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2017-06-19 23:00+0200 (Orsay) — Culture — Danse — Danses indiennes — Culture indienne
J'ai pris un certain retard dans la rédaction de comptes-rendus de spectacles. À l'occasion de la rédaction de celui concernant le récital d'Armelle Choquard et Kalpana, je reviens rapidement aussi sur celui donné il y a environ un an au Centre Mandapa par Kalpana et deux de ses élèves (Fanny et Iran).
Centre Mandapa — 2016-06-05
Kalpana, Iran Farkhondeh, Fanny Wiard, bharatanatyam
V. S. Muthuswamy Pillai, chorégraphies
Kalanidhi Narayanan, chorégraphie du Javali
Sangeeta Isvaran, chorégraphie du Padam “Yaare Kaagilum”
Alarippu (Tisra Ekam Tala) dansé par Kalpana
Muruga Kautwam (Raga Shanmukhapriya, Chatushra Ekam Tala) dansé par Fanny
Varnam “Sakiye Inda Velaiyil...” (Raga Anandabhairavi, Adi Tala) dansé par Iran
Padam “Yaare Kaagilum” (Raga Begada, Mishra Chapu Tala) dansé par Fanny
“Kalai Tooki” (Raga Harikamboji, Adi Tala) dansé par Fanny
Javali “Smara Sundaranguni” (Raga Paras, Adi Tala) dansé par Kalpana
Tala Vadyam (Panch-nadai Adi Tala) dansé par Kalpana, Fanny & Iran
Après une prière chantée Mahaganapati Manasa (Muthuswami Dikshitar), Kalpana a interprété l'Alarippu (Tishra Ekam). Muthuswamy Pillai a beaucoup innové en composant de nouveaux Alarippus et surtout en en proposant des chorégraphies extrêmement créatives qui s'écartent radicalement du vocabulaire habituellement utilisé pour ce type de pièces. Cependant, la chorégraphie de cet Alarippu utilisant la composition traditionnelle en Tishra Ekam est on ne peut plus traditionnelle, tout au plus utilise-t-il quelques diagonales et quelque motif rythmique particulier dans la phase de découpage de l'espace en troisième vitesse. Dans l'interprétation de Kalpana, j'apprécie particulièrement le phrasé étiré dans la première vitesse de la séquence utilisant les Kuttadavus.
Fanny a interprété ensuite un Kautwam dédié à Muruga, le fils de Shiva reconnaissable aux mudras Shikhara et Trishula. La danseuse ne paraît pas absolument à l'aise dans ses toutes premières frappes, mais la situation s'arrange très rapidement et j'apprécie particulièrement les adavus à une seule main caractéristiques du style de Muthuswamy Pillai. La monture de Muruga, le paon, est représentée dans ce Kautwam, mais les mouvements sont beaucoup plus martiaux que dans une version que j'ai pu observer dans la salle de danse du fils du chorégraphe, M. Selvam, dans laquelle les mouvements du paon étaient suggérés par une délicieuse ondulation des bras de son élève.
