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2010-05-30 11:09+0200 (Orsay) — Culture — Lectures
Le Prix Biblioblog du roman 2010 est décerné à L'Attente du soir de Tatiana Arfel (José Corti) :
2010-05-26 01:25+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Danse
Opéra Garnier — 2010-05-25
Ludwig Minkus, musique, réalisée et adaptée par John Lanchbery
Marius Petipa, Sergueï Khoudekov, livret
Rudolf Noureev, chorégraphie et mise en scène d'après Marius Petipa
Ezio Frigerio, décors
Franca Squarciapino, costumes
Vinicio Cheli, lumières
Kevin Rhodes, direction musicale
Emmanuel Strosser, piano
Frédéric Vaysse-Knitter, piano
Agnès Letestu, Nikiya
José Martinez, Solor
Émilie Cozette, Gamzatti
Allister Madin, Le Fakir
Yann Saïz, Le Grand Brahmane
Stéphane Phavorin, Le Rajah
Christine Peltzer, Aiya, servante de Gamzatti
Audric Bezard, L'Esclave
Marc Moreau, L'Idole dorée
Charline Giezendanner, Danse Manou
Sarah Kora Dayanour (sic), Fabien Révillion, Danse indienne
Sabrina Mallem, Première variation
Mathilde Froustey, Deuxième variation
Marie-Solène Boulet, Troisième variation
Ballet de l'Opéra
Élèves de l'École de danse de l'Opéra
Orchestre Colonne
La Bayadère, ballet en trois actes (production créée pour le Ballet de l'Opéra national de Paris le 8 octobre 1992)
Cette année, s'il y a un spectacle du Ballet de l'Opéra que je ne voulais pas manquer — en fait, je suis bien parti pour n'en manquer aucun — c'est bien La Bayadère, dans la version de Rudolf Noureev (1992) d'après Marius Petipa.
La bayadère Nikiya (Agnès Letestu) est aimée du kshatriya Solor (José Martinez), et du grand brâhmane (Yann Saïz). Le rajah de Golconde (Stéphane Phavorin) veut marier sa fille Gamzatti (Émilie Cozette) au-même Solor. Ceci pose problème à Nikiya, ainsi qu'à tout le monde vu qu'avec Solor, ils se sont juré fidélité. On complote contre la bayadère. Alors qu'elle danse pour les fiançailles de Solor et Gamzatti, on lui offre un panier qui contient un serpent venimeux... Plus tard, les deux amants se retrouvent au royaume des ombres.
C'est du grand spectacle. Les décors et costumes sont superbes. Bien
sûr, il s'agit plus de montrer une Inde phantasmée, encore plus irréelle
que la vision bollywoodienne qu'en donne par exemple Devdas (voir
notamment une scène avec Madhuri Dixit Maar Dala pour une
idée de ce que cela peut donner), que de présenter une vision conforme à la
réalité. En effet, même le temple indien le plus tarabiscoté ne ressemble
pas à celui du décorateur. Les femmes indiennes portent tout à fait
autrement leur sari. On a jamais vu un grand brâhmane
aussi
richement paré, etc, etc. Mais, qu'est-ce que ça brille !
On en prend donc plein les yeux, surtout au deuxième acte, avec
l'arrivée de Gamzatti en palanquin, celle de Solor sur un éléphant (quoique
faux, contrairement à celui de la mise en scène de Padmâvatî par Sanjay Leela Bhansali au Châtelet), et des
danses nombreuses et variées, comme celle des perroquets ou celle de
l'Idole dorée (Marc Moreau) ; il y a aussi une danse indienne
qui
fait penser à des danses du Penjab.
L'ambiance de fête se suspend brutalement quand la bayadère Nikiya entame sa danse langoureuse au son des violoncelles. Un moment magique.
Au cours du troisième acte, on peut apprécier le défilé et les alignements d'un groupe de trente deux danseuses lors de la fameuse Entrée des ombres. Ce troisième acte fait bien sûr penser au deuxième de Giselle. Ensemble ou séparément, José Martinez et Agnès Letestu effectuent de nouvelles prouesses, et les trois danseuses Sabrina Mallem, Mathilde Froustey et Marie-Solène Boulet dansent de belles variations.
