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2010-01-29 01:02+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2010-01-28
Michele Pertusi, Il Conte Rodolfo
Cornelia Oncioiu, Teresa
Natalie Dessay, Amina
Marie-Adeline Henry, Lisa
Javier Camarena, Elvino
Nahuel Di Pierro, Alessio
Jian-Hong Zhao, Un Notaro
Evelino Pidò, direction musicale
Marco Arturo Marelli, mise en scène, décors et lumières
Darmar Niefind, costumes
Patrick Marie Aubert, chef de chœur
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
La Sonnambula, Bellini
Jeudi soir, deuxième de La Sonnambula. Place d'abonnement dans la catégorie juste au-dessus de celle de lundi. Bout de rang 8 du deuxième balcon de côté (jardin). Un angle de vue comparable à celui que j'avais lundi, sans balcon au-dessus et personne derrière (il y a une cloison).
L'annonce que Natalie Dessay est toujours souffrante n'engendre que des applaudissements, la phrase prononcée ayant commençé par une locution suggérant qu'elle se finirait bien. De l'art d'annoncer une mauvaise nouvelle à 2700 personnes. Contrairement à lundi où cette difficulté passait presqu'inaperçue, ce soir, elle était souffrante et cela s'entendait. Pas tant dans les parties les plus virtuoses de ses airs, que dans les récitatifs, chantés bien sûr, que comporte l'opéra.
Qu'il doit être difficile de choisir entre renoncer à chanter au risque de décevoir les nombreux spectateurs et chanter tout de même en désespérant de ne pas être au meilleur de soi.
Quoique les autres chanteurs fussent très bons, ces imperfections eussent fait que cette soirée n'eût été qu'en demi-teinte s'il ne se fît ouïr l'air final Ah ! non giunge uman pensiero, où après avoir rapidement passé une robe rouge en coulisses, la chanteuse se place seule en scène devant un rideau imitant celui de l'Opéra Garnier (où, parfois, comme ce soir, les étoiles sont applaudies à leur entrée en scène). Cela a été plus court, mais je me suis retrouvé à peu près dans le même état que lundi.
⁂
Je ne sais pas depuis combien de temps le réglage des oculaires correspondant aux deux yeux s'était défait, mais au début du deuxième acte, ce n'était plus tenable, j'ai identifié le problème et en prenant soin de faire le réglage œil après œil, j'ai retrouvé une image très nette, me permettant de voir vraiment très bien le visage des chanteurs. Ces jumelles, achetées environ 25€ il y a un an et demi, furent un très bon choix d'équipement.
Dans Le Monde, Renaud Machart moque gentîment la mise en scène :
Pour cette production louée à l'Opéra de Vienne, le metteur en scène Marco Arturo Marelli a transposé l'action, sise dans un village, dans un sanatorium de luxe en montagne. Ce qui est assez piquant quand le Comte Rodolfo, revenu au bercail après une longue absence, s'exclame, alors qu'il est devant un bar et des tabourets Art déco :
Le moulin ! La fontaine ! Le bois ! (...) Je vous reconnais, lieux charmants.
Il oublie malicieusement de préciser qu'au moment où Rodolfo le dit, il ne regarde pas le bar, mais le tableau qui se trouve accroché au-dessus et représente un paysage villageois.
À propos de cette mise en scène, j'avais remarqué qu'un détail avait été
changé par rapport au livret, à savoir que l'objet qui trahit Lisa et ses
jeux folâtres avec le comte n'était pas un fichu mais un soulier (elle a
aussi égaré un bas...). N'entendant pas l'italien, je ne sais pas si le mot
vel
a été changé. En tout cas, pour l'amateur français d'opéra
italien qui se soucierait encore des paroles, on a pris garde à l'Opéra de
Paris de faire paraître le mot soulier
dans les sur-titres (c'est à
peu près le seul moment de la soirée où j'ai formé le dessein de les
lire).
2010-01-26 02:00+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2010-01-25
Michele Pertusi, Il Conte Rodolfo
Cornelia Oncioiu, Teresa
Natalie Dessay, Amina
Marie-Adeline Henry, Lisa
Javier Camarena, Elvino
Nahuel Di Pierro, Alessio
Jian-Hong Zhao, Un Notaro
Evelino Pidò, direction musicale
Marco Arturo Marelli, mise en scène, décors et lumières
Darmar Niefind, costumes
Patrick Marie Aubert, chef de chœur
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
La Sonnambula, Bellini
Ce lundi, lors de la première de La Sonnambula à l'Opéra Bastille (véritable première : c'est l'entrée au répertoire de l'Opéra de cette œuvre de Bellini créée en 1831), on annonce que Natalie Dessay est souffrante depuis quelques jours, brouhaha dans la salle, mais qu'elle assurera son rôle. L'opinion générale est qu'elle a fait un peu mieux qu'assurer. C'est carrément l'extase !
