlés de l'œuvre originale ne sont pas représentés, il
ne reste plus grand'chose qui ait un rapport avec l'épopée du roi Arthur.
Dans les passages musicaux qui restent, ce thème ne semble plus qu'un
prétexte pour invoquer Woden et Thor, dieux des Saxons et quelques divinités
classiques comme Amour, Pan ou Éole, et surtout pour glorifier
l'Angleterre, d'une façon qui frise parfois le ridicule :
Quoique la réputation de la Toison de Jason soit ancienne,
La laine anglaise vaut son pesant d'or ;
Aucune mine ne regorge davantage de richesses.
Elle protège les paysans du froid
Et procure ainsi la pourpre de Tyraux rois.
(Traduction Yvette Gogue, Erato)
Les solistes Susan Gritton, Deborah York, Anders J. Dahlin (qui fut Zoroastre récemment), James Gilchrist, Andrew Foster-Williams et Mélodie Ruvio (soliste du chœur) sont tous spécialistes de la période baroque. C'était un plaisir de les entendre et leur visage trahissait le plaisir de chanter cette œuvre. Certains passages font penser à de beaux oratorios anglais, mais parfois, on pourrait aussi bien s'imaginer à Versailes.
Parmi les moments inoubliables, le Génie du froid, initialement grelotant, réchauffé par Cupidon au troisième acte, ou la chanson à boire du cinquième acte (les membres du chœurs goûtant alors ostensiblement quelque breuvage). Une autre plaisanterie du même genre, au début du quatrième acte : avant que deux sirènes ne commencent à chanter quelque air marin, un drôle d'instrument manipulé par le percussionniste fait un bruit qui évoque sans doute le vent, le son enregistré d'un goéland se fait entendre et Hervé Niquet fait mine d'essuyer une déjection sur son costume.
Je ne connaissais pas cette œuvre de Purcell. Je l'ai beaucoup appréciée. Le public, très nombreux, aussi, apparemment.
2009-04-30 03:00+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Comique — 2009-04-29
Jean-Sébastien Bou, Henri de Valois, roi de Pologne
Magali Léger, Minka
Franck Leguérinel, Le duc de Fritelli
Sophie Marin-Degor, Alexina, duchesse de Fritelli
Gordon Gietz, Le comte de Nangis
Nabil Suliman, Laski, grand palatin
Didier Roussel, Basile, aubergiste / Liancourt
Brian Bruce, Elbeuf
Paolo Stupenengo, Maugiron
Jean-François Gay, Le comte de Caylus
Grégoire Guérin, Le marquis de Villequier
Jacques Gomez, Un soldat
Olivier Sferlazza, Bruno Andrieux, Jean-Benoît Terral, Comédiens
William Lacey, direction musicale
Laurent Pelly, mise en scène et costumes
Agathe Mélinand, dramaturgie et remise en forme du livret
Bernard Legoux, décors
Joël Adam, lumières
Lionel Hoche, collaborateur aux mouvements
Alan Woodbridge, chef de chœur
Chœurs de l'Opéra de Lyon
Orchestre de Paris
Le Roi malgré lui, Emmanuel Chabrier
Ah, si cela pouvait toujours être ainsi. Le Roi malgré lui est un très beau spectacle d'opéra, qui passe ces jours-ci à l'Opéra Comique. Merci à Kozlika de m'avoir suggéré d'y aller.
Il s'agit d'un opéra d'Emmanuel Chabrier sur un livret d'Émile de Najac
et de Paul Burani, inspiré de la pièce de théâtre du même nom d'Ancelot. Le
programme du spectacle indique que cette pièce était de
Marguerite-Louise-Virginie Ancelot, alors que sur le microfilm
d'une édition à la BnF, le nom de l'auteur indiqué est M.
Ancelot
et conformément catalogué au nom de
Jacques-Arsène-François-Polycarpe Ancelot, son mari. C'est curieux.
Afin de me préparer à cette représentation, lors de précédentes visites
à la BnF, j'avais lu le livret de cet opéra puis le texte de la pièce. Je
ne comprends pas pourquoi ce livet est critiqué (jusque dans le programme).
L'opéra est très quiproqué. Voici deux passages que j'avais trouvé très
drôles ; le deuxième a été remis en forme
par Agathe Mélinand pour
cette production :
Nangis
Nangis ! Mais c'est...
Henri, s'avançant et l'interrompant
La ruse est subtile
De passer pour moi !
Mais ruse inutile,
C'est moi, Nangis ! C'est vous, le roi !⁂
Minka
Tout à l'heure, ici même, madame la duchesse de Fritelli croyait que le roi était mort.
Nangis
Que dis-tu là ! Grand Dieu... qu'est-il arrivé. (Haut.) Courons Minka. Il me faut la preuve que c'est là une erreur...
Minka
Mais la preuve, monseigneur, je l'ai, puisque vous êtes vivant !
Petit résumé : Henri de Valois a été choisi par les Polonais pour devenir leur roi. Il y va à reculons. Un complot est ourdi par le grand palatin Laski pour le chasser et mettre je ne sais plus quel archiduc sur le trône. Sa nièce Alexina fut l'amante du roi incognito à Venise et il l'abandonna. Elle veut se venger de lui, bien qu'elle l'aime encore. Elle embrigade son mari dans le complot, c'est Fritelli, le grand chambellan d'Henri. Nangis, l'ami le plus fidèle d'Henri, s'est épris de Minka, l'esclave de Laski, qui vient au séjour du roi pour dénoncer le complot. C'est Henri, qui doit rester incognito jusqu'au sacre, qui la reçoit. L'idée d'un complot contre lui lui plaît, il décide de rejoindre les conjurés en se faisant passer pour Nangis, qu'il emprisonne. Nangis, le vrai, s'évadera et les conjurés réunis chez Laski se retrouveront avec deux personnes prétendant être Nangis. Les rôles sont inversés. Nangis prend son nouveau rôle de roi très au sérieux. Les conjurés ont peur des représailles d'un Henri qui reviendrait en Pologne avec une armée, ils préfèrent le tuer. Henri promet de se tuer lui-même. Nangis s'échappe encore une fois grâce à Minka qui le prend pour le roi. Le lendemain, Henri croit qu'il peut s'en aller avec le carosse qui avait été réservé par les conjurés. La réservation a été annulée quand il fut décidé de tuer Henri. Alexina, dont l'amour pour Henri, a repris le dessus, a fait en sorte que l'archiduc reparte en lui annonçant que le complot avait été mis au jour. Rien ne s'oppose plus à ce que Henri soit couronné, mais on le croit mort assassiné par Nangis (enfin Henri). Alexina essaie de fuir avec son cher assassin, mais tout est découvert. Vive le roi de Pologne ! Minka et Nangis sont mariés. Henri invite Fritelli, et donc son épouse, à le rejoindre à la cour.
C'est peut-être un peu compliqué, mais tellement drôle et vaudevillier. Le livret est bien supérieur au texte de la pièce de théâtre, dont la fin en queue de poisson était bâclée. Dans l'opéra, la fin s'étend sur un troisième acte supplémentaire. Quelques éléments ont de plus été ajoutés dans l'intrigue de façon à créer des situations bien plus amusantes. Ainsi, dans la pièce, Alexina était une orpheline, dont le tuteur, noble, avait été proscrit par les Médicis. Elle n'avait jamais été en amour avec Henri ; au contraire, le combat entre sa haine et son amour fait d'Alexina un beau personnage d'opéra. Le chambellan de Henri était français, aucunement lié à Alexina. En faire un personnage italien ajoute encore une dose de comique, d'autant plus qu'il doit gérer des intérêts contradictoires : le complot, la liaison entre Alexina et Henri, les Français, les Polonais.
Ma place au troisième balcon, très légèrement de côté, me permettait de voir toute la scène. Les sièges sont serrés et inconfortables. Le seul problème était que je ne voyais pas les surtitres, mais comme je connaissais déjà bien le livret, je n'ai pas eu de souci pour suivre. Je ne l'avais pas remarqué la dernière fois, mais en dehors du premier balcon, les couloirs sont recouverts de motifs en forme de croix gammées (qui sont inversées à l'orchestre). La construction date d'une autre époque... À l'entr'acte, on croise pas mal de gens ornés de décorations civiles, y compris un ancien ministre de l'économie. Pour voir davantage de ministres, il faut aller au rang 15...
La mise en scène de Laurent Pelly est en accord avec la légèreté de cet
opéra. C'est très dynamique, à des années lumières d'un Deflo. Plein de
très bonnes idées. Un peu de mise en abyme. Des costumes de Polonais
emmitouflés comme des ours. Des chariots tractés qui évoquent les gondoles
de Venise. Des éléments de décors qui apparaissent subitement lors de
quelque évocation de lieu ou d'un besoin scénique : tiens, il faut que
Minka entre en trombe, faisons apparaître une grande porte. Quelques
plaisanteries, des mousquetaires évoqués, une pancarte Amour
qui
passe pendant un air où Minka chante C'est l'amour qui passe
, etc.
Pendant ces presque trois heures de spectacle, on ne s'ennuie pas !
Hormis Sophie Marin-Degor que j'avais un tout petit peu entendue, mais à peine entr'aperçue dans Le Martyre de Saint Sébastien, je voyais pour la première fois la plupart des chanteurs, plutôt jeunes, dynamiques et enthousiasmants : Jean-Sébastien Bou (Henri), Magali Léger (Minka), Franck Leguérinel (Fritelli), Sophie Marin-Degor (Alexina), Gordon Gietz (Nangis), Nabi Suliman (Laski). Je ne connaissais que l'air de Minka Il est un vieux chant de Bohème, je l'ai aimé, comme tous les airs de Minka. Le duo Minka-Alexina du troisième acte, chacune s'inquiétant pour son bien-aimé, est celui que j'ai préféré. J'ai apprécié le chœur de l'Opéra de Lyon, qui a eu plusieurs belles occasions de se mettre en valeur. Je connais très mal la musique de Chabrier. Elle s'écoute très bien. C'est souvent un peu dégoulinant et parfois à la limite de la fanfare (sans oublier le triangle hystérique), mais cela ne gâche rien.
2009-04-28 00:40+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Théâtre des Champs-Élysées — 2009-04-27
Anna Caterina Antonacci, soprano
Pier et Jules Fack, les enfants
François-Xavier Roth, direction musicale
Juliette Deschamps, mise en scène
Nelson Wilmotte, décors
Macha Makeïeff, costumes
Andrea Santini, maquillage, coiffure
Joël Hourbeigt, lumières
Orchestre Les Siècles
Altre Stelle
Je vis mon premier opéra, Agrippina de Händel, en 2003, dans une très belle mise en scène de David McVicar. Agrippina était chantée par Anna Caterina Antonacci. Depuis, j'évite de manquer les occasions de la voir à Paris. Les programmes annuels du Théâtre des Champs-Élysées ayant un index par interprète, j'y trouvai sans peine le spectacle Altre Stelle où Anna Caterina Antonacci interprète cinq rôles de femmes en colère, trompées ou anéanties. Il ne s'agit pas d'un récital, puisque, mis en scène par Juliette Deschamps, la chanteuse et deux enfants portent des costumes de Macha Makeïeff et évoluent dans un sombre décor de Nelson Wilmotte.
Le théâtre avait convié des spectateurs à venir écouter une présentation de ce spectacle samedi dernier, à la Comédie des Champs-Élysées. La moyenne d'âge des présents était plus élevée que la moyenne habituelle de la salle, ce qui est difficile, vu la réputation du lieu en la matière ; j'ai longtemps craint d'être le plus jeune présent. Ce fut l'occasion de mettre une tête sur le directeur Dominique Meyer (qui s'en ira bientôt diriger l'Opéra de Vienne), sur Juliette Deschamps et surtout de voir de près Anna Caterina Antonacci en costume de ville s'exprimant dans un charmant français avec un petit accent italien qui disparaît quand elle chante.
Pendant l'ouverture (Méhul), deux enfants viennent écrire à la craie
Altre Stelle
et Autres étoiles
, en majuscules accentuées, sur
les murs asymétriques du décor (des deux côtés ! merci ! il est rare que
les metteurs en scène pensent aux spectateurs placés de côté et non
ubiquistes ; pour ma part, j'étais au premier balcon, assez près du
centre), puis, une femme, présomptivement leur mère, ouvre un livre pour
leur raconter une histoire. C'est le début de la mort d'Ophélie (Berlioz).
La femme s'éloigne, change de costume, elle reparaît en Phèdre (Rameau),
puis en Armide (de Gluck, à ne pas confondre avec celle de Lully, bien que ces deux opéras soient sur le même livret).
En mesure de tuer Renaud, Enfin il est en ma puissance, elle cède
du fait de son amour naissant pour lui. Plus tard, une lettre lui apprendra
sa trahison... Quand le barbare était en ma puissance. Les ombres
projetées du fait des lumières de Joël Hourbeigt illustrent bien le fait
qu'Armide est une sorcière.
Nous aurons ensuite le droit d'entendre deux sortes de tempêtes
musicales, alors que sur la scène sévit une tempête de neige. Médée
(Cherubini) va s'en prendre à ses enfants. Au sujet des tempêtes, je suis
étonné de n'avoir pas reconnu l'air des Furies d'Orphée et
Eurydice (Gluck) ; il faudra que je regarde si cet air ne serait pas
spécifique à une des versions de cette œuvre.
Abandonnée par le fils de Vénus, c'est au tour de Didon des Troyens (Berlioz) de s'illustrer par sa superbe mort. Antonacci ayant une inclination particulière pour Berlioz, il n'est pas étonnant que ces airs soient mes préférés de ce spectacle. (Que je regrette qu'en 2003/2004, je n'allasse pas encore régulièrement voir des opéras, j'eusse pu l'entendre dans le rôle de Cassandre ; ah, il semble que cela soit sorti en DVD...). C'est tellement bien que lorsque les lumières réalisent un fondu au noir, le public se met à applaudir. Ce n'est pas tout à fait terminé. Hors scène, la chanteuse referme la boucle avec la deuxième partie de la mort d'Ophélie.
De l'orchestre Les Siècles dirigé par François-Xavier Roth, j'ai trouvé que les instruments à vent avaient un son quelque peu bizarre. Malgré ce bémol, apparemment subjectif, puisqu'une dame italienne qui m'expliquera dans le métro n'avoir pas compris le concept du spectacle me fera au contraire l'éloge de l'orchestre, ce fut un très beau spectacle, qui repasse jeudi prochain, et sera diffusé sur France Musique le jeudi 21 mai à 20h.
2009-04-25 00:49+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2009-04-24
Ramon Vargas, Riccardo
Ludovic Tézier, Renato
Angela Brown, Amelia
Elena Manistina, Ulrica
Anna Christy, Oscar
Etienne Dupuis, Silvano
Mischa Schelomianski, Sam
Scott Wilde, Tom
Giudice, Giudice
Nicolas Marie, Servo d'Amelia
Renato Palumbo, direction musicale
Gilbert Deflo, mise en scène
William Orlandi, décors, costumes
Joël Hourbeigt, lumières
Micha van Hoecke, chorégraphie
Alessandro Di Stefano, chef des chœurs
Orchestre et Chœurs de l'Opéra national de Paris
Un bal masqué, Guiseppe Verdi
Je reviens de l'Opéra Bastille où j'ai vu une représentation d'Un bal masqué de Verdi. Première déception en entrant : Deborah Voigt est remplacée par Angela Brown dans le rôle d'Amelia. Je n'avais vu aucune de ces deux sopranos américaines auparavant et n'avais pas d'autre inclination que celle, a priori, liée à la plus grande notoriété de Deborah Voigt. Comme j'avais prévu de voir l'une dans un mois et l'autre ce soir, ce remplacement fait échouer mes plans. Une surprise agréable, néanmoins : en Renato, la brochure de l'Opéra de Paris avait annoncé Frank Ferrari, mais c'est Ludovic Tézier qui est venu.
Lors de mon opéra précédent, j'avais été un peu déçu du grossissement de mes jumelles (3×), ce qui n'est pas terrible quand on est au deuxième balcon. Je rachetai donc une autre paire, d'une vingtaine d'euros, de masse semblable et surtout ayant un grossissement triple. Elle se tient un peu mieux en mains, ce qui est heureux parce qu'avec ce grossissement, il ne vaut mieux pas trop bouger. J'avais hâte de l'essayer.
