2015-07-21 14:00+0530 (दिल्ली) — Culture — Musique — Danse — Danses indiennes — Culture indienne — Dhrupad — Voyage en Inde XIV — Photographies
Je suis arrivé à Delhi il y a un peu plus d'une semaine. Pendant le vol Air India 142, j'ai regardé le film Chennai Express, qui n'est pas trop mauvais. L'aventure commence au moment de monter dans un taxi prépayé pour rejoindre l'appartement où je vais résider dans le quartier de Jangpura. Le chauffeur de taxi ne sait manifestement pas du tout où cela se trouve. Il n'a pas de GPS, mais il passe un certain nombre de coups de fils pour se diriger. Je suis le trajet sur mon téléphone grâce à la carte OpenStreetMap de l'Inde que j'ai téléchargée. Une fois arrivé dans le quartier de Jangpura (qui n'est pas couvert de façon détaillée par OpenStreetMap), j'ai dû utiliser une carte Google Maps que j'avais préalablement téléchargée pour jouer au co-pilote :
Même quand on est arrivé, il n'est pas forcément évident pour tout le monde de savoir qu'on y est :
Quelqu'édile du quartier, Madame Darshana Jatav a en effet fait installer des panneaux indicateurs qui ne sont rédigés qu'en hindi. Dans d'autres rues, la fonction utilitaire a été délaissée au profit de la seule fonction promotionnelle de ces panneaux :
En bas de la partie bleue du panneau, à côté de रोड का
नाम (c'est-à-dire : Nom de la rue
), il n'y a
rien écrit du tout...
Voici la vue depuis le balcon de l'appartement où je loue une chambre et dont je peux aussi profiter du grand salon :
Les deux premières journées ont été très pluvieuses. La rue était inondée. L'année dernière, j'avais dû acheter en urgence des chaussures au retour de Champaner où les précédentes avaient été englouties par la boue. Les lanières de ces sandales que j'avais alors achetées n'ont pas tenu à cause d'une sorte d'effet ventouse qui s'est produit alors que je marchais dans les 10 centimètres d'eau qui recouvraient la rue.
⁂
Le lendemain de mon arrivée, je suis retourné à C.R. Park, non loin du temple du Lotus, pour prendre un premier cours avec Arupa Lahiry, une disciple de Chitra Visweswaran que j'avais eu l'occasion de voir à Paris et avec qui j'avais déjà pris des cours il y a un an. Elle me donne cours dans une petite salle à l'étage de l'association des femmes de l'Est (il s'agit d'un quartier bengali : la zone entière de C. R. Park a été donnée après la Partition de l'Inde à des réfugiés venant du Bengale oriental).
Chaque cours dure environ deux heures. Le cours commence par la pratique des adavus, les mouvements de base de la danse bharatanatyam. Ils sont classés par familles. J'avais déjà appris quatre séries complètes l'année dernière (Tatta, Natta, Marditha, Khudita Metti). Je peux maintenant les exécuter à peu près correctement à une plus grande vitesse. Comme je peux prendre un cours quotidiennement avec elle, j'ai déjà pu voir quelques autres séries entières : Ta tai ta ha (aussi appelés Tatta Kudicchi Metta), Tat tai tam (Shikhara), Tirmanam, Sharakau (à ne pas confondre avec les Sharakal que j'ai vus aussi), Panch Nadai (Tatti Metti), etc. Il y a des différences plus ou moins subtiles avec le style de Sucheta Chapekar que j'apprends. La plus confusogène réside dans l'orientation des mains dans les Tatta Kudicchi Metta : il n'est déjà pas évident de savoir comment les tourner quand on n'en pratique qu'une seule version, mais c'est encore plus perturbant quand il faut en apprendre une deuxième. Parmi les éléments subtilement originaux dans le style de Chitra Visweswaran, j'apprécie les petits mouvements courbes du haut du corps parfois couplés à des accents très marqués sur certaines frappes de pieds.
Je continue à noter ces exercices dans le système de notation du mouvement Benesh que je continue à apprendre (à distance) au Benesh Institute (je me suis inscrit dans le premier module du Certificate in Benesh Movement Notation).
Je souhaitais apprendre une pièce de danse pure, mais Arupa m'a proposé d'apprendre Vishnu Kavuthwam, une pièce qui ne contient que très peu de danse pure. La pose initiale est celle de Vishnu couché sur l'Océan cosmique et s'ensuit une évocation des dix avatars de Vishnu (ou plutôt neuf : Matsya, Kurma, Varaha, Narasimha, Vamana, Parashurama, Rama, Balarama, Krishna). Quelques exploits sont évoqués de façon un tout petit peu plus détaillée dans cette pièce de 4-5 minutes.
La fin du cours est agrémentée de la présence de Ganesh, un percussionniste (mridangam) qui accompagne très régulièrement Arupa. Après la pause-thé suivant mon cours, ils répètent des pièces ou en élaborent d'autres selon l'envie du moment. Je suis parfois resté plusieurs heures pour assister à ce travail et cela m'a procuré beaucoup de plaisir.
⁂
Un jour sur deux environ, je me rends à Mayur Vihar pour prendre un cours de dhrupad avec Pandit Nirmalya Dey. Je continue à travailler le raga qu'il m'avait enseigné l'année dernière (Todi), mais il s'agit maintenant de rentrer plus profondément dans l'Alap, la première partie d'un râga dans laquelle on présente progressivement les notes de la gamme. Il ne me demande pas seulement d'essayer de répéter les phrases qu'il fait (et dans lesquels je perçois davantage de détails qu'il y a un an), mais aussi d'essayer de faire mes propres phrases...
⁂
Dans l'appartement, il arrive qu'il y ait des coupures d'eau à certaines heures, ce qui peut être problématique si cela tombe quand la femme de ménage passe...
La plus grande rue du quartier (Central Road) est celle où la
circulation est la moins fluide. Un grand marché y a lieu le mardi. On y
trouve les choses les plus inattendues. Parmi les autres visions
étonnantes, en rentrant en rickshaw de la station de métro alors qu'il
faisait nuit, je me suis rendu compte que l'homme portait un polo sur
lequel était inscrit Dracula
...
2014-12-31 17:04+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Culture indienne — Dhrupad
Auditorium du Musée Guimet — 2014-10-10
Pandit Nirmalya Dey, chant dhrupad
Ustad M. Bahauddin Dagar, rudra vînâ
Pandit Mohan Shyam Sharma, pakhawaj
Véronique Dupont, Marie-Thérèse Guay, tampura
Raga Puriya (Alap & Chautal)
Raga Bhairavi (Alap & Tivratal)
J'ai quelque peu délaissé les comptes-rendus de concerts ces derniers temps pendant lesquels je me suis concentré sur les nombreux spectacles de danses indiennes auxquels j'ai assisté. Je n'ai même pas pris le temps de revenir sur le magnifique ballet La Source que j'ai revu cinq fois ces derniers jours et que j'avais déjà vu quatre fois en 2011. L'année 2014 se terminant, il serait dommage que je ne revienne pas sur ce qui a été pour moi le concert de l'année.
Le style de musique dhrupad (que je pratique depuis bientôt trois ans) est très peu présent à Paris. Quand on peut l'entendre, ce sera en général dans un appartement en petit comité. Il était donc tout à fait exceptionnel de le voir représenté sur la scène du Musée Guimet devant une salle pleine. Je n'aurais manqué ce rendez-vous pour rien au monde (j'ai dû pour cela renoncer à d'autres concerts très intéressants programmés le même soir et à une rencontre littéraire avec l'auteur du livre le plus passionnant que j'aie lu au cours de l'année). La configuration des interprètes est encore plus rare. Il s'agit d'un jugalbandhi, c'est-à-dire un duo de solistes. Cette configuration est relativement courante (Dagar Brothers, Senior Dagar Brothers, Gundecha Brothers, Women in Dhrupad, etc.), mais ce qui est plus exceptionnel, c'est que soient associés un chanteur et la Rudra Vina. Dans la famille Dagar, un tel duo a ainsi associé par le passé le chanteur Ustad Zia Fariduddin Dagar et le vîniste (?) Ustad Zia Mohiuddin Dagar. Ce vendredi 10 octobre, le concert associe Pandit Nirmalya Dey, chanteur disciple de Fariduddin, et Ustad Mohi Bahauddin Dagar, fils et disciple de Mohiuddin. Ayant pris cet été des cours pendant trois semaines à Delhi avec Pandit Nirmalya Dey, je ne suis bien évidemment pas très objectif à son sujet, mais je tiens à préciser que j'avais déjà de lui la plus haute opinion avant de suivre son enseignement.
Les deux musiciens ont interprété le Raga Puriya. Ce Raga comporte six notes parmi lesquelles tivra Ma (M) et Re komal (R). Voici les gammes ascendantes et descendantes : ṆRGMDNṠ / ṠNDMGRS. Il s'agit d'un des Ragas que j'aie le plus pratiqués. Mon immense plaisir d'auditeur a donc été encore davantage rehaussé par le fait que dans le très méditatif Alap que les deux musiciens ont interprété, je sentais la plupart du temps quelle note ils jouaient ; cette sensation-là me procure un plaisir sans commune mesure avec le mode d'écoute plus intuitif que j'avais avant de commencer à pratiquer le dhrupad. Ils ont fait durer le plaisir très longtemps au point que la fin de l'Alap a été un peu écourtée après qu'un des musiciens a regardé sa montre. Les musiciens ont en effet étiré à l'extrême le travail sur certaines notes, en particulier la toute première note de la gamme ascendante : Ni, qui est la note la plus importante de ce Raga. Ils n'ont bien sûr pas joué continuellement cette note, mais ils l'ont ornementée. Parfois, après un long Ni tenu, une petite glissade faisait entendre légèrement le Dha, voisin du dessous. Parfois aussi, ils montaient du Ni sur le très faible Re komal, le faisant à peine entendre, mais suffisamment pour qu'on en perçoive la subtile saveur. Les chapitres suivants de l'Alap ont mis en valeur les notes successives de ce Raga, le dernier chapitre ayant été malheureusement un peu abrégé pour des raisons de temps. Les deux musiciens alternaient. Ustad Bahauddin Dagar est un musicien plus reconnu que ne l'est Pandit Nirmalya Dey. Si les deux musiciens composant un jugalbandhi sont en principe sur un pied d'égalité, j'ai apprécié que le vîniste se mette semble-t-il un peu en retrait pour laisser au chanteur un peu plus de place pour s'exprimer.
La pulsation est entrée en jeu dans les sections Jor et Jhala. La vitesse ne me permet alors plus de comprendre véritablement ce qui se passe et je suis davantage en mode intuitif. J'apprécie la façon dont le timbre de la voix du chanteur se marie avec celui de la Rudra Vina.
Le Raga se conclut par une composition que je connaissais. Évoquant Shiva, elle commence par le mot Parvati et utilise le cycle rythmique Chautal (12 temps). Le chanteur en a une première fois interprété les deux premières strophes de façon fidèle avant que les deux musiciens ne s'en servent comme matériau de base pour élaborer des improvisations.
Je n'aurais pas été mécontent que le concert s'achève là, mais ils ont interprété un nouveau Raga, plus léger que le précédent. Cette fois-ci, le nom du Raga n'a pas été annoncé préalablement. J'ai donc essayé de reconnaître les différentes notes utilisées. J'y étais à peu près arrivé pendant l'Alap, mais je n'ai véritablement compris qu'il s'agissait du Raga Bhairavi que lorsque j'ai reconnu la composition Jagata Janani en Tivratal (sept temps).
2014-09-19 16:17+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Culture indienne — Dhrupad — Voyage en Inde XIII
Experimental Theatre, National Centre for the Performing Arts, Mumbai — 2014-07-24
Gundecha Brothers
Ramakant, Umakant Gundecha, chant dhrupad
Raga Gujari Todi (Chautal, Sultal, Tivratal)
Raga Megh (Tala à 5 temps)
Raga Madamat Sarang (Sultal)
Le lendemain du double récital de manipuri, je retourne de bonne heure au NCPA pour écouter les Gundecha Brothers. De même que Pandit Nirmalya Dey avec qui j'ai pris des cours à Delhi, ce sont des disciples d'Ustad Zia Fariduddin Dagar. Je n'avais pas du tout accroché au concert qu'ils avaient donné en 2008 en clôture des vingt-quatre heures du Râga à la Cité de la Musique. Il m'avait fallu attendre 2001 et un concert d'Ustad Faiyaz Wasifuddin Dagar pour commencer à apprécier le style dhrupad.
Ce nouveau concert des Gundecha Brothers ne m'a apporté pratiquement aucune satisfaction. J'ai juste été content de comprendre pendant le concert la différence entre le Râga Todi que j'ai pratiqué à Delhi et le Râga Gujari Todi qu'ils ont interprété : la quinte (Pa) est absente de Gujari Todi. (Le tampura était accordé différemment aussi, la corde usuellement accordée sur Pa étant semble-t-il accordée en Ni.)
Sinon, ce concert ne m'a pas procuré de réel plaisir et m'a même souvent agacé. La voix des deux chanteurs commence à décliner. Leurs phrases d'Alap sont très loin d'être aussi belles que celles que j'ai pu entendre Nirmalya (ou d'autres) chanter. Ils se répètent beaucoup aussi. Ces griefs ne devraient toutefois pas m'empêcher d'apprécier le concert. Le véritable problème est que les Gundecha Brothers sont deux : ils n'arrêtent pas de se couper la parole. Un sentiment d'ennui peut s'insinuer en raison de l'absence de respiration entre les phrases qui en résulte. À chaque fois que j'avais l'impression qu'un des deux chanteurs allait peut-être chanter une belle phrase, l'atmosphère était ruinée par une intervention intempestive du frère. Si des interventions de ce genre ne sont pas complètement absentes d'autres duos de dhrupad — cela peut arriver accidentellement — les Gundecha semblent les avoir élevées au rang de système. Si encore la note jouée par l'importun était la même ou au moins formait un accord harmonieux avec la note finissant la phrase précédente, ils ne me casseraient pas les oreilles, mais il semble choisir systématiquement celle qui produira la plus vilaine dissonance.
Dans Gujari Todi, la montée vers le Sa (tonique) n'a pas été amenée de façon à créer une attente particulière. La partie Jor de ce Râga a été le seul moment du concert que j'aie trouvée agréable. La composition sur le Râga Megh utilisait un cycle rythmique à cinq temps que je ne connaissais pas.
Le tout dernier Râga m'a donné l'occasion de reconnaître le texte d'une composition que je connaissais (Tumha Rava Tumha Saheba), mais ils l'ont chantée dans un autre Râga : Madamat Sarang au lieu de Vrindavani Sarang. Leur interprétation a été beaucoup moins mélodieuse que celle d'Uday Bhawalkar quand celui-ci avait enseigné la composition lors d'un stage à Utrecht en mars dernier. Ils ont chanté la composition à trois tempi différents, tous très rapides. Si ce n'est l'accélération du tempo, je n'ai pas remarqué de variations particulières d'une vitesse à une autre. Cette accélération produit un certain effet, mais ce n'est vraiment pas de chance pour moi parce que ce n'est pas ce que je cherche dans la musique dhrupad... J'étais semble-t-il assez seul, le reste du public se levant pour faire aux musiciens une standing-ovation.