C'était le moment de la saison opératique que j'attendais le plus avidement. Le moins que je puisse dire est que je n'ai pas été déçu par ce spectacle d'opéra, parmi les plus belles choses qui se puissent entendre. J'ai déjà eu l'occasion de discuter de l'intrigue et des œuvres qui par transpositions successives ont conduit à cet opéra 1. Je n'y reviens plus.
La mise en scène de Marco Arturo Marelli n'est pas désagréable à regarder. Le décor (unique) est une vaste salle d'un hôtel dans les Alpes suisses. C'est cohérent avec le livret qui fait de Lisa une aubergiste. Ce qui l'est moins, dans cette approche visuellement réaliste, c'est de n'avoir pas suggéré la chambre de Rodolfo où, après sa première crise de somnambulisme, Amina s'endort. On la voit ici s'allonger dans la salle de banquet. Lors des apparitions d'Amina, les témoins chantent parfois en regardant dans la direction opposée, ce qui produit un effet peu crédible. Comme il l'explique dans le programme, une des idées du metteur en scène est de rapprocher ce séjour suisse d'une retraite effectuée par le compositeur quelques mois avant de composer son ouvrage (il pensait alors écrire un (H)Ernani). Ce n'est que marginalement visible dans la mise en scène, mais il faudrait imaginer que Rodolfo est un compositeur. Bref, si elle n'est pas génialissime, cette mise en scène n'est en rien déplaisante (pas de quoi justifier les huées, quelqu'éparses qu'elle fussent, qui accompagnèrent l'arrivée de l'équipe de production lors des saluts).
Ce n'est je crois que la deuxième fois qu'un opéra me met dans des états pareils. La première fois, c'était lors de la première de Padmâvatî au Châtelet. La jouissance était alors davantage visuelle que musicale, même si l'impressionnisme de Roussel exacerbait mon sentiment général à propos de cet opéra-ballet. Ce soir, c'était avant tout la voix de Natalie Dessay qui détenait la faculté de déclencher des réactions jubilatoires. Lors de la retransmission du Met, cela ne m'avait tout à fait atteint que lors de l'avant-dernier air Ah ! no credea mirarti (j'avais même été plus impressionné par le rôle d'Elvino chanté par Juan Diego Flórez). Dans la salle de l'Opéra Bastille, l'effet de la voix de Natalie Dessay a été immédiat, dès les premiers airs du premier acte, dont je perçois enfin l'immense beauté. S'il n'est sans doute pas aussi enthousiasmant qu'un Flórez ou un Meli, Javier Camarena fait un bon Elvino. Les autres chanteurs, notamment Michele Pertusi (Rodolfo), assurent très-convenablement leur rôle aussi bien par leur chant que par leur jeu.
À voir, à revoir. (Cette production sera filmée. Une retransmission radiophonique est prévue le 27 février sur France Musique.)
[1] Un des textes du programme (tiré des mémoires de l'épouse du librettiste Felice Romani) confirme d'ailleurs que l'idée de faire de Rodolfo le père d'Amina était bien de lui, qu'il avait écrit une scène où Rodolfo révélait sa paternité à la présumée orpheline. Le seul vestige de cet ajout envisagé à l'intrigue se trouve allusivement dans les paroles de Rodolfo :
Elle est fort gentille et gracieuse
Laisse-moi te regarder. Oh, quel joli minois !
Tu ne sais pas combien ces beaux yeux
Font doucement battre mon cœur,
Comme tu rappelles à mes pensées
Une adorable beauté.
Elle était, ah ! telle que tu es,
Au matin de sa vie.
2010-01-23 01:39+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Théâtre du Châtelet — 2010-01-22
Lina Tetriani, Norma
Paulina Pfeiffer, Adalgisa
Nikolai Schukoff, Pollione
Nicolas Testé, Oroveso
Blandine Staskiewicz, Clotilde
Luciano Botelho, Flavio
Ensemble Matheus
Chœur du Châtelet
Jean-Christophe Spinosi, direction musicale
Nicholas Jenkins, chef de chœur et assistant du chef d'orchestre
Peter Mussbach, mise en scène et décors
Daniela Juckel, décors
Andrea Schmidt-Futterer, costumes
Alexander Koppelmann, lumières
Axel Bott, dramaturgie
Norma, Bellini
Je n'étais pas retourné au théâtre du Châtelet depuis un an et demi. La dernière fois, c'était pour un concert du dimanche matin avec Le Concert français dirigé par Pierre Hantaï et la fois précédente, c'était pour Padmâvatî de Roussel.