Ma place était à la galerie nº3, premier rang, place une. Cette galerie, ainsi que la symétrique, doit être le meilleur endroit pour se faire une vue d'ensemble du théâtre. Acoustiquement, c'est aussi un endroit privilégié pour entendre les toussotements, d'où qu'ils viennent. Les barreaux du rebord gênent cependant la vue sur une bonne partie de la scène. On peut soit regarder à travers la quadrillage (en profitant de sa vision stéréoscopique pour voir à travers les barreaux), soit se mettre une cale dans le dos pour s'installer sur l'avant du siège et regarder par dessus la rambarde. Globalement, je trouve que c'est plutôt une bonne place.
Ayant eu le temps de lire le synopsis en quatrième vitesse, j'ai pu délaisser les surtitres et profiter de ce que mes jumelles me permettaient de voir les chanteurs en beaucoup plus gros qu'avec les précédentes ! Ramon Vargas occupait presqu'entièrement l'angle de vue. Leur utilisation depuis les places que j'occupe habituellement et sensiblement plus éloignées devrait s'avérer très confortable.
Les chanteurs des rôles principaux sont très bons. Ramon Vargas en Riccardo, Angela Brown en Amelia et surtout Ludovic Tézier en Renato, le meilleur ami du gouverneur Riccardo, qui se joint aux conjurés pour l'assassiner quand il découvre son idylle avec Amelia, qui est son épouse. Un beau tableau met en scène séparément Amelia, Riccardo (et un marin) auprès de la sorcière Ulrica (Elena Manistina) qui leur révèle à chacun leur futur. Dans le rôle travesti d'Oscar, le page de Riccardo, Anna Christy, que j'avais déjà eu l'occasion d'entendre dans le rôle de Cunegonde dans Candide, pétille.
Suite à des problèmes avec la censure, le livret situe l'action aux États-Unis d'Amérique, auxquels font penser certains décors et costumes. Très bien. Le problème est que la mise en scène est de Gilbert Deflo. Ce n'est cependant pas aussi pire que dans Luisa Miller. En dehors du tableau avec la sorcière et du dernier, les chanteurs sont trop souvent droits, immobiles face à la salle. Je ne sais pas ce qui a pris à une partie du public d'applaudir au dernier tableau quand le rideau s'est ouvert sur la scène du bal masqué. Il y avait là une belle mise en place et une gracieuse chorégraphie qui commençait, mais de là à applaudir alors que l'orchestre joue, cela devient vraiment n'importe quoi ; ce n'est pas comme si le public avait été préparé à une extase collective par une préalable succession de tableaux superbement mis en scène.
2009-04-14 02:41+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2009-04-13
Dimitris Tiliakos, Macbeth
Ferruccio Furlanetto, Banco
Violeta Urmana, Lady Macbeth
Letitia Singleton, Dama di Lady Macbeth
Stefano Secco, Macduff
Alfredo Nigro, Malcolm
Yuri Kissin, Medico / Domestico
Jian-Hong Zhao, Un sicario
Soliste de la Maîtrise des Hauts-de-Seine, Apparizione I
Denis Aubry, Apparizione II
Vania Boneva, Apparizione III
Jean-Christophe Bouvet, Duncan
Teodor Currentzis, direction musicale
Dmitri Tcherniakov, mise en scène, décors, costumes
Gleb Filshtinsky, lumières
Elena Zaytseva, co-costumière
Leonid Zalessky / Ninja Films, Réalisation de la vidéo
Alessandro Di Stefano, chef des chœurs
Orchestre et Chœurs de l'Opéra national de Paris
Maîtrise des Hauts-de-Seine / Chœur d'enfants de l'Opéra national de Paris
Macbeth, Guiseppe Verdi
Je reviens d'une représentation de Macbeth à Bastille. Des cinq opéras de Verdi dont j'ai assisté à une représentation, c'est celui que j'ai le moins apprécié. Dans les extraits de lettres du compositeur que contient le programme, on le trouve presque plus préoccupé par la tragédie que par la musique.
Depuis l'avant-dernier rang du deuxième balcon, je n'entends guère Dimitris Tiliakos (Macbeth). J'apprécie davantage Violeta Urmana (Lady Macbeth). Hormis les sorcières sur lesquelles je reviens plus bas, les autres personnages sont secondaires. Par exemple, Stefano Secco (Macduff) ne chantera malheureusement qu'un seul air.
Deux décors sont utilisés. Le premier occupe tout l'espace scénique disponible, contient un réverbère et est entouré d'une douzaine de maisonnettes qui ne diffèrent que par la disposition des fenêtres. C'est dans cet espace que Macbeth et Banco entendent les oracles qui les concernent et qui conduiront Macbeth à commettre plusieurs assassinats pour obtenir la couronne d'Écosse et tenter de s'y maintenir. Dans cette production, le rôle des trois sorcières est chanté par le chœur. En voyant cette première scène, je me suis demandé comment le décorateur aurait envisagé le lieu plus intime de la résidence de Macbeth : je n'imaginais pas la planification de l'assassinat de Duncan dans un aussi grand espace. La transition avec le deuxième décor se fait à la manière d'Hitchcock, revue par Google Earth. Un petit mouvement de souris, on se déplace, on zomme sur la maison de Macbeth, on en fait le tour et on s'approche enfin de la fenêtre du salon. Quand la lumière est faite, le salon occupe la moitié de la largeur de la scène. On espionne chez Macbeth par la fenêtre. On ne surprend pas des amants, mais Lady Macbeth qui commence à avoir des pensées criminelles. D'après le livret, Lady Macbeth lit au début de cette scène la lettre de son mari ; ici, je ne sais pas exactement qui la lit, mais c'était parfaitement inaudible.
Ces interventions de personnages ou d'instruments depuis les coulisses se sont répétées jusqu'à la fin. J'ai trouvé cela dommage, cela donne un peu l'impression qu'on ne savait pas où les mettre, et que par défaut, on les a laissés en coulisses ; si ce procédé n'était pas toujours injustifié, j'ai trouvé qu'il était un peu trop utilisé. L'idée de passer de trois sorcières à un chœur plus volumineux est intéressante, mais ces séquences où tout l'espace de la scène était occupée m'ont déstabilisé : quand un personnage non anonyme intervient, la mise en scène devrait nous le faire ressortir de la masse d'une manière ou d'une autre ; ici, à plusieurs reprises, je ne savais pas trop où regarder pour le voir.
Cela dit, globablement, j'ai plutôt apprécié cette mise en scène et ces décors. Parmi les choses qui m'ont plu : la scène mimée où l'on voit le roi Duncan (peut-être un peu trop méprisant pour ses hôtes), la chanson à boire où Lady Macbeth réalise des tours de magie tandis que Macbeth voit des apparitions. Il y a aussi une surprise que je ne dévoilerai pas ici.
S'il n'y avait la chanson à boire, cet opéra serait uniformément sinistre. Le compositeur ayant décidé d'éviter tout ce qui était dramatiquement superflu, on ne trouve pas moult airs agréables à écouter. Je connaissais mal cet opéra, n'ayant qu'un enregistrement techniquement nul avec la Callas. Je ne sais donc pas à quoi doit ressembler une bonne interprétation de cette œuvre ; toujours est-il que pendant le premier acte, j'ai trouvé le son de l'orchestre assez brouillon. En revanche, le syndrome de l'hydr'avion était parfaitement maîtrisé.
2009-04-05 11:06+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Théâtre — Lectures
Dans une entrée précédente, je discutais de mes impressions au sujet d'une retransmission d'une représentation de La Sonnambula, opéra de Bellini, et d'une perplexité qui avait refait surface à propos des liens familiaux supposés ou non entre Amina et le Comte Rodolfo. Entretemps, j'ai retrouvé ce que je cherchais dans les textes d'introduction de la production dont j'ai un enregistrement (Evelino Pidò, Opéra national de Lyon, avec Natalie Dessay, 2007) : la mention du fait qu'Amina était la fille naturelle de Rodolfo se serait trouvée dans une version préliminaire du livret de l'opéra.
Après avoir lu sur Gallica le texte du
ballet de Scribe et Aumer, je suis allé hier à la BnF pour consulter
d'autres sources littéraires. Ce fut l'occasion d'utiliser pour la première
fois un lecteur de microfiches ; un livre tient sur une ou plusieurs fiches
(mesurant environ 10 × 15 cm²) que l'on projète sur un écran ; c'est assez
confortable à lire, en blanc sur fond noir. J'ai ainsi lu d'une part une
analyse
du ballet par un certain M. H. (de moindre qualité que le
texte de Scribe et Aumer qui décrivait succintement chaque scène) et
d'autre part le texte de la pièce de Scribe et Delavigne dont le ballet est
inspiré (il est à noter que la pièce contenait des passages chantés). Voici
un tableau récapitulatif des correspondances :
Titre | La Somnambule | La Somnambule ou l'Arrivée d'un nouveau seigneur | La Sonnambula |
Genre | Comédie-vaudeville | Ballet-pantomime | Opéra |
Auteurs | Eugène Scribe et Germain Delavigne | Eugène Scribe et Jean-Pierre Aumer, musique de M. Hérold | Felice Romani, musique de Vincenzo Bellini |
Création | 1819, Théâtre du Vaudeville, Paris | 1827, Opéra de Paris | 1831, Teatro Carcano, Milan |
Lieu de l'action | (Non précisé) | En Provence, dans l'île de la Camargue, auprès d'Arles | Un village suisse |
La Somnambule | Cécile | Thérèse | Amina |
Son parent | M. Dormeuil, son père | Mme Michaud, meunière, sa mère adoptive | Teresa, meunière, sa mère adoptive |
Son fiancé | Frédéric de Luzy | Edmond | Elvino |
L'étranger | Gustave de Mauleon | M. Saint-Rambert | Le comte Rodolfo |
L'aubergiste | ― (Mauleon est logé dans le pavillon de Dormeuil) | Mme Gertrude | Lisa |
(Je renonce à comprendre la logique des changements de noms d'une œuvre à l'autre, et aussi l'helvétotropisme.)
L'intrigue de l'opéra est presqu'identique à celle du ballet, mais elle diffère de façon très-significative de celle de la pièce. Dans le ballet et l'opéra, un mariage se prépare entre une jeune fille dont on découvrira qu'elle souffre de somnambulisme et un jeune homme. Le contrat de mariage est signé ; la cérémonie religieuse est prévue pour le lendemain. Un étranger arrive au village où il a l'intention de passer la nuit avant de continuer sa route. Il rejoint la chambre qu'il a louée. Il flirte avec l'aubergiste qui laisse tomber son fichu et s'enfuit quand elle entend des bruits de pas. La somnambule rejoint l'étranger qu'elle prend pour son futur mari, ce qui trouble bien sûr l'étranger. La somnambule finit par s'endormir dans sa chambre. Pendant ce temps, au village, on a découvert que l'étranger était en fait le nouveau seigneur et on vient à son réveil lui manifester un joyeux accueil digne de son rang. Le scandale éclate quand on trouve la mariée dans sa chambre. L'étranger défend sa vertu en expliquant qu'elle souffre de somnambulisme. À d'autres. Son fiancé refuse de se marier avec elle et pour se venger, décide aussitôt d'épouser l'aubergiste (qui a un faible pour lui). Alors que la cérémonie se prépare, la mère de la somnambule intervient en brandissant le fichu de l'aubergiste qu'elle avait trouvé dans la chambre de l'étranger. Nouvel émoi, vite surpassé par l'arrivée de la jeune fille en état de somnambulisme. Elle se lamente sur son sort, clame son innocence et pourtant souhaite le bonheur à son ex-futur mari. Ce dernier est ému et quand elle se réveille, il lui dit qu'elle ne rêve pas et qu'elle est bien en train de voir son époux.
Dans la pièce, le personnage de l'aubergiste n'existe pas. Mauleon est hébergé dans un pavillon par Dormeuil. Mauleon est un ancien ami de Frédéric et un ancien prétendant à la main de Cécile. Elle avait refusé sa proposition le lendemain d'un bal où il avait passé la soirée à danser avec une autre ; pourtant ces deux-là s'aimaient sincèrement. Par dépit, elle avait accepté la demande en mariage de Frédéric. Quand elle voit Mauleon débarquer le jour de son mariage (il est là par hasard), elle est troublée. Quand elle le rejoint dans le pavillon en état de somnambulisme, elle semble essayer de dialoguer avec lui et d'apaiser sa conscience à propos du malentendu qui conduisit à ce qu'elle repoussât sa proposition ; bref, elle l'aime et regrette de n'avoir alors pas accepté.
Quand Frédéric entre dans le pavillon au matin, Mauleon essaie d'éviter qu'il ne regarde de l'autre côté du paravent où Cécile s'est endormie. Quand cela se produit enfin, elle a disparu : il ne reste plus que son schall. [...] La deuxième scène de somnambulisme dévoile l'amour de Cécile pour Mauleon. Frédéric, qui a déjà vu quatre de ses projets de mariage échouer, renonce à épouser Cécile et la donne en mariage à son ami. (On peut noter que dans le ballet, une renonciation hétérologue est exprimée par Mme Gertrude qui laisse Edmond épouser Thérèse ; dans l'opéra, Lisa se fait tout simplement oublier.)
Faire de Rodolfo le père d'Amina semblait être une bonne idée, puisque, de même que la passion liant Cécile à Mauleon expliquait que ses rêves et donc son somnambulisme la fît tendre vers lui, cette filiation rendait plausible qu'elle fût attirée vers lui. Cela eût aussi été cohérent avec la nostalgie qu'exprime Rodolfo dans la première scène. Cela dit, on imagine mal comment insérer cette révélation à la fin de l'opéra sans casser l'ambiance et tomber dans le ridicule qu'évoque Beaumarchais en imaginant comment écrire un Barbier de Séville qui plût à la critique :
Ce Figaro, qui pour toute famille avait jadis connu sa mère, est fils naturel de Bartholo. Le médecin, dans sa jeunesse, eut cet enfant d'une personne en condition, que les suites de son imprudence firent passer du service au plus affreux abandon.
Mais avant de le quitter, le désolé Bartholo, Frater alors, a fait rougir sa spatule ; il en a timbré son fils à l'occiput, pour le reconnaître un jour, si jamais le sort les rassemble. [...]
À l'instant, la plus touchante reconnaissance a lieu entre le médecin, la vieille et Figaro : C'est vous ! c'est lui ! c'est toi ! c'est moi ! Quel coup de théâtre.
Dans le genre, Palpatine avait relevé le ridicule des retrouvailles entre Idomeneo et Idamante dans Idomeneo de Mozart.
2009-03-26 08:31+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse
Opéra Comique — 2009-03-25
Anders J. Dahlin, Zoroastre
Evgueniy Alexiev, Abramane
Sine Bundgaard, Amélite
Anna Maria Panzarella, Érinice
Lars Arvidson, Zopire, La Vengeance
Jakob Högström, Narbanor
Gérard Théruel, Oromasès, Une voix souterraine
Ditte Andersen, Céphie
Christophe Rousset, direction musicale
Pierre Audi, mise en scène
Amir Hosseinpour, chorégraphie
Patrick Kinmonth, décors, costumes
Peter Van Praet, lumières
Bo Wannefors, chef des chœurs
Chœur et danseurs du Drottningholms Slottsteater
Les Talens Lyriques
Zoroastre (seconde version), Rameau
Je suis allé hier soir pour la première fois à l'Opéra Comique. Le
théâtre est de dimension relativement modeste par rapport à pas mal
d'autres salles parisiennes. Les toilettes sont appelées lavabos
et
sont mixtes, ce qui ne laisse d'étonner (depuis l'École normale, je n'ai
pas souvenir d'avoir vu d'autre lieu où ce soit le cas) ; robinets
malpratiques (oui, je sais, ce mot n'existe pas, mais depuis que j'ai vu
le Figaro qualifier les personnalités issues de l'Outremer
d'ultramarines
, je ne crains plus rien ; dit-on que les Américains
sont ultra-atlantiques
? je dois confondre avec
ultra-atlantistes
).