Je reviens maintenant sur la pièce principale de ce récital, le Varnam en Raga Anandabhairavi “Sakiye Inda Velaiyil” dansé par Iran. En dehors de rares spectacles de danseuses indiennes visitant le Centre Mandapa (et autrefois le Musée Guimet), on a rarement l'occasion de voir à Paris un Varnam aussi bien interprété ! La composition est attribuée au Thanjavur Quartet (mais je ne me risquerai pas à préciser lequel des quatre frères l'a composé : les sources divergent). Sans même parler des compositions rythmiques (tirmanams) de Muthuswamy Pillai, ce Varnam présente une particularité rythmique qui en fait une exception parmi les compositions de musique carnatique : le texte de la composition ne commence pas sur le premier temps. (C'est le deuxième Varnam que je vois qui présente cette particularité, après “Manavi Chekonaradha” (Raga Shankarabharanam) dansé par Lavanya Ananth.) Dans certaines versions de ce Varnam en Anandabhairavi, le texte des différentes parties du Pallavi et de l'Anupallavi commencent entre le deuxième et le troisième temps. Dans celle-ci, le texte commence sur le deuxième temps. Ainsi, les quatre premiers passages rythmiques (tirmanams) se finissent juste avant le deuxième temps. Habituellement, les tirmanams sont introduits par une formule rythmique comme “Dhalan-gu takadiku takatadi kitatom-” qui se finit juste avant le premier temps, là où commence le tirmanam. Cette règle, que je croyais absolue, trouve une exception dans ce Varnam, puisque Muthuswamy Pillai fait commencer les quatre premiers tirmanams non pas sur le premier temps, mais sur le deuxième temps. (Ainsi, le “Dhalangu” ne s'étend pas sur les septième et huitième temps, mais sur le huitième et le premier temps.) Je conjecture donc que ces Tirmanams n'ont pas été composés spécialement pour ce Varnam par Muthuswamy Pillai, mais qu'il a plutôt recyclé des Tirmanams composés préalablement en Adi Tala pour des Varnams qui ne présentaient pas la particularité rythmique de ce Varnam en Anandabhairavi. Ces tirmanams, dont j'ai pu étudier en détail la composition rythmique entretemps, sont magnifiquement architecturés. Les deux premiers commencent avec des subdivisions binaires des temps (Chatushra nadai), puis basculent en Tishra-nadai (subdivisions en trois ou six). Le troisième jati “Ta dit ta gadim dim kitataka...” est une véritable merveille : sa formule conclusive commence en Chatushra-nadai et se finit en Tishra-nadai. Comme cette formule est répétée trois fois, on trouve au cours de la récitation de nombreux allers-retours entre Chatushra-nadai et Tishra-nadai, ce qui est un procédé rare à l'intérieur d'un Tirmanam. La construction de ce Tirmanam donne une certaine idée du génie de Muthuswamy Pillai... Je regrette cependant qu'à chaque fois qu'il bascule en Tishra-nadai, il ralentisse aussi légèrement le tempo de la pulsation principale. Ce type d'irrégularité dans le tempo est pour moi un frein pour apprécier dès le premier visionnage l'essentiel de la beauté rythmique des compositions, mais très rares sont les interprètes qui parviennent à conserver une régularité métronomique quand ils passent de subdivisions des temps en quatre à des subdivisions en trois et inversement. Contrairement aux précédents, le quatrième jati est entièrement en Chatushra-nadai, mais cette fois-ci les subdivisions en huit des temps sont par moments regroupés en trois, ce qui est du plus bel effet. Le Charana jati possède aussi une architecture magnifique tout en Tishra-nadai.
L'interprétation de ce Varnam par Iran a été magnifique. Mon expérience de spectateur a cependant été perturbée par ce qui m'a semblé être un problème dans la sonorisation : les parties mélodiques étaient parfaitement écoutables, mais la voix de Muthuswamy Pillai était difficilement audible dans les Tirmanams. En particulier, les formules introductives “Dhalan-gu takadiku takatadi kitatom-” étaient essentiellement inaudibles, ce qui est très problématique pour pouvoir apprécier le rythme des compositions lors de la première écoute. Il est possible que cela ait gêné aussi la danseuse, puisque que parmi les très rares éventuels défauts dans son interprétation, il m'a semblé, mais je peux me tromper, que ses marches en arrière à contretemps précédant les Tirmanams n'étaient pas synchronisées avec la musique.