Cette fois-ci, c'est pour Norma de Bellini, qui, hasard du calendrier intervient presqu'en même temps que la production de La Sonnambula du même compositeur à l'Opéra Bastille.
Les décors du metteur en scène Peter Mussbach et de Daniela Juckel sont conceptuels. Un grand vide bordé de trois murs. Une grande boule, représentation d'une divinité lunaire, est un totem que déplacent les Gaulois. Les membres du chœur, des comédiens et une acrobate restent sur scène en permanence. Ils portent des costumes ternes. Les couleurs changeantes des murs, des éléments de décor, des costumes, sont presqu'entièrement le fruit des lumières. La scène sera ainsi toute verte, toute rouge, bleue, etc, suivant la situation. Ce procédé est d'autant plus éclatant quand une tâche de lumière colorée suit un personnage, en l'occurrence Oroveso (Nicolas Testé), le chef des druides. C'est le père de Norma (Lina Tetriani), sorcière-prêtresse censée annoncer l'oracle aux Gaulois. Elle a eu deux enfants (interprétés par des sortes de poupées !) du proconsul romain Pollione (Nikolai Schukoff) dont la moitié haute du corps est dorée par le maquillage. Celui-ci doit rentrer à Rome, et plutôt que Norma, c'est la jeune Adalgisa (Paulina Pfeiffer) qu'il aimerait emmener. Norma est jalouse, elle veut mener sa vengeance à son terme en se servant du pouvoir que sa religion lui donne sur les Gaulois. Norma envisagera de sacrifier ses enfants (comme Médée...), puis annoncera à son peuple qu'il faut non seulement sacrifier à leur divinité le profanateur Pollione, mais aussi une jeune fille qui s'est compromise avec lui. Jusqu'au dernier moment, elle hésitera. Finalement, elle se dénoncera elle-même pour rejoindre Pollione dans la mort. Ce dernier loue une femme qu'il perd. Je me demande un moment s'il pense à Adalgisa ou à Norma, mais il semble bien qu'il s'agisse de Norma, bien plus forte qu'il l'avait pensée.
Musicalement, c'est très beau. Autant je n'avais pas du tout été convaincu par l'Ensemble Matheus dirigé par Jean-Christophe Spinosi dans L'Oratorio de Noël, autant dans Bellini, cela rend bien. Les chanteurs des trois ou quatre rôles principaux sont bons. Bien sûr, quand le public a entendu des centaines de fois l'air Casta Diva chanté par Maria Callas (le nombre de films qui l'utilisent dans leur bande son est assez invraisemblable), il est difficile que la comparaison ne paraisse pas défavorable (simplement parce que les détails d'interprétation sont différents, et qu'on pourrait attribuer à une faute ou une faiblesse ce qui n'est qu'un choix, pas forcément moins pertinent). Lina Tetriani, qui a été annoncée souffrante à l'entr'acte, s'en est très bien sortie. Dans ses airs, Nikolai Schukoff montre ses talents de bel cantiste. La première scène du deuxième acte met en scène un superbe duo entre Norma et Adalgisa, cette dernière étant prête à sacrifier son amour de Pollione pour son aînée.
Une partie du public a lancé des huées à la fin du premier acte et lors des saluts. Je ne sais pas si cela visait Spinosi ou bien le metteur en scène qui n'était pas là pour saluer. Pour ma part, j'ai trouvé que cette production était réussie.
PS: L'utilisation de toute la profondeur du plateau fait qu'il vaut mieux être au centre pour bien profiter de cette mise en scène, ce qui était mon cas vu que j'étais au premier balcon, plein centre, avec néanmoins devant moi un pilier, qui n'est pas très gênant : à un moment, Norma et Adalgisa étaient toutes les deux côté cour dans l'axe du pilier, mais par vision stéréoscopique, Adalgisa de l'œil gauche, Norma de l'œil droit (à moins que ce ne soit le contraire), je les voyais toutes les deux simultanément (cela marche bien sûr aussi derrière des jumelles).
