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Orphée et Eurydice, de Gluck !

2012-02-10 00:48+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse

Opéra Garnier — 2012-02-09

Maria Riccarda Wesseling, Nicolas Paul, Orphée

Yun Jung Choi, Alice Renavand, Eurydice

Zoe Nicolaidou, Charlotte Ranson, Amour

Balthasar-Neumann Ensemble & Chor

Ballet de l'Opéra

Pina Bausch, chorégraphie, mise en scène (1975)

Rolf Borzik, décors, costumes, lumières

Detlef Bratschke, chef des chœurs

Manlio Benzi, direction musicale

Orphée et Eurydice, Gluck

Il est scandaleux que sur les affiches de la reprise d'Orphée et Eurydice à l'Opéra Garnier, on ne lise en sous-titre que opéra dansé de Pina Bausch. Un opéra, fût-il opéra-ballet, reste avant tout l'œuvre de son compositeur : Christoph Willibald Gluck.

C'est de la fabuleuse interprétation de cette musique qu'est venu l'essentiel de mon plaisir lors de cette représentation. J'étais pourtant quelque peu dubitatif pendant la première partie deuil (une atmosphère dans laquelle le spectateur est immédiatement plongé du fait de l'omission de l'ouverture). J'avais alors l'impression d'entendre des effets un peu exagérés et parfois mal dégrossis ; le petit nombre de cordes (une seule contrebasse) fait que parfois certaines aspérités dépassent. En tout cas, il est évident que l'on est dans une interprétation überbaroque complètement assumée (bref, on ne joue pas uniquement ce qui est écrit !). Mon état d'esprit a changé à partir de la deuxième partie violence. L'entrée en matière ne ressemblait aucunement à mes souvenirs et références (la même production il y a trois ans, la version Berlioz à la MC93 Bobigny, et au disque René Jacobs et le Freiburger Barockorchester). L'entrée aux enfers se faisait ainsi au son vertigineusement ébouriffant des trombones à coulisses qui ne se contentent pas de tenir la note, mais qui en augmentent progressivement le volume de façon saisissante (je soupçonne les instrumentistes d'avoir aussi glissandé un peu). Pendant ce temps, le chœur alterne les postures. Pris dans l'action, il repousse Orphée de violents Nein!. Parfois, il commente comme un chœur grec : la musique ressemble alors davantage à un choral.

Dans la troisième partie paix, la musique s'adouçit. Paisiblement, les cordes ou le chœur se lancent dans des gammes ascendantes puis descendantes. Dans la quatrième partie mort, je retiens la très subtile interprétation de l'air J'ai perdu mon Eurydice, rien n'égale mon malheur (traduit en allemand en Ach, ich habe sie verloren, all mein Glück ist nun dahin !). Si l'interprète de ce rôle ne m'avait pas complètement convaincu jusque là (sa voix était par moments couverte par l'orchestre), elle a été superbe dans cet air-là. Dans la fosse, les pupitres ne cordes exploraient diverses techniques pour passer d'une note à une autre : parfois avec souplesse, parfois avec raideur, l'ensemble étant du meilleur effet. La conclusion reprenant la musique du début de la deuxième partie n'a évidemment pas été pour me déplaire !

Du côté des deux autres rôles principaux (Eurydice et Amour), j'ai aimé la façon de chanter assez mozartienne des deux chanteuses, et tout particulièrement Zoe Nicolaidou (Amour) qui est issue de l'Atelier Lyrique.

Si le ravissement a été presque total du côté de la musique, j'ai seulement aimé ce que j'ai vu, sans être enthousiasmé. Mon mauvais placement y est sans doute aussi pour quelque chose. Certes, c'est très esthétique (surtout dans la partie paix), mais cela manque de rugosité, certains gestes paraissant un peu trop lisses par rapport à ce que j'ai été habitué avec d'autres chorégraphies de Pina Bausch. À vrai dire, je trouve que cela manque un peu de danse, et surtout cela manque de solos et pas de deux... Cela dit, les ensemble m'ont plutôt convaincu, tout comme la brève apparition en Amour de Charlotte Ranson (qui danse ensuite dans le corps de ballet). Après avoir vu Le Sacre du printemps, il m'est difficile de revoir une autre pièce de Pina Bausch...

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Commentaires

1. 2012-02-10 10:13+0100 (Genoveva)

Bien d'accord avec toi pour la musique de Gluck ! mais pas pour le ballet de Pina Bausch : c'est Tanztheater - donc pas uniquement de la danse mais aussi de l'expression de sentiments ! Le placement y est pour beaucoup ! j'ai testé 2 places et ma perception n'était pas la même !

2. 2012-02-10 10:35+0100 (elendae)

La prestation d'Alice Renavand ne t'a pas parue inoubliable si je comprends bien ? j'aurais bien aimé la voir mais j'hiberne complètement en ce moment ! est-ce que son partenariat avec Nicolas Paul était convaincant ? J'avais trouvé que Stéphane Bullion et Marie-Agnès Gillot n'étaient pas forcément très bien assortis.

Tu étais placé où, au fait ?

3. 2012-02-10 11:25+0100 (Joël)

@elendae : j'étais très mal placé, en fond de première loge 10 (sachant que le 2e rang de la loge 8 était debout, donc réduisant un peu mon champ de vision et annihilant sans aucun scrupule celui de la spectatrice de la place 4 de ma loge qui du coup est partie).

Dans ce que j'ai entr'aperçu, je n'ai pas été ébloui par la performance d'Alice Renavand (par rapport à d'autres rôles qu'elle a si brillamment interprétés ! pas vraiment par rapport à MAG que j'avais vue il y a trois ans).

4. 2012-02-11 14:06+0100 (Philippe[s] de l'escalier)

D'après mon expérience aussi, le placement est très important pour apprécier la chorégraphie (effets d'ensemble, symétrie/dissymétrie, occupation de l'espace...). En 2008, je n'avais pas spécialement aimé le spectacle, étant beaucoup plus mal placé que jeudi (en revanche, la direction d'Hengelbrock m'avait semblé moins lourdingue que celle de Benzi)

5. 2012-02-13 21:39+0100 (Joël)

En 2008, je l'avais vu dans de très bonnes conditions (deuxième rang centré du parterre), la chorégraphie m'avait alors paru plus saisissante.


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