Bref, j'espérais mieux pour le dernier jour de mon séjour en Inde.
2014-08-09 17:10+0530 (વડોદરા) — Culture — Culture indienne — Dhrupad — Voyage en Inde XIII — Photographies
Je viens de passer trois semaines à Delhi, ou plus exactement à Greater Noida, une ville nouvelle en lointaine banlieue de Delhi : elle se trouve en fait dans l'état voisin d'Uttar Pradesh. Ceci explique que sur la longue route auprès de laquelle fourmillent les immeubles en construction, à l'approche de Delhi, on passe à côté d'un grand parc construit à l'instigation de Mayawati, ancienne Chief Minister d'Uttar Pradesh. Je ne suis pas sûr que ces longs alignements de sculptures d'éléphants furent une très bonne initiative pour la cause des dalits...
Le jour de mon arrivée à Delhi, je suis allé à Akashvani Bhavan, le bâtiment de l'All India Radio où travaille Pandit Nirmalya Dey. Dans la salle d'attente VIP, alors que j'étais habillé d'un kurta Lucknow-style, je me fais saluer très respectueusement par un musicien musulman. Plus tard, dans le local où il travaille, la situation est souvent à pleurer de rire, mais ce n'est pas vraiment racontable... Panditji m'a ensuite conduit jusqu'à Greater Noida.
À Greater Noida, j'ai séjourné dans un très bel appartement d'environ 100 m². Deux étudiants afghans du conservatoire de Rotterdam, Ilyas et Samim avaient loué cet appartement pour leur séjour de deux mois afin de se perfectionner avec Pandit Nirmalya Dey. Samim est plus débutant que moi et Ilyas est plus avancé (il jouait d'ailleurs du tampura lors du festival d'Utrecht).
Un jour sur deux environ, Panditji venait le matin vers 6h pour le Kharaj, un entraînement vocal explorant les graves (jusqu'au Sa d'en bas, voire jusqu'au Ni encore en-dessous !). Les deux autres élèves sortaient tout juste du lit à cette heure-là, mais je devais souvent me lever dès 5h pour me préparer à partir après le Kharaj avec Panditji qui pouvait me déposer près d'une station de métro pour que je puisse enchaîner avec un cours de bharatanatyam avec Arupa Lahiry. Cela dit, il m'est aussi arrivé d'aller me recoucher juste après le Kharaj...
Les autres jours Panditji venait l'après-midi pour nous donner un cours. Si nous étions assis tous ensemble et si nous avons parfois chanté la composition en groupe, l'enseignement était individuel, chacun recevant sa leçon l'un après l'autre. Même pendant les passages collectifs, si l'un d'entre nous produisait la moindre fausse note, celle-ci était quasi-systématiquement corrigée...
Je suis arrivé à Greater Noida alors qu'Ilyas et Samim pratiquaient Raga
Todi depuis déjà deux semaines. Le premier jour, Panditji m'a demandé si ce
raga me convenait ; je n'allais évidemment pas dire non, puisque c'est
un raga très difficile, le seul de ceux que j'avais déjà pratiqué dont
j'étais jusque là incapable de chanter une composition en raison de sa
difficulté. La première chose que j'aie eu à essayer de chanter a été la
gamme de ce raga... Celle-ci comporte de nombreuses altérations, assez
subtiles : on est loin du tempérament égal
. Ainsi, si la
tonique (Sa) est le do, par rapport aux touches du piano les plus proches,
les Re komal, Ga komal, Tivra Ma et Ni komal sont respectivement un peu
plus bas que les Ré bémol, Mi bémol, Fa# et Si bémol. Le Dha komal est au
contraire un peu plus haut que le La bémol. Même le Pa (sol) ne fait pas
une quinte juste : il est un peu en-dessous ! C'est donc avec un
certain soulagement que vers la fin de mon séjour j'ai pu chanter la gamme
et quelques exercices de Sargam sans que Panditji ait besoin de me corriger
trop souvent...
J'ai aussi appris la composition Kaun Bharama Bhule Ho Mana Gyani,
Pujata Raga Akshara Budha Bani
en Chautal de Vilas Khan, fils de
Tansen, la plus longue que j'aie apprise ! Les enregistrements
répertoriés ne contiennent que les deux premières strophes de la
composition (Stayi et Antara) alors que nous avons appris les quatre
strophes. De toute façon le style personnel de Panditji est assez
inégalable par son raffinement (autant que dans ses Alap) et aussi par sa
façon de chanter avec de subtils retards sur le cycle rythmique :
c'est superbe, mais difficile à reproduire à l'identique ! Les deux
autres élèves avaient déjà appris les deux premières strophes quand je suis
arrivé. J'ai donc pu les apprendre en me laisant entraîner par l'effet de
groupe, mais pour les deux dernières strophes, j'ai été en première ligne
quand Panditji s'est décidé à nous les apprendre : comme on commençait
par ma leçon, j'ai été le premier à devoir reproduire ce que Panditji
chantait... J'ai aussi fait un tout petit peu d'Alap, mais de même que les
autres il m'a fallu attendre deux semaines avant de pouvoir me lancer du
fait de la difficulté de Raga Todi. Heureusement que j'avais rapidement
décidé de prolonger d'une semaine mon séjour à Greater Noida parce que
sinon cela m'aurait sans doute frustré.
Dans ma chambre, j'avais un tampura :
L'engin est assez lourd : je ne sentais plus ma jambe droite après un quart d'heure de pratique...
⁂
La cuisine de l'appartement n'était pas trop mal équipée. J'ai fait des Kulfis (à partir d'amandes, mangues ou pistaches entières, et ce sans mixeur ni véritable pilon...), Parathas, Puris, Chapatis, Paneer Butter Masala, Alu Masala, etc. Pour les Chapatis, j'ai d'abord observé comment procédait Mamta, une autre élève de Panditji qui est venue deux ou trois fois.
J'ai aussi bu presque continûment du thé chinois préparé en utilisant deux tasses pour émuler un zhong (une technique que j'avais découverte l'année dernière à Édimbourg). Les autres ont notamment préparé du riz, du Dal. Panditji nous a même fait plusieurs fois la cuisine tout en nous enseignant. Le jour où je suis arrivé il a préparé un succulent ragoût de mouton. Il nous a aussi invité chez lui déguster un korma de poulet.
Ilyas est parti une dizaine de jours au Surinam (!) pour une tournée d'un groupe de musique auquel il appartient. Comment a-t-il pu survivre sans le kilo de mangues qu'il mangeait quotidiennement ! Pendant ce temps, j'ai fait faire un peu de tourisme à Samim : Gurdwara Bangla Sahib, Sri Gowri Shankar Mandir, Lal Qila.
Pour aller à Delhi depuis Greater Noida, il fallait prendre un rickshaw, un bus et enfin le métro, ce qui prenait presque deux heures... J'ai profité de ces quelques allers-retours pour manger au Saravana Bhavan de Janpath :
J'ai également eu l'occasion de rendre une courte visite à Ustad F. Wasifuddin Dagar pour lui remettre une copie sur CD (dans la plus belle boîte que j'aie trouvée) de l' enregistrement que j'avais fait lors de son dernier concert à Paris.
2014-07-09 19:25+0200 (Aéroport CDG 2) — Culture — Musique — Culture indienne — Dhrupad — Voyage en Inde XIII — Planning
À peu près tous les balletomanes parisiens sont en ce moment-même à l'Opéra Garnier pour les adieux de Nicolas Le Riche, mais de mon côté, je suis enregistré sur le vol 9W123 pour Mumbai. Je ne sais pas encore très bien ce que je verrai en Inde lors de ce treizième voyage, mais j'ai déjà noté trois spectacles :
2014-07-07 10:00+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Culture indienne — Dhrupad
Pour le mois de mars, j'ai déjà eu l'occasion de revenir sur le récital de Gayatri Sriram au Musée Guimet et sur le Dhrupad Festival à Utrecht. Voici de brefs souvenirs des autres spectacles que j'ai vus au cours de ce mois :
Cité de la musique — 2014-03-01
Les Dissonances
David Grimal, violon
Concerto pour violon et orchestre nº4 en ré majeur, KV 218 (Mozart)
Vicent Alberola, clarinette
Concerto pour clarinette en la majeur, KV 622 (Mozart)
Concerto pour violon et orchestre nº5 en la majeur, KV 219 (Mozart)
Très beau concert des Dissonances. L'orchestre et le soliste David Grimal m'ont semblé particulièrement magnifiques dans le Cinquième concerto pour violon de Mozart. J'ai apprécié aussi le clarinettiste Vicent Alberola aux très subtils pianissimi dans le concerto pour clarinette en la majeur. (Cela n'efface cependant pas tout à fait de ma mémoire l'interprétation de Romain Guyot avec le Chamber Orchestra of Europe.)
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Opéra Garnier — 2014-03-03
Ballet de l'Opéra
Orchestre Colonne
Horton Gould, musique
Agnès De Mille, chorégraphie (1948), réglée par Paul Sutherland
Oliver Smith, décors
Miles White, costumes
Pascal Mérat, lumières
Alice Renavand, L'Accusée
Vincent Chaillet, Le Pasteur
Laurence Laffon, La Mère de l'Accusée
Stéphanie Romberg, La Belle-mère de l'Accusée
Christophe Duquenne, Le Père de l'Accusée
Léonore Baulac, L'Accusée enfant
Sébastien Bertaud, Le Porte-parole du jury
Juliette Gernez, Hugo Marchand, Nocturne
Fall River Legend, ballet en un prologue et huit scènes
Ture Rangstrom, musique
Hans Grossman, arrangements musicaux et orchestration
Birgit Cullberg, chorégraphie (1948), réglée par Ana Laguna
Sven X:et Erikson, décors et costumes
Erik Berglund, lumières
Katrin Brannstrom, responsable technique pour les décors et costumes
Monika Mengarelli, Agneta Valcu, répétitions
Aurélie Dupont, Mademoiselle Julie
Nicolas Le Riche, Jean
Amélie Lamoureux, Kristin
Michaël Denard, Le Père de Julie
Alessio Carbone, Le Fiancé de Julie
Charlotte Ranson, Clara, La Fille du garde-forestier
Aurélien Houette, Anders
Takeru Coste, L'Ivrogne
Jean-Christophe Guerri, Andrey Klemm, Richard Wilk, Les trois vieilles Femmes
Mademoiselle Julie, ballet en quatre tableaux d'après la tragédie naturaliste en un acte d'August Strindberg
Pour ce programme de ballet, malgré un placement exceptionnel au parterre dû à des ventes promotionnelles, j'ai été globalement plus enthousiasmé par la musique que par la danse. Si je me souviens bien ma préférence allait à Fall River Legend, surtout pour la musique : j'avais ainsi été un peu déçu par l'expression d'Alice Renavand que j'ai connue plus bouleversante dans d'autres rôles. Je mesure cependant le privilège que cela a été de voir d'aussi près Nicolas Le Riche et Aurélie Dupont dans Mademoiselle Julie !
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Salle Pleyel — 2014-03-07
Hélène Collerette, violon solo
Orchestre philharmonique de Radio France
Ádám Fischer, direction
Symphonie nº88 en sol majeur (Haydn)
Tedi Papavrami, violon
Concerto pour violon et orchestre nº1 (Bartók)
Symphonie nº5 en fa majeur op. 76 (Dvořák)
Ce fut un délicieux concert du Philharmonique de Radio France. Je garde en particulier un très bon souvenir de la Symphonie nº88 de Haydn dirigée par Ádám Fischer. Encore une fois, je me demande comment il est possible que les symphonies de Haydn ne soient pas remboursées par la sécu'.
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Cité de la musique — 2014-03-15
Chamber Orchestra of Europe
Vladimir Jurowski, direction
Danses allemandes (Schubert, arrangement de Webern)
Christian Tetzlaff, violon
Concerto pour violon et orchestre en ré majeur op. 61 (Beethoven)
Cinq Mouvements, op. 5, Anton Webern
Symphonie nº4 “Tragique” en ut mineur (Schubert)
Magnifique programme du Chamber Orchestra of Europe ! Le moment le plus exaltant pour moi a sans doute été l'interprération des Cinq Mouvements de Webern.
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Amphithéâtre de la Cité de la musique — 2014-03-18
Pierre Hantaï, clavecin
Suite anglaise nº4 en fa majeur, BWV 809
Suite anglaise nº5 en mi mineur, BWV 810
Suite anglaise nº6 en ré mineur, BWV 811
Le clavecin que jouait Pierre Hantaï était assez affreux d'un point de vue strictement visuel, mais j'ai pris beaucoup de plaisir à entendre dans de bonnes conditions ces Suites anglaises de Bach.
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Ivry-sur-Seine — 2014-03-19
Céline Wadier, chant dhrupad
Gérard Hababou, pakhawaj
Raga Puriya (Alap, Jor, Jhala & Chautal)
Raga Jog (Alap & Tivratal)
Raga Bhinna Shadja (Alap & Sultal)
Avant de commencer son concert, Céline Wadier a demandé aux quelques débutants en dhrupad qui se trouvaient là quels ragas nous étudions. Une des élèves a opportunément dit Puriya. Ce fut manifestement une bonne idée parce que non seulement l'interprétation de ce raga m'a paru superbe, mais ayant pratiqué moi-même ce raga (c'est celui que je connais le mieux), c'est la première fois qu'en écoutant un concert de dhrupad, je sentais à chaque instant de l'Alap où on est était dans la gamme de ce Raga. Je peux ainsi dire en étant à peu près certain de ne pas me tromper que la chanteuse est descendue jusqu'au Ga de l'octave inférieure et est allé jusqu'au Ga de l'octave supérieure (soit deux octaves plus haut). Après ce Raga très développé, elle a chanté Raga Jog et Raga Bhinna Shadja. Seul regret, il y a eu moins d'interactions au cours de ce concert entre la chanteuse et le percussionniste que lors de leur concert d'octobre.
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Salle Pleyel — 2014-03-21
Svetlin Roussev, violon solo
Orchestre philharmonique de Radio France
Myung-Whun Chung, direction
Antoine Tamestit, alto
Till l'Espiègle (Strauss)
Concerto pour alto (Bartók)
Une Vie de héros (Strauss)
La corde de do d'Antoine Tamestit ! Quelle sonorité incroyable ! Je suis extrêmement admiratif de l'interprétation qu'il a donné du concerto pour alto de Bartók, même si je dois avouer en toute subjectivité que j'avais été plus ému par l'interprétation de Daniel Vagner (qui se trouvait ce soir-là dans le Philharmonique de Radio France).
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Salle Pleyel — 2014-03-27
Orchestre de Paris
Giovanni Antonini, direction
Chœur de l'Orchestre de Paris
Lionel Sow, chef de chœur
Olympia, ouverture (Joseph Martin Kraus)
Giorgio Mandolesi, basson
Concerto pour basson, KV 191, Mozart
Sol Gabetta, violoncelle
Concerto pour violoncelle nº2 (Haydn)
Messe de l'orphelinat, KV 139, Mozart
Camilla Tilling, soprano
Kate Lindsey, mezzo-soprano
Rainer Trost, ténor
Havard Stensvold, basse
Délicieux concert de l'Orchestre de Paris. Les habitués, et ils ont eu
mille fois raison, étaient venus pour entendre Giorgio Mandolesi dans le
concerto pour basson de Mozart et trinquer avec lui au café d'à côté
:-)
: je suis reparti avec un autographe en forme de basson.
