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2012-09-15 22:19+0200 (Orsay) — Culture — Musique
Théâtre des Champs-Élysées — 2012-09-14
Orchestre de chambre de Paris
Sir Roger Norrington, direction
Symphonie nº33 en si bémol majeur, KV 319 (Mozart)
Emanuel Ax, piano
Concerto pour piano nº25 en ut majeur, KV 503 (Mozart)
Variations pour piano seul en fa mineur, Hob.XVII/6 (Haydn)
Symphonie nº36 “Linz”en ut majeur, KV 425 (Mozart)
Une heure avant le début de ce concert eut lieu une petite mais
néanmoins intéressante rencontre avec le chef d'orchestre Sir Roger
Norrington et le pianiste Emanuel Ax qui se sont tous les deux exprimés en
français. Peu de monde dans le public pour cette rencontre, et surtout peu
de jeunes... Tout en rendant hommage à Harnoncourt, le chef de file de ce
mouvement, Roger Norrington a expliqué quelques aspects de ce travail de
retour à des interprétations plus respectueuses du contexte dans lequel les
œuvres de Mozart, Haydn et d'autres avaient été interprétées à l'origine.
Un de ces aspects est l'abandon du vibrato que l'on est habitué à
entendre et qui n'est qu'une mode relativement récente. Il a ainsi expliqué
qu'en écoutant des enregistrements de la première moitié du vingtième
siècle, tout simplement, on pouvait voir cette tendance apparaître, plus ou
moins rapidement dans les différents grands orchestres, les derniers à s'y
être mis étant les Viennois, vers les années 1940. Un autre aspect
important est la question de l'effectif des musiciens. Il a donné moult
exemples d'effectifs utilisés pour les symphonies de Haydn, Mozart,
Beethoven, Brahms... Une configuration assez standard au cours du
dix-neuvième siècle était d'utiliser 8 premiers violons, ce qui sera le cas
au cours du concert. Et puis, il y eut une inflation du nombre
d'instruments à cordes. Si jamais on assistait à un concert avec 16
premiers violons, le double, et qu'il n'y aurait que huit instruments à
vents, il a plaisanté en nous encourageant à crier Maestro ! Où sont les
hautbois ?
, étant entendu que si on double le nombre de cordes, il faut
aussi doubler le nombre de vents (ou souffler deux fois plus fort...). La
discussion a également porté sur l'interprétation proprement dite : par
exemple, quelles nuances utiliser en cas d'absence d'indications
explicites ? Plutôt que de s'en tenir aux traditions d'interprétations du
baroque jusqu'aux années 1950, il convenait de revenir aux sources
d'origine : édition critique de partitions Urtext, utilisation de
livres de pédagogie musicale de l'époque (comme la méthode de violon du
père de Mozart).
Les deux premiers rangs de musiciens forment un fer à cheval au centre duquel s'installent Roger Norrington. Les huit premiers violons sont à sa gauche, les sept seconds à sa droite. Les six altos sont devant lui, à sa droite et les cinq violoncelles à sa gauche. Les autres musiciens sont debout, les deux hautbois à gauche, les deux bassons à droite. Les trois contrebasses sont sur les côtés et les deux cors ont pris place au fond.
Ce qui m'a le plus marqué peut-être dans la première œuvre au programme, la Symphonie nº33 de Mozart, c'est la limpidité des phrasés et plus particulièrement le contraste qui résulte de l'alternance entre des suites de notes détachées et d'autres au contraire très liées. L'absence de vibrato participe sans doute à l'impression de légèreté sans pesanteur que m'inspire le son de l'orchestre. La gestuelle du chef est toute différente de ce que j'ai pu voir par ailleurs. Dans les deux symphonies de Mozart au programme, aucunement embarassé par un pupitre ou une partition, il peut se tourner d'un côté ou de l'un autre pour encourager les premiers ou les seconds violons. Les mouvements des mains et du corps me paraissent assez mystérieux. L'important est que cela fonctionne ! et que tous les musiciens paraissent en confiance. Si l'enthousiasme du premier violon Deborah Nemtanu est constant, concert après concert, j'ai été agréablement surpris par le fait que cet enthousiasme était cette fois-ci manifestement très largement partagé par les autres musiciens de l'orchestre, qui n'hésitent pas à dandiner des épaules ou à se pencher vers l'avant. À cet enthousiasme des musiciens s'est joint celui du public qui a applaudi entre les mouvements. Il s'est malheureusement trouvé quelques ridicules grincheux antiphraseurs pour demander très bruyamment le silence.
Pour le concerto pour piano nº25, le pianiste Emanuel Ax bien sûr, mais aussi une flûtiste, une timbalière et deux trompettistes ont rejoint les autres musiciens. Dans le premier mouvement, on entend un thème dont les huit premières notes rappellent celles de La Marseillaise, qui n'avait pas encore été composée... De tout le concert, le deuxième mouvement, lent, de ce concerto, sera celui qui me procurera le plus de plaisir, la délicatesse et la bonhomie du pianiste se joignant à l'orchestre qui flotte dans une atmosphère éthérée. Dans ce concerto, j'ai également été très impressionné par la flûtiste.
Après l'entr'acte, le pianiste a interprété une œuvre pour piano pour Haydn. C'est comme un rêve agréable dont on ne se souvient plus au réveil. Qu'en dire de plus ?
Le concert s'est conclu par la symphonie nº36 “Linz” de Mozart. Cet aspect était déjà remarquable dans les autres œuvres orchestrales au programme, mais ici j'ai apprécié les jeux de questions et réponses entre les différents groupes d'instruments, en particulier les hautbois et les bassons (qui se faisaient face, debouts, des deux côtés de la scène). La fin très très énergique du Presto faisait plaisir à voir, et à entendre !
Après ce concert, je crois que je ne pourrai plus dire que je déteste Mozart tout en adorant Haydn.
Les théories de Norrington sur le vibrato sont ineptes. On peut lire sur classicstoday.com un très long essai sur la question du vibrato orchestral, qui a selon toute vraisemblance toujours existé.
En lisant, dans un programme de concert de l'OP de Vienne, un article sur Bruno Walter, je suis tombé sur un extrait d'une de ses lettres, rapportant un voyage à Vienne dans les années 1910 : il y disait à quel point l'art du vibrato de l'orchestre l'avait impressionné.
Il existe également un concert filmé pour le cinéma de la Staatskapelle de Dresde avec Fritz Busch, en 1932. Ils donnent l'ouverture de Tannhäuser et on voit très bien, à un moment, les violoncelles jouer avec un généreux vibrato. Busch était réputé pour être un styliste rigoureux, et la Staatskapelle est le plus vieil orchestre d'Allemagne, fier de sa tradition : bref, si le vibrato d'orchestre avait été une invention récente, inconnue du temps de Wagner, il n'aurait pas été employé dans cet enregistrement...
Norrington est un sinistre charlatan. Il est désolant qu'il continue à propager de telles sottises (curieusement, je ne l'avais pas trouvé si mauvais comme chef en l'entendant avec le RSO Stuttgart il y a quelques années).
Je n'ai pas trouvé le très long essai, mais une suite de billets <URL: http://www.classicstoday.com/?s=vibrato+norrington >
.
Si, ça se trouve, en bas à droite, il y a une rubrique "orchestral vibrato". Ce qui s'y trouve n'est pas une vérité révélée, mais c'est intéressant.
Si ça se trouve, ça fait plus de 500 pages...
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