Je m'installe à ma place. Troisième et dernier rang de trois quarts du deuxième balcon. Malgré les têtes des deux rangs précédents, l'ensemble de la scène est dans mon champ de vision. Je n'ai qu'une vue partielle sur Les Talens lyriques et il me faut me lever pour apercevoir le chef Christophe Rousset qui va diriger Zoroastre (seconde version) de Jean-Philippe Rameau.
L'opéra compte quatre personnages principaux : Zoroastre (ténor), Amélite (soprano) qui s'aiment, mais qui sont menacés par l'alliance des deux amoureux déçus Abramane (baryton) et Érinice (soprano). Les deux camps font usage de la magie et de pouvoirs divins pour contrer les attaques de l'autre. Happy ending. La divinité invoquée par Zoroastre anéantit ses adversaires aux pratiques sacrificielles.
On apprend dans le programme (élégamment mis en page, avec seulement
trois pages de pub'), on apprend que Zarathushtra
ne doit pas être
traduit en étoile d'or
(comme le fait penser Zoroastre
, qui
est une francisation du nom grec), mais en celui qui a de vieux
chameaux
.
Les chanteurs, nonobstant l'origine scandinave de la plupart, donnent l'impression d'avoir parlé français toute leur vie tant la diction est correcte et le texte ainsi rendu intelligible, les sur-titres sont presqu'inutiles. Comme toujours avec Rameau, la musique est très belle et on a plaisir à écouter l'orchestre.
J'ai beaucoup apprécié la mise en scène de Pierre Audi, à laquelle la chorégraphie des parties dansées concourt harmonieusement. On l'apprécie d'autant plus que le décor est très dépouillé, à tel point que dans le dernier acte, le théâtre est nu, on se serait cru dans un film de Lars von Trier.
Ayant commencé à 20h et entrecoupée de deux entr'actes, la représentation de cet opéra en cinq actes se termine à 23h30 ; avec le RER A et la correspondance triviale à Châtelet pour le RER B, je suis chez moi à peine une heure plus tard.
Une diffusion en direct est prévue sur Radio classique le 27 mars.
2009-03-23 19:51+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Quand je lis ça, je me dis qu'il sera difficile de résister à l'envie de prendre un abonnement pantagruélique à l'Opéra de Paris l'an prochain...
2009-03-22 01:44+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
La Géode, en direct du Met — 2009-03-21
Natalie Dessay, Amina
Juan Diego Flórez, Elvino
Michele Pertusi, Il conte Rodolfo
Jennifer Black, Lisa
Jane Bunnell, Teresa
Bernard Fitch, Un notaro
Jeremy Galyon, Alessio
Chœur, ballet et orchestre du Metropolitan Opera
Evelino Pidò, direction musicale
Mary Zimmermann, mise en scène
La Sonnambula, Bellini
J'étais en fin d'après-midi à la Géode pour assister en direct (ou plutôt en léger différé) du Metropolitan Opera (New-York) à une représentation de l'opéra La Sonnambula de Bellini.
Si c'était à refaire, je choisirais peut-être un cinéma ayant un écran plat, plutôt qu'un écran sphérique. La liste des cinémas français participant à ces retransmissions en direct est trouvable sur le site de CielÉcran ; le prochain opéra ainsi diffusé sera La Cenerentola de Rossini, le 9 mai ; la programmation de l'année prochaine contient quelques opéras qui promettent (Les Contes d'Offmann (sic) avec Villazón, Netrebko notamment, Hamlet avec Natalie Dessay, Simon Keenlyside).
20€, c'est bien plus cher qu'une place de cinéma. Pour ce prix-là, on peut aussi aller à l'opéra de Paris, mais il faut s'être levé tôt, pas pour aller travailler, mais pour aller faire la queue. Bref, a priori, c'est peut-être un tantinet cher.
La mise en scène de Mary Zimmermann est une mise en abyme. Le décor est celui d'une salle de répétition où on prépare une représentation de La Sonnambula. Natalie Dessay (Amina) descend les marches pour entrer sur le parquet dans un costume de star et se fait habiller. Après que la scène des fiançailles avec Juan Diego Flórez (Elvino) a été répétée, les chanteurs se mettent à l'écart du reste de la troupe et un duo d'amour lie les deux chanteurs, qui ne sont plus les Amina et Elvino de l'opéra mis en abyme. Le principe de cette mise en scène marche très bien pendant l'essentiel du premier acte. Cela se gâte à la fin de cet acte et pendant le deuxième, puisqu'on ne peut plus alors dire qu'il y ait deux histoires imbriquées l'une dans l'autre, mais seulement l'opéra de Bellini, joué dans des costumes et un décor new-yorkais plutôt que tyroliens.
La manière de filmer privilégie les gros plans sur les chanteurs, de préférence en contre-plongée depuis une caméra mouvante. Jamais sur une scène d'opéra, on ne verra les chanteurs en si grand. Même depuis les tous premiers rangs, ce n'est pas si impressionnant. Un gros couac dans la réalisation quand la caméra s'attarde interminablement sur la mère d'Amina (Jane Bunnell) alors qu'il faudrait nous montrer Lisa (la très dynamique Jennifer Black), qui ne sourit plus après que sa duplicité a été mise au jour.
Si on aime écouter de belles voix, cet opéra est un pur plaisir. Celle qui a le plus d'occasions de se mettre en valeur est celle du personnage d'Elvino, élégamment interprété par Juan Diego Flórez, qui livre prouesses sur prouesses vocales. Il occupe le devant de la scène pendant la quasi-totalité de l'opéra. De très beaux duos avec Natalie Dessay. Cependant, il faudra attendre les tout derniers numéros de l'opéra pour entendre son talent s'exprimer pleinement.
Elvino voudrait qu'on lui prouve qu'Amina ne l'a pas trompé avec le Comte Rodolfo. Amina entre sur scène. Somnambule, elle est inconsciente de la présence des autres. Elle chante son amour pour Elvino. Pendant le superbe air Ah ! no credea mirarti, une bande de parquet s'est avancée au-dessus de la fosse avec Natalie Dessay dessus ; comme cet air est plus émouvant sur scène qu'au disque ! Quand elle se réveille, Elvino, qui s'était détourné d'elle, se présente à elle en se déclarant son époux. Le chœur a revêtu des costumes tyroliens. Le ballet de l'opéra réalise des mouvements de danse de circonstance. On habille rapidement Amina et Elvino conformément au nouveau dressing code ; Amina peut se réjouir et faire partager sa joie avec l'air Ah ! non giunge uman pensiero.
Il me semblait que l'on découvrait à la fin de l'opéra que Rodolfo était le père d'Amina, ce qui expliquait qu'elle fût attirée vers lui pendant sa crise de somnambulisme. Pour essayer de trouver une explication, je suis allé lire le texte du ballet-pantomime de Scribe et Aumer intitulé La Somnambule ou l'arrivée d'un nouveau seigneur sur Gallica. Rien. Rodolfo (Saint-Rambet) est trop jeune pour avoir eu une fille en âge de se marier. J'avais probablement lu cette explication dans le texte d'introduction à l'opéra dans le coffret de CD de l'enregistrement que j'en possède.
2009-03-07 01:45+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2009-03-06
Rolando Villazón, Werther
Ludovic Tézier, Albert
Alain Vernhes, Le Bailli
Christian Jean, Schmidt
Christian Tréguier, Johann
Susan Graham, Charlotte
Adriana Kucerova, Sophie
Vincent Delhoume, Brühlmann
Letitia Singleton, Kätchen
Kent Nagano, direction musicale
Jürgen Rose, mise en scène, décors, costumes, lumières
Michael Bauer, lumières
David Coleman, études musicales
Martina Weber, assistante à la mise en scène
Gaël Darchen, chef des chœurs
Orchestre de l'Opéra national de Paris
Maîtrise des Hauts-de-Seine / Chœur d'enfants de l'Opéra national de Paris
Werther, Massenet
Ah, donc, vous voulez voir Villazón ?
Voilà ce que me demandait
au téléphone un employé de l'Opéra de Paris au moment de finaliser mon
abonnement. Je répondis par l'affirmative et au lieu de la raisonnable
sixième catégorie, je dus donc me résoudre à prendre une onéreuse place en
quatrième catégorie.
L'opéra de Massenet est une adaptation du roman épistolaire Les Souffrances du jeune Werther de Goethe. Ce roman est dans ma bibliothèque depuis plusieurs mois, mais je n'ai pas encore pris le temps de le lire.
J'ai trouvée que la mise en scène de Jürgen Rose était très réussie. En
particulier, j'ai apprécié l'idée permettant d'évoquer avec le plus
d'acuité le tourment du héros et sa solitude. En effet, même quand il ne
prend pas part à la scène, il reste assis à sa table de travail, qui est
fixée sur un rocher situé au milieu du décor qui tourne, au sens propre,
autour de lui. J'ai un peu plus modérément aimé le fait de recouvrir le
décor de fragments de lettres, mais pourquoi pas. Quelques curiosités :
même au plus fort de ses face-à-face avec Charlotte, Werther, debout,
continue à écrire dans ses carnets ; quand Charlotte s'exclame
Werther
en se rendant compte de sa présence, elle lui tourne le
dos !
Suivant les dates, deux versions de l'œuvre sont présentées. Dans la version pour baryton, c'est Ludovic Tézier qui joue Werther ; c'est d'ailleurs ce qui est arrivé pour la première où Rolando Villazón s'est fait remplacer. Dans la version originale pour ténor, Werther est joué par Rolando Villazón, Charlotte par Susan Graham, Sophie par Adriana Kucerova et Albert par Ludovic Tézier. J'avais déjà eu l'occasion d'entendre ce dernier dans Falstaff et dans Lucia di Lammermoor, inutile de dire qu'il est toujours aussi bon. Je n'avais jamais entendu Susan Graham ni Adriana Kucerova. Le rôle de la jeune Sophie semble fait pour Adriana Kucerova. Susan Graham est impressionnante, autant par la voix que par son jeu. Reste Rolando Villazón. Vu son remplacement lors de la première et les craintes au sujet de sa voix, il y avait de quoi avoir peur pour lui. Le premier acte ne mettant que modérément son talent en valeur, j'ai attendu le deuxième acte pour m'enthousiasmer en l'écoutant chanter l'air Un autre est son époux !. Les scènes en duo avec Susan Graham sont bouleversantes de lyrisme, avec une progression entre le deuxième acte où Charlotte ne paraît pas excessivement affligée et la déchirante mort du héros au quatrième acte, en passant par le troisième acte où elle est torturée par ses sentiments.
Renaud Machart, du Monde, n'a pas du tout aimé cette production. C'est plutôt bon signe. En revanche, Marie-Aude Roux, malheureusement trahie par le typographe, dresse un portrait sensible du ténor français et s'interroge sur sa voix menacée.
2009-02-28 01:56+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Garnier — 2009-02-27
Paul Groves, Idomeneo
Joyce DiDonato, Idamante
Camilla Tilling, Ilia
Mireille Delunsch, Elettra
Johan Weigel, Arbace
Xavier Mas, Il gran sacerdote
Ilya Bannik, La voce
Yun-Jung Choi, Anna Wall, Due Cretesi
Jason Bridges, Bartlomiej Misiuda, Due Troiani
Luc Bondy, mise en scène
Erich Wonder, décors
Rudy Sabounghi, costumes
Dominique Bruguière, lumières
Geoffrey Layton, dramaturgie
Arco Renz, chorégraphie
Catherine Friedlang, styliste des coiffures
Winfried Maczewski, chef des chœurs
Iñaki Encina Oyón, assistant à la direction musicale
Thomas Hengelbrock, direction musicale
Idomeneo, Wolfgang Amadeus Mozart
Je suis allé ce soir à la première représentation de la reprise d'Idomeneo. Je ne sais plus très bien pourquoi j'avais inscrit cet opéra de Mozart à mon abonnement ; peut-être parce que Joyce DiDonato était dans la distribution ? L'opéra m'a semblé moins ennuyeux que je ne l'avais ressenti en en écoutant un enregistrement. Cela dit, le troisième acte est nettement plus enthousiasmant que les deux premiers.
L'histoire est abracadabrantesque. Idoménée, roi de Crète, manque mourir en mer. Il n'est épargné par Neptune que parce qu'il a promis de sacrifier la première personne qu'il rencontrera après avoir débarqué. Le problème, c'est qu'il voit Idamante, son propre fils. Pour le protéger, il l'éloigne, mais Neptune fait apparaître un monstre marin meurtrier. Idamante, déçu de la volonté de son père de l'éloigner, cherche la mort en allant combattre le monstre, mais il parvient à le vaincre. Idoménée révèle que la victime sacrificielle que Neptune attend est Idamante. Celui-ci s'offre en sacrifice sous le fer d'Idoménée, mais au dernier moment, une voix caverneuse s'élève pour satisfaire Neptune, il suffit qu'Idamante abdique en faveur de son fils. Sur cette histoire, se greffe une rivalité amoureuse entre Ilia et Électre pour Idamante. Ilia est tourmentée par la contradiction entre d'une part l'honneur de Troie dont elle est issue et d'autre part son amour pour Idamante. Idamante l'aime aussi, mais il méconnait les sentiments d'Ilia. Électre est un personnage qui ne semble exister ici que pour faire obstacle à l'amour entre Ilia et Idamante.
Une fois que l'on a en tête le résumé, j'ai l'impression que l'on ne perd pas grand'chose en ne regardant que très distraitement les sur-titres afin de viser les solistes avec les jumelles. Les chanteurs des rôles principaux sont tous très bons : Paul Groves (Idoménée), Joyce DiDonato (Idamante), Camilla Tilling (Ilia) et Mireille Delunsch (Électre). Par contre, le décor est un peu trop minimal et est revêtu de bien curieuses couleurs. Je n'ai pas aimé les lumières non plus, puisque comme trop souvent, les ténèbres envahissent la scène de sorte que le seul moment pour vraiment bien voir les chanteurs est à la fin du spectacle, quand ils viennent saluer...
À part ça, le deuxième rang des troisièmes loges de côté, c'est horrible ; je préfère très nettement le premier rang des quatrièmes. De là, à moins de se tordre dans tous les sens, une bonne partie de la scène n'est pas visible et pour les parties visibles, il faut compter sur l'absence de conjonction avec les têtes des spectateurs du premier rang. Je n'ose imaginer ce que ça doit être pour ceux du troisième rang, qui devaient carrément se lever pour y voir quelque chose.
2009-01-27 12:32+0530 (சென்னை) — Culture — Opéra — Voyage en Inde VI
Hier, je suis retourné aux cinémas Satyam pour faire usage du ticket que j'avais acheté la veille pour une séance de Slumdog Crorepati. Je ne suis pas arrivé suffisament en avance pour déjeuner au restaurant avant d'entrer, j'ai donc mangé debout dans une dhaba en face. J'ai demandé des samosas, mais à peine l'homme les avait-il saisis qu'ils se sont retrouvés en miettes, mélangés à une sauce et saupoudrés de quelques autres ingrédients. C'était plutôt bon. En fait, il y avait un restaurant à l'intérieur du cinéma, peut-être pour une prochaine fois.
Contrairement à la plupart des cinémas indiens qui diffusent un unique film trois ou quatre fois par jour, ce cinéma est un grand édifice avec six salles, des guichets de réservation informatisés très modernes (la fréquence de défilement des écrans annonçant les disponibilités de chaque film est quasi-stroboscopique...).
Je monte dans la salle Santham, qui est complètement remplie et m'installe à ma place (un peu chère payée pour un cinéma en Inde : cent roupies alors que d'habitude, je paye plutôt autour de quarante ou cinquante roupies). Divers écrans publicitaires et bandes-annonces toujours précédées d'un écran montrant le visa de la censure. Le film d'aujourd'hui serait dans la catégorie (A), bref, interdit aux moins de dix-huit ans.
Le film est en double flash-back. Jamal Malik est interrogé
par
la police après avoir répondu brillamment aux questions du jeu Who wants to be a millionaire?