La déception de la soirée est cependant venue pour moi de l'interprétation
du concerto pour violoncelle nº2 de Haydn par Sol Gabetta. De la place très
proche de la scène où je me trouvais, j'entendais le bruit de ses doigts
frappant violemment la touche comme des petits marteaux. Cela accentuait ma
sensation de percevoir des suites de notes dont je ne pouvais saisir
l'organisation en phrases. Son bis en revanche a été magnifique.
⁂
Opéra Comédie, Montpellier — 2014-03-29
Orchestre national Montpellier Languedoc-Roussillon
Jérôme Pillement, direction musicale
Benoît Bénichou, mise en scène et adaptation du livret
Amélie Kiritzé-Topor, scénographie
Bruno Fatalot, costumes
Thomas Costerg, lumières
Anne Lopez, chorégraphie
Vincent Recolin, chef des chœurs
Valérie Blanvillain, Marie Arnaud, chefs de chant
Samy Camps, Le Roi Ouf 1er
Héloïse Mas, Lazuli
Solistes du Jeune Opéra
Chœurs du Jeune Opéra
L'Étoile (Chabrier)
Dans la salle presque vide (à part au parterre) de l'Opéra Comédie de Montpellier, j'ai assisté à une représentation de L'Étoile de Chabrier. Ce spectacle n'est pas particulièrement bouleversant, mais assurément agréable à regarder et écouter. Les chanteurs étaient tous jeunes. Parmi eux, je retiens l'excellente Héloïse Mas dans le rôle de Lazuli.
2014-07-06 16:24+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Culture indienne — Dhrupad
Il y a trois mois, je suis allé pour la première fois aux Pays-Bas pour assister au deuxième festival de Dhrupad organisé à Utrecht. Le premier train que j'ai pris à Paris allait à Amsterdam où je pensais rester quelques heures, mais la désespérante atmosphère amstelodamoise m'a fait fuir très rapidement cette ville pour rejoindre la paisible Utrecht :
Les concerts auront lieu dans la grande salle de RASA :
À l'intérieur, une sympathique buvette et quelques stands, dont un propose une copieuse collection de CD de musique hindustani. Je salue Uday Bhawalkar que je félicite pour le superbe Raga Hindol qu'il a chanté quelques jours plus tôt à Delhi lors du troisième jour d'un festival de dhrupad et que j'ai pu entendre grâce à la diffusion en direct sur le site d'IGNCA.
Lors des concerts de ce festival, la salle qui doit pouvoir accueillir environ 200 personnes est malheureusement très peu remplie. Une soixantaine de specteurs seulement seront présents.
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RASA, Utrecht — 2014-03-08
Amelia Cuni, chant dhrupad
Nathanaël van Zuilen, pakhawaj
Sophia, Elias, tampura
Raga Bhup (Alap & Chautal)
Raga Kedar (Alap & Sultal)
Le premier concert a été donné par Amelia Cuni. Elle a interprété une composition de style traditionnel dûe à Vidur Mallick (Raga Bhup), mais a aussi chanté des vers en italien, un hommage à la Mère Nature dans son deuxième Raga avant de changer une de ses propres compositions en Sultal. Si j'apprécié ce concert, j'ai cependant trouvé que la note Sa du haut arrivait un peu vite dans ses Alap, comme inopinément ; j'apprécie davantage les interprètes qui créent une attente ou une tension, qui titillent cette note avant de la jouer franchement. Les motifs rythmiques de ses parties rapides (Jor/Jhala) étaient particulièrement intéressants, les accents étant placés en des endroits inhabituels. C'est la différence la plus notable que j'ai observée entre le style que je connais le mieux (Dagarvani) et ce que j'ai entendu dans ce concert ; la chanteuse m'expliquera le lendemain que c'est une des particularités du style des Mallick.
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RASA, Utrecht — 2014-03-08
Pandit Ashok Pathak, surbahar
Rishab Dhar, pakhawaj
Raga Darbari Kanada (Alap & Jhaptal)
Raga Tilang (Alap & Sultal)
Plus tard dans la soirée intervenait le concert de Pandit Ashok Pathak. Il joue du surbahar. En voyant l'instrument, il y a de quoi se demander comment il est ne serait qu'imaginable de sortir un son correct. Pour créer certains effets de glissando, le musicien doit littéralement tirer sur les cordes, et pas qu'un peu... S'il fallait vraiment tendre l'oreille pour entendre quelque chose pendant les phrases de l'Alap explorant les graves, les parties rapides de ce concert étaient particulièrement exaltantes.
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Le lendemain matin, j'ai participé à un cours collectif donné par Uday Bhawalkar, manifestement un excellent pédagogue. Quelques exercices sur la gamma indienne (sans jamais prononcer le nom des notes cela dit) dont un joli exercice sur le Raga Bhairav, un Alap un peu trop difficile sur le Raga Vrindavani Sarang et une sympathique composition Tumharava Tumhasaheba en Sultal (exceptionnellement lente pour ce Tala).
Avant le dernier concert, Amelia Cuni a prononcé une intéressante conférence sur son expérience dans la musique dhrupad, la danse kathak, le traumatisme de l'apprentissage du solfège en Italie, sa collaboration avec un ensemble de musique ancienne, etc.
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RASA, Utrecht — 2014-03-09
Uday Bhawalkar, chant dhrupad
Nathanaël van Zuilen, pakhawaj
Sophia, Elias, tampura
Raga Bhimpalasi (Alap, Chautal & Sultal)
Très beau concert d'Uday Bhawalkar qui a interprété le Raga Bhimpalasi et deux compositions, dont une que je connaissais (en Chautal). Cela dit, je n'avais plus pratiqué ce Raga depuis un certain temps, donc je n'ai pas aussi bien suivi le développement de l'Alap aussi bien que je l'aurais voulu.
Globalement, si je suis très content d'avoir assisté à ce festival, mais j'en ressors un tout petit peu moins enthousiaste que je ne l'aurais imaginé a priori.
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Avant de repartir depuis Rotterdam, j'ai passé une matinée dans la délicieuse ville de Delft :
Les autres photographies que j'ai faites pendant ce week-end sont là.
2014-03-07 10:40+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Danses indiennes — Culture indienne — Dhrupad — Planning
2013-12-20 12:17+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Danse — Danses indiennes — Culture indienne — Dhrupad
J'ai déjà eu l'occasion de revenir sur le spectacle Sangama de Shantala Shivalingappa ainsi que sur le passage à Paris de la Chidambaram Dance Company. Voici un bref récapitulatif des autres spectacles vus au cours du mois de novembre :
Cité de la musique — 2013-11-08
Ensemble Intercontemporain
Matthias Pintscher, direction musicale
Hidéki Nagano, piano
L'Asie d'après Tiepolo pour ensemble (Hugues Dufourt)
L'Origine du monde pour piano et ensemble (Hugues Dufourt)
Le Palais du silence, drammaturgia d'après Claude Debussy, Lucia Ronchetti (création)
Grégoire Simon, alto
Les Chardons d'après van Gogh pour alto et orchestre de chambre (Hugues Dufourt)
La musique de Hugues Dufourt m'a bien plu, mais je me serai bien contenté d'entendre une seule de ses œuvres, ce qui aurait évité que son style déclenche en moi une certaine lassitude. Sans m'émerveiller, la création de Lucia Ronchetti m'a semblé plutôt plaisante à écouter et si en musique contemporaine mon regard tend à prendre parfois le dessus sur mes oreilles, ce qu'il était donné à voir était plutôt esthétique, comme quand les musiciens à cordes ont recouvert leurs instruments d'un voile et ont frotté les cordes avec leur archet à travers ce voile. Les vents ont aussi soufflé dans des bouteilles. Trois percussionnistes s'activaient autour du piano. Un d'entre eux était même allongé sous l'instrument qu'il tapotait avec des baguettes. À la fin de l'œuvre, de façon tout à fait inattendue, le chef d'orchestre a utilisé les touches du piano !
Si la musique ne m'a pas déplu, je dois avouer que ce qui m'a le plus ému dans ce concert, ce fut le ballet des machinistes chargés des changements de configuration de chaises, pupitres, instruments, etc.
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Auditorium du Musée d'Orsay — 2013-11-14
Quatuor Takács
Edward Dusinberre, Károly Schranz, violons
Geraldine Walther, alto
András Fejér, violoncelle
Quatuor à cordes nº3, Sz. 85, Bartók
Quatuor nº2 “Lettres intimes”, Janáček
Quatuor nº1 en mi mineur ”De ma vie”, Smetana
Concert plutôt décevant. J'ai aimé le troisième quatuor de Bartók et au cours du concert j'ai particulièrement aimé le jeu du second violon, mais si l'interprétation du Quatuor “Lettres intimes” de Janáček a comporté quelques très beaux moments, je n'ai pas eu le même sentiment de miracle musical permanent que lorsque j'avais découvert cette œuvre avec David Grimal et quelques autres au Théâtre des Bouffes du Nord.
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Salle Pleyel — 2013-11-15
Anne Sofie von Otter, mezzo-soprano
Robert Getchell, ténor
David Lefort, ténor
Jean-Christophe Jacques, baryton
Geoffroy Buffière, basse
Orchestre philharmonique de Radio France
HK Gruber, direction
Les sept péchés capitaux (Weill)
Petite musique de Quat'sous (Weill)
Surabaya Johnny (Weill)
I am a stranger here myself (Weill)
Speak low (Weill)
The Saga of Jenny (Weill)
Très beau concert 100% Weill du Philharmonique de Radio France ! Je
retiens surtout de ce concert l'irrésistible chant d'Anne-Sophie von Otter
dans la partie la plus légère
du programme. Alors que je m'étais
replacé au tout premier rang après l'entr'acte, je ne m'attendais pas à
ressentir un tel émerveillement quand la chanteuse est venue interpréter
Surabaya Johnny et d'autres chansons. Son attitude scénique est en
phase avec les personnages qu'elle joue, mais elle me convainc surtout par
la beauté de son chant, magnifiquement ornementé.
Ailleurs : Bladsurb, Paris — Broadway, Palpatine.
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Mairie du vingtième arrondissement — 2013-11-17
Camille, élève de Jyotika Rao, bharatanatyam
Prestar (hommage à la Déesse)
Kasturitillakam
Au cours du festival du livre de l'Inde, quelques animations étaient proposées. Cela m'a permis de découvrir le style de Sucheta Chapekar, la guru de ma prof de bharatanatyam. Une de ses élèves les plus avancées présentait une pièce dans son style propre, Prestar, un hommage à la Déesse (sous trois formes : Sarasvati, Lakshmi, Durga). D'un point de vue musical, la particularité de ce style est d'utiliser non pas la musique carnatique mais la musique hindustani. Le tala utilisé était assez original (9 temps). Je retiens surtout la beauté des mouvements dans les shlokas.
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Mairie du vingtième arrondissement — 2013-11-17
Jérôme Cormier, chant dhrupad
Gérard Hababou, pakhawaj
Anne-Marie, Joël, Leïla, Michèle, chant dhrupad
Raga Bhupali
Un peu plus tard, j'ai participé avec d'autres élèves du cours de dhrupad de Jérôme Cormier à une présentation de ce style de chant, ou plutôt de la façon dont nous le pratiquons en cours. Nous avons chanté un Alap dans le Raga Bhupali, puis du Sargam ; nous essayions de reproduire les phrases qu'il chantait. Enfin, nous avons chanté une composition en Chautal (dont le premier des trois vers est Tane Talevare Tare), Jérôme Cormier improvisant seul pendant certains cycles rythmiques. (Sur la vidéo ci-dessous, on entend Ustad H. Sayeeduddin Dagar chanter le premier vers de cette composition.)
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Chez Malavika — 2013-11-22
Bithika Mistry, odissi
Mangalacharan (en l'honneur de Ganesh)
Mangalacharan (en l'honneur de Sarasvati)
Pallavi (Shringararasa)
Abhinaya (Gita-Govinda)
Megh-Pallavi
Dashavatar
Salutation à Ganesh
Récital de danse odissi en petit comité. La musique enregistrée sur CD a posé problème. D'une part, j'en ai trouvé l'orchestration un peu surchargée. D'autre part, au début du récital, au lieu de la musique d'un Mangalacharan en l'honneur de Sarasvati, c'est un Mangalacharan en l'honneur de Ganesh qui a retenti. La configuration des lieux ne permettant pas vraiment à la danseuse de couper court à la confusion, elle n'a pas eu d'autre choix que d'interpréter une pièce qu'elle n'avait pas prévu de danser ! De même, la piste Moksham n'était pas disponible ; le récital ne s'est donc pas conclu comme l'usage le veut. Mon impression sur ce récital est globalement assez mitigée. Si la jeune danseuse a d'indéniables qualités, je n'ai pas été très ému par ce récital, qui n'a pas laissé beaucoup de place au travail sur l'expression du visage. J'ai néanmoins apprécié la pièce Dashavatar qui évoque les incarnations de Vishnu.
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Salle Pleyel — 2013-11-24
Gidon Kremer, violon
Martha Argerich, piano
Sonate pour violon et piano nº5 (Mieczysław Weinberg)
Sonate pour violon et piano nº10 (Beethoven)
Sonate pour violon nº3 (Mieczysław Weinberg)
Sonate pour violon et piano nº8 (Beethoven)
J'ai beaucoup aimé le jeu de la pianiste Martha Argerich, que je voyais pour la première fois sur scène. J'ai un peu moins apprécié la prestation du violoniste Gidon Kremer dans la première partie du concert, mais la seconde a été magnifique. La sonate pour violon nº3 de Weinberg a été pour moi une très belle découverte.
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Salle Gaveau — 2013-11-26
Orchestre Colonne
Krystof Maratka, direction
Drupopisy, atelier d'instruments de musique populaire des pays Tchèques, Krystof Maratka (création)
Laurent Petitgirard, direction
Daniel Vagner, alto
Concerto pour alto (Bartók)
Récitatif de la Fantaisie chromatique (Bach, arrangement de Kodály)
Symphonie nº4 (Beethoven)
La création de Drupopisy de Maratka a beaucoup plu. Cette œuvre évoquant les pays tchèques de façons aussi variées qu'amusantes grâce à des mélodies d'apparences paysannes et de combinaisons inattendues d'instruments et de techniques non standard. Les musiciens des sections de cordes ont presqu'autant tapé du pied et des mains qu'utilisé leur archet !
Le concert pour alto de Bartók a été merveilleusement bien interprété par l'alto solo de l'orchestre, Daniel Vagner. Le deuxième mouvement était particulièrement émouvant. Tous mes efforts pour sécher mes larmes ont été ruiné par son interprétation en bis d'un arrangement de Bach par Kodály.