Dans la première partie du Pallavi, l'héroïne est séparée de son amant. Sa souffrance est notamment illustrée par le fait qu'elle ne supporte plus le parfum des fleurs. Son amie ne l'aide pas. Dans la deuxième partie, elle exhorte son amie à aller lui dire de venir. Ce n'est peut-être pas dans cette section du texte de la composition, mais la chorégraphie décrit la ville céleste de son amant. Dans la première partie de l'Anupallavi, on s'émerveille de la beauté de la ville de Rajanagar où réside Rajagopalan dont la deuxième partie de l'Anupallavi évoque le disque et la conque, attributs de Vishnu. J'ai apprécié l'engagement émotionnel de la danseuse dans les sections expressives. Le plus beau moment du Varnam a sans doute été pour moi le Tattu Muttu du Muktayi Sahitya “Nagarikamighavum...”. Il s'agit d'une partie hybride puisque les pieds exécutent des mouvements rythmiques et le haut du corps exprime les émotions du personnage. Il est fréquent que l'aspect rythmique prenne légèrement le dessus par rapport à l'expression des sentiments dans ce type de séquences, mais dans les autres Tattu Muttu de ce Varnam, et tout particulièrement dans celui-ci, la danseuse était complètement immergée dans le personnage. Tout en exécutant des mouvements de pieds sur place, les gestes de l'héroïne cherchant l'union avec son amant étaient accompagnés de mouvements du torse d'une exceptionnelle intensité émotionnelle. Je ne crois pas avoir jamais vu chez d'autres interprètes quoi que ce soit de comparable. (Le seul point technique que je pourrais éventuellement critiquer est le faible degré d'ouverture des pieds, et ce d'autant plus que l'on avançait dans le Varnam, la fatigue s'accumulant. Je ne suis pas du tout pour un en-dehors parfait (180°) comme ceux des danseurs de ballet, ce qui est à la longue dangereux pour les genoux pour une danse comme le bharatanatyam qui comporte de nombreuses frappes de pieds. Ici, on était souvent très proche d'une ouverture naturelle (90°), ce qui est un excès inverse.)
Dans la deuxième grande partie du Varnam, le tempo s'accélère. Dans l'alternance entre passages expressifs et techniques, j'ai particulièrement apprécié que dans la danse pure, on ne perde jamais complètement de vue les sentiments de l'héroïne. Celle-ci est frappée par les flèches de Kamadeva. Pendant la nuit, alors qu'elle est séparée de son amant, son sommeil est perturbé par le bruit d'un oiseau. Elle supplie encore son amie d'aller le chercher pour qu'ils soient réunis, afin de pouvoir chanter ensemble ?!
Mes souvenirs de deux des pièces suivantes Yaare Kaagilum, Smara Sundaranguni sont trop lointains et imprécis pour que j'en rende compte. En revanche, la pièce “Kalai Tooki” dansée par Fanny m'a semblé absolument sublime. Son interprétation est un magnifique équilibre entre la danse technique et l'intensité émotionnelle dans l'évocation des divinités. On trouve là un juste sens du détail et des micro-mouvements. Il ne s'agit pas exactement d'une pièce narrative. Il y a bien un personnage, qui est un dévot, mais la danse s'arrête un instant sur les émotions qui le traversent. Il exprime l'émerveillement qu'il ressent en pensant à Shiva, dans sa forme qui réside à Chidambaram, dansant le pied gauche levé. La chorégraphie évoque son fils Muruga, son tambour Damaru, la rivière Ganga qui s'écoule de son chignon, sa peau de tigre, sa monture Nandi, etc. La pièce inclut aussi l'épisode mythologique dans lequel Vishnu et Brahma cherchent en vain l'extrémité de la colonne de lumière en laquelle Shiva s'était transformé.
Le récital s'est conclu par une redoutable pièce de danse pure interprétée par les trois danseuses, intitulée Tala Vadyam et dont les différentes sections utilisaient des subdivisions des temps en 4, 3, 7, 5 ou 9.
Ailleurs : Sunil Kothari.