2010-01-22 02:05+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse — Théâtre — Lectures
Opéra Comique — 2010-01-21
Lucy Crowe, Soprano, Juno
Andrew Foster-Williams, Bass, Coridon, Winter, Hymen, Sleep
Claire Debono, Mystery, First Fairy, Nymph, Spring
Miriam Allan, Anna Devin, Claire Debono, Maud Gnidzaz, Fairies
Ed Lyon, Tenor, Adam, Secrecy
Sean Clayton, Tenor, Summer
Callum Thorpe, Bass
Emmanuelle de Negri, Soprano, Night, The Plaint
Robert Burt, Mopsa
Andrew Davies, Phoebus
David Webb, Autumn
Helen Jane Howells, Eve
William Gaunt, Theseus
Robert East, Egeus
Alice Haig, Hermia
Nicholas Shaw, Lysander
Gwilym Lee, Demetrius
Jo Herbert, Helena
Roger Sloman, Starveling
Robert Burt, Flute
Desmond Barrit, Bottom
Paul Mc Cleary, Quince
Brian Pettifer, Snug
Jack Chissick, Snout
Sally Dexter, Titania
Jotham Annan, Puck
Finbar Lunch, Oberon
Laura Caldow, Omar Gordon, Samuel Guy, Anthony Kurt-Gabel, Jarkko Lehmus, Caroline Lynn, Maurizio Montis, Sarah Storer, Danseurs
Adel Aïssani, Riad Ghelazi, Lucien Pech, Indian Boy (en alternance)
Les Arts Florissants
William Christie, direction musicale
Jonathan Kent, mise en scène
Paul Brown, décors et costumes
Mark Henderson, lumières
Kim Brandstrup, chorégraphie
Francesca Giplin, assistante mise en scène
Joanna O'Keeffe, assistante chorégraphie
François Bazola, chef de chœur
Sophie Decaudaveine, conseillère linguistique
The Fairy Queen, Purcell
Les spectacles à l'Opéra Comique qu'il m'a été donné de voir rivalisent d'adresse à m'enthousiasmer. Le dernier en date est The Fairy Queen, semi-opéra de Purcell, dont la partition a été perdue pendant deux siècles ! Je ne m'étais pas renseigné sur cette œuvre. Je découvre ainsi qu'un semi-opéra est un spectacle intermédiaire entre le théâtre et l'opéra. À vrai dire, les musiciens, les comédiens et les chanteurs ne sont pas les seuls à rassasier les sens du spectateur puisqu'on verra aussi évoluer des danseurs !
Le livret est inspiré (vaguement nous dit le metteur en scène Jonathan Kent) de la pièce de Shakespeare Le songe d'une nuit d'été. Tout se passe dans un décor unique mais multiforme. Il commence par figurer l'intérieur du duc Theseus, puis il se déstructure pour représenter la forêt où les amoureux Lysander et Hermia ont promis de se rejoindre, suivis de près par Helena qui n'est point aimée de Demetrius en retour. La reine des fées et Oberon se disputent. Puck, le serviteur d'Oberon, se trompe de destinataire pour les charmes que lui suggère son maître, ce qui fait que la reine des fées se trouvera en amour avec le tisserand Bottom transformé en âne et que Lysander et Demetrius vont fuir Hermia pour se disputer Helena. Quand le jour paraîtra, tout sera rentré dans l'ordre et les personnages auront eu l'impression de faire un songe.
Tout ce spectacle est so British. Par exemple, les artisans jouent une pièce de théâtre inspirée de la légende de Pyrame et Thisbé racontée par Ovide. Les artisans jouent tellement mal leur pièce à l'intérieur de la pièce que c'en est à hurler de rire. Le comédien qui interprète Bottom (Desmond Barrit) est très impressionnant.
Le décor est unique, mais cela bouge beaucoup. Une trappe permet de rapides et multiples apparitions-disparitions de personnages. On a presque peur pour les danseurs qui arrivent à ne pas tomber dans le trou. Certains, comme Phoebus et Juno sont suspendus dans les cieux.
Le spectacle est très long : cela commence à 20h et finit peu avant minuit, avec un seul entr'acte d'une demi-heure. Bref, il ne s'en ai pas fallu de beaucoup pour que j'arrive à prendre le dernier RER B (qui, n'étant omnibus qu'à partir de Massy-Palaiseau, est plus rapide que ceux qui précèdent). Long, mais en rien ennuyeux.
2010-01-21 01:46+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Lectures
Opéra Bastille — 2010-01-20
Andrew Richards, Werther
Ludovic Tézier, Albert
Alain Vernhes, Le Bailli
Andreas Jäggi, Schmidt
Christian Tréguier, Johann
Sophie Koch, Charlotte
Anne-Catherine Gillet, Sophie
Alexandre Duhamel, Brühlmann
Olivia Doray, Kätchen
Michel Plasson, direction musicale
Benoît Jacquot, mise en scène
Charles Edwards, décors et lumières originales
Christian Gasc, costumes
André Diot, lumières
Orchestre de l'Opéra national de Paris
Maîtrise des Hauts-de-Seine / Chœur d'enfants de l'Opéra national de Paris
Werther, Massenet
L'opéra Bastille voit se succéder les Werther maudits. L'an dernier, Villazón avait annulé la première. Cette année, pour la représentation de ce soir, Jonas Kaufmann a été remplacé par Andrew Richards qui a interprété fort honorablement le rôle de Werther dans l'opéra éponyme de Massenet.