Si le périlleux troisième mouvement ne m'a pas tout à fait convaincu, j'ai toutefois été enthousiasmé par l'interprétation de la Quatrième symphonie de Beethoven par l'orchestre après l'entr'acte.
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Conservatoire de Paris, Salle d'art lyrique — 2013-11-27
Peter Lanckweerdt, Roméo
Jeanne Baudrier, Juliette
Pierre-Emmanuel Lauwers, Mercutio
François Aulibé, Tybalt
Fanny Alton, Audrey Boccara, Alice Cocagne, Hélène Davière, Marie Jolly, Dan Kim, Fatoumata Niang, Soa Ratsifandrihana, Julia Sanz, Nicole Stroh, Mathieu Durand, Sungyeop Kim, Gaëtan Lhirondelle, Damien Sengulen, danseurs comédiens
Naruko Tsuji, piano
Raphaël Pagnon, Julie Le Gac, altos
Junior Ballet
Musiciens du Conservatoire
Sergueï Prokofiev, musique
Vadim Borisovsky, arrangement pour piano et deux altos
Paul Chalmer, chorégraphie
Roméo et Juliette
J'ai été séduit par cette version de Roméo et Juliette réduite pour durer un peu plus d'une heure. Certains spectateurs semblaient déçus de n'avoir pas vu plus de danse. Il est vrai que la musique de Prokofiev (redoutablement réduite pour alto(s) et piano) a souvent servi d'interludes. Cela ne m'a pas gêné puisque j'étais venu en grande partie pour entendre cette musique. En dehors des solistes, les comédiens-danseurs du CNSMDP ne dansent pas (ou très très peu). Ils étaient néanmoins très convaincants dans leur expression et leur interprétation du texte. Si ce Roméo et Juliette est réduit en durée, l'histoire est présentée de façon cohérente. La danse est essentiellement réservée aux quatre solistes. J'ai particulièrement apprécié les interprètes des rôles de Juliette et de Mercutio. Les moments les plus remarquables à mon goûts sont intervenus lors des très beaux adages mettant en scène Roméo et Juliette.
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Auditorium du Musée d'Orsay — 2013-11-28
Quatuor Pražák
Pavel Hůla, violon, direction
Vlastimil Holek, violon
Josef Klusoň, alto
Michal Kaňka, violoncelle
Sérénade pour trio à cordes en do majeur, op. 10 (Ernö Dohnányi)
Quatuor à cordes nº6, Sz. 114, Bartók
Quatuor à cordes nº3 en si bémol majeur, op. 67 (Brahms)
Valse en ré majeur, op. 54 (Dvořák)
Je crois me souvenir que j'ai beaucoup apprécié ce concert. Parmi les musiciensi du quatuor Pražák j'ai particulièrement aimé le jeu de l'altiste Josef Klusoň. L'engagement des musiciens, notamment dans le Sixième quatuor de Bartók m'a plu. Cependant, l'image que je retiens de ce concert est l'atmosphère joyeuse du bis qu'ils ont donné : la Valse en ré majeur op. 54 de Dvořák. À cause du thème très envahissant de cette valse, comment peut-on se souvenir de ce qui a précédé ?
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Cité de la musique — 2013-11-30
Orchestre de chambre de Paris
Accentus
Toby Spence, ténor
Thomas Zehetmair, direction
Offertorium “Intende voci” (Schubert)
Julia Bauer, soprano
Alain Buet, basse
Le Christ au mont des Oliviers (Beethoven)
Si je suis content d'avoir découvert l'oratorio de Beethoven, je n'ai pas pris beaucoup de plaisir en assistant à ce concert. En particulier, je me suis longtemps demandé dans quelle langue chantait le ténor Toby Spence...
2013-12-18 10:30+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Culture indienne — Dhrupad
À propos des spectacles d'octobre 2013, j'ai déjà eu l'occasion de revenir sur Orfeo à la Cité de la musique et le récital de Vaibhav Arekar et Anuya Rane au Musée Guimet. Pour les autres spectacles, voici mon vite dit :
Salle Pleyel — 2013-10-01
Orchestre Colonne
Laurent Petitgirard, direction
Philippe Graffin, violon
Concerto pour violon et orchestre Le Violon rouge, John Corigliano
Marie-Claude Bantigny, violoncelle
Daniel Vagner, alto
Don Quichotte, variations fantastiques sur un thème à caractère chevaleresque (Strauss)
J'étais venu à ce concert pour entendre la violoncelliste Marie-Claude Bantigny dans Don Quichotte de Strauss. Elle a été magnifique, mais à l'alto, un certain Daniel Vagner, que j'entendais pour la première fois, tenait le rôle de Sancho Panza, et c'était tout simplement incroyable !
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Les 3 arts — 2013-10-02
Céline Wadier, chant dhrupad
Gérard Hababou, pakhawaj
Raga Todi
Raga Bhinna Shadja
J'assiste pour la première fois à un récital de chant dhrupad de ma prof, qui a interprété le Raga Todi en finissant par la composition Samhara Chalate (Dhamar) que j'ai déjà pratiquée avec elle et quelques autres. Les difficultés de ce raga font qu'il m'est pour le moment beaucoup plus plaisant de l'écouter en concert que d'essayer de le pratiquer ! Si j'ai apprécié la première partie de ce concert, la deuxième était a été merveilleusement belle. Trop pour que mes glandes lacrymales puissent le supporter... Quel plaisir de l'entendre dans ce très lumineux Raga Bhinna Shadja et deux compositions en Chautal puis en Sultal !
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Salle Colonne — 2013-10-06
Michel Bernier, clarinette
Marie-Claude Bantigny, violoncelle
Carole Villiaumey, piano
Trio pour clarinette, violoncelle et piano en la mineur, op. 114 (Brahms)
Pierre Hamel, violon
Nachtgesang pour piano clarinette, violon et violoncelle (Hersant)
Ching Yun Tu, violon
Mathieu Rolland, alto
Quintette pour clarinette et cordes en si mineur, op. 115 (Brahms)
Magnifique interprétation du Quintette pour clarinette et cordes de Brahms !
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Opéra Garnier — 2013-10-10
Frédéric Chopin, musique
John Neumeier, chorégraphie et mise en scène (1978)
Jürgen Rose, décors et costumes
Rolf Warter, lumières
Victor Hughes, assistant du chorégraphe
Claude de Vulpian, répétitions
James Tuggle, direction musicale
Emmanuel Strosser, piano
Frédéric Vaysse-Knitter, piano
Agnès Letestu, Marguerite Gautier
Stéphane Bullion, Armand Duval
Michaël Denard, Monsieur Duval
Nolwenn Daniel, Prudence Duverney
Laurent Novis, Le Duc
Christine Peltzer, Nanine, la servante de Marguerite
Simon Valastro, Le Comte de N
Frédéric Vaysse-Knitter, Un pianiste
Eve Grinsztajn, Manon Lescaut
Christophe Duquenne, Des Grieux
Léonore Baulac, Olympia
Nicolas Paul, Gaston Rieux
Ballet de l'Opéra
Orchestre de l'Opéra national de Paris
La dame aux camélias, ballet en un prologue et trois actes d'après le roman d'Alexandre Dumas fils
J'ai vu trois représentation de cette série de représentations de La Dame aux camélias de Neumeier (déjà vu en 2010). La scénographie est plus classique que dans mon souvenir et la musique de Chopin, à force d'être répétée, me paraît presqu'insupportable. Dans les rôles principaux, le couple Eleonora Abbagnato/Benjamin Pech n'était vraiment pas exaltant. Celui formé par Hervé Moreau et Aurélie Dupont au regard captivant d'autorité était au contraire bouleversant ! S'il m'a un peu moins touché, j'ai aussi apprécié celui formé par Agnès Letestu et Stéphane Bullion. Ce dernier était absolument déchaîné. Le temps d'un solo, j'ai eu l'impression que c'était Ivan Vasiliev qui virevoltait sur scène. J'ai eu malheureusement trop peu d'occasions de voir Agnès Letestu dans de grands ballets pour retenir d'elle de grands souvenirs et de grandes émotions alors qu'elle faisait ses adieux. Les saluts furent néanmoins émouvants, notamment du fait de la présence de José Martinez.
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Salle Pleyel — 2013-10-15
Russian National Orchestra
Mikhaïl Pletnev, direction
Le Retour de Lemminkäinen (Sibelius)
Gidon Kremer, violon
Concerto pour violon en ré mineur, op. 47 (Sibelius)
Symphonie nº2, Rachmaninov
Vocalise, Rachmaninov
Je ne suis vraiment pas fan du violoniste Gidon Kremer. Par contre, j'ai beaucoup aimé le Russian National Orchestra et dans le concerto pour violon de Sibelius, j'avoue avoir souvent préféré concentrer mon attention sur l'arrière-plan orchestral que sur le jeu du soliste.
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Salle Pleyel — 2013-10-26
Gewandhausorchester Leipzig
Riccardo Chailly, direction
Julian Rachlin, violon
Enrico Dindo, violoncelle
Double concerto pour violon et violoncelle, Brahms
Symphonie nº1, Brahms
Le programme de la Salle Pleyel de ce mois d'octobre permettait d'entendre de grands orchestres étrangers. Quelques jours plus tôt, j'ai entendu le Russian National Orchestra et plus tard j'entendrai le Budapest Festival Orchestra. Intercalé entre les deux, j'ai découvert le Gewandhausorchester Leipzig, dirigé par Riccardo Chailly. Je n'ai pas très bien compris les quelques huées qui furent semble-t-il destinées au violoniste Julian Rachlin, qui remplaçait Leonidas Kavakos, souffrant. J'ai pour ma part bien aimé le double concerto pour violon et violoncelle (Enrico Dindo), mais la partie la plus mémorable du concert est intervenue après l'entr'acte, avec une interprétation de la Première symphonie de Brahms qui m'a mis d'un rare état d'exaltation...
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Salle Pleyel — 2013-10-29
Budapest Festival Orchestra
Iván Fischer, direction
Threnos in memoriam Béla Bartók (Sándor Veress)
Maria João Pires, piano
Concerto pour piano nº4 (Beethoven)
Impromptu op. 142 nº2 (Schubert)
Symphonie nº8 (Dvořák)
Valse (Takemitsu)
Danse hongroise nº1 (Brahms)
Magnifique concert du Budapest Festival Orchestra. Le plus grand frisson de la soirée est venu avec l'interprétation de la Symphonie nº8 de Dvořák !
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Cité de la musique — 2013-10-30
Chamber Orchestra of Europe
Jaap van Zweden, direction
La Nuit transfigurée, op. 4, version pour orchestre à cordes (Schönberg)
Hilary Hahn, violon
Concerto pour violon, op. 14 (Barber)
Symphonie nº9 en mi bémol majeur, op. 70 (Chostakovitch)
Avec le Chamber Orchestra of Europe, on s'attend à de l'inoubliable (cf. ici ou là). Ce soir-là, ce ne fut que bon. Je n'ai pas aimé la direction de Jaap van Zweden dans La Nuit transfigurée. Aucun frisson autour de la mesure 100. Des nuances parfois excessivement piano. En effet, comme malheureusement presque toutes les salles de concert parisiennes, la Cité de la musique présente le défaut d'émettre un petit bruit de fond, même en l'absence de son émis par les musiciens ou les spectateurs. À partir du jour où je l'ai remarqué, j'ai commencé à le trouver insupportable pendant les silences orchestraux. C'est une chose que l'on entende un bruit de fond pendant les silences, mais c'en est une autre que ce bruit de fond couvre la musique des instruments à cordes comme ce fut le cas par moments.
Après avoir entendu récemment une autre interprétation de La Nuit transfigurée par les Berliner Philharmoniker dirigés par Simon Rattle, je mesure rétrospectivement le privilège que j'ai eu d'avoir découvert cette œuvre avec Pierre Boulez.
Le concerto pour violon de Barber interprété par l'orchestre et Hilary Hahn m'a paru plus convaincant et après l'entr'acte, la Symphonie nº9 de Chostakovitch le fut plus encore !
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Opéra Garnier — 2013-10-31
Saburo Teshigawara, chorégraphie, musique, scénographie, costumes et lumières
Tim Wright, Akira Oishi, éléments sonores
Daniel Burke / Illusion of Safety, musique additionnelle (Dissenting Voices, extrait de Water Seeks Its Own Level, Finite Material Context / Silent Record, 1994)
Rihoko Sato, assistante du chorégraphe
Sergio Pessanha, assistant lumières
Kazuomi Kurosawa, assistant technique
Aurélie Dupont, Jérémie Bélingard, Nicolas Le Riche
Darkness is hiding black horses (création)
Trisha Brown, chorégraphie (1979)
Robert Rauschenberg, photographies, scénographie et costumes
Beverly Emmons, lumières
Lisa Kraus, Carolyn Lucas, assistantes de la chorégraphe
Laurence Laffon, Caroline Robert
Letizia Galloni, Juliette Hilaire, Miho Fuji
Glacial Decoy
Chant traditionnel géorgien et madrigaux de Carlo Gesualdo (IV et XVII du livre VI), Claudio Monteverdi (extraits du IIe et IIIe livres)
Jiří Kylián, chorégraphie
Michael Simon, scénographie et lumières
Joke Visser, costumes
Patrick Delcroix, assistant du chorégraphe
Kees Tjebbes, assistant technique et réalisation lmières
Images en direct réalisées par le Service vidéo de l'Opéra
Maud Gnidzaz, soprano
Hannah Morrison, soprano
Lucile Richardot, contralto
Sean Clayton, ténor
Lisandro Abadie, baryton basse
Stéphanie Leclerq, contralto (chant grégorien)
Marcio Soares Holanda, ténor (chant grégorien)
Julien Neyer, baryton basse (chant grégorien)
Les Arts Florissants
Paul Agnew, direction musicale
Eleonora Abbagnato, Vincent Chaillet
Alice Renavand, Stéphane Bullion
Doux mensonges
Je me suis beaucoup ennuyé en regardant les deux premiers ballets. Certes, Nicolas Le Riche a dansé dans le ballet de Teshigawara, mais ce n'est pas en soi suffisant pour rendre une chorégraphie intéressante. La création de ce ballet a été très froidement accueillie par le public. Je n'ai pas du tout accroché à Glacial Decoy de Trisha Brown, mais pour sauver ce programme de ballet, il y avait heureusement Doux mensonges de Jiří Kylián dans lequel deux couples évoluent entre la scène et les sous-sols de Garnier, tandis que des chanteurs des Arts Florissants interprètent de magnifiques madrigaux.