⁂
Centre Mandapa — 2017-05-14
Armelle et Kalpana, bharatanatyam
V. S. Muthuswamy Pillai, Kalanidhi Narayanan, Sucheta Chapekar, chorégraphies
Shloka “Gururbrahmā” dansé par Armelle & Kalpana
Ganapati Kautvam (Chatushra Ekam Tala) dansé par Armelle & Kalpana
Sarasvati Kautvam (Rupaka Tala, composition de Sucheta Chapekar) suivi de Māta Sarasvatī (Raga Saraswati, Chautal, composition de Prabha Atre), dansé par Armelle
Jatiswaram (Raga Yedukula Kamboji, Adi Tala) dansé par Kalpana
Varnam (Raga Anandabhairavi, Adi Tala) dansé par Armelle
Krishnakarnamritam “Ramo Namo Bhabhuva” (Ragamalika) dansé par Kalpana
Kirtana (Raga Shanmugapriya, Rupaka Tala) dansé par Kalpana
“Kalai Tooki” (Raga Yedukula Kamboji, Adi Tala) dansé par Armelle
Shloka “Nityanandakari” (Raga Mohana) dansé par Armelle & Kalpana
Les danseuses Armelle Choquard et Kalpana, qui ont toutes les deux été disciples de Muthuswamy Pillai et Kalanidhi Narayanan ont présenté un récital commun. Le programme inclut aussi des pièces de Sucheta Chapekar dont Armelle est depuis devenue la disciple.
Le récital commence par une prière chantée dédiée à Ganesh ; je crois reconnaître la magnifique voix du chanteur du Varnam en Anandabhairavi dont il a été question plus haut. Les deux danseuses entrent ensuite en scène, Armelle en costume rouge et Kalpana en bleu pour le Shloka “Gururbrahmā”. Je n'avais vu Armelle qu'en 2015 lors d'un stage à Paris avec Sucheta Chapekar qui nous avait transmis l'Abhinaya-Pada “Aghaṭita saye śivalīlā”. C'est donc la première fois que je la vois danser lors d'un spectacle. J'apprécie son incarnation sobre dans cet hommage au guru.
Les deux danseuses interprètent ensuite à un tempo modéré Ganapati Kautvam, une chorégraphie de Muthuswamy Pillai, qu'elles récitent toutes les deux dans une sorte de jeu de questions et réponses. J'admire particulièrement la récitation d'Armelle dont l'intonation sonne très indienne.
Armelle interprète ensuite deux pièces enchaînées dédiées à la Déesse Sarasvati. La première est une magnifique chorégraphie de Sucheta Chapekar qui est aussi l'auteure de cette courte composition purement rythmique en Rupaka Tala (6 temps), puisque conformément à la tradition Thanjavur, le Kautvam n'est pas chanté, mais récité. Si ses mouvements du haut du corps sont magnifiques, dans l'exécution des adavus sur les onomatopées et dans l'illustration des attributs de Sarasvati sur le court texte en marathi, on sent malheureusement des hésitations qui rendent la pulsation des frappes de la danseuse quelque peu irrégulière dans cette pièce. À cette pièce dont la musique s'inscrit dans le contexte carnatique habituel à la danse bharatanatyam s'enchaîne une autre pièce dédiée à Sarasvati (et en Raga Sarasvati) venant de la musique du Nord de l'Inde. Cette composition Māta Sarasvatī est l'œuvre de la chanteuse hindustani Prabha Atre. Sucheta Chapekar appréciait cette composition et décida de la chorégraphier. Il existe plusieurs versions de cette chorégraphie. Celle que j'ai apprise avec elle à Pune est un बंदिश की सरगम (Bandish ki sargam), c'est-à-dire une pièce comportant un certain nombre de séquences solfiées (Sargam) insérées dans cette composition (Bandish), ce qui fait de ce type de pièce un homologue du Jatiswaram dans le format de récital développé par Sucheta Chapekar. La version dansée par Armelle n'inclut pas de passage de danse pure et se concentre donc sur l'aspect Bandish, sur un rythme à douze temps (Chautal ou Ektal) ; en plus des Sthayi et Antara, sa version inclut une troisième strophe que je ne connaissais pas et qui commence par “Mayura Vahini”. Les mouvements du haut du corps de la danseuse sont très