; on le soupçonne d'avoir
triché. On est soit au poste de police, soit dans le jeu télévisé, soit
dans des scènes de l'enfance du personnage qui, tout en montrant l'horreur
de sa vie dans son slum, expliquent pourquoi il sait qui est
l'acteur de tel ou tel film ou bien ignore ce que Rama tient dans sa main
droite dans l'iconographie hindoue.
C'est un très beau film, montrant un envers invisible de situations bien observables en Inde. Si ce n'est quelques images du Taj Mahal ou du slum, peu de plans larges dans ce film, ce qui nous immerge dans le cœur de l'action (mais heureusement pas de l'olfaction !).
Comme l'a noté Palpatine, on trouve dans ce film un clin d'œil musical à Orphée et Eurydice de Gluck (en français ! par l'orchestre Lamoureux). Cela fait bien sûr écho à l'histoire de Jamal et Latika depuis leur enfance. Si ma mémoire est bonne, le film se termine comme dans cet opéra (ce n'est pas vraiment un spoiler, ça, si ?).
Le public indien ne boude pas ce film, bien au contraire. Contrairement à ce que j'ai observé plusieurs fois, le public est resté parfaitement silencieux pendant le film et certains ont même applaudi à la fin. Ce week-end, l'équipe du film participait à un débat pas inintéressant sur NDTV (la seule chaîne d'information convenable en Inde). En dehors des questiosn importantes, on se demandait si Shahrukh Khan avait été approché pour le rôle joué par Anil Kapoor. Les réponses ont plutôt été discordantes : Anil Kapoor remerciait SRK pour lui avoir laissé l'opportunité de faire ce rôle vu les honneurs que ce film reçoit tandis qu'une personne de la production disait en substance que faire jouer à SRK ou à Amitabh Bachchan plus ou moins leur propre rôle, vu qu'ils ont présenté KBC (Kaun Banega Crorepati), aurait nui à leur image, étant entendu que le présentateur du film est hautain et méprisant alors qu'eux deux avaient bénéficié d'un regain de popularité grâce à cette émission.
Les dialogues du film ont gardé une petite contribution d'Amitabh
Bachchan : quand le héros jour son joker 50/50 (à moins que ce ne soit à un
autre moment du film), le présentateur commence sa phrase par
Computerji
, bref, il s'adresse cérémonieusement à l'ordinateur pour
qu'il enlève deux mauvaises réponses. En revanche, pas de clin d'œil à SRK
et son Freeze karõ
.
Je suppose que la version que j'ai vue est la version originale. L'essentiel était en anglais, mais quelques passages étaient en hindi (avec des sous-titres en anglais, quoique non systématiques).
Quelques autres avis sur le film : Palpatine, Yohan, Agnès, Naina.
⁂
J'avais encore un peu faim après avoir vu le film. Je suis donc allé dans un des restaurants de la chaîne de fast-food haut de gamme Saravana Bhavan spécialisée dans la cuisine du Sud. C'était en fait plutôt la version très haut de gamme appelée Swathi.
J'ai été dépaysé par les premières pages du menu, mais j'ai été rassuré en voyant la toute dernière page, puisqu'elle seule mentionnait les spécialités du Sud. J'ai choisi un South Indian Parota : deux parotas de taille moyenne accompagnés d'un curry dans lequel nageaient quelques petits morceaux de paneer, juste de la bonne taille pour que l'on ait pas l'impression de manger du caoutchouc. C'était vraiment excellent.
Je me suis ensuite dirigé vers la mer. Face à la baie du Bengale, près de Besant Road, se trouve la rose Ice House (du nom de la fonction qu'elle occupait autrefois dans l'importation de glace en Inde). Swami Vivekananda y a passé quelques jours en février 1897 ; c'est maintenant un musée qui lui est dédié. Une statue du moine accueille le visiteur avant qu'il n'entre dans la maison et ne s'acquitte du modeste pécule de deux roupies.
L'accueil est très sympathique ; on m'a même octroyé le privilège d'une petite visite guidée, dont les explications les plus triviales m'ont été épargnées après que j'eus dit que j'avais déjà visité Kanyakumari et Belur Math (Kolkata). À l'étage, on trouve une galerie de peintures assez réussies sur l'Inde, son histoire, ses religions. La seule véritable entorse au bon goût est celle qui consiste à avoir représenté l'avatar du poisson (Matsya) par un authentique aquarium (avec des vrais poissons dedans). Un peu plus haut, les murs s'ornent de photographies. La plupart d'entre elles sont des portraits du moine.
J'avais lu dans le journal qu'un concours de portraits de Swami Vivekananda avait été organisé, mais je n'avais pas trop fait attention au lieu. Bien sûr, c'était au musée qui lui est consacré. Les moins de vingt ans pouvaient participer et ils l'ont fait en nombre puisqu'il y avait pas moins de vint mille participants !
Les premiers prix sont les portraits les mieux réalisés techniquement, mais pas forcément les plus originaux dans la conception. On trouve néanmoins une sorte de Trimurti Swami Vivekananda, Shri Ramakrishna, Sharada Devi (les trois figures importantes dans le mouvement initié par Ramakrishna). Les vainqueurs sont exposés en haut de la maison, dans l'antichambre de la salle de méditation. Les autres le sont sur les murs circulant tout autour. En dehours de nombreux dessins ordinaires, on trouve un portrait réalisé avec le pied, un autre avec la bouche, un autre dessiné avec vingt millilitres de sang. Voilà pour les excentriques. Plus intéressant, on trouve aussi quelques dessins assez hofstadteriens. Un portrait a été réalisé en écrivant de nombreuses fois le nom du moine en tamoul, ce sont les lignes d'écritures (courbes) qui, dans leur globalité, font apparaître la figure du moine. Un autre, malheureusement achevé trop tard pour le concours, a été obtenu en écrivant environ deux cents pages d'une biographie tamoule en tout petits caractères ; deux loupes sont fournies.
J'ai fini la journée par une petite balade sur Marina Beach. Le vent tendait la ficelle de nombreux cerfs-volants.
⁂
Aujourd'hui, le Chennai Mathematical Institute est ouvert ; je vais pouvoir commencer à faire des mathématiques.
2009-01-18 02:48+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2009-01-17
Vladimir Vaneev, Boris Timofeevitch, un vieux bagnard
Ludovit Ludha, Zinovy Borisovitch Ismailov
Eva-Maria Westbroek, Katerina Lvovna Ismailova
Michael König, Serguei
Carole Wilson, Aksinya, une bagnarde
Alexander Kravets, Le Balourd miteux
Lani Poulson, Sonietka
Valetin Jar, Un maître d'école
Alexander Vassiliev, Un pope, un gardien
Nikita Storojev, Le chef de la policer, un officier
Shin Jae Kim, Un régisseur
Marc Chapron, Un portier
Hyoung-Min Oh, Se-Jin Hwang, Slawomir Szychowiak, Contremaîtres
Chae-Wook Lim, Un meunier
Fernando Velasquez, Un cocher
Andrea Nelli, Un policier
Pascal Mesle, Un invité ivre
Hartmut Haenchen, direction musicale
Martin Kušej, mise en scène
Martin Zehetgruber, décors
Heide Kastler, costumes
Reinhard Traub, lumières
Louba Orfenova, études musicales
Winfried Maczewski, chef des chœurs
Orchestre et Chœurs de l'Opéra national de Paris
Lady Macbeth de Mzensk, Dimitri Chostakovitch
Ce soir, c'était la première de Lady Macbeth de Mzensk, de
Chostakovitch, à l'Opéra Bastille. L'opéra n'est pas une adaptation de la
pièce de Shakespeare, mais d'une nouvelle de Nikolai Leskov. Pas de
sorcières, pas de soldats déguisés en arbres. Si Macbeth
apparaît
dans le titre, c'est que l'héroïne 1,
Katerina Lvovna Ismailova, a des penchants meurtriers.
Au premier acte, pour tromper son ennui, elle se laisse séduire par Serguei, un ouvrier qui travaille pour son mari, alors que ce dernier est parti réparer un moulin. Le beau-père lubrique profiterait bien de sa bru, mais il surprend Serguei et le bat. Katerina l'empoisonne. Ensuite, au retour de son mari, de peur d'être abandonnée par son amant, elle tue son mari avec la complicité de Serguei. Ils cachent le corps dans le cellier et s'en vont se marier.
Prévenue par un ouvrier ayant découvert le corps, la police fait une apparition spectaculaire pendant le mariage. Ils sont tous les deux arrêtés et envoyés au bagne. Serguei se détourne de Katerina et séduit une autre détenue, Sonietka. Trompée, Katerina étrange sa rivale et meurt elle aussi dans la confusion, apparemment lynchée par les autres détenus (dans le livret, elles sont toutes les deux noyées).
L'opéra dure presque trois heures. Ignorant la durée de l'opéra en entrant, le temps passant, j'ai cru qu'il n'y aurait pas d'entr'acte. Il est finalement intervenu au bout d'environ deux heures. L'opéra est découpé en neuf tableaux répartis en quatre actes. L'entr'acte survint à un drôle d'endroit. Après la reprise, un tableau, puis le spectacle s'est interrompu pendant de longues minutes nécessaires à l'installation du superbe décor carcéral. Ce long changement de décor eût vraisemblablement gagné à coïncider avec un entr'acte, quitte à ce qu'il y en eût un de plus.
Pendant les deux premiers actes, le décor est constitué d'un sol terreux (salissant) encadré par de hautes palissades, avec au milieu, une grande pièce dépouillée aux murs transparents ; c'est le domaine de Katerina, brillamment interprétée par Eva-Maria Westbroek. Les scènes crues de son intimité avec Serguei sont terriblement violentes, ceci étant encore accentué par la musique et les lumières.
On ne peut pas vraiment dire que j'aie été séduit par la musique de Chostakovitch. L'action violente, crue, laisse très peu d'espace pour que les personnages, et en particulier Katerina, puissent exprimer leurs sentiments, leurs motifs et leurs éventuelles hésitations alors qu'ils s'apprêtent à commettre des méfaits. Bref, des personnages on ne peut plus antipathiques.
[1] Le français est vraiment une langue de
fous : comment expliquer que le h de héros
soit aspiré et que celui
de héroïne
ne le soit pas ?
2008-12-19 00:03+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Lectures
Il y a quelque temps, je parlais de la quarantaine d'heures de musique qu'il me restait à écouter après que j'eus finis de découvrir mon intégrale de Mozart. Cela fait au moins cinq ans que ça ne m'est pas arrivé, mais aujourd'hui, il n'y a pas dans ma collection de disques une minute de musique que je n'aie pas écoutée.
Parmi les opéras écoutés dernièrement, Fidelio de Beethoven m'a beaucoup impressionné. Rarement, au disque, je n'ai autant été ému par un opéra, alors même qu'aucun personnage ne meurt ! Si le premier acte ne m'a pas particulièrement enthousiasmé, le deuxième est vraiment superbe. J'avais acheté cet enregistrement (Sir Colin Davis, London Symphony Orchestra, 2006) pour me préparer à la représentation que je me disposais à voir cette année ; un grain de sable a dû compromettre la saisie de mon formulaire d'abonnement par les services de l'Opéra de Paris puisque de la production présentée cette année, je n'ai reçu nul billet. Quel dommage !
Là, tout de suite, je viens de visionner un DVD conseillé par Madame Abricot : Carmen avec Anna Caterina Antonacci et Jonas Kaufmann à l'Opéra royal de Londres. De cet opéra, je n'avais écouté que les suites pour orchestre qui en sont extraites. Avec d'excellents chanteurs et une bonne mise en scène, c'est tellement mieux ! Je me réjouis d'avoir pris une place pour la production de l'Opéra Comique en juin 2009, avec ladite Anna Caterina Antonacci. En regardant à nouveau la distribution, je viens de remarquer que le chœur d'enfants sera le chœur Sotto Voce. Tant mieux.
Mon mois de janvier s'annonçant chargé et celui de février indien, j'attendrai sans doute mars avant de me livrer à quelque nouvelle dilapidation (une semi-intégrale Haydn ?).
Côté livres, cette situation ne risque pas se produire de sitôt. À mon rythme actuel de lecture (environ quatre-vints livres cette année), j'ai de la réserve pour plus d'une année, étant entendu qu'en dernier recours, il me restera toujours une Bible (Segond).
2008-11-24 20:06+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
J'ai déjà parlé d'actes anodins de disquaires pouvant nuire à leur commerce. Le parcours du discolique est parsemé d'un autre type d'embûches : les malfaçons.
Ces dernières années, j'ai rencontré ce type de problèmes à plusieurs reprises. Dans mon intégrale Hänssler de Bach, un disque était en double et un autre était manquant. La plupart de ces disques, peut-être tous, étaient aussi en vente à l'unité et j'en possédais déjà quelques uns que j'ai donnés ici ou là. Par une chance inouïe, le disque qui était manquant faisait déjà partie de ma collection.
Les trois autres problèmes qui m'ont fait souffrir quelques désagréments sont dus à divers problèmes avec EMI Classics. Un des premiers opéras que j'ai acheté était Norma de Bellini (avec Maria Callas, 1960). Commandé sur Amazon.fr, le boîtier de trois CD contenait le CD nº1, deux exemplaires du CD nº2, mais pas de CD nº3. Retour à l'envoyeur, qui me réexpédie un nouveau coffret, souffrant du même défaut. Deuxième retour ; la troisième expédition sera la bonne.
J'ai déjà parlé du caractère bâclé de certain livret fourni par cet éditeur. Hier, en écoutant pour la première fois Orphée aux enfers d'Offenbach, dirigé par Marc Minkowski, avec notamment Natalie Dessay (Eurydice), Yann Beuron (Orphée), Laurent Naouri (Jupiter), j'ai été tout perturbé que la page 73 du livret succède à la page 96. Bref, une vingtaine de pages manquent au livret, ce qui m'a pas mal déstabilisé dans mon écoute des troisième et le quatrième tableaux. Heureusement que l'opéra est en français ! Bien sûr, le livret complet n'est pas disponible sur le site Internet de l'éditeur. Comme Offenbach a proposé deux versions de son œuvre et que Laurent Pelly et Marc Minkowski ont retenu plutôt la première avec quelques éléments de la seconde, une version du livret trouvée sur Internet s'est avérée assez différente de ce que j'entendais. Cet incident m'a un peu gâché cette première écoute de ce bien charmant opéra-bouffe, qui cite parfois pour plaisanter Orfeo ed Euridice de Gluck (dont je ne me lasse pas non plus d'écouter un enregistrement avec Bernarda Fink dans le rôle d'Orfeo).
On voit là un des dangers de l'achat compulsif de disques pour une
consommation
non immédiate. Si j'écoutais mes disques aussitôt après
les avoir achetés, je saurais vers qui me retourner pour obtenir
remplacement d'objets défectueux (encore que dans le dernier cas envisagé
ici, il ne me semble pas aller de soi que le commerçant accepte de procéder
à un échange). Pour Orphée aux enfers, je n'ai absolument aucun
souvenir de l'achat, qu'il se réalisât par Internet ou en magasin.
⁂
Les organisateurs de concerts proposant à la vente des programmes ne sont pas toujours irréprochables non plus. Je me souviens d'une Johannes-Passion au TCE pour lequel le livret apparaissant dans le programme commençait par O Mensch, bewein dein Sünde groß. Dans les versions usuelles des Passions de Bach, ce chœur apparaît à la fin de la première partie de la Matthäus-Passion, mais c'était aussi et avant tout le chœur introductif d'une des versions de la Johannes-Passion, mais qui n'est pas la version canonique jouée actuellement. Pendant les minutes précédant le concert, je me réjouissais donc par avance de l'écoute prochaine d'une version non standard de cette œuvre. Ce ne fut donc pas sans une certaine déception que j'entendis le concert débuter par le traditionnel chœur Herr, unser Herrscher.
Je n'ignore s'il y a lieu d'y voir un changement de politique de l'Opéra de Paris, mais je constate avec réjouissance que les trois programmes d'opéra que j'y ai achetés depuis le début de la saison comportent une version française du livret alors que ce cas était plutôt l'exception les années précédentes (sur les huit programmes précédemment achetés, seul celui de Luisa Miller incluait un livret).