2013-12-09 09:57+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Culture indienne — Dhrupad
Il n'arrive pas vraiment en avance, mais voici le vite dit de septembre, un mois au cours duquel outre les spectacles mentionnés ci-dessous j'ai aussi eu l'occasion de voir la magnifique danseuse Janaki Rangarajan :
Salle Pleyel — 2013-09-01
Berliner Philharmoniker
Sir Simon Rattle, direction
La Nuit transfigurée, op 4, version pour orchestre à cordes de 1943 (Schönberg)
Barbara Hannigan, soprano
Trois Fragments de Wozzeck, pour voix et orchestre (Berg)
Le Sacre du Printemps, édition révisée de 1947 (Stravinski)
Formidable concert ! Grâce à un ami, j'ai pu assister à ce concert de l'Orchestre Philharmonique de Berlin. Les solos des musiciens de l'orchestre étaient magnifiques, mais collectivement, l'ensemble n'était qu'excellent, alors qu'avec un orchestre de cette réputation, je m'attendais à ce que ce soit inoubliable. Je n'ai pas autant vibré pendant La Nuit transfigurée que lorsque j'avais vu Pierre Boulez la diriger. Tel moment palpitant (autour de la mesure 100) sous la direction de Boulez me paraissait tout plat avec Simon Rattle, comme s'il n'avait pas lu le Molto rit.. En revanche, quel plaisir d'entendre Barbara Hannigan interpréter Berg avec une telle beauté de chant, une aussi remarquable technique et une si grande conviction !
⁂
Salle Pleyel — 2013-09-12
Philippe Aïche, violon solo
Orchestre de Paris
Paavo Järvi, direction
Orages, ouverture de concert pour orchestre, op. 93, Bechara El-Khoury
Janine Jansen, violon
Concerto pour violon nº2 (Prokofiev)
Mélodie (Tchaikovski)
Mari Eriksmoen, soprano
Max Emanuel Cencic, contre-ténor
Ludovic Tézier, baryton
Chœur de l'Orchestre de Paris
Lionel Sow, chef de chœur
Maîtrise de Paris
Patrick Marco, chef de chœur
Carmina Burana, “Cantiones profanae” pour soprano, ténor, baryton, chœur mixte, chœur d'enfants et orchestre, Carl Orff.
Comme je m'étais rendu compte du fait que je n'aurais sans doute pas d'autre occasion d'entendre Janine Jansen cette année, j'avais réservé une place pour ce concert un peu au dernier moment, et une opportunité d'assister à ce concert depuis le tout premier rang s'est présentée. Je n'ai pas été déçu ! Je ne saurais dire si je l'ai préférée à Lisa Batiashvili. Elles ont toutes les deux été magnifiques dans ce concerto nº2 de Prokofiev ! A priori, je me serais bien dispensé d'écouter Carmina Burana, mais j'ai bien fait de ne pas partir à l'entr'acte. L'orchestre et le chœur étaient en très bonne forme, mais mon plus grand plaisir est venu des solistes, Max Emanuel Cencic, Ludovic Tézier et surtout Mari Eriksmoen dont le chant d'extase, cette redoutable acrobatie vocale, m'a paru superbe.
⁂
Opéra Garnier — 2013-09-19
Yann Beuron, Admète
Sophie Koch, Alceste
Jean-François Lapointe, Le Grand Prêtre d'Apollon
Franck Ferrari, Hercule
Stanislas de Barbeyrac, Evandre/Coryphée ténor
Marie-Adeline Henry, Coryphée soprano
Florian Sempey, Apollon/Un Héraut/Coryphée basse
François Lis, Une Divinité Infernale/L'Oracle
Manuel Nunez-Camelino, Coryphée Alto
Marc Minkowski, direction musicale
Olivier Py, mise en scène
Pierre-André Weitz, décors et costumes
Bertrand Killy, lumières
Pierre Dumoussaud, chef de chœur
Chœur et Orchestre des Musiciens du Louvre-Grenoble
Alceste, Gluck
Mise en scène sobre d'Olivier Py avec décors et costumes en noir et blanc. Les décors sont dessinés en direct à la craie par des artistes dont les noms ne sont scandaleusement pas mentionnés dans la feuille de distribution. Quelques très beaux moments choraux. Des musiciens du Louvre-Grenoble plutôt inspirés. De très bons chanteurs (notamment les quatre coryphées). Alors que ma place ne me permet pas d'apercevoir les surtitres, je m'étonne de comprendre presque tout le texte (racontant le mythe assez peu exaltant d'Alceste). Le point noir de la distribution est Sophie Koch, dont le français chanté est incompréhensible. (Même en me contorsionnant pour voir les surtitres, ce que je lis ne semble pas correspondre à ce que j'entends.)
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Cité de la musique — 2013-09-20
Alexandre Astier, écriture et interprétation
Jean-Christophe Hembert, mise en scène
Seymour Laval, scénographie, lumières
Anne-Gaëlle Daval, costumes
François Vatin, création son
Jean-Charles Simon, voix
Rémi Vander-Heym, régie lumières
François Vatin, régie son
Yannick Bourdelle, régie plateau
Thierry Cabecas, régie
Que Ma Joie Demeure !
J'ai été content d'assister à ce charmant spectacle musical d'Alexandre Astier autour de la vie de Bach. Malheureusement, j'avais eu l'occasion de visionner quelques extraits du spectacle et connaissais donc déjà pas mal de gags, ce qui gâche un peu le plaisir...
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Cité de la musique — 2013-09-27
Ensemble Intercontemporain
Matthias Pintscher, direction musicale
Fuga (ricercata) a 6 voci, extrait de L'Offrande musicale, BWV 1079, Johann Sebastian Bach/Anton Webern
Claire Booth, soprano
Gordon Gietz, ténor
Gilbert Nouno, Carl Faia, réalisation informatique musicale IRCAM
Franck Rossi, ingénieur du son IRCAM
Two Interludes and a Scene for an Opera (Jonathan Harvey)
Pierre Strauch, violoncelle
Sonate pour violoncelle seul (Bernd Alois Zimmermann)
Bereshit (Matthias Pintscher)
Je garde deux souvenirs de ce concert. Le premier concerne les extraits d'un opéra de Jonathan Harvey intitulé Wagner Dream et inspiré par le projet de Wagner de composer un opéra Vainqueurs sur un thème bouddhiste. À la scène peu exaltante faisant intervenir Prakriti et Ananda j'ai nettement préféré les interludes orchestraux qui l'entouraient. L'autre souvenir est celle de la Sonate pour violoncelle seul de B. A. Zimmermann. J'y ai rencontré une des limites de mes possibilités d'écoute de la musique contemporaine. En la voyant, j'ai eu l'impression d'assister à une séance de torture de violoncelle par Pierre Strauch (qui n'utilisait pas son instrument design habituel). Mon écoute était complètement perturbée par cette vision. Quand j'ai écouté l'enregistrement sonore lors d'une diffusion sur France Musique, l'œuvre et l'interprétation m'ont paru bien plus agréable à écouter...
Ailleurs : Bladsurb.
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Théâtre des Champs-Élysées — 2013-09-29
Emmanuel Pahud, flûte
Maja Avramovic, violon
Joaquín Riquelme García, alto
Stefan Koncz, violoncelle
Quatuor avec flûte en ut majeur, KV 285B, Mozart
Sonata a quattro nº2 en la majeur, Rossini
Quatuor avec flûte en sol majeur, KV 285A, Mozart
Sonata a quattro nº1 en sol majeur, Rossini
Quatuor avec flûte en ré majeur, KV 285, Mozart
Ravissant concert de musiciens berlinois autour du flûtiste Emmanuel Pahud ! La grande découverte de ce concert a été pour moi celle du violoncelliste Stefan Koncz (qui a fait l'objet d'une chouchouscopie du Klariscope). Avec ses merveilleux et variés pizz. et son entente avec les autres musiciens, il a contribué à faire de la Sonata a quattro nº2 de Rossini le point culminant de ce concert.
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Chez Véronique — 2013-09-29
Nirmalya Dey, chant dhrupad
Céline Wadier, tampura, chant dhrupad
Gérard Hababou, pakhawaj
Raga Multani
Raga Malkauns
Nirmalya Dey, un des tout meilleurs chanteurs de dhrupad était présent à Paris pour un concert donné dans un appartement où une foule de spectateurs s'étaient rassemblés (soit une petite cinquantaine). Quelques jours avant, j'ai eu la chance de pouvoir prendre un cours particulier avec lui sur le Raga Puriya (et ce ne sera sans doute pas le dernier...). J'ai tout particulièrement aimé ses Alap. Quand j'écoute de la musique classique occidentale, même sans avoir une connaissance préalable de l'œuvre jouée, il m'arrive très souvent de m'attendre à ce qui se passe quelque chose d'assez précis, comme la reprise d'une phrase, une montée ou une baisse de tension ou plus simplement la fin d'un morceau ; dans les secondes qui suivent, je suis soit flatté quand la prédiction s'avère juste soit surpris quand le compositeur avait prévu autre chose. Je commence à avoir entendu et pratiqué assez le chant dhrupad pour commencer à avoir de telles attentes, même dans les sections improvisées qui constituent un Alap. J'ai ainsi eu le sentiment que Nirmalya Dey cherchait parfois à créer une attente chez l'auditeur, notamment dans sa façon de jouer les notes proches des notes très stables comme Sa (tonique) ou Pa (dominante). Le premier Raga (Multani) comportait un Tivra Ma et un Shuddh Ni (respectivement un demi-ton en dessous du Pa et du Sa). Dans son exploration du Raga, le chanteur est resté plusieurs fois de façon prolongée sur ces notes qui ne sont pas les plus consonnantes, créant une tension qu'il pouvait libérer en finissant sa phrase avec la note très consonnante voisine ou au contraire prolonger en redescendant sur des notes plus basses avant de prochains assauts. J'ai pris un certain plaisir à voir mes attentes surprises ou au contraire contrariées.
Je crois me souvenir que la composition sur la Raga Multani était en Chautal (12 temps). Ce même Tala était utilisé dans la première composition sur le Raga Malkauns, que je n'ai pas reconnu avant que le chanteur ne commence une deuxième composition Shankara Girija Pati (Sultal, 5 ou 10 temps suivant comment on compte...) que je connaissais pour l'avoir un tout petit peu pratiquée.
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Opéra Bastille — 2013-09-30
Ricarda Merbeth, Emilia Marty
Atilla Kiss-B, Albert Gregor
Vincent Le Texier, Jaroslav Prus
Jochen Schmeckenbecher, Dr Kolenaty
Andreas Conrad, Vitek
Andrea Hill, Krista
Ladislav Elgr, Janek
Ryland Davies, Hauk-Sendorf
Susanna Mälkki, direction musicale
Krzyzstof Warlikowski, mise en scène
Małgorzata Szczęśniak, décors et costumes
Denis Guéguin, vidéo
Felice Ross, lumières
Miron Hakenbeck, dramaturgie
Alessandro Di Stefano, chef du chœur
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
Věc Makropoulos, Janáček
Le livret de cette Affaire Makropoulos m'a paru assez confus. La belle mise en scène de Krzyzstof Warlikowski qui transpose ce cas dans le monde du cinéma n'aide pas vraiment à caractériser les différents personnages secondaires. Je m'attendais à apprécier la musique puisqu'il s'agit d'un opéra de Janáček, mais je ne pensais pas prendre un tel plaisir à l'écoute de l'Orchestre de l'Opéra. Mille mercis à Susanna Mälkki pour son exaltante direction musicale !
2012-07-19 18:24+0530 (কলকাতা) — Culture — Musique — Culture indienne — Dhrupad — Voyage en Inde XI
Ce mercredi était une date que j'avais notée soigneusement dans mon agenda avant de partir en Inde. J'avais bien fait puisque les concerts de la ITC Sangeet Research Academy n'étaient pas annoncés dans le journal. J'avais repéré les lieux la veille, ce qui me donna l'occasion de signer le registre d'entrée de l'académie pour pouvoir demander à l'accueil dans quelles conditions avaient lieu les concerts que je ne voulais manquer sous aucun prétexte : pas la peine de réserver à l'avance, c'est gratuit.
Dans la journée, je me suis contenté de marcher autour de M. G. Road (oups, je commence à prendre cette mauvaise habitude indienne de réduire le nom des rues à leurs initiales, ici celles de Mahatma Gandhi). J'observe encore une fois la spécialisation de certains quartiers tout entiers dans un type de commerces ou de travaux. Un de ceux-là est dédié au recyclage des boîtes métalliques destinées à contenir de l'huile de moutarde. Dans College Street, près de l'université, il n'y a que des librairies et des bouquinistes à perte de vue. Je déjeune à l'Indian Coffee House. L'escalier qui y mène est franchement miteux, mais la grande salle du premier étage est plus accueillante. Malgré l'interdiction, les jeunes gens y fûment. Les étudiants qui partagent ma table ont l'air de parler de littérature. Manifestement, c'est aussi un lieu de rendez-vous pour jeunes amoureux.
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ITC Sangeet Research Academy, Kolkata — 2012-07-18
Sanchita Chowdhury, chant dhrupad
Apurbalal Manna, pakhawaj
Raga Yaman (Tivra tal)
Raga Behag (Dhamar)
Raga Shankara (Sultal)
Je suis le premier à m'asseoir sur la moquette de la salle de spectacle de l'ITC Sangeet Research Academy qui se remplira complètement dans les minutes précédant le début de premier concert, les hommes et les femmes étant séparées par l'allée centrale. Je suis donc au premier rang pour écouter la chanteuse de dhrupad Sanchita Chowdhury qui a commencé à étudier avec son père Pandit Amar Nath Dey et qui poursuit son travail avec Ustad Fariduddin Dagar. Le moins que l'on puisse dire est que le public est connaisseur. Quelques éminents membres de l'académie s'installent en effet entre le public et l'estrade. Je crois reconnaître Arshad Ali Khan et bien sûr Uday Bhawalkar.
La chanteuse a réglé sa shrutibox Radel sur le la (grave) et est
accompagnée par deux tampuras d'hommes et un tampura de femme (plus petit)
actionnés par un jeune homme et deux jeunes femmes. Le raga principal est
Yaman. La chanteuse doit malheureusement s'interrompre assez fréquemment
pour tousser. J'apprécie tout particulièrement son Alap. J'aurai un peu
plus de mal à rentrer dans la composition dédiée à Shiva (Mahadev
)
du fait de ma difficulté à sentir le tala à 7 temps.
Je perçois un peu mieux les temps forts de la composition suivante sur
le Raga Behag dont je n'ai compris qu'un seul mot : Jamuna
. Le
premier et le sixième temps de ce tala Dhamar sont particulièrement
accentués par la chanteuse et le percussionniste (qui insiste pour ne pas
être appelé Pandit
). Curieusement, je n'éprouve pas la même
sensation lors du onzième temps.
Le concert se terminera avec une bonne demi-heure de retard avec une
composition sur un rythme rapide à cinq temps (Sultal), le thème étant
Ganapati
. Il m'est difficile de revenir plus en détail sur ce
concert qui m'a beaucoup plu puisque comme me le dira mon voisin qui
assiste à ces concerts du mercredi depuis les années 1980, en chantant
Behag après Yaman, puis Shankara après Behag, la chanteuse chasse les
impressions suscitées par le raga précédent, d'autant plus qu'après un
court entr'acte, un autre chanteur va monter sur scène...