J'avais plutôt apprécié la production de Jürgen Rose. Celle dont l'Opéra a fait l'acquisition, mise en scène par Benoît Jacquot au Royal Opera House (2004), m'a enthousiasmé bien au-delà. Le seul faux pas me semble résider dans le port de lunettes teintées par Werther lors de son entrée en scène. Bagatelle.
Les quatre décors (un par acte) sont en pente. Le mur d'enceinte et la porte d'entrée sur le domaine du bailli, les abords du temple (que l'on ne voit pas), le salon de Charlotte, la chambre de Werther. Les costumes sont classiques. Albert est en rouge, Werther en bleu, Charlotte en blanc, Sophie en violet. Si on excepte le début du troisième acte, trop sombre, j'ai trouvé que l'utilisation des lumières était extrêmement pertinente.
Depuis la dernière fois, j'ai pris le temps de lire le roman épistolaire de Goethe, Les souffrances du jeune Werther, que j'ai lu dans la sublime version française que constitue la traduction de Charles-Louis de Sévelinges, rendue plus élégante par Pierre Leroux qui n'entendait pas l'allemand et revue récemment par Christian Helmreich, Le Livre de Poche, collection Les Classiques de Poche. À ma surprise, Sophie, la sœur cadette de Charlotte, est un personnage qui n'apparaît que dans l'opéra. Elle est interprétée par Anne-Catherine Gillet, qui m'avait impressionné dans l'air de Micaëla de Carmen. C'est d'ailleurs dans cette Carmen que j'avais entr'aperçu Andrew Richards. Il n'avait pu assurer son rôle de Don José que pendant les deux premiers actes et avait été remplacé par un ténor brésilien anonyme.
Son interprétation du rôle de Werther est tout à fait convaincante. Toutefois, la prononciation de certaines voyelles lui pose occasionnellement quelques problèmes. Charlotte est interprétée par Sophie Koch que je n'avais entendue qu'une seule fois, dans le final de la neuvième symphonie de Beethoven en 2005 au TCE avec l'Orchestre Lamoureux. La tension dramatique et l'importance de ce rôle augmentent à chaque acte jusqu'à la scène finale, très lyrique.
Dans le rôle d'Albert, on trouvera cette année aussi Ludovic Tézier. Par rapport au roman, Albert est plus en retrait. On ne saura pas grand'chose de lui si ce n'est qu'il est l'homme que Charlotte avait promis d'épouser à sa mère sur son lit de morte. Dans le roman, on le voit volontiers philosopher avec Werther, qui est fasciné par le suicide... Dans cette version toutefois, un détail dans l'attitude d'Albert laisse à penser qu'il est parfaitement conscient de l'usage que Werther entend faire des pistolets qu'il lui prête pour un prétendu voyage. Dans le roman, seule Charlotte semblait envisager la fatale issue.
Les amateurs du son de la harpe seront comblés dans les derniers actes. Le directeur musical Michel Plasson (76 ans !) a manifestement plus de mal à marcher qu'à diriger l'orchestre de l'Opéra. En tout cas, il fait de la musique de Massenet un délice de musique continue, seulement interrompu par les deux entr'actes.
La représentation du 26 janvier sera retransmise en direct sur Arte et sur Internet (ArteLiveWeb).
PS: Il m'a semblé que le surtitrage a été remonté, le rendant seulement à moitié visible depuis le rang 7 du premier balcon de côté. Cela paraît curieux par rapport à l'utilisation de l'espace scénique : seule la moitié de la hauteur disponible était utilisée, de sorte qu'il n'eût résulté aucune gêne de ce qu'on descendît légèrement l'appareil.
2010-01-16 23:10+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Danse
Jusques à il y a deux ans, je vivais dans l'idée fausse que la Cité de la Musique n'était que le Temple de la Musique Nouvelle 1. À vrai dire, tous les styles de musique y sont représentés, ce qui la distingue des autres lieux culturels parisiens. Je n'y avais pour le moment entendu que des Râgas et de la musique baroque.
Il n'y avait pas de raison que je n'essayasses point d'entendre aussi de cette musique du vingt-et-unième siècle quand l'occasion se présenta de coupler l'écoute de cette musique avec une partie de programme de l'intégrale Schubert prévue lors de la biennale de quatuors à cordes.