2008-11-23 01:16+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2008-11-22
Shawn Mathey, Tamino (ténor)
Iwona Sobotka, Erste Dame (soprano)
Katija Dragojevic, Zweite Dame (mezzo-soprano)
Cornelia Oncioiu, Dritte Dame (mezzo-soprano)
Russell Braun, Papageno (baryton)
Maria Virginia Savastano, Pagagena (soprano)
Kristinn Sigmundsson, Sarastro (basse)
Wolfgang Ablinger-Sperrhacke, Monostatos (ténor)
Maria Bengtsson, Pamina (soprano)
Erika Miklosa, Königin der Nacht (soprano)
José Van Dam, Der Sprecher (baryton)
Jon Ketilsson, Erster Geharnischter (ténor)
Rúni Brattaberg, Zweiter Geharnischter (basse)
Solistes de la Maîtrise des Hauts-de-Seine / Chœur d'enfants de l'Opéra national de Paris, Drei Knaben
Thomas Hengelbrock, direction musicale
La Fura dels Baus / Alex Ollé et Carlos Padrissa, conception, mise en scène
Jaume Plensa, conception, décors et costumes
Valentina Carrasco, collaboratrice à la mise en scène
Franc Aleu, vidéo
Albert Faura, lumières
Alessandro Di Stefano, chef des chœurs
Orchestre et Chœurs de l'Opéra national de Paris
Die Zauberflöte, Wolfgang Amadeus Mozart
J'avais entendu beaucoup de mal de la production de La Flûte enchantée qui est reprise en ce moment à l'Opéra Bastille. J'étais à la représentation d'hier. Un placement plutôt bon : deuxième balcon, plein centre.
Je suis horrifié par le début. Les costumes sont d'une laideur et d'un mauvais goût incroyables à ce niveau (avec une mention spéciale pour les trois Dames et la Reine de la Nuit). Des vidéos de mauvais économiseurs d'écrans sont projetées en surimpression.
Au bout d'un moment, j'arrive à surmonter mon premier sentiment. Les chanteurs des rôles principaux, Tamino, Pamina, La Reine de la Nuit, Sarastro, Papageno et Papagena sont bons. Monostatos me paraît un peu plus limite. Le chœur est planqué sous la scène et il ne sera pas donné au public d'apercevoir José Van Dam qui a le rôle parlé de la Voix. Je profite de mon placement pour observer l'orchestre.
Si on laisse de côté les costumes affreux et l'essentiel des vidéos, ce qu'il reste de la mise en scène se laisse bien regarder. Le décor est constitué de douze matelas géants gonflables (et dégonflables). Ces éléments bougent beaucoup et se transforment aussi bien en temple, en pyramide ou en les terribles lieux des épreuves d'initiation que subissent Tamino et Pamina.
D'autres aspects de la mise en scène laissent perplexes, comme la pluie
de boules noires et blanches dans un grand récipient, constituant une sorte
de piscine dans laquelle Monostatos, Pamina puis Papageno plongent. Le bout
de phrase quand j'ai placé les pièces
dans la bouche de Sarastro
donne lieu à un grand n'importe quoi au deuxième acte où un grand échiquier
est projeté sur scène ; des figurants viennent s'y placer, Sarastro en
échange trois ou quatre ; une très courte partie d'échecs grandeur nature
se déroule. On assiste à deux tours de magie classiques : Sarastro est
coupé en trois morceaux et plus loin est transpercé d'épées avec en plus du
sang qui coule de la boîte dans laquelle il se trouve, sang, qui vidéo
aidant, se répand sur toute la scène. Ce deuxième tour me paraît assez
incohérent avec l'histoire : dans la version du livret que j'avais lue,
après que la Reine de la Nuit a exprimé sa colère terrible en demandant à
Pamina de tuer Sarastro, Pamina ne semble pas le moins du monde disposée à
lui obéir (elle n'a de toute façon pas le temps d'y penser, vu que
Monostatos revient la harceler). Ce soir, elle plantait des épées dans
Sarastro, sans le tuer pourtant. L'utilisation des clochettes
par
Papageno est curieuse. Parfois, il actionne son attirail, parfois, on
entend leur son mais il ne fait même pas semblant de s'en préoccuper, ayant
autre chose à faire. Les trois enfants apparaissent avec des consoles de
jeux portables en mains. Bref, l'onirisme décomplexé des concepteurs ne
s'est pas exprimé sans quelques débordements.
Malgré tout, ce spectacle est tout à fait regardable et écoutable. Le public, constitué d'un nombre inhabituellement élevé d'enfants, semble avoir apprécié ; je n'ai pas entendu de sifflets.
Ailleurs : l'avis de Palpatine.
2008-11-22 14:24+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2008-11-21
Clifton Forbis, Tristan (ténor)
Matti Salminen, König Marke (basse)
Waltraud Meier, Isolde (soprano)
Alexander Marco-Buhrmester, Kurwenal (baryton)
Ekaterina Gubanova, Brangäne (mezzo-soprano)
Ralf Lukas, Melot (baryton-basse)
Bernard Richter, Ein Hirt, Ein junger Seemann (ténor)
Robert Gleadow, Der Steuermann (ténor)
Semyon Bychkov, direction musicale
Peter Sellars, mise en scène
Bill Viola, vidéo
Martin Pakledinaz, costumes
James F. Ingalls, lumières
Alessandro Di Stefano, chef des chœurs
Orchestre et Chœurs de l'Opéra national de Paris
Tristan und Isolde, Richard Wagner
Hier, je suis allé pour la deuxième fois à l'Opéra Bastille pour assister à une représentation d'un opéra de Wagner. En mai 2007, j'avais plutôt aimé Lohengrin (mis en scène par Robert Carsen) et une Waltraud Meier terriblement convaincante en Ortrud. Qu'elle incarne Isolde a été ma principale motivation pour inscrire cet opéra à mon abonnement. Ce qui est ennuyeux avec les abonnements, c'est qu'on ne peut réserver que des places dans les six premières catégories de prix. Faute de place disponible en sixième, j'avais dû opter pour une place de cinquième catégorie. À mon humble avis, le prix des places et le plaisir de spectateur en résultant est complètement décorrélé. Je préfère être au premier balcon avec vue plongeante sur l'orchestre, la vision des sur-titres en fût-elle mise en péril que d'être à l'avant-dernier rang du parterre, en ayant payé ma place à quadruple prix : on ne voit que la tête du chef dépasser, les chanteurs sont très loin et la santé et la fortune ne s'accordant guère, on tousse bien davantage au parterre que dans les hauteurs. Bon, je me console en me disant que les personnages du rang situé juste devant moi eurent à payer encore 26€ de plus !
L'opéra commenca vers 18h, les opéras normaux commençant plutôt vers 19h30. Tristan dure 4h, également divisé en trois actes. Des entr'actes de 45 et 30 minutes ayant été prévues, pour que l'œuvre finît à une heure raisonnable, il fallait commencer tôt.
Globalement, je suis déçu par cette représentation. Quelques prosélytes lyriques ont même abandonné après le premier ou le deuxième acte. Le seul élément de décor était une toute petite plate-forme où les personnages pouvaient s'asseoir ou s'allonger. Les costumes étaient trop sobrement noirs. À part peut-être au troisième acte où il y avait un peu de couleur, les lumières n'éclairaient pas grand'chose. Non, le spectacle visuel n'était pas sur scène, mais sur l'écran situé entre les chanteurs et le sur-titrage. Pendant quatre heures ou presque, nous avons été abreuvés des vidéos de Bill Viola. Le premier acte a représenté des rites de purification. Du fait d'un petit coup de barre, j'ai un souvenir plus confus du deuxième acte. Lumières dans un bois pendant une partie de chasse, coucher de Lune, lever de Soleil. Vidéos accélérées ou ralenties représentant la nature, des effets d'optique plus ou moins naturels. Bravo au directeur de la photographie, l'esthétique et la qualité des images était impressionnante. C'est bien beau, mais cela distrait le spectateur de ce qui se passe sur scène. Il ne m'a pas été possible de me détourner de ces images, puisque, n'entendant guère l'allemand, j'ai besoin des sur-titres pour suivre. Il n'est pas évident de suivre simultanément l'action qui se passe en bas et en même temps ces sur-titres situés tout en haut, deux éléments sobres, quand le centre est accaparé par d'ondoyantes images (cela empêche aussi de s'endormir complètement, la luminosité étant importante, surtout si on est situé à proximité de la cabine de projection). Ajouter à cela que les textes sont largement métaphoriques, de sorte qu'une ligne de sur-titres de perdue engendre bien dix lignes d'incompréhension.
La mise en scène est très statique. À plusieurs reprises, des personnages se retrouvent à rester immobiles pendant de longues minutes. Certains personnages semblent avoir des yeux dans le dos ; Isolde fait même à distance et de dos un diagnostic de Tristan mourrant. Pour tenter de faire oublier ces limitations, certains personnages (Brangäne, le berger) apparaissent non plus sur scène mais dans dans les hauteurs du théâtre (invisibles depuis ma place). On fait aussi entrer un chœur d'hommes par le fond du parterre (tout près de moi, donc). Bref, ce n'est pas très convaincant.
Heureusement, il reste la musique. Si je suis partagé sur les parties chorales, très limitées et assez peu intéressantes, aussi bien l'orchestre que les solistes lui font honneur. L'ouverture de l'œuvre est belle ; on réentend ensuite avec plaisir quelques leitmotivs.
2008-10-14 21:12+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Théâtre des Champs-Élysées — 2008-10-12
Claire Debono, La Gloire, Phénice, Lucinde (dessus)
Isabelle Druet, La Sagesse, Sidonie, Mélisse (bas-dessus)
Stéphanie d'Oustrac, Armide (bas-dessus)
Nathan Berg, Hidraot (basse)
Marc Mauillon, Aronte, Ubalde (basse)
Marc Callahan, Artémidore (haute-contre)
Paul Agnew, Renaud (haute-contre)
Laurent Naouri, La Haine (basse)
Andrew Tortise, Le Chevalier danois (haute-contre)
Anders J. Dahlin, Un amant fortuné (haute-contre)
Francesca Boncompagni, La Nymphe (dessus)
Violaine Lucas, La bergère héroïque (dessus)
Virginie Thomas, La bergère (dessus)
William Christie, direction musicale
Robert Carsen, mise en scène
Gideon Davey, décors et costumes
Jean-Claude Gallotta, chorégraphie
Robert Carsen et Peter Van Praet, lumières
Les Arts Florissants
Danseurs du Centre Chorégraphique National de Grenoble / Groupe Émile Dubois
Armide, Jean-Baptiste Lully.
Dimanche dernier, j'étais au Théâtre des Champs-Élysées pour une représentation d'Armide, opéra en un prologue et cinq actes de Lully.
Le prologue, panégyrique de Louis XIV et annonce du thème de l'opéra,
est interprété par William Christie et les Arts florissants pendant que les
choristes déguisés en touristes envahissent la salle par diverses portes.
La scène ressemble à l'entrée d'une exposition. On annonce Prochaine
visite à 17h
. La Gloire et la Sagesse (Claire Debono et Isabelle Druet)
entrent sur scène en guides touristiques munies de baguettes et de
télécommande pour vidéoprojecteur pour faire défiler des images du
Roi-Soleil sur la grande toile située au milieu de la scène. On voit un
film d'un groupe de touristes à Versailles, écoutant dans un premier temps
sagement leur guide, puis se mettant à danser en entrant dans la galerie
des Glaces. Ce prologue joyeusement animé par écran interposé par les
danseurs du Centre chorégraphique national de Grenoble (groupe Émile
Dubois) et par nos deux guides et les choristes installés dans la salle me
fait me demander si j'ai bien lu le programme : cela ne ressemble guère à
du Robert Carsen.
Quand le premier acte commence, je retrouve une mise en scène et des décors d'un style plus familier. Un joli fondu enchaîné entre la fin du film projeté et la première scène où Armide, Stéphanie d'Oustrac, se réveille dans un lit à baldaquin. On vante les victoires de la magicienne sur les croisés, mais un guerrier, Renaud (Paul Agnew), lui résiste, il vient d'ailleurs de libérer les prisonniers. Elle promet de se venger.
Au deuxième acte, Armide et son oncle Hidraot convoquent des charmes pour enchanter Renaud. Des nymphes vêtues en rouge et portant des fleurs entourent Renaud qui s'assoupit au milieu de la scène, couverte de fleurs. Par le pouvoir des machinistes, il se trouve surélevé de quelques dizaines de centimètres. Armide arrive avec un poignard pour le tuer, commence l'air Enfin, il est en ma puissance. Quand elle le voit, elle en tombe amoureuse et renonce à le tuer.
Entr'acte. Armide ne pense pas être aimée de Renaud. Elle croit ne pouvoir le divertir de ce sentiment que par magie. Elle convoque la Haine (Laurent Naouri) pour se défaire de son amour pour lui. La Haine et sa suite, vêtus de rouge, interviennent. Au dernier moment, Armide renonce aux pouvoirs de la Haine et prend refuge dans l'Amour. Les membres de la suite de la Haine embrassent goulûment l'héroïne.
Le quatrième acte est très curieux. Ubalde et le Chevalier danois sont chacun à son tour perturbés dans leur recherche de Renaud par l'apparition d'une nymphe enjôleuse. Pendant que l'un est charmé, l'autre utilise une arme magique pour défaire la nymphe de son pouvoir charmeur.
Au dernier acte, Armide et Renaud sont devenus amants. Armide craint que Renaud ne lui préfère la Gloire et le laisse sous le charme des plaisirs. Les deux compères du quatrièmes actes retrouvent Renaud et le libèrent du pouvoir d'Armide. Renaud s'habille (en rouge) et répond à l'appel de la guerre. Armide revient (en gris) et le maudit.
Si j'ai toujours un peu de mal avec les opéras baroques en français, j'ai passé un bon moment. J'ai revu avec plaisir Paul Agnew et Laurent Naouri. Après vérifications dans mes archives, si j'avais déjà entendu Stéphanie d'Oustrac dans plusieurs rôles secondaires d'Alceste (en version oratorio), je ne l'avais jamais vue dans un rôle principal. J'ai particulièrement apprécié son jeu et son chant dans l'air final du deuxième acte.
La dernière est samedi prochain. Elle sera diffusée en direct sur France Musique.
En rentrant, mon RER B est bloqué à Laplace en raison d'un accident
grave de voyageur
(en clair : un suicide). Je continue à pieds. Trois
stations plus loin, à Bourg-la-Reine, je trouve un RER pour
Massy-Palaiseau, puis un autre pour Orsay.
2008-10-09 23:05+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Je viens enfin de finir d'écouter mon intégrale Brilliant de Wolfgang Amadeus Mozart. Il m'aura fallu 1074 jours pour cela, c'est-à-dire un peu moins de trois ans. Voici le graphique de ma lente progression (le nombre de jours depuis l'acquisition en abscisse et en ordonnée le pourcentage écouté à cette date) :
Je l'ai écoutée essentiellement dans l'ordre chronologique de composition, à savoir dans l'ordre du catalogue Köchel. Ce qui m'a beaucoup ralenti, voire bloqué, surtout au début, étaient les opéras, franchement pas très intéressants. J'ai un peu accéléré le rythme d'écoute il y a un an, et il y a quelques semaines, pressé d'arriver au bout, je me suis presque infligé une sorte d'anti-traitement Ludovico. À partir des Noces de Figaro, les opéras de Mozart deviennent tout à fait supportables à mon goût ; j'ai hâte de voir une représentation de La Flûte enchantée.
Comme je le disais il y a trois ans, je n'ai pas acheté cette intégrale par goût. J'avais juste envie de connaître un peu mieux ce compositeur. J'estimais alors qu'il était moins ruineux d'acheter l'intégrale qui venait de sortir que d'acheter isolément tels ou tels symphonies, concertos ou opéras. À la fin de cette écoute, je suis toujours très loin de considérer Mozart comme un de mes compositeurs préférés.
⁂
J'ai encore en réserve une bonne quarantaine d'heures de CD non écoutés, parmi lesquels quelques opéras et oratorios :
Il paraît que je suis discolique.