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ITC Sangeet Research Academy, Kolkata — 2012-07-18
Pandit Uday Bhawalkar, chant dhrupad
Apurbalal Manna, pakhawaj
Raga Bageshri (Chautal)
Alors qu'il y a au plus trois personnes dans la salle comble qui n'entendent peut-être pas le bengali ou le hindi, le directeur de l'académie Ravi Mathur fait un petit discours pour présenter deux étrangers qui mènent des recherches à l'académie : l'uruguyao-chilien Victor et l'américaine Amy qui prépare un rapport sur l'enseignement de maître à disciple (Guru-shishya) qui est pratiqué à l'académie. Il annonce aussi que Pandit Uday Bhawalkar sera dorénavant un des gurus enseignants à l'académie (10 jours par mois). Les tampuras de ses disciples (une jeune femme et un jeune homme aveugle) étant accordés, Pandit Uday Bhawalkar prononce un bref discours dans un hindi suffisamment simple pour que j'aie l'impression de comprendre. Il est très heureux d'enseigner à l'académie et de donner ce concert dans lequel il va interpréter le Raga Bageshri.
Que dire à propos de ce concert !? C'ést évidemment pour moi un des tout meilleurs concerts de l'année (voire davantage). Il m'a autant ému que les deux fantabullissimes concerts vécus depuis janvier (Janáček par Grimal et al., la Pastorale de Beethoven par le COE). C'est aussi comme lire Pagli, le chef d'œuvre d'Ananda Devi.
Je ne suis aucunement malheureux que ce concert se soit réduit à un seul Raga (25 minutes d'Alap, une partie rythmique de 35 minutes et une composition faisant un peu moins d'un quart d'heure).
Dans son Alap, Uday Bhawalkar navigue entre les notes du raga Bageshri
(dont je n'ai pas deviné les altérations
). Les phrases sont incroyablement longues. Dans une même phrase,
il peut inclure de longues notes tenues, des glissandis très étendus dans
le temps et qui font imperceptiblement passer d'une note à une note
voisine. À cela peuvent s'ajouter des allers-retours entre deux notes, une
plongée dans le grave et bien d'autres figures, toutes accompagnées par une
fascinante gestuelle des deux mains (cf. cette vidéo dans
laquelle il chante le Raga Gunkali). La continuité de l'ensemble est
impressionnante. Des syllabes différentes peuvent comme se fondre l'une
dans l'autre dans un même élan.
La plus longue des trois grandes parties du Raga est celle dans laquelle le chanteur fait entrer une pulsation rythmique dans son chant (et dans son genou gauche).
Je ne suis pas mécontent de savoir clapper Chautal pour mieux apprécier
la composition Hare Raghubir
qui conclut magnifiquement ce concert !
Elle est manifestement dédiée à Rama, le héros du Rāmāyaṇa puisqu'outre le
nom Raghubir, j'ai distinctement entendu les noms de lieux Ayodhya et Lanka
ainsi que les noms de personnages Sita, Shatrughna et Vibhishana. Ayant une
tendresse toute particulièrement pour Rāmāyaṇa j'ai naturellement adoré
cette composition notamment pour la reprise des mots Hare Raghubir
au début de certains cycles rythmiques venant parachever l'improvision
ayant précédé avec une très longue syllabe Ha
. Si le cycle à 12
temps était fixe, le tempo utilisé était très variable d'un cycle à
l'autre : je n'avais jamais remarqué cela auparavant ! Je me demande comment
le chanteur et le percussionniste font pour se coordonner ou s'il y a là
une sorte de jeu de questions et réponses ou de défi
lancé par le
percussionniste au chanteur ?
⁂
J'ai les chevilles quelque peu engourdies après avoir été assis au même endroit pendant plus de trois heures. Il commence à être tard pour dîner, certains restaurants étant déjà fermés. Je quitte Tollygunge pour Park Street où je continue mon exploration des restaurants bon marché. On ne mange pas mieux dans un restaurant à 500 roupies que dans un restaurant à 100 roupies, à mon avis. Un de ces restaurants sert de savoureux plats simples, j'ai déjà testé le Chana Masala et le Dal Makhani).
Le métro fermant autour de 22h, je marche pour la première fois depuis le début de ce voyage entre Park Street et Chandni Chowk, passant ainsi devant la mosquée Tipu Sultan.
Série de photographies : 2012-07-18, Kolkata.
2012-06-08 21:00+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Culture indienne — Dhrupad
J'ai commencé à prendre des cours de chant dhrupad en février. J'ai déjà décrit mes impressions à chaud après un premier cours et une journée de stage.
Pour le moment, en cours, nous faisons essentiellement trois types d'exercices. Le premier type d'exercice, que nous faisons toujours en début de séance consiste à bien assimiler les notes de la gamme, en montant, en descendant ou en faisant quelques détours, toujours en prononçant le nom des notes : Sa, Re, Ga, Ma, Pa, Dha, Ni, Sa. Cela peut être dans le mode majeur standard, la seule différence étant que les notes ne sont plus appelées do, ré, mi, fa, sol, la, si, do ; cela peut aussi être dans un raga spécifique (depuis quelques semaines, c'est Bhairav, cf. le billet de Klari sur le concert de Nirmalya Dey). Un autre type d'exercice consiste à reproduire des phrases musicales qui pourraient faire partie d'un Alap. Pour le moment, ces phrases font rarement intervenir plus de trois ou quatre notes, mais il faut faire particulièrement attention au phrasé et dans la phase d'écoute, il faut aussi s'entraîner à reconnaître les notes. Je suis loin d'être au point de ce côté-là, mais il y a du progrès : cela me fait un peu moins paniquer maintenant qu'au tout début.
Le troisième type d'exercice consiste en le fait de travailler une composition de dhrupad, sans chercher à improviser, pour le moment... La première que nous avons étudiée est dans le Raga Yaman. Le Ma est un Tivra Ma (noté ma). Autrement dit, le fa est remplacé par un fa# et c'est la seule altération. Pour autant, il ne faut pas croire que c'est un morceau en sol majeur, pas plus qu'en mi mineur (consultez votre musicien-musicologue préféré pour plus de détails sur les modes).
Voici une retranscription (approximative) en devanagari d'une transcription latine du texte en Braj Bhasha (une langue proche du hindi) :
भज मन करुणा निधान
सुखसँ पद एकदम
शरण गत वत्सल प्रभु
पूराता सब मन सुखाम
Vu les quelques mots que je puis trouver dans mon dictionnaire de hindi, il est manifestement question d'une divinité importante (Krishna ?), qui n'est toutefois pas explicitement nommée.
Quand je travaille cette composition tout seul, j'aime bien savoir si
les notes que je chante sont en quelque sorte corrélées avec les notes
prévues... En faisant l'acquisition de mon piano électrique, j'avais acheté
un métronome (électrique aussi). Je désespère d'arriver à faire honneur à
la vocation première de ce gadget. J'utilise en effet bien davantage son
autre fonction Tuner
, qui est en fait double. L'engin peut d'une
part jouer un son pur à une certaine hauteur et d'autre part reconnaître la
note que quelque quidam jouerait à proximité ; c'est cette
dernière fonction que j'utilise. Une belle lumière
verte s'allume quand la note est juste ; sinon, des flèches indiquent dans
quel sens on joue faux. Cela ne fonctionne pas trop mal avec ma voix.
Cependant, quand je tiens une note un certain temps, l'appareil détecte la
bonne note au début, puis tend à afficher la note située une quinte
au-dessus. Autrement dit, l'appareil entend un peu trop les
harmoniques...
Même si je ne suis pas expert en traitement du signal, je sais ce qu'est une transformée de Fourier, donc je me suis décidé à faire un petit programme affichant non seulement la note jouée, mais la courbe parcourue dans le temps ! puisque comme je l'avais remarqué lors du stage de début février, en chant dhrupad, la courbe est tout sauf anguleuse. Voici ce que cela donne quand je chante :
(Stricto sensu, je n'ai pas représenté la courbe mais une suite de points...)
Le temps s'écoule vers la droite, les notes les plus hautes sont en haut. Les lignes horizontales correspondent aux notes du raga (dont j'ai indiqué à gauche les noms). La fondamentale (Sa) est en rouge. Une quinte au-dessus, le Pa est en bleu. Les autres notes sont en pointillés (entre deux notes consécutives, les intervalles font ici soit un demi-ton soit un ton, mais cela peut être différent dans d'autres ragas, et dans ce Raga Yaman, on peut signaler que la gamme ascendante commence par le Ni et passe directement au Re en omettant le Sa, ce qui fait un intervalle d'un ton et demi...). Le Sa de base est pour moi à peu près une octave en dessous du do du milieu du clavier (là, il se trouve que c'était un si, peu importe, ça doit être mon côté baroqueux). Sous le graphique, j'ai mis une transcription approximative de ce que j'essaie de chanter (le Sa étant représenté par un do). La portée et le graphique sont vaguement alignés. Le tala est ici Chautal. C'est un cycle à 12 temps dont j'ai représenté en pointillés sur la portée les subdivisions en trois parties représentant chacune quatre temps. (Chaque temps doit faire environ 1 seconde et demie.)
Au début des cours, en première approximation, dans le karuna
du
milieu, on ne chantait que les notes ma-ma-pa.
Plus d'une fois sur deux, la proximité entre les deux notes faisait que je
tombais directement sur le pa. Progressivement, j'ai pu faire la petite
glissade du ma vers le ga.
La note suivante sur la syllabe ru
est très ornementée aussi, je ne
saurais même pas comment la noter sur la partition. La hauteur monte un peu
jusque vers le pa, puis on est censé se poser sur le ma. On peut voir ici que je me
suis posé un peu trop haut. (Presque tous les ma que vous verrez plus bas seront
un peu faux aussi, chacun différemment.)
Dans le dernier tiers du cycle, on a un petit glissando du ma vers le ga. Au début, je le faisais un peu vite, maintenant je peux le faire durer un temps comme ci-dessus comme le fait la prof sur l'enregistrement qu'elle nous a envoyé.
Dans le premier tiers de ce deuxième cycle, la syllabe sam
est
nasalisée et il faut glisser en faisant attention à s'arrêter sur le ma avant de se reposer
tranquillement sur la rassurante note pa. Il faut en effet attaquer une
phrase rigolote sur le mot ekadama
où l'on ne s'arrête pour ainsi
dire pas de glisser d'une note à une autre...
Ici aussi, la notation est imparfaite. La double glissade ga-re-ga ne
concerne semble-t-il que la voyelle a de la syllabe na
, le n
devant être à une hauteur que je ne suis pas sûr de bien saisir (ni, ou
sa ?).
Encore un ma un peu faux avant de jouer aux montagnes russes sur les notes aiguës.
(Si vous voulez voir la courbe toute entière, cliquez-ici. Ceci vaut aussi pour les quatre portées de la partition.)
2012-05-18 10:47+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Culture indienne — Dhrupad
La maison des couleurs — 2012-05-17
Nirmalya Dey, chant dhrupad
Céline Wadier, tampura, chant dhrupad
Pandit Mohan Shyam Sharma, pakhawaj
Raga Adbhut Kalyan
Raga Abhogi
Raga Sohini (“Adi Shiva”)
J'assistais ce soir à mon cinquième concert de dhrupad, après les Gundecha Brothers, Wasifuddin Dagar (!), Sayeeduddin Dagar et Arnaud Didierjean. Le concert de ce soir (non amplifié !) avait lieu dans une belle demeure, “La maison des couleurs”.
Ce concert de Nirmalya Dey est certainement un des deux meilleurs concerts de dhrupad auxquels j'aie assisté, l'autre étant celui de Wasifuddin Dagar. Si dans le cas de ce dernier, le plaisir avait été le plus intense pendant les parties improvisées élaborées autour de la composition, lors du concert de ce soir, ce seront les autres parties qui me procureront le plus d'agrément.
Le premier raga est Adbhut Kalyan. On trouve aussi
l'orthographe sans le h, qui est me semble-t-il une mauvaise transcription
de अद्भुत
कल्याण. Klari saura sans doute mieux que moi
expliquer pourquoi ce Raga de la famille Kalyan est merveilleux,
étonnant, remarquable, étrange, surnaturel
(d'après mon dictionnaire de
hindi). En effet, mes capacités pour reconnaître les notes à l'oreille sont
pour le moment assez limitées : si cela sonne drôlement bien, c'est un
Sa, un Pa ou à la rigueur un Ma (do, sol ou
fa) ; la semaine dernière, en cours de dhrupad, j'ai même pris un
Ga (mi) pour un Sa. Hors contexte, pour distinguer entre
le Sa et le Pa, j'ai encore un peu de mal... En savoir
plus sur ce Raga avant d'aller au concert m'aurait évité de me poser des
questions, puisque comme le disait Klari à la sortie du concert, il n'y a
ni Ma ni Pa dans ce raga. Et effectivement, d'après mes appareils de mesure, sur
la vidéo ci-liée,
la vînâ (accordée en la) de Bahauddin Dagar n'utilise que les notes
Dha-Ni-Sa-Re-Ga (non altérées) pendant son Alap sur ce Raga Adbhut
Kalyan. (Ananth, le fils d'un collègue indien qui m'accompagnait,
m'expliquait qu'un autre chanteur, Uday Bhawalkar, lui avait dit après un
concert à Chennai qu'il décidait parfois au tout dernier moment le raga
qu'il chanterait, au moment même d'accorder le tampura ! J'espère qu'un
jour j'arriverai à entendre en concert un raga que j'aurai déjà un peu
pratiqué...)
Pour revenir au concert de ce soir, j'ai beaucoup apprécié l'Alap de Nirmalya Dey. J'aime sa façon de prendre son temps, de caresser les notes avec douceur, de passer le relais à Céline Wadier (ma prof). J'apprécie la continuité de l'ensemble puisqu'à plusieurs reprises j'ai eu l'impression qu'il commençait sa phrase sur la note qu'elle avait chantée en dernier. J'aime sa façon de chanter les notes aiguës en les nasalisant à divers degrés (la bouche étant plus ou moins fermée). On entend assez peu de pppp, la subtilité passant davantage par le mouvement mélodique que par les nuances extrêmes. Si les syllabes chantées sont comme toujours un peu les mêmes (Re-Ne-Na, Ri-Na...), il arrive souvent à surprendre, par exemple en retardant la dernière syllabe, créant une attente qui est apaisée pour l'auditeur qui sait être tout petit peu patient. Il surprend aussi parfois en introduisant un petit Gamak, une sorte d'accent apparemment obtenu en plaçant sa langue d'une façon particulière (palatalisation ?). (Cela n'a aucun rapport avec les ornementations aussi appelées Gamakas dans le chant carnatique, celles-ci consistant en une oscillation de faible amplitude de la hauteur de la note autour de la note juste.)
À la fin de l'Alap est intervenue une section dans laquelle un rythme s'insinue dans le chant. Les interventions de Nirmalya Dey et Céline Wadier utilisent le même type de rythmes, mais du point de vue mélodique, il me semble qu'ils font tous les deux des choses assez différentes. Le contraste est assez intéressant. C'est une des parties du concert que j'ai aussi beaucoup appréciées. Ce type de section rythmique (Jor) est à rapprocher du Tanam de la musique carnatique (cf. mon compte-rendu d'un récent concert d'Aruna Sairam), lequel Tanam intervient après le Ragam Alapana et avant la composition (Pallavi). Finalement, il y a donc une certaine unité entre les styles classiques de musique du Nord et du Sud de l'Inde... Une différence cependant, de taille : un long développement de musique carnatique dépasse rarement la demi-heure, tandis que le premier développement de dhrupad de Nirmalya Dey a fait 1h20...