La musique de Minkus semble présenter en soi moins d'intérêt que d'autres musiques de ballet. Il paraît que c'est la faute des photocopieuses soviétiques : la partition ramenée par Noureev était incomplète.
Ailleurs : Klari.
2010-05-14 19:25+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Théâtre
Opéra Garnier — 2010-05-13
Martin Haselböck, direction musicale
John Malkovich/Michael Sturminger, mise en scène
Birgit Hutter, costumes
Christoph Willibald Gluck, Luigi Boccherini, Wolfgang Amadeus Mozart, Joseph Haydn, Ludwig van Beethoven, Carl Maria von Weber, musique
John Malkovich, comédien
Bernarda Bobro, soprano
Aleksandra Zamojska, soprano
Orchester Wiener Akademie
La comédie infernale, confessions d'un seriel killer, théâtre musical de Michael Sturminger et Martin Haselböck
Il est des spectacles de l'Opéra qui sont bien cachés dans le programme.
Les aurait-on repérés dans la brochure que, la campagne d'abonnements
passée, il faudrait encore s'en souvenir le moment venu pour faire une
réservation. Ce n'était pas mon cas en ce qui concerne le spectacle La
comédie infernale, confessions d'un serial killer. Lors d'une visite
récente sur le site de l'Opéra, le titre aura sans doute paru dans la liste
des spectacles pour lesquels des billets étaient mis en vente et par
curiosité, j'aurai cliqué et saisi ainsi l'occasion de voir depuis les
premières loges
John Malkovich sur la scène du Palais Garnier.
Il s'agit d'un spectacle de théâtre musical inspiré par la vie et la mort de Jack Unterweger, un serial-killer autrichien ayant été condamné vers 1974, qui fut gracié et relâché en 1990 à la suite de pétitions en faveur d'un homme qui était devenu écrivain en prison. Quand des meurtres semblables aux précédents — prostituées étranglées dans leurs soutiens-gorge — surviendront, il sera à nouveau condamné en 1994. S'étant suicidé avant d'avoir pu faire un éventuel appel de cette condamnation, il jouit de la présomption d'innocence...
Alors qu'il a menti toute sa vie et qu'il est aux Enfers depuis une
quinzaine d'année, Jack Unterweger décide d'écrire la vérité dans un livre
Confessions d'un serial-killer
et, suivant la recommandation de ses
éditeurs, il se donne en spectacle pour vanter les mérites de son livre.
Différentes femmes ayant gravité autour de lui s'incarnent sur scène à ses
côtés en interprétant des airs d'opéra de Gluck, Boccherini, Vivalvi,
Mozart, Beethoven, Haydn et Weber correspondant à la situation dramatique.
La partie musicale est assurée par l'Orchester Wiener Akademie dirigé par
Martin Haselböck (qui a une drôle de manière de diriger ses cuivres : il
lance très-ostensiblement sa main dans la direction de celui qui doit
jouer) et les deux sopranos Bernarda Bobro et Aleksandra Zamojska. Si la
voix de la deuxième m'a paru manquer un peu de puissance dans son premier
air, l'autre m'a bien plu, notamment dans la scène de Bérénice
Berenice, che fai de Haydn.
Le personnage qu'interprète John Malkovich est drôle, dans un genre très
cynique. Les rires sont parfois un peu à contretemps, vu que le texte parlé
de Michael Sturminger est en anglais the international language of
love
, surtitré en français. À un moment donné, il s'énerve contre son
ordinateur (un Mac donné par son éditeur ; il préférerait un PC) alors
qu'il va lire des extraits de la page Wikipédia le
concernant et ironiser à propos des erreurs qu'elle contiendrait. Je ne
suis pas mécontent d'avoir assisté à ce spectacle de théâtre lyrique d'un
peu moins de deux heures.