2008-06-28 02:59+0200 (Orsay) — Culture — Opéra
Opéra Bastille — 2008-06-26
James Morris, Filippo II
Stefano Secco, Don Carlo
Dmitri Hvorostovsky, Rodrigo
Mikhail Petrenko, Il Grande Inquisitore
Paul Gay, Un frate
Tamar Iveri, Elisabetta Di Valois
Yvonne Naef, La Principessa Eboli
Elisa Cenni, Tebaldo
Jason Bridges, Il Conte Di Lerma
Elena Tsallagova, Voce Dal Cielo
Igor Gnidii, Luc Bertin-Hugault, Michal Kowalik, Marc Fouquet, Patrice Lamure, Marcos Pujol, Deputati Fiamminghi
Christian-Rodrigue Moungoungou, Slawomir Szychowiak, Vadim Artamonov, Enzo Coro, Constantin Ghircau, Shin Jae Kim, Sei Frati
Teodor Currentzis, direction musicale
Graham Vick, mise en scène
Tobias Hoheisel, décors et costumes
Matthez Richardson, lumières
Winfried Maczewski, chef des chœurs
Brad Moore, assistant à la direction musicale
Kevin Murphy, responsable des études musicales
Orchestre et chœurs de l'Opéra National de Paris
Don Carlo, Giuseppe Verdi
Théâtre des Champs-Élysées — 2008-06-27
Alessandro Corbelli, Falstaff
Anna Caterina Antonacci, Alice Ford
Francesco Meli, Fenton
Caitlin Hulcup, Meg Page
Amel Brahim-Djelloul, Nannetta
Federico Sacchi, Pistola
Marie-Nicole Lemieux, Mrs Quickly
Ludovic Tézier, Ford
Enrico Facini, Dr Cajus
Patrizio Saudelli, Bardolfo
Alain Altinoglu, direction musicale
Mario Martone, mise en scène
Sergio Tramonti, décors
Ursula Patzak, costumes
Pasquale Mari, lumières
Orchestre de Paris
Chœur du Théâtre des Champs-Élysées
Falstaff, Giuseppe Verdi.
Cette semaine, j'ai vu deux opéras de Verdi. Jeudi soir, Don Carlo à l'Opéra Bastille. Vendredi, Falstaff au Théâtre des Champs-Élysées.
Don Carlo était bien, mais globalement pas très enthousiasmant. Falstaff, le dernier opéra que Verdi a fini, est un opéra très différent de Don Carlo, et de tous ses autres opéras que j'aie vus ou entendus. Tout d'abord, il ne commence pas par une ouverture. On entre aussitôt dans l'histoire, qui est une comédie. Le très bedonnant Falstaff envoie deux lettres d'amour identiques à Alice Ford et à Meg Page. Celles-ci s'en aperçoivent et décident de rire à ses dépens. Monsieur Ford manigance aussi quelque chose (quoique l'opération soit d'un intérêt douteux, au moins pécunièrement : il donne incognito une valise de billets à Falstaff pour séduire sa femme). Alice Ford met en scène la venue de Falstaff chez elle. Quand son mari débarque fou de rage pour massacrer l'intrus, on le cache dans un panier à linge. On finit par le jeter dans la Tamise par la fenêtre. L'opéra pourrait presque se terminer sur ce plouf final. Dans le troisième acte, on va encore se moquer un peu de Falstaff, mais il ne sera plus le seul à en recevoir les éclaboussures. Depuis le premier acte, on avait découvert la romance entre Nanetta, la fille des Ford, et Fenton, mais Ford veut la marier avec le pédant Dr Cajus. Au cours de la cérémonie nocturne du troisième acte, Ford va célébrer simultanément deux mariages : Dr Cajus avec la reine des fées (il s'agit en fait d'un partisan de Falstaff déguisé) et, rendus méconnaissables par leurs déguisements, Nanetta et Fenton.
Les raisons qui m'avaient poussé à inscrire cet opéra à mon abonnement étaient la présence d'Anna Caterina Antonacci (Alice Ford) et le fait qu'il s'agisse d'un opéra de Verdi. Comme toujours, j'ai aimé son chant et son jeu. Parmi les autres interprètes féminins, Caitlin Hulcup (Meg Page) était assez en retrait. J'ai été plutôt agréablement surpris par Marie-Nicole Lemieux (Mrs Quickly ; elle avait le bras en écharpe suite à une chute pendant les répétitions). Il y a un ou deux ans, le mensuel Cadences m'avait offert son disque L'heure exquise : je l'avais trouvé d'un ennui profond. Dans le rôle de Nanetta, Amel Brahim-Djelloul était très bien. Falstaff était interprété par l'impressionnant Alessandro Corbelli, que j'avais vu en DVD dans le rôle de Sulpice (La fille du régiment). J'ai pu apprécier à nouveau Ludovic Tézier (Ford) et entendre Francesco Meli (Fenton) dans le très bel air Dal labbro il canto estasiato vola.
Dans cet opéra, les personnages entrent et sortent de scène très rapidement, et on voit beaucoup de dialogues (mettant en relation parfois beaucoup de personnages), ce qui donne un résultat très vivant (tout particulièrement quand les quatre personnages féminins sont réunis), sans temps mort. La dernière partie du troisième acte est incroyable. Bien qu'elle l'ait fait jeter dans la Tamise, Mrs Quickly a réussi à faire croire à Falstaff qu'Alice Ford l'aime et qu'elle lui donne rendez-vous près du chêne de Herne, théâtre de la légende du Chasseur Noir, pourvu de cornes. À minuit, Falstaff est au lieu dit, déguisé comme on lui a demandé de le faire... Tous les autres vont concourir à sa mystification. L'idée est de lui faire croire que des créatures célestes réprouvent sa conduite. Elles l'intimident, le maltraitent physiquement et le forcent à se repentir. Cela commence par la mouvante apparition de la reine des fées (Nanetta), qui se balance sur une balançoire à la verticale de Falstaff ; après Natalie Dessay (Lucia di Lammermoor) et Sylvie Brunet (Padmâvatî), c'est la troisième chanteuse que je vois utiliser cet accessoire dans un opéra. Les fées vont bientôt céder la place à des créatures plus maléfiques, avançant masquées. La mise en scène de ce passage est extrêmement bien réussie ; le fond lumineux représentant un arbre peint en style impressionniste était un très seyant élément de décor. Le pauvre Falstaff en voit vraiment de toutes les couleurs. Dans la cohue, le masque de Bardolfo, un de ses partisans putatifs, tombe. Les créatures qui le tourmentent n'avaient donc rien de céleste. Vient le temps de la célébration des noces de Nanetta et du Dr Cajus, se dit Ford. Comme indiqué plus haut, il est trompé à son tour par les femmes. On se dispute un peu pour savoir qui a gagné et qui a perdu, et finalement, on se réconcilie.
Avec cette histoire et cette belle musique, il y avait de quoi faire un spectacle enthousiasmant. À mon avis, c'est une réussite, autant par la mise en scène que par les voix.
2008-06-06 01:23+0200 (Orsay) — Culture — Opéra
Opéra Bastille — 2008-06-02
Giovanni Battista Parodi, Capellio
Anna Netrebko, Giulietta
Joyce DiDonato, Romeo
Matthew Polenzani, Tebaldo
Mikhail Petrenko, Lorenzo
Evelino Pidò, direction musicale
Robert Carsen, mise en scène
Michael Levine, décors et costumes
Davy Cunningham, lumières
Alessandro Di Stefano, chef des chœurs
Alessandro Galoppini, assistant à la direction musicale
Bernard Chabin, maître d'armes
Orchestre et chœurs de l'Opéra National de Paris
I Capuleti e i Montecchi, Vincenzo Bellini
À Vérone, deux groupes s'affrontent : les Guelfes et les Ghibellines. On s'y retrouve mieux si on oublie ces noms et qu'on les appelle respectivement Capulet et Montaigu. Un émissaire des Montaigu vient offrir la paix à Capellio en l'échange du mariage de Giulietta et Roméo. Bien entendu, les Capulet refusent ; Giulietta a déjà été promise à Tebaldo, qui a juré de venger la mort du frère de Giulietta que Roméo a tué au combat. En vérité, cet émissaire n'est autre que Roméo. Il rencontre Giulietta en cachette. Les noces de Tebaldo et de Giulietta, que Capellio a précipitées, sont interrompues par une attaque surprise des Montaigu. La bataille entre les deux clans va pouvoir éclater au moment de l'entr'acte.
Au deuxième acte, Lorenzo, le médecin et confident de Giulietta lui propose de feindre la mort en buvant un philtre. Elle finit par accepter. On l'enterre tandis que Tebaldo et Roméo se battent. Lorenzo ayant été découvert, Roméo n'a pas été averti du subterfuge. Quand il voit le corps sans vie de Giulietta, de désespoir, il avale un poison. Après que Giulietta s'est réveillée et a compris ce qui s'était passé, elle se donne elle aussi la mort.
⁂
J'ai assisté à une représentation de cet opéra de Bellini lundi dernier à l'Opéra Bastille. Avant que le spectacle commence, on pouvait voir des sabres plantés dans l'avant-scène. Je demandai alors à ma voisine si elle pensait qu'on allait avoir des scènes d'escrime. Si j'avais regardé de plus près la distribution, j'eusse vu qu'elle comprenait la mention d'un maître d'armes... Je n'ai pas été déçu.
Le décor manquait singulièrement de fantaisie : il était essentiellement formé de grands murs quadrillés en rouge. Un passage secret pour faire rentrer Roméo dans la chambre de Giulietta (avec un joli effet d'ombres chinoises portées sur le mur du milieu). Des costumes assez austères : le chœur des Capulet en rouge, Roméo en vert et noir sauf quand il est déguisé en Capulet, Giulietta en blanc, les Montaigu en bleu. J'ai trouvé la scène de l'église particulièrement réussie. Les rouges et les bleus ont commencé à se battre tout d'abord au ralenti avec leurs armes alors que les murs centraux tournaient avec le décor autour d'un axe, et puis le combat s'est fait de plus en plus spectaculaire.
Quelques détails m'ont fait tiquer dans cette mise en scène de Robert
Carsen. Après qu'elle s'est écroulée et que tout le monde l'imagine déjà
morte (certes pour de faux) depuis quelques secondes, pourquoi diable
Lorenzo remet-il sur pieds Giulietta pour finalement la laisser retomber et
mourir
à nouveau ? Pourquoi les missels ont-ils disparu à la fin des
combats ? Pourquoi donc faire se relever quelques secondes avant le tomber
du rideau les combattants que l'on imagine morts depuis le début de
l'acte ? Au sujet des lumières, pourquoi les avoir autant réduites lors du
deuxième acte ? Quand on va à l'Opéra ou au Théâtre, c'est pour voir des
artistes en pleine lumière, non ? Par moments, depuis le premier balcon,
même avec les jumelles, on n'y voyait goutte.
Dans cet opéra, l'action est très resserrée. Dans le programme, on peut lire un commentaire de Berlioz qui, après avoir vu cet opéra, se plaignit notamment de n'y avoir pas vu de nombreuses scènes de la pièce de Shakespeare. Trois moments forts : les airs de Giulietta lors de l'entrevue avec Roméo, ses airs avec Lorenzo et son père au début du deuxième acte, la scène finale. Bref, le rôle principal est celui de Giulietta, qui été interprétée lundi soir par Anna Netrebko qui fait ses débuts à l'Opéra de Paris avec cette production (enceinte de cinq mois, elle est remplacée pour quelques dates par Patricia Ciofi). Je n'ai pas été ému aux larmes par le grand air de Giulietta du premier acte. La version enregistrée par Natalie Dessay de cet air est nettement plus émouvante, mais je n'irai pas jusqu'à dire que j'ai détesté la prestation d'Anna Netrebko.
Par la beauté et le nombre des airs, Giulietta est suivie de peu par le rôle de Roméo, qui a été écrit pour mezzo-soprano. Ce rôle a aussi été adapté pour ténor, comme sur l'enregistrement techniquement nul que j'ai (enregistré le 7 octobre 1967 à la Scala). Pour notre plus grand plaisir, ce rôle a été confié à Joyce DiDonato dont j'ai autant apprécié le chant que le jeu.
Pour d'autres critiques, voir chez Kozlika.
2008-04-11 08:53+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Culture indienne
Je ne sais pas ce qui se passe cette année, mais par rapport aux années précédentes, j'observe un inquiétant nombre de spectacles annulés parmi ceux que j'avais réservés.
Au Théâtre du Châtelet, sur les cinq spectacles de mon abonnement, deux ont été annulés, pour des raisons en apparence assez futiles d'après les lettres envoyées par le Théâtre pour informer ses abonnés. Je n'ai donc pas pu voir Howard Shore diriger la suite pour orchestre Le Seigneur des Anneaux en raison de la création mondiale de l'opéra The Fly du même compositeur. Où donc ? Au théâtre du Châtelet ! La Flûte enchantée dirigée par Jean-Christophe Spinosi est annulée parce que l'enregistrement des concerts qui était prévu initialement a été annulé.
J'ai lu hier dans Le Monde que, souffrant, Ravi Shankar a annulé les deux concerts programmés à Paris. Ce matin, je vois un mail de la Salle Pleyel m'informant qu'Anna Caterina Antonacci sera remplacée par Marguerite Krull pour le concert rossinien de dimanche prochain ; bien sûr, j'avais réservé ce concert parce que c'était A. C. Antonacci qui avait le rôle d'Elisabetta...
Je ne compte pas les grève à l'Opéra de Paris et à la RATP qui m'ont empêché de voir l'opéra Tosca, fût-il en version de concert. Je ne compte pas non plus les quelques modifications de distributions survenues inopinément sans que la qualité du spectacle en souffrît. Malgré deux solistes remplacés au dernier moment, la représentation de La messe en si mineur par le Concert Spirituel dirigée Hervé Niquet que j'ai vue à la Salle Pleyel cette année est celle que j'ai préférée.
2008-03-15 16:49+0100 (Orsay) — Culture — Opéra — Cinéma — Culture indienne
Théâtre du Châtelet — 2008-03-14
Sylvie Brunet, Padmâvatî
Finnur Bjarnason, Ratan-Sen
Alain Fondary, Alaouddin
Yann Beuron, Le Brâhmane
Blandine Folio Peres, Nakamti
François Piolino, Badal
Lauvent Alvaro, Gora
Alain Gabriel, Le Veilleur
Jean-Vincent Blot, Un Prêtre
Orchestre Philharmonique de Radio France
Chœur du Châtelet
Sanjay Leela Bhansali, mise en scène
Omung Kumar Bhandula, scénographie
Tanushree Shankar, chorégraphie
Rajesh Pratap Singh, costumes
Somak Mukherjee, lumières
Lawrence Foster, direction
Stephen Betteridge, chef de chœur
Padmâvatî, opéra-ballet d'Albert Roussel
Hier soir, j'étais à la première de l'opéra-ballet Padmâvatî au théâtre du Châtelet. Je n'avais jamais été autant ému par un opéra. Le thème de cet opéra-ballet est inspiré de l'histoire d'une rani rajpoute de Chittor (Rajasthan) qui s'est sacrifiée avec de nombreuses autres femmes de la citadelle avant qu'un sultan ne prenne possession du palais après avoir vaincu l'armée conduite par le raja. Dans l'adaptation de cette histoire par Louis Laloy, Padmâvatî tue son mari Ratan-Sen qui veut céder à la demande du sultan mogol (sic) Alaouddin de lui donner la belle Padmâvatî en échange de la paix.
Je n'ai pas de goût marqué pour la musique vingtième siècle de Roussel. Pourtant, cette musique symphonique a la faculté de déclencher des impressions et des émotions fortes. En dehors de la musique et du chant (chœur du Châtelet et orchestre philharmonique de Radio France dirigé par Lawrence Foster), l'essentiel de la production a été confié à des indiens. La mise en scène de Sanjay Leela Bhansali (qui a notamment réalisé le film Devdas) et les décors semblent avoir pleinement utilisé les possibilités techniques du théâtre : Ganesh surgissant du ciel, décors escamotés par en haut au milieu d'un acte, rideau venant cacher l'arrière-scène pour mettre en valeur la scène tendue entre Ratan-Sen et Padmâvatî au deuxième acte.