Ce premier raga s'est terminé avec une composition sur un cycle standard à douze temps joué par le percussionniste Mohan Shyam Sharma (que j'avais déjà vu accompagner Wasifuddin Dagar et Sayeeduddin Dagar). J'apprécie le tempo lent de cette composition, la façon dont le chanteur arrive à l'heure à la fin des cycles rythmiques et la conclusion paisible de la composition par évanouissement du son (très élégant) du pakhawaj. J'éprouve cependant quelques difficultés à être tout à fait enthousiasmé par cette composition peu développée, le son du percussionniste étant aussi un peu trop fort pour que je puisse entendre dans les meilleures conditions la voix du chanteur. (N'ayant pas assisté à des concerts de dhrupad ces derniers temps, je suis presque surpris de ne pas entendre d'improvisations de type sargam dans lesquelles le chanteur prononce le nom des notes. Cette forme d'improvisations, très présente dans la musique carnatique et dans le khyal, serait donc absente du dhrupad.)
Je préfèrerai la deuxième composition sur le Raga Abhogi. Ce développement (omettant la section Jor) fera environ 35 minutes. Le cycle rythmique est cette fois-ci un peu plus tordu : 14 temps, qui se divisent apparemment en 5+5+4. Il me faut quelques minutes avant d'être certain d'avoir saisi la structure, mais j'apprécie d'autant mieux la suite !
Le concert s'est terminé par une dernière composition commençant par les mots Adi Shiva et précédée d'une courte improvisation vocale de forme assez libre. Le texte fait manifestement référence à Shiva, dont le nom Parameshwara sera aussi prononcé. Quelques autres divinités comme Sarasvati (et peut-être Hanuman) seront également mentionnées. Le rythme est beaucoup plus rapide. J'ai donc tendance à considérer que chaque temps compte en fait pour ½, et je perçois une structure qui avec la convention habituelle de ce blog serait décrite comme 2½+2½, chaque moitié du cycle comptant pour 2½ étant divisée en 5, ce cycle de 5 ne comprenant que 3 frappes franches. Ce que j'entends, c'est donc ...+1+1+½+1+1+½+1+1+½+... que j'aurais arbitrairement tendance à parenthéser comme ...+(1+1+½)+(1+1+½)+(1+1+½)+... À la sortie du concert, je me disputaille en mode dialogue de sourds avec Djac Baweur qui me dit que ce que je clappe est un rythme à 7 temps, euh... Après une manœuvre de conciliation de Klari, il apparaît que nous étions en fait d'accord, mais qu'un meilleur parenthésage serait plutôt ...+1)+(1+½+1)+(1+½+1)+(1+½+... En bon mathématicien, j'avais la bonne période de la fonction ; quant à savoir où commence véritablement le cycle, c'est une affaire trop sérieuse pour être abordée par les non-musiciens...
Ailleurs : Klari.
2012-02-05 13:38+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Culture indienne — Dhrupad
Klari est formidable. Je me souviens que lorsque je l'ai rencontrée à l'occasion d'un concert Colonne, alors que nous nous installions à nos places, elle me disait qu'elle avait commencé à faire du chant dhrupad. Je ne sais plus très bien ce que je dis alors, mais à l'époque, ma seule expérience du dhrupad était le concert des Gundecha en clôture des vingt-quatre heures du râga et j'en avais plutôt un mauvais souvenir. Peut-être avais-je dit que j'avais cependant eu un gros déclic avec la musique de l'Inde du Nord : le récital de chant Gaayatri Kaundinya à Kolkata quelques mois auparavant m'avait fait apprécier ce type de musique. Il ne s'agissait pas de dhrupad, mais de khyal, qui est une forme de musique vocale plus répandue que le dhrupad.
Et puis, en juin 2011, elle m'a suggéré d'aller écouter Wasifuddin Dagar (cf. nos billets respectifs). Dans la foulée, il y eût le concert de Sayeeduddin Dagar. Après ces deux concerts, il était clair que le dhrupad me plaisait...
⁂
Le temps passe. Parfois, lors d'une discussion d'avant ou d'après concert, Klari me raconte à quel point le dhrupad lui plaît. Je laisse passer une ou deux occasions d'assister à des concerts. Et puis, elle m'annonce une conjonction favorable : sa prof va commencer un nouveau cours et organiser un stage d'initiation avec sa propre prof le week-end qui suit. Hop, je téléphone et je m'inscris. Quelques semaines se passent...
Mercredi dernier, pendant le premier cours (où nous sommes deux élèves),
nous commençons à étudier le Raga Yaman. Rien qu'à
écouter la prof prononcer des phrases musicales pour nous les faire
répéter, j'ai l'impression d'être comme à un concert... et je suis au
premier rang pour entendre le subtil raffinement de ce chant ! Quand il
s'agit de reproduire, la légère tension d'avoir à chanter (jamais fait ça
de ma vie) ajoutée à la froidure subie fait que je dois souvent reprendre
ma respiration très prématurément. Quand les notes sortent, ce ne sont pas
les bonnes, mais ce n'est pour autant pas complètement faux puisque d'après
la prof, je chante des harmoniques. Elle essaie de me guider vers la note
juste en reproduisant ma note puis en faisant du glissando vers la note
Sa
continuellement répétée par son tampura. Quelques exercices
suivent. Certaines ornementations apparaissent. Tiens, une phrase commencée
bouche ouverte se termine progressivement bouche fermée. Tiens, on répète
trois fois la même note mais elle est chantée différemment. Bref, dès la
première heure de cours, on commence déjà à entrevoir certaines directions
qui peuvent être explorées par les chanteurs de dhrupad.
Cela a continué samedi avec le stage d'initiation dirigé la prof de ma
prof. Avant de venir, j'étais loin de m'imaginer à quel point les quelques
heures de ce stage seraient enrichissantes. La prof du jour remarque
immédiatement que je ne chante pas la bonne note et me fait me rapprocher
du tampura de ma prof du mercredi pour que je l'entende mieux. Les
exercices se suivent. On explore la gamme de différentes manières, puis on
commence à travailler quelques phrases d'Alap (Raga Bhimpalasi).
En écoutant les phrases que nous devons répéter, il semble évident que s'il
est possible de faire plein de choses rien qu'avec une ou deux notes. Après
des essais collectifs, chacun des 7 ou 8 élèves répète la phrase seul et la
prof apporte des corrections. De mon côté, j'essaie de faire ce que je
peux. Il faut en effet préciser que je suis le plus béotien des présents,
tous les autres, s'ils sont certes de niveaux très variables, ont suivi des
cours depuis un an minimum... Je prends les remarques et compliments de la
prof pour la part de vérité qu'ils contiennent et surtout pour des
encouragements. Good technique, but wrong notes!
. Chez les autres,
elle va un peu plus loin en soulignant des détails dans les phrasés, et ce
toujours avec bienveillance, expliquant que toutes les variations
involontaires apportées par les élèves sont belles et pourraient être
utilisées, mais il faudrait pour cela qu'elles correspondent à une
intention.
Ces ornementations, donc, de quoi s'agit-il ? Prenez une suite de notes parfaitement justes :
En abscisse, le temps, en ordonnée la hauteur du son. C'est carré, mais c'est affreux. Typique de certaines horreurs entendues depuis quelques années (la première fois que j'ai entendu ça, c'était dans Believe de Cher). Voyez ce que ça donne sur la voix du Président américain.
En vrai, j'imagine que la courbe d'un chanteur normal serait pas mal plus arrondie. Dans le chant dhrupad, j'ai l'impression que non seulement on arrondit mais on réfléchit à la manière d'arrondir :
(PS: pour de vraies courbes tirées d'une composition, voir ce billet.)
De temps en temps, il doit bien y avoir des lignes droites, m'enfin en général tout est courbe et les possibilités sont énormes... et il ne s'agit là que d'un seul des paramètres !
Revenons au déroulé du stage. Nous avons travaillé une composition où ce type de techniques intervenaient. Comme le texte était écrit dans une langue proche du hindi, j'ai pu reconnaître que c'étaient des vers en l'honneur de Krishna. J'en ai eu la confirmation quand la prof a pris le temps d'expliquer le sens de ces vers, un égard que j'ai beaucoup apprécié ! Enfin, le cours s'est achevé paisiblement sur la syllabe ॐ.
À vrai dire, à la fin, j'ai eu un mini-cours particulier, la prof me
faisant travailler toutes les notes de la gamme jusqu'à ce que je les
chante à l'unisson avec elle, et concluant en s'exclamant auprès de la prof
du mercredi : See, the problem is fixed!
. J'ai comme l'impression
qu'il y aura un avant ce samedi 4 février et un après !
⁂
Salle Pleyel — 2012-02-04
Eva-Marie Westbroek, soprano
Orchestre National de Lille
Evelino Pidò, direction
Ouverture des Vêpres siciliennes (Verdi)
Air Tu che le vanità de Don Carlo (Verdi)
Air Ritorna vincitor de Aïda (Verdi)
Ouverture de La Force du destin (Verdi)
Air Pace, pace mio Dio! de La Force du destin (Verdi)
Air Io son l'umile ancella de Adrienne Lecouvreur (Francesco Cilea)
Air Poveri fiori de Adrienne Lecouvreur (Francesco Cilea)
Intermezzo de Manon Lescaut (Puccini)
Air Sola, perduta, abbandonata de Manon Lescaut (Puccini)
Ballet de La Gioconda (Amilcare Ponchielli)
Suicidio! de La Gioconda (Amilcare Ponchielli)
Chanson de Vilja (Lehar)
Air Vissi d'arte de Tosca (Puccini)
J'avais prévu de longue date d'aller ce samedi à la Salle Pleyel pour écouter Eva-Maria Westbroek que j'avais eu l'occasion d'entendre dans Lady Macbeth de Mzensk de Chostakovitch (à l'époque où les classes moyennes pouvaient entrer à l'Opéra Bastille au lieu d'avoir à se contenter de retransmissions au cinéma ; rendez-nous Mortier !). Rarement un concert de musique classique m'aura autant indifféré. C'est probablement dû en partie au fait que je ne connaissais pas ou très mal les airs d'opéra interprétés. J'avais également l'impression que le chef était comme un pantin désarticulé. Pas que les musiciens aient démérités, non, simplement je n'étais pas remis des folles émotions musicales de la journée de dhrupad. J'avais une impression de trop. Trop d'effets sans cause. En particulier, la plupart des œuvres jouées pendant la premières partie étaient fortement atteintes du syndrome de l'hydravion... Et surtout, il n'y avait aucune ornementation comme celles entendues tout au long de la journée. Bref, je me sens tout à coup complètement étranger à cet univers de la musique classique. Heureusement, ce n'est qu'un état transitoire puisque la première partie du récital s'est achevée en m'enthousiasmant grâce à l'air Pace, pace mio Dio! de La Force du destin.
En deuxième partie, j'ai une impression très étrange avec les airs joués. Pas d'hydravion, mais c'est du sucré-émouvant à la sauce Puccini (que je ne déteste pas). Par ailleurs, j'ai l'impression d'entendre des fragments d'opéras découpés à la hache : tous les morceaux joués se terminent au moment précis où la chanteuse finit une phrase.
Dans ce concert, mes plus grandes satisfactions viendront de l'orchestre lors des deux extraits instrumentaux. L'Intermezzo de Manon Lescaut me séduit, notamment grâce au début qui met en valeur des solistes chez les violoncelles, altos et violons. L'œuvre qui me procure un effet tout à fait inattendu est le Ballet de La Gioconda (Ponchielli). Quelle délicieuse musique de ballet ! C'est mignon comme tout, très espiègle, mais cette musique est surtout superbement jouée par l'Orchestre National de Lille !
La chanteuse a interprété deux bis. Le premier était en allemand. Le deuxième était l'air Vissi d'arte de Tosca. Si mes sensations lors de ce concert pâtissent de ma méconnaissance de toute une partie du répertoire opératique et de la juxtaposition avec le dhrupad, au moins, les deux parties de concert se sont achevées sur des airs qui m'ont laissé une très bonne impression !
⁂
Ce matin, il me faut écouter par hasard le duo Wir eilen mit schwachen de la cantate BWV 78 de Bach pour me dire que, quand même, la musique classique europénne, ça peut parfois être presque aussi fin et subtil que le dhrupad !
2011-11-26 12:00+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Culture indienne — Dhrupad
Centre Mandapa — 2011-11-25
Arnaud Didierjean, chant dhrupad
Raga Malkauns
Ce soir, c'était mon quatrième concert de dhrupad après ceux des Gundecha, de Wasifuddin Dagar et de Sayeeduddin Dagar.
La salle du Centre Mandapa n'est pas très remplie. Il y avait une petite vingtaine de spectateurs. Une bonne surprise est que le concert n'est pas sonorisé. Le chanteur Arnaud Didierjean n'est accompagné que de son tanpura (je persiste à en faire un nom masculin puisque c'est le genre de ce mot en hindi). Il explique que le raga Malkauns comporte cinq notes Sa-Ni-Dha-Ga-Ma (drôle d'ordre) et si j'ai bien compris qu'il est permis de faire varier légèrement la hauteur de la note autour de Ni et de Ga.
J'ai eu une petite frayeur pendant la première minute du concert quand le chanteur a utilisé un peu toutes les notes. Ce n'était qu'une petite prière à Ganesh, et il a ensuite commencé son Alap, qui a duré un peu moins d'une heure (très approximativement). Les phrasés sont relativement variés. Les techniques vocales aussi. Celles-ci peuvent se mélanger dans une même phrase musicale. Le chanteur peut prononcer une voyelle, puis nasaliser avec la bouche fermée, puis revenir à la voyelle, et enfin la faire s'évanouir tout doucement, ce qui s'apprécie d'autant plus du fait de l'absence de sonorisation de la voix et du silence presque complet des spectateurs. Par moments, la voix se fait un peu plus forte. J'ai cependant préféré les moments plus doux, comme lors de la fin très apaisée de cet Alap.
Le chanteur a ensuite répondu à quelques questions des spectateurs. Manifestement, beaucoup d'adeptes du yoga et de la quête de spiritualité... (Cela a failli dégénérer à propos de cette religion qui engendre le système de castes. Je ne sais pas ce qui se serait passé s'il avait été précisé que des interprètes et non des moindres de cette musique sont musulmans, comme les Dagar, dont le chanteur de ce soir a d'ailleurs reçu indirectement des enseignements.)
J'ai quand même réussi l'air de rien à poser la question qui fâche sur l'absence de percussions : comme il venait de Lyon, il était compliqué pour le chanteur de travailler avec un percussionniste à Paris... Si l'Alap était très bien, ne pas entendre la composition et l'improvisation sur le rythme prescrit, c'est quand même un peu comme aller à un enterrement en Bretagne et s'en aller avant le goûter de crêpes qui suit.