2010-05-08 02:46+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Bastille — 2010-05-07
Laura Aikin, Olympia
Inva Mula, Antonia
Béatrice Uria-Monzon, Giulietta
Ekaterina Gubanova, La Muse/Nicklausse
Giuseppe Filianoti, Hoffmann
Cornelia Oncioiu, Une Voix
Rodolphe Briand, Spalanzani
Jason Bridges, Nathanaël
Alain Vernhes, Luther, Crespel
Léonard Pezzino, Andres, Cochenille, Frantz, Pitichinacio
Franck Ferrari, Lindorf, Coppélius, Dr Miracle, Dapertutto
Vladimir Kapshuk, Hermann
Yuri Kissin, Schlemil
Jesus Lopez-Cobos, direction musicale
Robert Carsen, mise en scène
Michael Levine, décors et costumes
Jean Kalman, lumières
Philippe Giraudeau, mouvements chorégraphiques
Patrick Marie Aubert, chef de chœur
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
Les Contes d'Hoffmann, Offenbach
Je n'avais encore jamais vu la production du dernier opéra d'Offenbach qui repasse ce mois-ci à l'Opéra Bastille. La mise en scène de Robert Carsen des Contes d'Hoffmann est absolument superbe. C'est assurément un des tout meilleurs spectacles d'opéra que j'aie vu.
L'opéra se passe pendant une représentation de Don Giovanni dans laquelle chante Stella, la femme dont est éprise Hoffmann. Ainsi, tout naturellement, les décors font de l'opéra dans l'opéra. Durant le prologue, on voit ainsi le décor de l'opéra de Mozart faire un travelling latéral. Quand il en sort, on voit les coulisses, ainsi que Hoffmann et ses amis en train de bien boire. Alors qu'il leur raconte l'histoire de Kleinzach à la cour d'Eisenach, son esprit se fixe sur trois femmes qu'il a aimées : Olympia, Antonia, Giulietta. Chacune est évoquée pendant un acte. Pour nous accompagner ainsi qu'Hoffmann dans ce retour en arrière, la Muse d'Hoffmann a pris l'apparence de Nicklausse, un ami d'Hoffmann.
Dans l'acte d'Olympia, le monde de l'opéra sera présent via des musiciens et un chef côté cour tandis que les invités de Spalanzani dansent dans de riches costumes. Hoffmann tombe amoureux de l'automate Olympia, une authentique poupée.
Dans celui d'Antonia, les personnages évoluent dans un décor de fosse d'orchestre et de scène d'opéra. La défunte mère d'Antonia était cantatrice : sa voix se fera entendre depuis cette scène alors qu'elle porte une robe à crinoline. Comme elle, Antonia mourra d'avoir trop chanté.
Enfin, dans celui de la vénale Giulietta, nous voyons la scène par l'arrière, avec des rangées de fauteuils dans le fond. Ces rangées peuvent osciller latéralement de façon à faire penser aux gondoles de Venise. À un moment, les chanteurs chantent pour nous, puis ils se tournent pour saluer les faux spectateurs. Les fauteuils étant de couleur rouge, on se croirait presque à un concert Salle Pleyel.
L'épilogue referme l'opéra conformément aux commencements. Ainsi, Hoffmann reprend où il en était de l'histoire de Kleinzach, la Muse remet ses habits antiquisants (et sa lyre). Elle s'en va avec Hoffmann sur la scène nue.
Tout ceci est servi avec d'excellents chanteurs. J'ai tout particulièrement apprécié Giuseppe Filianoti (Hoffmann), Ekaterina Gubanova (La Muse/Nicklausse), Laura Aikin (Olympia), Inva Mula (Antonia) et Franck Ferrari (Lindorf, Coppélius, Dr Miracle, Dapertutto).