Au premier acte, après une gracieuse entrée en scène du chœur par les allées de l'orchestre et un prologue, Alaouddin entre à dos d'éléphant, parlemente avec Ratan-Sen et sollicite des spectacles de plus en plus merveilleux jusqu'à demander explicitement Padmâvatî dont le nom évoque le lotus. Ceci permet de mettre en scène des danses de plus en plus gracieuses : guerriers, femmes esclaves, femmes du palais. Bien que la musique soit assez différente des musiques indiennes, Tanushree Shankar a merveilleusement bien chorégraphié ces danses.
Au début du deuxième acte, la bataille a commencé. Dans le temple de Śiva (de part et d'autre de la scène se trouvent un lingam/yoni et le buffle Nandi), les prêtres invitent Padmâvatî à se préparer à suivre son mari sur le bûcher. Muni de certains de ses attributs (trident, tambour, croissant de lune dans le chignon tressé), Śiva fait une apparition et prend la position Nataraja du seigneur de la danse. Pendant une trêve, Ratan-Sen entre dans le palais. Quand il demande à son épouse de se donner à Alaouddin pour épargner les autres femmes de son peuple, à l'évocation de leur mariage, quelques aspects du rite du mariage hindou sont mimés. Elle l'embroche avec le trident de Śiva. Les déesses Kali et Dourga surgissent. Lors de son entrée sur scène, Dourga est accompagnée d'un tigre ! À première vue, cela peut sembler inutile, mais dans cette production, les aspects indiens de l'œuvre sont respectés aussi authentiquement que possible. Les turbans des hommes du commun du premier acte sont ceux des rajasthanis, la barbe d'Alaouddin a la couleur orangée commune à celle que produit le henné sur la chevelure de nombreux hommes indiens, etc. Ici, le tigre est justifié par le fait que Dourga est traditionnellement représentée assise sur un félin (le plus souvent un tigre, parfois un lion). On voit une Kali avide de sang tirer la langue. Dans ce deuxième acte, l'évocation de Dourga et Kali (et d'autres divinités voisines et qui leur sont parfois identifiées) par les prêtres procure l'occasion de magnifiques scènes dansées. À un moment, les deux groupes de danseuses entourant Kali et Dourga se sont regroupées derrière leur divinité tutélaire, et ont positionné leurs bras de façon à suggérer les multiples paires de bras de l'iconographie hindoue (nécessaires pour représenter les nombreux attributs des divinités). Sous un meilleur angle que le mien, l'effet devait être saisissant.
Finalement, Padmâvatî rejoint son époux sur le bûcher. Quand Alaouddin victorieux force la porte du palais, il est trop tard. Depuis le devant de la scène, il se retourne et voit Padmâvatî et Ratan-Sen enlacés rejoindre leur séjour céleste. Tomber de rideau. Applaudissements enthousiastes de la salle pour l'ensemble des artistes qui viennent saluer.
PS : Une fois n'est pas coutume, Renaud Machart, du Monde, n'a pas détesté.
⁂
Pour me préparer à ce magnifique spectacle (auquel je vais essayer de
retourner), j'avais écouté l'enregistrement par l'orchestre du Capitole de
Toulouse (Michel Plasson) avec notamment Marilyn Horne (Padmâvatî), Nicolai
Gedda (Ratan-Sen) et José Van Dam (Alaouddin). Par le même orchestre,
Lakmé de Delibes avec Natalie Dessay (Lakmé), José Van Dam
(Nilakantha), Gregory Kunde (Gerald) est aussi hautement recommandable.
Contrairement à d'autres opéras édités par EMI classics, le livret n'était
pas inclus dans le coffret. Je ne comprends pas sous quel prétexte
économique fallacieux on peut se dispenser de publier un opéra avec son
livret, de préférence traduit aussi dans d'autres langues (le plus souvent,
les textes joints avec les disques de musique classique apparaissent en
italien, allemand, français et anglais). La quatrième de couverture
du coffret invite à consulter full libretto and translations
at www.theoperaseries.com and
www.emiclassics.com
. En
allant sur ces sites, je n'ai trouvé qu'un indigne fichier
PDF. Tout d'abord,
le livret est uniquement présenté en français, donc sans les traductions
promises dans les autres principales langues européennes. Ceci ne m'émeut
guère dans ce cas particulier, mais ce fichier n'est qu'un grotesque
brouillon qui n'a manifestement été relu par quiconque entendrait le
français ni même quiconque apte à déchiffrer l'alphabet latin. Certains
mots manquent, des groupes de lettres sont absents, remplacés par d'autres
à la graphie voisine. On y peut lire par exemple Elle découvrent le
cadavre et en vent (sic) ecantées (sic) par les prêtres.
.
Manifestement, le texte est le résultat brut d'une entreprise de
reconnaissance automatique de caractères (OCR) sur un scan d'un livret
imprimé ; pour qu'il présente mieux vu de loin, on a cependant bien voulu
rendre les didascalies en italique et le nom des personnages en gras. Le
format PDF permettant d'inclure des images, il aurait été préférable
d'inclure un livret correct dans un format bitmap, quitte à ce que fichier
soit plus gros. Les lecteurs s'en trouveraient moins incommodés.
⁂
Lors de mon dernier séjour en Inde, je ne suis pas passé loin de Chittor. Depuis Pushkar, j'avais pris un petit bus matinal avec des écoliers allant à l'école dans la ville voisine d'Ajmer. Je voulais continuer vers la citadelle de Chittor en bus, mais j'eusse dû attendre cinq heures pour le prochain bus. N'ayant alors plus que trois jours à consacrer au Rajasthan pour ce séjour, je pris un bus en partance pour la très belle ville d'Udaipur. Ce sera pour une prochaine fois...
Albert Roussel avait visité cette citadelle lors d'un voyage en Orient
quelques années avant de composer cet opéra. Le programme vendu au théâtre
du Châtelet contient un extrait du journal de voyage du compositeur. Ce
journal a d'ailleurs été publié dans Albert Roussel, Lettres et
Écrits, Flammarion Harmoniques
.
2008-02-10 13:56+0100 (Orsay) — Culture — Opéra
Opéra Garnier — 2008-02-07
Elisabeth Kulman, Yann Bridard, Orphée
Svetlana Doneva, Marie-Agnès Gillot, Eurydice
Hélène Guilmette, Miteki Kudo, Amour
Balthasar-Neumann Ensemble & Chor
Ballet de l'Opéra
Pina Bausch, chorégraphie, mise en scène (1975)
Rolf Borzik, décors, costumes, lumières
Thomas Hengelbrock, direction musicale
Orphée et Eurydice, Gluck
Jeudi dernier, je suis allé pour la première fois au Palais Garnier. Je n'avais jusqu'alors qu'aperçu ce bâtiment depuis l'avenue de l'Opéra en sortant de la station de métro Pyramides, soit pour aller assister à des concerts à l'église Saint-Roch soit pour manger dans un restaurant japonais tenu par des japonais rue Saint-Anne. De plus près, le Palais Garnier est très beau (malgré les travaux en cours à proximité). L'intérieur est magnifique, il faut le voir pour le croire.
J'avais cassé ma tire-lire pour acheter une place pour Orphée et Eurydice de Gluck mis en scène et chorégraphié par Pina Bausch (version créée en 1975). Ma place était meilleure que ne le laissait suggérer la fonction du site de réservation permettant de prévisualiser la scène telle qu'on la voit depuis le siège. Tout ce que je savais, c'est que j'avais un strapontin à l'orchestre. En entrant, je découvre que je suis au milieu, au deuxième rang, juste derrière la fosse. Acoustiquement, une place aussi proche de l'orchestre n'est pas forcément extraordinaire : bien que l'effectif d'un orchestre baroque soit relativement réduit, depuis ma place, le chant des solistes était bien souvent couvert par l'orchestre. J'espère que depuis une place plus reculée, la balance était meilleure. Ce bémol est largement compensé, l'angle aidant, par la possibilité de voir de très près les instrumentistes et le chef ou et de profiter pleinement du son de la harpe. J'ai aussi remarqué que depuis leur siège les flûtistes devaient naturellement avoir un bon angle de vue sur la scène pour pouvoir ainsi à leurs yeux offrir régulièrement les splendeurs du ballet. J'ai d'ailleurs repéré Marc Hantaï dans ce Balthasar-Neuman Ensemble. La musique de cet opéra de Gluck est remarquable, j'en ai bien profité. Par exemple, la danse des Furies (Chi mai dell'Erebo dans la version italienne), au début du deuxième acte, est impressionnante.
Contrairement à ce que l'on voit souvent dans les mises en scène d'opéra (je ne sais pas ce qu'il en est en général pour les opéras-ballets, c'était le premier que je voyais), le chœur n'était pas sur la scène, mais dans la fosse avec l'orchestre. Contrairement aux chœurs dans les représentations de concert, il chantait sans l'aide de la partition. L'opéra étant chanté en allemand (l'original était en italien), mais les spectateurs ne pouvaient pas bénéficier de surtitres (de toute façon, depuis le deuxième rang, je n'aurais pas pu en voir grand chose). De toute façon, je connaissais bien sûr déjà le mythe d'Orphée et Eurydice et avait écouté un enregistrement de cet opéra de Gluck quelques jours avant de venir ; je n'étais donc pas trop perdu.
Dans cette version en quatre tableaux, chacun des trois personnages (Orphée, Eurydice, Amour) est incarné sur scène par un danseur et une chanteuse. Le rôle d'Orphée était dansé par Yann Bridard, ceux d'Eurydice et Amour par Marie-Agnès Gillot et Miteki Kudo. Ils pouvaient donc danser librement en même temps que, habillées dans une robe sobre de couleur sombre, Elisabeth Kulman, Svetlana Doneva ou Hélène Guilmette chantaient (ce qui serait impossible si chaque rôle était interprêté par une seule personne).
Dans chacun des quatre tableaux, la chorégraphie était très belle. La tristesse des lamentations sur la mort d'Eurydice dans le premier, l'atmosphère oppressante des Enfers dans le second, l'harmonie du Jardin des bienheureux dans le troisième et la sobriété du tableau final où évidemment Orphée ne parvient pas à se retenir de regarder Eurydice, qui meurt (en soi, chorégraphier de nombreuses minutes de danse de couple où les deux danseurs ne doivent pas se regarder me paraît assez remarquable). Dans la version originale de l'opéra de Gluck, satisfait d'Orphée, Amour finissait par rendre Eurydice à la vie, ce qui donnait une fin heureuse ; ici, la fin était conforme au mythe.
Les décors étaient plutôt sobres, surprenants sans être extravagants.
La chaîne de télévision Arte diffusera une représentation de cet opéra en direct le samedi 16 février à 19h30. Si j'avais un poste, je sais ce que je ferais ce soir-là.
⁂
Je suis entré dans une boutique de disques harmonia mundi. Les
étiquettes étaient d'un format ancien, je n'en avais pas revu de telles
depuis mon enfance de cette sorte : toutes petites étiquettes arrondies où
il n'y a que le prix (pas de code-barre). Elles ne couvraient pas les
informations importantes. Je suis sorti de ce lieu de perdition avec sept
articles (dont deux offerts) : 9 CD et 1 DVD musical... Trois opéras
baroques (Charpentier, Marais, Monteverdi), des quattuors parisiens
de Telemann, trois disques de musique classique indienne.
2008-01-13 15:58+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Lectures
Gaveau — 2008-01-11
Cornelia Samuelis, Soprano
Carlos Mena, Alto
Markus Schäfer, Ténor
Thomas Bauer, Basse
Orchestre Baroque de Séville
Chœur Arsys Bourgogne
Pierre Cao, direction
Le Messie, HWV 56, Händel.
Avant-Hier avant l'aube, queue à Bastille après une trop courte nuit pour acheter ma place pour une représentation de Luisa Miller en compagnie de quelques prosélytes lyriques et en bénéficiant des fruits secs de Madame Abricot. À midi, un bon biryani pour me remettre d'aplomb pour travailler en bibliothèque. Le soir, je me rends à la salle Gaveau pour un concert. Je croyais que celui commençait à 19h30. Arrivé à 19h, le hall était ouvert, mais personne en vue, ce qui était bizarre. Je vois alors passer quelques petits groupes : des chanteurs solistes que je reconnais, un chef d'orchestre (qui dirige aussi le chœur) sortent du bâtiment, j'entends parler espagnol, français, allemand. Étrange pour une formation qui est censée être sur scène dans moins d'une demi-heure.
Je vérifie mon billet : le spectacle ne commence qu'à 20h30. Je me replonge dans Les Hauts de Hurle-Vent pour quelques dizaines de minutes et m'installe à ma place dès que les organisateurs des concerts Philippe Maillard et le contrôle se sont mis en place. Un jeune homme accorde le clavecin avec application. C'est ensuite au tour des deux violoncelles et de la contrebasse de faire de même. La salle se remplit. Quand c'est l'heure, l'orchestre baroque de Séville puis le chœur Arsys Bourgogne prennent place. Le chef Pierre Cao, sobrement habillé de noir prend place devant son pupitre et commence à diriger Le Messie de Händel.
C'était hier la quatrième fois que j'assistais à une représentation de cette œuvre, et c'est celle qui m'a le plus enthousiasmé. Les conditions d'écoute étaient particulièrement bonnes pour moi. Vers le centre du deuxième rang, j'étais suffisamment loin pour n'avoir pas besoin de parapluie pendant les airs de solistes, mais suffisamment près pour pouvoir presque entendre individuellement chaque instrument (l'effectif de l'orchestre étant plutôt modéré), chaque voix de l'ensemble, et pénétrer les moindres mouvements respiratoires du premier violon.
Je ne suis en général pas un grand admirateur des voix d'altos masculines, à part peut-être celle de Philippe Jaroussky. Je préfère largement les voix féminines pour les cantates de Bach. Pour les oratorios anglais, je ne sais pas pourquoi, mais cela me choque moins. Hier, l'alto était Carlos Mena. Quand il se positionnait à la gauche du chef pour ses airs, j'avais une vue contre-plongeante de cet homme situé juste en face de moi. J'ai beaucoup apprécié sa voix claire (bien que je n'eusse pas réécouté Le Messie depuis près d'un an, le texte anglais m'était parfaitement intelligible quand il chantait). La basse Thomas Bauer, que j'ai souvent eu l'occasion d'entendre dans des cantates de Bach était dans un très bon jour. Je découvrais la soprano Cornelia Samuelis, dont l'air I know that my Redeemer liveth au début de la troisième partie était merveilleux ; je n'avais jamais vu un visage se rosir autant par l'afflux de sang déclenché par le chant. J'ai un peu moins aimé le ténor Markus Schäfer. Concernant le chœur Arsys Bourgogne, parmi lequel je reconnaît quelques visages d'une fois sur l'autre, ce n'est pas demain que je cesserai de l'apprécier.
2007-11-20 19:17+0100 (Orsay) — Culture — Opéra — Mathématiques — Photographies
Je suis rentré du Maroc dimanche soir. Vendredi et samedi matin, j'ai visité Marrakech avec ma collègue dont la mère nous a hébergés dans sa maison située dans la médina (elle nous a aussi fait la cuisine...). Entre deux discussions mathématiques, nous avons vus rapidement quelques sites intéressants de Marrakech : le palais de la Bahia, le palais El Badi, les tombeaux saadiens, la place Djemaa-El-Fna, la médersa Ben Youssef et la mosquée Koutoubia. Je mettrai prochainement en ligne quelques photos (principalement celles de ma visite de la mosquée Hassan II à Casablanca).
À l'aéroport Charles-De-Gaulle, aucun train en raison de la grève. En utilisant un bus Air France puis un taxi, j'ai pu rejoindre Orsay en début de soirée.
Ce soir, je ne pourrai pas aller voir Tosca à l'Opéra comme je l'aurais souhaité.
2007-09-22 19:27+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Lectures — Culture indienne — Mathématiques
Hier, réveil à 4h pour prendre un des premiers RER pour Paris et faire la queue à l'opéra Bastille en compagnie de quelques autres prosélytes lyriques.