2011-06-06 00:54+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Culture indienne — Dhrupad
Institut des Cultures d'Islam — 2011-06-05
Ustad F. Wasifuddin Dagar, chant dhrupad
Pandit Mohan Shyam Sharma, pakhawaj
Raga Multani
Raga Bhupali
Deuxième concert de dhrupad de ma vie après celui des Gundecha Brothers à la fin des Vingt-quatre heures du râga en 2008. C'est grâce à Klari que j'ai eu connaissance de ce concert à l'Institut des Cultures d'Islam. Nous n'avons pas très bien compris comment il eût fallu faire pour réserver. Comme c'était gratuit, on a été suffisamment gentil pour nous laisser entrer et nous installer sur des petits coussins au deuxième rang, le public plutôt fourni s'étant assis comme nous sous le dais transparent abritant la scène ou ayant trouvé un banc ou une chaise auprès des tables situées tout autour. Ce sentiment des minutes précédentes de ne pas savoir si je pourrais assister au concert m'a fait penser aux expériences semblables que j'ai faites en Inde : voir le jour-même l'annonce d'un programme potentiellement intéressant dans un lieu inconnu, noter l'adresse, essayer de trouver un moment au cours de la journée pour aller sur Internet pour récupérer des informations éventuelles sur le lieu, passer des coups de fil pour voir si c'est payant ou non, s'il faut réserver avant de venir, estimer le temps nécessaire (voir large) pour s'y rendre, se perdre en chemin, le retrouver et apprécier un concert inoubliable comme celui de Gaayatri Kaundinya lors de mon dernier séjour à Kolkata.
Le chanteur Ustad F. Wasifuddin Dagar sera accompagné par le percussionniste Pandit Sharma (pakhawaj) et de deux tanpuras actionnés par deux femmes. Je n'ai jamais été aussi près de ces instruments, à l'impressionnante caisse de résonance. De plus, bien que nous soyons en plein air dans une cour, la sonorisation, qui mettra un certain temps à être réglée, est très légère. Ceci fait que l'on a pu entendre très clairement le son des tanpuras lorsque l'Ustad les a accordés. Cela doit d'ailleurs être un des premiers concerts de musique indienne sans tanpuras électroniques auxquels j'assiste.
Le raga interprété pendant la première partie du concert est Multani. Avant de commencer, Wasifuddin Dagar a bredouillé une explication pas très nette sur le sens du vers qu'il utiliserait dans la composition. Bien qu'il soit musulman, le vers utilisé provient de la mythologie hindoue. Je comprends juste qu'il est à la fois question de Hari (nom de Vishnu, souvent attribué à son avatar Krishna, qui est aussi appelé Giridhar, celui qui porte la montagne (pour protéger les bouviers des pluies diluviennes déclenchées par Indra à ceux qui ne voulaient pas lui rendre de culte), voyez cette photographie d'une représentation à Vrindavan) et de Har(a) (nom de Shiva, dont le chignon tressé amortit la descente de la rivière Ganga, voir par exemple le kitschissime jet d'eau vertical qui sort des cheveux de cette statue de Shiva dans le temple Shri Durgiana à Amritsar ou la petite tête qui dépasse du sommet du chignon sur cette photographie prise lors d'une cérémonie du soir au bord de la Ganga à Rishikesh).
Après une présentation de la gamme qui serait utilisée, le concert proprement dit a commencé. Je ne sais pas exactement combien de temps a duré cet Alap ; je dirais au moins une demi-heure ! Avec le seul accompagnement des tanpuras, le chanteur a laissé les différentes notes entrer progressivement dans le système. Le tout a été fait avec une douceur extrême seulement perturbée par quelque bruit de klaxon ou de moteur dans les environs qui ont fait poindre quelque sourire au bord des lèvres du musicien. Il se montre capable de tenir une note pendant une durée invraisemblable tout en faisant un decrescendo poussé jusqu'au complet évanouissement de la note. Il me semble aussi entendre des ornementations dans lesquelles le chanteur fait varier très légèrement la hauteur du son autour de la note juste.
Le percusionniste entre ensuite en action. J'ai été surpris par le rythme frénétique de sa première intervention, se superposant à la pulsation plus modérée du chanteur. Pourtant, les deux musiciens m'ont semblé jouer ensemble en bonne intelligence. Le chanteur passe des vocalises au texte du vers. Dans un premier temps, les phrases musicales paraissent assez régulières. Dans un deuxième temps, le chanteur et le percussionniste laissent se développer leur sens de l'improvisation. Les phrasés sont souvent très fluides, parfois plus hachés. Toutes sortes de techniques vocales sont utilisées, comme la nasalisation bouche fermée. Un silence respectueux accompagne le moment où la dernière note s'éteint, suivi d'applaudissements enthousiastes.
J'ai beaucoup aimé ce raga qui aura été développé sur un peu plus d'une heure. La maîtrise du pppp par le chanteur est stupéfiante. Les techniques d'improvisation m'ont paru moins éblouissantes que celles de la sus-nommée Gaayatri Kaundinya (chant khyal) qui reste ma référence en la matière. Dans la séance de questions-réponses avec le public qui a suivi l'entr'acte, il a notamment expliqué que dans la tradition d'interprétation à laquelle il appartient (Dagarvani), les phrases musicales ressemblent plus à des phrases d'une voix naturelle, par opposition à d'autres styles comme le khyal où ce serait plus découpé. Dans toutes ses réponses, il a fait preuve d'un certain sens de l'humour. Un autre raga, Bhupali, a été joué pour conclure le concert : on est entré beaucoup plus vite en matière et cela a été malheureuseument assez court, faute de temps.
Wasifuddin Dagar chantera au même endroit le 21 juin prochain...
2008-09-28 23:22+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Danse — Danses indiennes — Culture indienne — Dhrupad
Cité de la musique — 2008-09-28
Vingt-quatre heures du râga. L'Inde : le jour.
Sheik Mahaboob Subahani Sheik Meera Saheb, nadhaswaram
Sheik Kale Eshabimahaboob Sheikmahaboob Subhani, nadhaswaram
Govindarajan Rajamannar, tavil
Sankar Manickam, tavil
Musique rituelle des temples (Inde du Sud)
Ensemble Tala Vathyam
Srikanth Venkataraman, violon
Sri Naga Siva Venkata Subbaraya Phal Parupalli, mridangam
Sukanya Ramgopal, gattam
Panwar Koshal Kumar, tabla
Ensemble rythmique
Neena Prasad, danse
Madhavan Nampoothiri Cheerakattu Parameswaran, chant
Satheesan Paliyam Parambil Madhavan, mridangam
Narayanan Muraleekrishnan Pazhangapparambilvadakkemana, vînâ
Krishnakumar Thrikkur Madom Anatharaman, edaka
Danse mohiniattam du Kerala
Shashank Subbu, flûte
Srikanth Venkataraman, violon
Sri Naga Siva Venkata Subbaraya Phal Parupalli, mridangam
Sukanya Ramgopal, gattam
Flûte bansuri (Inde du Sud)
Sudha Ragunathan, chant
Skanda Subramanian Sundarajan, mridangam
Kannan Sadagopan, violon
Raman Ramakrishnan, morsing
Chant carnatique (Inde du Sud)
Divana
Barkat Khan, chant
Anwar Khan, chant
Mehruddin Langa, satâra, sarangui, morchang
Ghewar Khan Manganiar, kamanchiya
Firoze Khan Manganiar, dholak
Gazi Khan Barana, direction, kartâl
Chant du Rajasthan
Kaushiki Chakraborty, chant khyal et thumri
Vijay Gathe, tabla
Hiranmay Mitra, harmonium
Chant khyal et thumri
Ajay Rathore, danse
Aditi Jain, danse
Jyoti Bharti Goswami, tarant
Ramesh Meena, chant, harmonium
Panwar Koshal Kumar, tabla
Danse kathak de Jaipur
Gundecha Brothers
Ramakant, Umakant Gundecha, chant dhrupad
Akilesh Gundecha, pakhawaj
Nirant Gundecha, tanpura
Chant dhrupad
Je reviens des vingt-quatre heures du râga, qui ont commencé hier à 18h. Ce programme audacieux de la Cité de la musique était divisé en deux parties : Nuit, Jour. Sur les neuf spectacles présentés dans chacune des deux parties, sept étaient communs, je n'ai donc pas jugé utile de suivre les deux programmes !
Je me suis donc levé à une heure invraisemblable pour arriver un peu avant 7h à la Cité de la Musique, porte de Pantin, où j'allais pour la première fois. Les alentours de la salle des concerts sont sobrement décorés à l'indienne. J'hallucine un peu en voyant passer devant moi un marchand ambulant de CD ayant quelques difficultés d'expression, ou comment donner aussitôt l'illusion que l'on se trouve sur un autre continent ; en fait, il s'agit d'un musicien d'un groupe rajasthani qui va se produire. Le contrôle est très moderne : l'ouvreur passe un lecteur de codes-barres sur le billet. Évidemment, mon billet fait bugger le système. On n'arrête pas le progrès.
Entre la scène et la première rangée de fauteuils sont disposés des tapis sur lesquels les plus audacieux s'asseyent. Si j'avais su, j'eusse apporté un coussin. Victime du grand ordinateur Shadok, je dois m'installer au deuxième rang. Vu la taille de la salle, dans les configurations usuelles, je suppose qu'à peu près toutes les places doivent être correctes (à moins d'avoir un basketteur devant soi). Les sièges sont très confortables, en tout cas, bien plus que dans un certain nombre d'autres salles parisiennes.
Les groupes se succèdent : musique rituelle des temples (nadaswaram et tavil), ensemble rythmique, danse mohiniattam du Kerala, flûte bansuri, chant carnatique, chant du Rajasthan, chant khyal et thumri, danse kathak de Jaipur, chant dhrupad. Le programme est très chargé : dix heures de spectacles, deux pauses d'un quart d'heure. La première pause d'un quart d'heure a d'ailleurs été quasi-absorbée par le retard accumulé dans la matinée. J'avais à peine fini mon plateau de samosas et mon lassi quand le spectacle suivant commença.
Ne connaissant pas très bien la musique classique indienne,
j'appréhendais un peu cette journée, par peur de m'ennuyer. Dans
l'ensemble, tout cela était très écoutable. J'ai découvert deux autres
styles de danse : le mohiniattam et le kathak. J'avais déjà entr'aperçu un
peu de kathak à Allahabad, mais cela ne compte pas. Le
mohiniattam semble avoir quelques similitudes avec le bharata-natyam, un
autre style de danse du Sud de l'Inde, mais paraît un peu moins compliqué
et d'exécution moins rapide. La première différence que j'ai remarquée avec
le kathak, c'est que dans cette dernière danse, les danseurs font beaucoup
de pirouettes. L'ensemble des danseurs kathak comportait deux danseuses
(d'âges très différents) et un jeune danseur. Le peu de cohésion entre les
danseurs, leurs manières d'entrer et sortir de scène (ou plutôt de n'en pas
sortir quand il conviendrait) ne faisait pas très pro
(contrairement
aux sept spectacles qui avaient précédé). Ensuite, est venu un entr'acte
musical qui s'est achevé par le son de grelots de cheville approchant. Dans
leur nouveau costume, les trois danseurs ont présenté une deuxième partie
de spectacle bien plus enthousiasmante que la première.
Je n'ai pas encore fait toute la lumière sur le mystère du tampura. Le
son de cet instrument est très important dans la musique classique
indienne, pourtant, on ne le voit pas si souvent en scène. Il s'agit d'un
instrument à cordes. Chacune des cordes est librement actionnée à tour de
rôle, ce qui produit un son métallique fluctuant continûment de façon
curieuse. Si on faisait la même chose avec un violon, on entendrait quatre
notes qui se suivent. Là, toutes les notes se mélangent... Les
instrumentistes de tampura joueront la même suite de notes pendant de
longues dizaines de minutes consécutives et auront tendance à s'ennuyer
ferme. Certains ont eu l'idée de les remplacer par des machines : de fait,
beaucoup d'ensembles utilisent un objet électronique qui ressemble de loin
à un vieux transistor. Il permet de synthétiser les combinaisons dont ils
ont besoin. Ce matin, le joueur de bansuri n'a pas utilisé une de ces
machines, mais son ordinateur portable pour ce faire. S'excusant de ce
qu'il soit difficile de transporter des tampura, il a utilisé un
enregistrement de cet instrument (en insistant pour dire que c'est du real sound
). Le dernier ensemble de la journée comprenait
deux joueurs de tampura, et pourtant, le leader a utilisé au début une
machine, semble-t-il pour accorder les instruments, mais il me semble qu'il
ne l'a jamais éteinte, bizarre.
Dans l'ensemble, les spectacles étaient bons voire très bons. Un d'entre eux m'a semblé excellent. C'était celui de Sudha Ragunathan, qui était accompagnée d'un violon, d'un mridangam (percussion) et d'un morsing (guimbarde). Avant chaque pièce, elle a fait l'effort d'expliquer sa structure et le sens du texte (ce n'était pas le cas par exemple du groupe de chanteurs du Rajasthan, je n'ai pas le début du commencement d'une idée sur ce que signifiaient leurs chansons). Plutôt que d'essayer de décrire de la musique carnatique de Sudha Rahunathan, je renvoie à YouTube.
Vers 17h, il ne restait plus qu'un seul spectacle d'une heure. Je me disais que j'y étais presque, qu'il ne restait plus qu'une heure. La mise en place du dernier ensemble (chant dhrupad) a pris pas mal de temps. Les maestros ont mis un temps fou à accorder les deux tampuras. Une gorgée de thé. Ensuite, ils ont eu un petit problème technique. Nouvelle gorgée de thé. Le machiniste intervient. Gorgée de thé. Pendant ce temps-là, le public cache son impatience. Il ne sait peut-être pas encore que ce dernier spectacle est le plus exigeant et austère de tous et que pour tenir jusqu'au bout, il faudra faire des efforts. Pendant plus de trois quarts d'heure, les deux chanteurs ne sont accompagnés que par le son des tampuras. Le chant évolue tout doucement, quand on croit que l'on va avancer un petit peu, non, on revient en arrière, une petite gorgée de thé au passage (il doit être froid maintenant, mais est-ce bien du thé ?). Tiens, le joueur de pakhawaj (percussion) se dégourdit les doigts, jouera, jouera pas ? allez encore dix minutes à attendre. Je commence franchement à m'ennuyer et à la fin de chaque phrase musicale désespère de constater que ce n'est pas une fin. Ce n'est pas que ce soit désagréable à entendre, non, mais c'est juste trop long pour moi. 18h25, le groupe a très largement dépassé son temps. Applaudissements du public qui a réussi à tenir jusqu'au bout. Applaudissements un tout petit peu trop enthousiastes, parce que, profitant de ce que nous sommes arrivés à la fin du programme, le groupe a le champ libre pour sacrifier à la tradition des rappels. Quand j'ai vu que les tampuras en étaient à se faire réaccorder (ce qui prendrait bien cinq minutes par instrument), j'ai lâchement fui.
PS: (2 octobre) Les vingt-quatre heures du râga ont été diffusées en direct sur Internet. Je viens de recevoir un mail de la Cité de la Musique m'informant que l'on peut revisionner ce programme en intégralité jusqu'au 30 octobre. Apparemment, il faudrait un système d'exploitation de la firme de Redmond pour ce faire, mais c'est assez facilement circumambulable... Enjoy!
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