« Salomé à Bastille | Orchestre de Paris à Pleyel : Berlioz/Chopin/Beethoven »
2011-09-11 01:32+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra
Opéra Garnier — 2011-09-10
Klaus Florian Vogt, Tito
Hibla Gerzmava, Vitellia
Amel Brahim-Djelloul, Servilia
Stéphanie d'Oustrac, Sesto
Allyson McHardy, Annio
Bálint Szabó, Publio
Willy Decker, mise en scène
John Macfarlane, décors et costumes
Hans Toelstede, lumières
Alessandro Di Stefano, chef du chœur
Adam Fischer, direction musicale
Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris
La Clémence de Titus, Mozart
Après la rentrée à Bastille avec Salomé, c'était ce soir la première représentation de la saison à Garnier : La Clémence de Titus.
Les costumes ne font pas référence à l'époque romaine. Ils me rappellent
ceux qu'on pouvait voir dans Andrea Chénier. Bref, ils
renvoient plutôt à l'époque de la composition de l'opéra. Le décor est plus
ou moins conceptuel. Le sol est un rond en imitation marbre. Il est entouré
d'une structure en demi-cylindre penché qui donne l'impression d'être à
l'intérieur de la tour de Pise. Cette structure est en deux morceaux. Ils
peuvent être écartés pour permettre des entrées et sorties par l'arrière.
Au centre, un gros bloc parallélépipédique en marbre qui fait à première
vue penser à celui, noir, de 2001, l'Odyssée de l'espace. Il
s'agit en fait d'un projet de sculpture représentant Titus. Dans la
première scène, on écrit Titus
dessus. À la fin de l'opéra, le bloc
aura été sculpté pour représenter Titus et le nom qui n'était marqué que de
façon éphémère sera gravé en dur (en majuscules, avec un U
en forme
de U
et non de V
...). Entretemps, le bloc sera passé par des
phases intermédiaires. Je suppose qu'il faut comprendre que le caractère de
Titus est en formation et qu'il n'aura fait ses preuves comme souverain que
lorsqu'il aura pardonné à ceux qui avaient voulu sa mort. Alors, sa
sculpture monumentale pourra apparaître dans toute sa splendeur.
Un autre accessoire est manipulé presqu'en permanence : la couronne de Titus. D'autres que lui la voudraient bien. Lui hésite entre le pouvoir d'un côté et de l'autre l'amour et l'amitié. Donner la mort ou pardonner. Plaire au peuple ou persister à aimer Bérénice.
Pour ne pas déplaire aux Romains, il abandonne Bérénice (rôle muet interprétée par une comédienne non créditée) et décide d'épouser Servilia, qui aime Annio. Annio cache ses sentiments à Titus, mais Servilia avoue qu'elle aime déjà quelqu'un. Elle préfère laisser entendre à Titus d'honnêtes paroles déplaisantes plutôt que de lui plaire hypocritement. L'homme bon qu'il l'est l'en remercie. Son troisième choix est Vitellia. Celle-ci n'ayant pas supporté de n'avoir pas figuré dans les deux premiers choix, elle décide de comploter contre lui. Flattant Sesto (par ailleurs frère de Servillia et ami d'Annio), qui l'aime, elle arrive à le pousser à commettre l'irréparable. À la fin du premier acte, on comprend que Sesto n'a pas tué Titus, mais un autre homme qui portait son habit. Dans le deuxième acte, Titus finira par pardonner à tout le monde, Sesto ayant dans un premier temps endossé toute la responsabilité avant que Vitellia n'avoue elle-aussi.
Si c'est le dernier opéra seria de Mozart, l'intrigue est typique de ses opéras de jeunesse avec des histoires d'amour tordues qui se finissent bien façon deus ex machina (voir par exemple Lucio Silla).
Stylistiquement, je n'ai pas l'impression d'avoir découvert un autre Mozart que celui que je connaissais déjà. On retrouve ses effets habituels et la proximité furtive de certains passages avec d'autres déjà connus est assez frappante (notamment il y a un moment qui m'a beaucoup fait penser au tout début du Hm! hm! hm! hm! de La flûte enchantée). Cela dit, cela se laisse bien écouter. Le chef d'orchestre Adam Fischer, qui dirige de mémoire, paraît immédiatement très sympathique. Il bat la mesure de façon très claire, signale les entrées aux musiciens, félicite tel soliste pendant que le public applaudit un air. Le principal, c'est qu'il a réussi à maintenir mon attention pendant la durée de l'opéra, me faisant oublier que mes genoux cognaient contre le rebord du premier rang de l'amphithéâtre (au premier acte, le strapontin le plus à gauche, et la place voisine libérée à l'entr'acte pendant le deuxième).
La mise en scène n'a rien d'extraordinaire, mais elle se laisse regarder. Un point faible est l'usage un peu trop systématique de précipités. Certes, cela fait paraître d'assez jolis rideaux peints dans un style vaguement expressionniste. Je ne sais pas s'il est courant de représenter sur scène une Bérénice muette. En tout cas, j'ai trouvé que cela fonctionnait très bien. Le personnage de Titus passe un certain temps au sommet du bloc de marbre qui deviendra à la fin une statue à son effigie. Chanteurs ayant le vertige s'abstenir. Globalement, sans m'enthousiasmer, cette mise en scène ne m'a pas trop déplu.
Stéphanie d'Oustrac (Sesto) domine assez largement le plateau vocal. La dernière fois que je l'avais entendue, c'était dans Armide de Lully. J'ai été très content de la réentendre ce soir. Lors de son air Parto, parto au premier acte, j'ai eu comme l'impression que la soirée commençait véritablement. J'ai également eu un certain plaisir à réentendre Amel Brahim-Djelloul (Servilia). Dans le rôle secondaire de Publio, la basse Bálint Szabó m'a bien plu. Les trois autres chanteurs m'ont semblés plus inégaux au cours de la soirée, mais ils ont eu tendance à se bonifier après l'entr'acte. Le grand air de Vitellia (Hibla Gerzmava) au deuxième acte a effacé mon impression mitigée du premier acte. Je n'ai pas été complètement convaincu par Klaus Florian Vogt (Tito), mais c'est plus une question de goût personnel (je n'aime pas le timbre de sa voix) qu'autre chose. S'il a moins brillé au premier acte, c'est peut-être aussi tout simplement parce que son personnage y est plus fragile, moins déterminé qu'il ne le sera lors du deuxième acte, en particulier quand il devra prendre une décision à propos de Sesto.
J'aurais bien aimé écouter cet opéra ! J'ai entendu pour la première fois KF VOgt dans le Vaisseau Fantôme, l'année dernière, et m'étais fait la remarque qu'il avait une voix de mozartien. Dans un contexte mozartien, peut-être sa voix parait wagnérienne ?
(oui, Adam Fischer est très sympathique, je me réjouis de le revoir sur le ring budapestois - me suis résignée à potentiellement craquer..)
A priori, je n'avais pas prévu d'y aller (je ne suis pas très fan de Mozart), mais comme les places de catégories 5 ont été mises en vente sur Internet et que je suis tombé sur mon strapontin préféré, j'y suis allé... Sinon, il doit encore être possible de trouver des places à 10€ aux guichets.
Vitellia est encore soprano au I (si naturels en pagaille, contre-ré souvent coupé dans le trio)et mezzo au II (un sol grave très exposé) donc très difficile à distribuer...
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