« Planning de novembre 2012 | Keren Ann à Pleyel »
2012-11-13 00:12+0100 (Orsay) — Culture — Musique
Je n'aimais pas Schumann. En remontant dans mes archives, je vois
que j'ai entendu deux fort valeureux amateurs en jouer au piano en 2003,
peu de temps après que je commence à aller à des concerts. Puis, plus rien
jusqu'en 2010. Entretemps, j'ai lu Quatuor
de Vikram Seth. Schumann est devenu pour moi le mauvais Schu-
, comme
il est appelé dans ce roman.
Vu le nombre de concerts auxquels j'assiste, je ne pouvais pas non plus éviter complètement ce compositeur, les programmes pouvant associer une de ses œuvres à des œuvres de compositeurs qui m'intéressaient davantage. Ces concerts sont pour ainsi dire passés aux oubliettes de ma mémoire. Je n'ai pas tout détesté, quelques bons moments se sont même glissés dans mon écoute de quelques œuvres, mais même en l'absence de rejet frontal, mes sentiments ont presque toujours relevé au minimum d'une certaine indifférence. Sans m'enthousiasmer excessivement, j'avais cependant bien aimé le concerto pour piano joué par Dang Thai Son avec l'Orchestre de Paris. J'avais ensuite détesté ce concerto quand Hélène Grimaud l'avait joué avec le LSO dirigé par Gergiev.
En mars, alors que les membres de la Cihohi
Appreciation Society apprenaient que le COE feraient une intégrale
Schumann à l'automne, non sans quelque désarroi, quoi ! du
Schumann ?
, un jeune chef d'orchestre présent à quelque dîner
post-concert confia en substance que les œuvres de Schumann étaient
magnifiquement orchestrées, mais qu'elles étaient
super-dures-à-bien-jouer. Admettons, on irait écouter le
Chamber Orchestra of Europe dirigé par Yannick Nézet-Séguin et si eux
n'arrivaient pas à nous faire aimer Schumann, on ne nous y reprendrait
plus...
L'automne est arrivé, entretemps les musiciens du COE ont réussi à me faire aimer la Symphonie nº9 La Grande de Schubert. Allaient-ils relever le défi de faire de même avec Schumann ? Pour augmenter la difficulté, leur temps était limité à peu moins de deux heures, les circonstances ayant fait que je ne pouvais assister qu'à un seul des trois concerts du week-end. Pour le premier épisode de 2h de Schumann chrono, ils bénéficiaient du renfort du pianiste Nicholas Angelich (dont certains concertivores se souviennent de l'interprétation du concerto pour piano nº5 L'Empereur de Beethoven). Pour le deuxième épisode intervenant après l'entr'acte, ils ne pouvaient plus compter que sur leurs propres ressources.
⁂
Cité de la musique — 2012-11-04
Yannick Nézet-Séguin, direction
Chamber Orchestra of Europe
Ouverture de Genoveva (Schumann)
Nicholas Angelich, piano
Concerto pour piano en la mineur, op. 54 (Schumann)
Träumerei, extrait des Kinderszenen (Schumann)
Symphonie nº2 (Schumann)
Alors, alors, le COE, Nicholas Angelich et Yannick Nézet-Séguin ont-ils réussi à me faire apprécier Schumann le temps d'un concert ?
Oui ! Mille fois, oui !
L'ouverture de Genoveva est une bonne mise en jambe pour la suite du concert. Le style me fait un peu penser à Weber. L'atmosphère est assez tourmentée, mélancolique comme lorsqu'un motif descendant initié par la clarinette de Romain Guyot se déploie dans le reste de l'orchestre. Et puis, le hautbois de François Leleux entame un tidadada..tidadada.. joyeux et champêtre qui apporte quelques instants de joie avant que les tourments reprennent et que l'hydravion qu'il convient de faire amerrir entame sa descente finale.
Vient ensuite le concerto pour piano. L'œuvre contient quelques passages assez intériorisés, presque douloureux, mais l'ensemble est vivifiant et parfois quasi-jubilatoire. Je ne doutais pas que j'apprécierais l'interprétation de Nicholas Angelich. Nonobstant, dans le premier mouvement, j'ai l'impression qu'il n'y a non pas un soliste, mais trois. Non pas que Romain Guyot et François Leleux volent la vedette au pianiste, mais ils jouent ensemble, tout simplement. Le deuxième mouvement est une majestueuse friandise. L'équilibre entre le pianiste et les cordes, en particulier les violoncelles, est merveilleux. Le troisième mouvement s'enchaîne au second. Le piano s'y fait plus brillant, étincelant. À un moment, on entend aussi une sorte de mini-fugue dans l'orchestre, ce qui n'est évidemment pas pour me déplaire...
En bis, le pianiste joue magnifiquement Träumerei, extrait des Kinderszenen. Très récemment, un autre pianiste gâchait ma soirée en jouant un gros truc percussif juste après un concerto qui se finissait dans l'apaisement le plus total. Ici, c'est tout le contraire : j'aime entendre ce genre de bis où la musicalité prime sur la virtuosité.
Après l'entr'acte, l'orchestre a joué la deuxième symphonie de Schumann. Certes, il y a eu quelque couac chez les cuivres au début du premier mouvement. Pour le reste, cela a été un émerveillement total. Quelle clarté dans le son ! L'acoustique de la salle des concerts de la Cité de la musique est sans doute plus favorable à cet égard que l'aimable boîte à chaussures qu'est la Salle Pleyel. Après deux premiers mouvements sautillants (filmant à 25 images par secondes les caméras ont-elles capté tous les mouvements de Yannick Nézet-Séguin ?!), dans le mouvement lent, le compositeur fait s'envoler l'auditeur dans les nuées, à moins qu'il ne s'agisse d'une plongée dans les fonds marins. Oh la la, les trilles des cordes tandis que les instruments à vents entonnent une voluptueuse mélodie (aïe aïe aïe le Leleux-alertomètre a explosé), juste avant qu'une que les cordes jouent un petit passage fugué auquel les vents vont se joindre. Dans le dernier mouvement, l'orchestre fait preuve d'une vigoureuse fougue. Parfois, les voix orchestrales situées au premier plan semblent jouer des phrases dont les notes s'enchaînent à un rythme moins vif, mais en arrière-plan, les seconds violons et les altos s'activent à une vitesse folle pour maintenir la tension avec d'ardents tidoudoutoudoudi à moins que ce ne soient des toudoudoutoudoudi ou des tatatatā.tatatatā., je n'en sais rien : ils vont tellement vite...
Bref, globalement, ce fut pour moi un Schumann assez inouï que celui que j'ai entendu lors de ce concert...
Tout comme les deux concerts précédents de cette intégrale Schumann auxquels je n'ai pas pu assister, ce concert peut être réécouté sur Cité de la musique live.
Ailleurs : Klari (chapitres 1, 2, 3).
Alors, Joël, tu as changé d'avis! à propos avec quels effectifs ont-ils joue la 2ème symphonie?
Sauf erreur de comptage : 9 premiers violons, 9 seconds, 6 altos, 5 violoncelles, 4 contrebasses ; 2 flûtes/hautbois/clarinettes/bassons, 3 cors, 3 trombones, 3 trompettes, 1 timbalier.
Ah oui c'est un petit effectif, je crois qu'il n'y a que deux trompettes, c'est dans l'ouverture de Manfred qu'il y en a trois. En revanche 4 cors.
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