L'opéra fantastique
ayant été créé après la mort du compositeur,
de nombreux remaniements ayant été faits en préparation de la création et
l'orchestration ayant dû être terminée par Ernest Guiraud, les commentaires
que j'avais déjà lus sur cet opéra ainsi que ceux du programme donnent
l'impression que l'ensemble est un sacré plat de spaghettis qui doit être
recomposé pour chaque production de cet opéra, au fil des différentes
traditions d'interprétations et de découvertes nouvelles de documents de
l'époque. Parmi les différentes curiosités, on peut noter qu'il existe des
versions avec passages parlés alors que dans d'autres (comme dans cette
production), ceux-ci sont transformés en récitatifs. Par ailleurs, la
longueur de l'acte d'Antonia est très variable : lors de la création, il
avait carrément été supprimé. Il souffre de la comparaison avec les actes
d'Olympia et d'Antonia ; musicalement, on a néanmoins la Barcarolle et
l'air de Dapertutto Scintille diamant (dont j'avais entendu parler
comme n'étant pas authentique
, mais que j'ai découvert avec surprise
au cours de la représentation). De même, je ne connaissais pas le sextuor
qui commence par Hélas ! mon cœur s'égare encore (tiens, en fait
peut-être que si, mais avec d'autres paroles...).
Parmi mes morceaux préférés dans cet opéra, il y a l'air de Nicklausse Vois sous l'archer frémissant. Si j'ai aimé le chant d'Ekaterina Gubanova, j'ai été très surpris, voire traumatisé, par les choix de direction du chef d'orchestre (Jesus Lopez-Cobos) : les violons se retrouvaient parfois escamotés par le volume sonore d'autres instruments.
Une nouvelle fois, le public scolaire s'est montré pénible. Une bonne
proportion des derniers rangs étaient occupés par des élèves. Sur ma
droite, il a fallu une petite remarque chuchotée bien sentie pour que je
n'entende plus le commentaire en direct de l'opéra. Par-devant moi, un
écran de téléphone portable est allumé : une fille y joue à un
casse-briques. Au moins, elle le fait silencieusement... Dans les
catégories d'âge plus évoluées, derrière moi, à propos de Nicklausse,
j'entends notamment On dirait que c'est une femme, non ?
. À ma
gauche, un couple devise sans trop faire de bruit, mais quand la demoiselle
a besoin d'un mouchoir, j'ai droit à l'attrapage de sac à main, l'ouverture
de fermeture éclair, le fouillage de sac... la fermeture éclair qui se
clôt, etc. Au secours !
2010-05-07 16:43+0200 (Orsay) — Culture — Musique
Salle Pleyel — 2010-05-06
Rolando Villazón, ténor
Lucy Crowe, soprano
Gabrieli Consort & Players
Paul McCreesh, direction
Œuvres de Händel
Hier soir, j'ai assisté au récital de Rolando Villazón salle Pleyel. Vu l'inflation des prix dans ce type de soirées (130€ en première catégorie), j'avais opté pour une place à 10€, achetée en janvier dans les dix minutes ayant suivi la réception du mail de la salle Pleyel annonçant la programmation de ce concert.
Je me suis donc retrouvé au deuxième balcon, au bout du tout dernier rang. J'y reste vu que le réseau de rambardes métalliques ne gêne absolument pas ma vue sur la scène. J'y suis très seul : l'essentiel des places proches sont vides, leurs occupants ayant préféré se replacer.
Quand les Gabrieli Consort & Players dirigés par Paul McCreesh commencent l'Arrivée de la Reine de Saba de l'oratorio Solomon de Händel, je suis surpris par le volume sonore, pas tant atténué que cela. Restait la question de savoir si cet effet acoustique se perpétuerait quand le ténor Rolando Villazón allait chanter (pas un mot sur ses problèmes de voix récents dans le programme). Aucun problème de ce côté-là, il se fait très bien entendre jusqu'au tout dernier rang. Les airs, tous händeliens, sont de plus en plus enthousiasmants (airs de Rodelinda, Serse, Ariodante, Tamerlano) jusqu'au deuxième bis qui déclenche une standing ovation dans les premiers rangs du parterre.
En complément de programme, il y avait aussi le Concerto grosso op. 3 nº2 en si bémol majeur et le concerto pour hautbois nº3 en sol mineur, HWV 287, et surtout deux airs de Cleopatra dans Giulio Cesare in Egitto superbement chantés par la soprano Lucy Crowe.