Cité de la musique — 2010-01-13
Quatuor Diotima
Gilbert Nouno, réalisation informatique musicale Ircam
Quatuor à cordes nº4 (Jonathan Harvey)
Quatuor Pražák
Quatuor à cordes nº7 (Schubert)
Jiří Hudec, contrebasse
François-Frédéric Guy, piano
Quintette pour piano et cordes La Truite (Schubert)
Mercredi dernier, j'ai assisté au programme de 20h30. Je m'installe sur mon siège dans la salle que je trouve dans une configuration géométrique inhabituelle. Les deux fois précédentes, les sièges étaient dirigés vers le centre du côté le moins long du rectangle, alors que ce soir, ils étaient tournés de 90°.
Les placeurs de la CdM sont certainement les plus décontractés qu'il se puisse voir. Entre deux spectateurs, combien de ragots sont échangés !
La première partie aurait dû voir la création d'un quatuor de Philippe
Manoury. Elle n'aura pas lieu. À la place, le quatuor Diotima joue le
quatuor à cordes nº4 (2003) de Jonathan Harvey. Après que le quatuor s'est
installé et qu'une annonce bienveillante à destination d'un pays récemment
frappé par les destructrices forces sous-terraines, des sons se font
entrendre de toutes les directions. Le concert est en effet sonorisé par un
dispositif électronique en temps réel
opéré par Gilbert Nouno.
Parfois, on ne sait plus très bien si ce qu'on entend est du direct, l'écho
de ce qui a déjà été entendu ou un tout autre son. En tout cas, le son
provient de partout et la localisation change tout le temps. C'est rigolo,
mais j'ai du mal à considérer qu'il s'agisse de musique. En effet, le
premier son qui se fait entendre est celui d'un archet frottant non pas les
cordes mais le bois du violon. Un peu plus loin, l'archet du violoncelle
essuie les cordes longitudinalement. Je me demande bien comment ces
techniques sont notées sur la partition 2. Plein d'autres techniques zarbi. C'est
amusant, c'est indiscutablement original, mais ce n'est pas franchement ce
que j'aime entendre.
La deuxième partie laisse la place au quatuor Pražák pour le septième quatuor de Schubert et son quintette La Truite (pendant lequel un violon s'effacera et le trio restant sera rejoint par le contrabassiste Jiří Hudec et le pianiste François-Frédéric Guy). Je n'ai pour le moment que très peu eu l'occasion d'entendre de la musique de chambre. En particulier, c'est la première fois que j'entends ces œuvres en concert. Mon impression est assez mitigée. J'ai en effet souvent eu l'impression que le premier violon couinait. Pendant le quintette, peut-être est-ce de la faute à mon placement près d'un des murs et d'une entrée, mais de ma place, le son du piano me semblait dégradé comme dans un mauvais enregistrement datant d'un demi-siècle. Cela dit, je suis plutôt content d'avoir entendu ces œuvres en concert, tout particulièrement La Truite dont je n'avais entendu que la version Lied chantée par Waltraud Meier.
⁂
Cité de la musique — 2010-01-16
Quatuor Arditti
Quatuor VII OpenTime, 21 variations pour quatuor à cordes, Pascal Dusapin (création)
Quatuor Hagen
Douze Microludes (György Kurtág)
Quatuor à cordes nº16 (Beethoven)
Samedi, 17h, je suis de nouveau à la Cité de la Musique pour un autre
programme de quatuors. En première partie, le Quatuor Arditti crée le
Quatuor VII OpenTime de Pascal Dusapin. Contrairement au truc de
Jonathan Harvey évoqué ci-dessus, là, il s'agit indiscutablement de
musique. Cela dure une quarantaine de minutes. L'œuvre est dédiée à
Anton, né le 29 juin 2009 à 0h31
. Cela commence par un coup d'archet
de l'alto sur deux notes. À vrai dire, le début est presque un solo pour
alto, l'accompagnement du violoncelle étant assez discret. Lors des 21
variations, le quatuor montre un large éventail d'ambiances, de sonorités,
de rythmes et de techniques, qui restent néanmoins dans le cadre d'une
utilisation standard des instruments à cordes. Le public apprécie. Comme de
coutume lors d'une création (si je compte bien, cela doit être la quatrième
à laquelle j'assiste), le compositeur vient saluer le public avec le
quatuor. Cette création, ainsi que d'autres concerts de la biennale sont
disponibles sur Arte
Live Web et devraient bientôt l'être sur le site de la CdM.
Pour la deuxième partie, Dusapin regagne sa place et le quatuor Hagen entre en scène. La première œuvre, très courte, est Douze Microludes György Kurtág. Si elle n'était pas désagréable à écouter, elle a déjà fui ma mémoire. Quelques mignons effets de glissando du violon. Pour finir, un charmant quatuor nº16 de Beethoven qui vaut une ovation méritée au quatuor.