Je m'étais promis de ne pas entrer dans une librairie avant d'avoir réduit significativement la taille de ma PAL (63 livres), mais je suis ensuite allé chez Gibert, et suis reparti avec le Paperback Oxford English Dictionary et La maison et le monde de Tagore auquel il est fait référence dans le nouveau roman d'Ananda Devi, Indian Tango, ma lecture du moment.
J'ai passé mon après-midi à la bibliothèque de l'École normale supérieure, à laquelle j'ai encore accès. Je n'étais entré dans les nouveaux locaux de celle-ci qu'il y a un an pour renouveler ma carte de lecteur. Malgré les échos négatifs que j'avais entendus à son sujet, j'ai trouvé ce nouvel espace très agréable pour travailler.
Dans la soirée, je me suis rendu au Théâtre des Champs-Élysées pour
écouter un concert du Staatskapelle de Dresde. Cet orchestre a interprèté
le concerto pour piano nº5 de Beethoven avec Hélène Grimaud, puis le poème
symphonique Une vie de héros de Richard Strauss. J'aime beaucoup
ce concerto de Beethoven, et l'entendre pour la première fois en
vrai
était un vrai plaisir. Le poème symphonique de Strauss me faisait
un peu plus peur, et les dix premières minutes (l'œuvre dure environ 45
minutes) n'ont pas altéré ce sentiment. Cette musique m'a semblé
extrêmement saccadée, stressante et presqu'oppressante (le volume sonore
émis par cet orchestre était important). Puis, vers le milieu, le style m'a
semblé se rapprocher de ce que j'arrive à apprécier dans la musique de
Strauss que j'ai écoutée jusqu'à présent (pas grand chose en dehors de
Ainsi parlait Zarathoustra et Vier letzte Lieder), ce qui
m'a soulagé.
Pour le retour, des relents d'alcool dans la RER B, la présence de supporters de l'équipe d'Irlande aidant...
2007-05-30 19:58+0200 (Grigny) — Culture — Musique — Opéra — Culture indienne
Ma collection de disques vient de franchir un nouveau cap dans la démesure : 700 CD. Le sept-centième est le dernier album de Keren Ann. Les prochains, en cours d'acheminement, devraient être une version de l'opéra-ballet Padmâvatî de Roussel (qui sera mis en scène l'an prochain au théâtre du Châtelet par Sanjay Leela Bhansali) et puis un enregistrement de l'opéra Lakmé de Delibes dirigé par Michel Plasson, avec Natalie Dessay.
Quelques statistiques :
2006-12-12 01:25+0100 (Grigny) — Culture — Opéra
Théâtre du Châtelet — 2006-12-11
Lambert Wilson (Voltaire, Pangloss, Martin)
William Burden (Candide)
Anna Christy (Cunegonde)
Kim Criswell (Old Lady)
John Daszak (The Grand Inquisitor, Captain, Governor, Vanderdendur, Ragotski)
Jeni Bern (Paquette)
David Adam Moore (Maximilian)
Ferlyn Brass (Cacambo)
Ensemble Orchestral de Paris
Chœur du Théâtre du Châtelet
John Axelrod, direction musicale
Stephen Betteridge, chef de chœur
Robert Carsen, mise en scène et lumières
Rob Ashfort, chorégraphie
Michael Levine, décors
Buki Shiff, costumes
Peter Van Praet, lumières
Ian Burton, dramaturgie
Candide, Bernstein.
Je reviens de la première de Candide, une opérette de Bernstein, au Théâtre du Châtelet. C'était absolument excellent, et relativement fidèle au texte de Voltaire. J'avais écouté un autre enregistrement de cette opérette, mais sans les parties parlées ; cela m'avait donné l'impression que l'histoire avait été chamboulée ; je me trompais. Avec les passages parlés (en français), il était beaucoup plus aisé de voir la cohérence et les correspondances avec le conte. Le chateau de Thunder-ten-tronckh en Vestphalie est remplacé par la Maison Blanche en West-failure. On pend des juifs communistes pour un auto-da-fé. Le grand inquisiteur et le juif Issachar sont transformés en impresarios et Cunégonde en chanteuse (la scène de l'air Glitter and be gay avec Cunégonde habillée en Marylin était assez énorme). Le bateau transatlantique est le Titanic. Le gouverneur don Fernando d'Ibaraa, y Figueora, y Mascarenes, y Lampourdos, y Souza était remplacé par un officier de l'immigration véreux. L'Eldorado est riche pour son pétrole. Les rois déchus que Candide rencontre à Venise sont Jacques Chirac, Tony Blair, Vladimir Poutine, Silvio Berlusconi et George Bush ! Et il faut toujours cultiver son jardin.
Merci à Flo pour le thé Pu Er et les places, à Kozlika et à Marion pour le chocolat, et coucou à ceux que j'ai pu voir ou revoir.
Bon, il faudrait que je pense à dîner.
PS : Cela passera à la télévision le 20 janvier 2007 à 22h30 sur Arte.
2006-03-24 00:17+0100 (Grigny) — Culture — Musique — Opéra — Mathématiques
Vingtième théâtre — 2006-03-22
Chœur d'enfants Sotto Voce
Ellina Akimova, piano
Matthieu Septier, assistant chef de chœur
Scott Alan Prouty, direction
Paris-New York !
Mardi dernier, concert du chœur
d'enfants Sotto Voce. Je les avais déjà entendus en première partie
lors d'un concert de negro spirituals ; j'avais vraiment
adoré. Cette fois-ci, c'était dans un théâtre plus petit (du côté de
Ménilmontant), avec un public essentiellement familial, et ils faisaient un
concert à eux tous seuls. Il y avait une joie de chanter assez ostensible
parmi ces jeunes chanteurs dirigés par Scott Alan Prouty et accompagnés de
Ellina Akimova au piano. Les chansons était principalement issues du
répertoire américain, mais il y avait aussi quelques chansons françaises et
quelques morceaux religieux (en latin) ; ces dernières œuvres
swingaient
autant que les autres ! L'ensemble était divisé en deux : un chœur de
jeunes enfants et un ensemble plus restreint de moins jeunes qui nous ont
gratifiés de quelques extraits de comédies musicales chorégraphiés avec un
certain humour. Vraiment réjouissant. En
sortant de là, j'ai testé un restaurant indien du quartier.
:-)
Théâtre des Champs-Élysées — 2006-03-23
Nicolas Rivenq, Alcide
Véronique Gens, Alceste
Simon Edwards, Admète
Judith Gauthier, La Gloire, Céphise, première ombre
James Oxley, Lychas, Alecton, Apollon, premier Triton
Renaud Delaigue, Straton
Bernard Deletre, Lycomède, Caron
Alain Buet, Pluton, Éole, homme désolé, Cléante
Jean Delescluse, Phérès, deuxième Triton
Hjördis Thebault, Proserpine, Nymphe de la Marne, Nymphe des Tuileries, troisième ombre, Petit chœur
Stéphanie d'Oustrac, Femme affligée, Nymphe de la Seine, Nymphe de la mer, Diane, Thétis, deuxième ombre, Petit chœur
Chœur de chambre de Namur
Jean Tubery, direction
La grande écurie et la chambre du Roy
Jean-Claude Malgoire, direction
Alceste, Jean-Baptiste Lully.
Hier soir, mon premier Lully, Alceste au Théâtre des Champs-Élysées, en version oratorio. Je n'avais pas révisé ma mythologie grecque (juste le temps de lire le synopsis avant le début du concert), il y avait une foule de chanteurs solistes (onze !) dont certains interprétaient plusieurs rôles, comme en plus j'étais un peu fatigué (et il faisait horriblement chaud à l'intérieur de la salle) et le texte français, bien que très beau, m'était insuffisamment intelligible : bref, j'ai pas mal souffert pendant les deux premiers actes. Pendant l'entr'acte, j'ai refait surface et potassé la distribution pour faire la correspondance entre les chanteurs et les personnages. J'ai donc pu apprécier bien davantage les trois derniers actes (l'œuvre doit bien faire trois heures) ; il y avait des passages carrément comiques, comme le moment où Charon, le passeur des Enfers, demande des pièces sonnantes et trébuchantes aux candidats à la traversée. Au niveau de style musical, je ne suis pas absolument fan, mais il y avait des passages que j'ai beaucoup aimés.
Théâtre des Champs-Élysées — 2006-03-24
Anna Caterina Antonacci, mezzo-soprano
Chœur de femmes de Radio France
Ken-David Masur, chef de chœur
Orchestre National de France
Sir Colin Davis, direction
Les Nuits d'été, Hector Berlioz.
Les Planètes, Gustav Holst et Colin Matthews.
Là, je rentre encore du TCE. Cette fois-ci, c'était pour un concert de l'Orchestre National de France dirigé par Sir Colin Davis. La première œuvre au programme était Les Nuits d'été de Berlioz, six mélodies sur des poèmes de Théophile Gautier. Il n'y a nul besoin de décrire le plaisir que constitue l'écoute des ces chants interprétés par Anna Caterina Antonacci. En deuxième partie, il y avait Les Planètes de Holst, et semble-t-il aussi Pluton de Colon Matthews bien que je ne l'aie pas distinguée de Neptune ; il semble que ce soit fait exprès...
À part ça, j'ai fait tout-à-l'heure un exposé au séminaire des thésards de mon institut ; mon directeur de thèse a fini de relire la dernière version de ma thèse, le jour J approche...
2006-03-05 01:20+0100 (Grigny) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Culture indienne
Palais des Congrès — 2006-03-04
Bhavna Pani, Bharati
Gagan Malik, Siddharta
Rahul Vohra, Le narrateur
Nikam Mangesh, Domraja
Yusuf Kinnu Khan, Raj
Jojo Khan, mise en scène, chorégraphie
Shirili Deshe, mise en scène
Roni Sinai, mise en scène
Kamlesh Pandey, histoire
Gashash Deshe, conception
Bhâratî, il était une fois l'Inde
Je reviens du spectacle Bhâratî (site). Ce n'était pas mal du tout, les danses étaient plutôt réussies (une bonne soixantaine de danseurs en tout). Je regrette cependant que ce fut essentiellement une juxtaposition de passages dansés (ou seulement chantés) sans réelle organisation. En fait, c'était comme un opéra baroque : récitatif, air, récitatif, air... Le récitant était plutôt sympathique, il parlait de quelques coutumes indiennes et de la pseudo-histoire, expédiée en quelques phrases : Bharati rencontre un charmant indien ayant vécu à l'étranger : Siddharta, mais son père Domraja la fiance avec un autre, Raj ; puis Siddharta va voir Domraja, et finalement il se marie avec Bharati.
Ce n'était pas désagréable, mais j'hésiterais à conseiller ce spectacle : le prix était très élevé (les places les moins chères étaient à 50 €) et puis le programme du spectacle avait un prix absolument indécent (15 €, là où en des endroits chics au possible comme le Théâtre des Champs-Élysées on se contente le plus souvent de nous faire payer au maximum 5 ou 6 €).
Les chansons étaient issues de films indiens (dont le programme n'indique pas les titres, grrr...). J'ai au moins reconnu des chansons des films suivants :
Bref, je préfère donc voir une danseuse exceptionnelle plutôt que de voir des dizaines de personnes faire de la danse synchronisée
autour de danseurs leaders. Cependant, je ne regrette nullement d'avoir fait le déplacement, ces occasions étant trop rares.
2006-02-27 10:50+0100 (Courcouronnes) — Culture — Opéra
Théâtre des Champs-Élysées — 2006-02-25
Lisa Larsson, Soprano
Bogna Bartosz, Alto
Christoph Genz, Ténor
Klaus Mertens, Basse
The Amsterdam Baroque Orchestra and Choir
Ton Koopman, direction
Messe en si mineur, BWV 232, Johann Sebastian Bach.
J'ai pu assister aux deux concerts que j'avais prévus ce week-end. La Messe en si mineur de Jean-Sébastien Bach samedi : c'est bizarre, plus j'ai écouté souvent une œuvre, plus le concert semble se passer vite. Parmi les solistes, Klaus Mertens est toujours aussi bon à mon goût.
Opéra Bastille — 2006-02-26
Laura Claycomb, Gilda (soprano)
Natacha Constantin, La Contessa (soprano)
Martine Mahé, Giovanna (mezzo-soprano)
Dagmar Pecková, Maddalena (mezzo-soprano)
Letitia Singleton, Paggio della Duchessa (mezzo-soprano)
Ain Anger, Sparafucile (basse)
Mihajlo Arsenski, Matteo Borsa (ténor)
Andrzej Dobber, Rigoletto (baryton)
Philippe Fourcade, Il Conte di Monterone (baryton-basse)
Yuri Kissin, Il Conte di Ceprano (basse)
Bülent Külekci, Il Duca di Mantova (ténor)
Sergei Stilmachenko, Marullo (baryton)
Jian-Hong Zhao, Usciere di corte
Renato Palumbo, direction musicale
Jérôme Savary, mise en scène
Michel Lebois, décors
Jacques Schmidt, costumes
Emmanuel Peduzzi, costumes
Alain Poisson, lumières
Peter Burian, chef des chœurs
Rigoletto, Guiseppe Verdi
Hier, c'était mon premier opéra romantique : Rigoletto, en compagnie d'autres blogueurs. J'ai eu un peu peur au début en voyant défiler des acrobates (la mise en scène était de Jérôme Savary...), mais les chanteurs (surtout ceux qui interprétaient les rôles de Gilda et de Rigoletto) étaient très bons.
L'opéra fini, j'entendis derrière moi une conversation assez surréaliste, approximativement :
— Le Bouffon et le Duc étaient bons.
— Mais le Bouffon, c'est le Duc !
— C'était peut-être le même chanteur, mais ce sont deux personnages différents.
— Mais le Bouffon, c'est le Duc !
— Non, non, en fait, il y avait deux chanteurs.
— Mais le Bouffon, c'est le Duc !
Le sur-titre était pourtant bien visible de là où j'étais, et comme il y avait plusieurs scènes où intervenaient simultanément le Duc et le Bouffon (Rigoletto), je me demande comment on peut être à ce point malcomprenant.
2006-01-04 18:49+0100 (Grigny) — Culture — Musique — Opéra — Lectures
Aujourd'hui, j'ai été pris d'une légère folie consommatrice ; cela ne m'était pas arrivé depuis un certain temps.
J'ai ainsi passé pas moins de quatre commandes par Internet. Tout d'abord deux commandes de DVD, disques, livres. Dans un moment d'égarement, j'ai bêtement essayé d'acheter une version électronique d'un livre. Le site indiquait qu'il suffisait d'avoir Adobe Reader 6 pour accéder au document ; je pensais que tout irait bien, que ce serait un honnête PDF ; mais il s'est avéré que c'était du PDF crypté pour lequel il n'existe apparemment pas de lecteur fonctionnant sous Linux. Je m'en suis gentiment plaint à l'éditeur qui vient de me répondre qu'il acceptait de me dédommager en m'envoyant une version papier. Ouf.
Les deux autres commandes sont des places de concert : une pour Rigoletto, opéra de Verdi, dont j'aurai le privilège d'assister à une représentation en compagnie de quelques autres prosélytes lyriques.
L'autre place de concert, c'est la faute à la publicité que je reçois
régulièrement du Théâtre des
Champs-Élysées, publicité masquée sous le nom de Carnet de janvier à
mars 2006
: j'ai résisté à la tentation jusqu'à l'avant-dernière page, mais
à la dernière, j'ai remarqué un concert de l'orchestre national de France au
programme duquel figure Les Planètes de Holst ; ce sera aussi
l'occasion d'écouter la mezzo-soprano Anna Caterina Antonacci, que j'avais vue
pour la première fois dans Agrippina de Händel, dirigé par René Jacobs et mis en scène
par David McVicar (d'ailleurs, depuis quelques jours, je me réécoute en boucle
un enregistrement de cet opéra, dirigé par Claude Malgoire, avec notamment
Véronique Gens, Philippe Jaroussky et Ingrid Perruche comme solistes, en
particulier le dernier air Ogni
vento du deuxième acte ; tiens, si j'achetais le DVD ; ah, zut, je
l'ai déjà !).
Pour d'autres manifestations de ce genre de pathologies, cf. les livroliques anonymes.
Date de génération : 2023-07-27 14:18+0530 ― Mentions légales.