PS : En fait, on l'entend très bien même quand, de dos, il chante pour l'arrière-scène...
2010-05-04 00:30+0200 (Orsay) — Culture — Danse — Danses indiennes — Culture indienne
Théâtre de la Ville — Les Abbesses — 2010-05-03
Padmini Chettur, danse, chorégraphie, décor
Anoushka Kurien, danse
P. Akila, danse
V. Aarabi, danse
Preethi Athreya, danse
Maarten Visser, musique
Jan Maertens, lumières, décor
Vivek Narayanan, texte
Gilles Richard, direction technique
Beautiful Thing 1
Après Paperdoll en 2006 et Pushed en 2008, c'est Beautiful Thing 1, la dernière création de Padmini Chettur que je viens de voir aux Abbesses (première représentation). La pièce dure à peine plus d'une heure. Comme les fois précédentes, les bruits sont de Maarten Visser, mais si ceux de Pushed étaient parfois oppressants, à la limite du supportable, les sons de Beautiful Thing 1 ne font pas mal aux oreilles.
Les trois premiers quarts d'heure (environ) m'ont consterné. Il n'y a
absolument aucun contact entre les cinq danseuses. Équipées d'un micro,
elles prononcent des mots (left, elbow, hip,
etc.) en rapport avec les parties du corps qu'elles mettent en mouvement.
Comme dans les pièces précédentes, c'est très lent. Quelques phrases
énoncées comme des platitudes, comme I do not like or dislike those who
see me... even when I am on stage
(ou quelque chose d'approchant).
À un moment donné, les lumières s'éteignent presque totalement. Les cinq
danseuses vont réaliser une diagonale à reculons, très, très, len-te-ment.
Les mains vont commencer à s'effleurer. C'est à partir de là que je trouve
que cela devient un peu intéressant. La musique
fait alors penser à
des mécanismes en mouvement. Les danseuses se transforment plus ou moins en
automates.
Puis, alignées face au public, elles vont prononcer simultanément des mots (comme lotus, bird, death) tout en réalisant avec les mains et les bras des mouvements typiques de la façon dont ces éléments sont traditionnellement codifiés dans le bharatanatyam. On assiste ainsi à une sorte de lecture d'un dictionnaire pendant quelques minutes.
Enfin, les danseuses ayant enfilé un vêtement supplémentaire, elles vont s'amuser à tirer sur le leur, celui de la voisine, ce qui produit de drôles de contorsions (toujours en lenteur). L'une après l'autre, elles se retrouveront à plat ventre. On retrouve un final du genre de celui de Paperdoll avec un long travail au sol, alors que les lumières et les bruits s'évanouissent dans un très long fondu au noir.
Ailleurs : Bladsurb.
2010-05-01 00:36+0200 (Orsay) — Culture — Danse — Danses indiennes — Culture indienne
Théâtre de la Ville — Les Abbesses — 2010-04-30
Shantala Shivalingappa, chorégraphie, direction artistique
Savitry Nair, conseillère artistique
Nicolas Boudier, lumières
Shantala Shivalingappa, Nicolas Boudier, espace scénique
B. P. Haribabu, natuvangam (cymbales) et pakhawaj (percussions)
J. Ramesh, chant
N. Ramakrishnan, mridangam (percussions)
K. S. Jayaram, flûte
Swayambhu (kuchipudi)
Je reviens de la deuxième représentation du nouveau récital de kuchipudi de Shantala Shivalingappa Swayambhu (Celui qui est né de lui-même, un des noms de Brahmâ, mais aussi de Shiva). La première fois que j'ai vu du kuchipudi, c'était en juin 2007 pour Gamaka, un autre spectacle de cette danseuse (vu aux Abbesses et à l'amphithéâtre Bastille). Quelques autres spectacles de ce style de danse ont suivi, en Inde, à Chennai, au cours desquels Radha Prasanna s'était tout particulièrement distinguée.
Le kuchipudi est un peu aux danses indiennes ce que le bel canto est à l'opéra. Les mouvements sont amples, beaux, élégants et semblent moins voués à une forme narrative que peut l'être parfois le bharatanatyam.