⁂
C'est probablement l'effectif musical restreint qui accentue cela, mais j'ai trouvé que pendant ces concerts, les nuisances habituelles du public étaient décuplées. Certes, nous sommes en janvier, mais il est invraisemblable qu'autant de gens se mettent à tousser tout au long du concert.
Cette expérience m'incite à augmenter la proportion de musique de chambre dans les concerts auxquels j'assisterai à l'avenir (j'en entends déjà occasionnellement dans des lieux comme l'église des Billettes, mais cela se limite au répertoire baroque). Voir d'aussi petites formations rend aussi l'expérience de la musique moins impersonnelle qu'elle ne peut paraître quand on écoute un orchestre. On peut en effet plus facilement imaginer le type de liens et les vies qui se cachent derrière la musique que l'on entend. À cet égard, le roman Quatuor de Vikram Seth est remarquable.
[1] Veuillez pardonner à cette pulsion terminologique : je viens de lire un roman de Shan Sa (pas très bon d'ailleurs : Les Conspirateurs).
[2] À propos de notations, je me suis toujours demandé comment la chorégraphie d'un ballet ou la mise en scène d'une pièce de théâtre ou d'un opéra était notée, si elle l'est effectivement. Si on peut comprendre qu'il est possible de la communiquer à un interprète simplement en lui montrant comment faire (j'ai même cru comprendre que dans certaines chorales, les choristes non solfégistes apprenaient par cœur la musique en écoutant des enregistrements), cette transmission se heurte aux limites de la mémoire et de la vie. Ce n'est pas tout à fait anodin puisque des ballets du répertoire français du XIXe comme Giselle (1841) ont été oubliés en France à partir de 1868, mais ont continué à être joués en Russie grâce à Marius Petipa, rendant possible des reprises ultérieures à l'Opéra (1910). Certains de ces ballets ont été notés en utilisant des symboles musicaux comme l'avait imaginé Vladimir Stepanov. Le seul document de ce type que j'ai vu est une notation utilisant cette méthode pour La Bayadère. Je me demande quels sont les usages modernes en la matière.
2010-01-08 02:33+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Danse
Opéra Garnier — 2010-01-07
Jonathan Nott, direction musicale
Maurice Béjart, chorégraphie
Béjart Ballet Lausanne
Ensemble Intercontemporain
Béla Bartók, musique (Sonate pour deux pianos et percussions, premier et deuxième mouvements, 1938)
Bert, décors
Julien Favreau, Daria Ivanova, Luisa Diaz Gonzalez
Sonate à trois (1957), d'après Huis clos de Jean-Paul Sartre
Anton Webern, musique (Cinq mouvements pour quatuor à cordes, opus V, 1909)
Dominique Roman, réalisation lumières
Kathleen Thielhelm, Dawid Kupinski
Webern Opus V (1966)
Pierre Boulez, musique (Dialogue de l'ombre double pour clarinette, clarinette enregistrée et piano résonnant, 1985)
Anna De Giorgi, costumes
Clément Cayrol, costumes
Nicolas Berteloot, régie son
Alain Damiens, clarinette
Kateryna Shalkina, Oscar Chacon
Dialogue de l'ombre double (1998)
Pierre Boulez, musique (Le Marteau sans maître, pour voix d'alto et six instruments, 1954)
Joëlle Roustan, Roger Bernard, décors et costumes
Roger Bernard, lumières
Hilary Summers, contralto
Daria Ivanova, Dawid Kupinski, Johann Clapson, Oscar Chacon, Keisuke Nasuno, Julien Favreau, Arthur Louarti
Felipe Rocha, Adrian Cicerone, Neel Jansen, Juan Sanchez, Valentin Levalin, Juan Pulido, Marco Merenda, Les personnages en noir
Le Marteau sans maître (1973)
Je suis allé ce soir à l'Opéra pour voir non pas le Ballet de l'Opéra, mais la compagnie qui y est invitée, le Béjart Ballet Lausanne. De Béjart, je ne connaissais que la mort. Je savais bien sûr qu'il était chorégraphe et qu'il avait tout particulièrement changé la danse masculine, mais je n'avais jamais vu ses spectacles.
Quatre œuvres sont au programme, créées depuis 1957 jusques à 1998. Dans toutes ces pièces, la musique est du vingtième siècle et parmi les plus bizarres que j'aie entendues (c'est d'ailleurs la première fois que j'entends l'Ensemble Intercontemporain). En tout cas, c'est très dissonnant. Dans la première pièce Sonate à trois, c'est du Bartòk. Il paraît pour la deuxième fois à mes oreilles et cette deuxième occasion ne me donne pas envie de favoriser de nouvelles rencontres. La musique de Webern dans Webern Opus V, cinq mouvements de quatuors à cordes, me déplaît moins, mais les sons produits par le violon sont parfois vraiment curieux. Les deux dernières pièces Dialogue de l'ombre double et Le Marteau sans maître tirent leur musique d'œuvres de Pierre Boulez des mêmes noms. Première fois aussi que j'entends du Boulez. Dans Dialogue de l'ombre double, on entend deux clarinettes, une enregistrée (et à la mouvante spatialisation) et une physique, dont Alain Damiens joue sur scène. Cela paraît quelque peu aléatoire, mais ce n'est pas du tout désagréable à entendre.
Dans les quatre ballets, la chorégraphie est bien sûr
contemporaine
, pourtant cela ne ressemble aucunement aux spectacles
de danse contemporaine que j'avais vu avant. Certes, comme souvent dans ces
styles, les décors sont assez abstraits. On trouve par exemple trois
chaises dans Sonate à trois. De nombreux mouvements sont saccadés,
chose que l'on voit rarement dans le ballet classique. Ce qui est
véritablement étonnant, c'est la façon dont ces éléments sont incorporés à
des mouvements que manifestement, seuls des danseurs ayant une solide
formation classique puissent exécuter. Les danseuses sont d'authentiques
ballerines, réalisant des pointes. Les costumes près du corps des messieurs
(et aussi des dames) font penser à la tenue des danseurs de ballet. Bref,
vus jusques à cinquante ans après la création par quelqu'un qui n'a vu ces
différents genres qu'en des lieux différents, jamais en même temps, cela
fait drôle de voir réunis ces styles jusques alors opposés. Bref, même si
je ne suis pas forcément ému par la musique (et la musique de ballet n'est
pas toujours non plus la plus intéressante qui soit), je ne peux qu'admirer
les prouesses techniques.
Le choc esthétique et visuel a donc été total pendant la première pièce Sonate à trois. Lors de la deuxième Webern Opus V, j'ai souffert de mon placement qui ne m'a pas autant fait apprécier ce pas de deux en blanc qu'une meilleure place l'eût permis. J'étais en effet au deuxième rang de la baignoire 8, à la place symétrique de celle que j'avais eue et appréciée pour Onéguine. Quand la chorégraphie utilise tout l'espace, bien qu'un peu excentrées, ces places permettent de voir très bien les danseurs sans avoir à utiliser de jumelles ! Le souci, dans cette pièce, est que le quatuor à cordes n'était pas dans la fosse, mais sur scène, côté jardin. La chorégraphie s'était donc réfugiée côté cour, en partie invisible de moi, donc.
La pièce que j'ai inconditionnellement appréciée le mieux est Dialogue de l'ombre double. Deux clarinettes. Un couple de danseurs, un lion (dont je me disais qu'il serait amusant qu'il bouge...). Un passage presque comique montre la duplicité du style, presque jusqu'à l'écartèlement de la ballerine. Au milieu de la pièce, celle-ci déchausse un de ses pieds. Elle exécute ensuite des mouvements indépendants sur chaque jambe. Une sage pointe encore possible avec le chausson qui lui reste tandis que libérée, l'autre jambe se met à faire un peu n'importe quoi.
La dernière œuvre Le Marteau sans maître, la plus longue, a la
musique la plus bizarre des quatre. C'est aussi la plus longue : 38
minutes. Pendant les dix premières minutes, je me suis vraiment demandé ce
que je faisais là. La chorégraphie m'indifférait, la musique aussi,
d'autant plus qu'il y avait des passages chantés, qui choquent en ce qu'ils
n'ont pas grand'chose à voir avec ce qu'on entend habituellement quand on
parle de chant. Les paroles, en français apparemment (des extraits des
poèmes de René Char du même nom ?), ont été rendues tout à fait
inintelligibles par la musique. Progressivement, sans que je comprenne
pourquoi, la danse me plaît de plus en plus à mesure que l'on avance. Il
s'agit d'une danse de groupe. Six danseurs. De temps en temps, à peu près
aux moments où chante la contralto Hilary Summers, la ballerine Daria
Ivanova entre sur scène, portée par un des personnages en noir
, à
vrai dire, un homme recouvert d'un costume ressemblant à une burqa. Dans
cette pièce comme dans les autres, la technique est éblouissante. Des
portés absolument invraisemblables. À la fin, je suis
presque enthousiasmé parce que je viens de voir.
Les entrées des baignoires étant au même étage que les fauteuils d'orchestre, forcément, on ne croise pas les mêmes gens que dans les étages supérieurs et je ne suis même pas surpris de me retrouver à la sortie à côté d'une actrice oscarisée...
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