Pour la première fois depuis longtemps aux Abbesses, ma place est au tout premier rang, au centre. Les conditions sont donc idéales pour apprécier ce récital.
Le spectacle commence par une invocation de Vani, la déesse des arts. La flûte, puis la voix et enfin les percussions se font entendre. Suit une pièce dédiée à Ganesha, celui qui écarte les obstacles. Sa trompe et ses oreilles sont évoquées avec sobriété par la danseuse.
La pièce la plus importante et la plus éblouissantes de ce récital est le Tarangam, dédié à Shiva. C'est celle que j'ai préférée. Elle commence par la récitation d'un mantra en sanskrit typique du shivaïsme. Quelques aspects et attributs de Shiva sont évoqués : ses cheveux, le croissant de Lune, le serpent, sa fureur. Cette pièce comporte bien sûr des passages pendant lesquels la musique devient purement rythmique. Une des originalités de la danse kuchipudi est représentée brillamment. Il s'agit de la danse sur un plateau en laiton auquel la danseuse impose des mouvements de rotation par à-coup qui lui permettent d'avancer, de reculer, de tourner sur elle-même, tout en présentant une chorégraphie avec la partie haute du corps. Le rythme qu'un des deux percussionnistes dicte aussi bien de la voix (en utilisant un système de correspondances avec certaines syllabes) que du pakhawaj (je n'ai pas très bien vu la différence avec le mridangam), la danseuse le reproduit. La complexité de certains passages semble particulièrement ardue. À partir de là, je suis déjà rassasié et pleinement satisfait par ce que j'ai vu ; le reste, c'est du bonus. (Je ne sais plus si c'est dans cette pièce-là ou dans une autre, mais j'ai été impressionné par la faculté de la danseuse d'incorporer des sauts à sa danse. Il me semble que c'est inhabituel dans les danses indiennes, en tout cas pour des sauts de cette amplitude.)
Les deux percussionnistes enchaînent avec un duo rythmique, à la fin duquel la danseuse interviendra depuis l'arrière de la scène, cachée derrière un voile. La pièce qui suit est narrative. La déesse Padmavati raconte à son époux Venkateshwara un mauvais rêve qu'elle a fait au cours duquel ils se disputaient. Si les premières pièces semblaient tout à fait dans la tradition, certains éléments de la chorégraphie de celle-ci sont probablement originaux. Si la façon de représenter une personne couchée (usuellement Vishnu) est typique, la danseuse me semble avoir intelligemment détourné cette figure pour représenter le sommeil de Padmavati. Certains épisodes sont très picturaux, comme celui où Padmavati s'embrouille entre ses différents produits de beauté, ce qui lui fait une drôle de tartine sur le visage. Cette pièce distrayante se finit par une sortie au son d'un épisode rythmique.
L'avant-dernière pièce est un Tillana : un morceau rapide de danse
pure
, accompagné de la voix qui répète une succession de syllabes
n'ayant pas de sens particulier. Cependant, cette pièce trouve le moyen
d'évoquer Kumara (un des fils de Shiva). Je connais mal son iconographie
(au-delà de ses représentations à six têtes). Néanmoins, il m'a bien semblé
reconnaître le paon, sa monture.
Dans la dernière pièce, on entendra même la voix de la danseuse, puisque dans cette pièce lente (Pasayadân, extrait d'une version de la Bhagavad-Gita en marathi : Dyaneshwari), elle chante le texte tout en dansant !
Je n'ai pas vraiment parlé du décor. Il est minimaliste. Je n'en dis pas plus, mais arriver à créer d'aussi beaux effets avec une telle économie de moyens, c'est une performance qui mérite d'être soulignée. Bref, un très beau spectacle (que je recommanderais vivement s'il restait la moindre place), utilisant quelques éléments apparemment originaux tout en respectant la tradition.
Cette page ne contient que les entrées du mois de mai 2010. Les entrées les plus récentes se trouvent là. Vous pouvez aussi naviguer vers avril 2010 ou juin 2010.
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