beaux, j'apprécie particulièrement sa façon de montrer que Sarasvati a une voix aussi douce que le miel sur “Va Devi Madhubashani”. Cependant, je suis assez déçu par les frappes de pieds qui interviennent lorsque le texte est récapitulé en Tattu Muttu s'enchaînant avec une formule rythmique semblable à un Arudi. Je ne saurais dire si les frappes de pieds étaient au bon endroit musical, parce les frappes manquaient de force et étaient toutes sensiblement de la même intensité. En tant que spectateur, je considère que les Tattu Muttu doivent davantage s'entendre que se voir. Quand on fait “Takadimi Takadimi Tai tai didi tai” comme sur la phrase “Mata Sarasvati Devi”, il faut que l'on entende un accent particulier sur la syllabe Ta dans Takadimi. C'est particulièrement important parce que suivant les principes qui lui ont été enseignés par K. P. Kitappa Pillai, Sucheta Chapekar chorégraphie les Tattu Muttu en suivant la prosodie du texte chanté, et c'est particulièrement frappant dans la phrase Sakala Gyani Vidya Dani dont le Tattu Muttu associé est une série de quatre Takita, un pour chaque mot. Je ne dis pas qu'il faille tout frapper comme une brute, mais il me semble important d'accentuer certaines frappes pour préserver une composante esthétique essentielle de ces Tattu Muttu.
Kalpana a dansé un Jatiswaram. Dans les diagonales qui sont tracées dans les séquences de transition, j'ai particulièrement apprécié le jeu sur le regard, consistant parfois à regarder dans la direction indiquée par la main, ou contraire dans la direction opposée à ce qu'on attendrait. La séquence d'introduction de ce Jatiswaram est étonnamment longue, et le Tirmanam (la seule section de la pièce qui n'est pas chantée, mais récitée) intervient assez tardivement par rapport à ce qu'on voit habituellement dans ce type de pièces. Malheureusement, comme dans le Varnam discuté dans la première partie de ce billet, la voix enregistrée de Muthuswamy Pillai était essentiellement inaudible. Je ne pouvais me fier qu'au son des cymbales et je me suis surpris à un moment donné à entendre très distinctement un motif utilisant des groupes de 5 subdivisions qui ne correspondait pas à ce que je voyais au niveau des pieds. Dans certains adavus exécutés à grande vitesse, le regard de la danseuse ne suivait plus la main, ce qui est assez perturbant à regarder, notamment dans le premier Kuttadavu (le remplacer par la version à une seule main de cet adavu règlerait le problème). Cependant, ce type de pièce est très difficile et exige une grande endurance et, Kalpana faisant preuve d'une grande assurance, son interprétation restait très convaincante.
Armelle a ensuite interprété un Varnam en langue marathi en Raga Anandabhairavi et Adi Tala (ce n'est pas le même que dans la première partie de ce billet). Comme Armelle l'expliquera très bien quelques semaines plus tard lors d'une journée d'étude du projet DELI, le texte de la composition fait dire à l'héroïne qu'elle est satisfaite par Krishna, mais dans la chorégraphie de Sucheta Chapekar, le sens dévie progressivement, et il faut comprendre tout le contraire. Dans le plus beau développement du Varnam (sur la même ligne de texte), l'héroïne souhaite que Krishna lui rapporte une fleur, mais il lui rapporte en fait l'arbre tout entier qu'il installe dans son jardin. Elle est ravie, mais au bout d'un moment, elle remarque que quelques fleurs tombent dans le jardin de la voisine... Les passages expressifs de ce Varnam étaient très beaux et la danseuse a fait preuve d'une très élégante technique dans les Tirmanams. Cependant, ses frappes de pieds perdaient en qualité lors de l'exécution de l'Arudi qui sert de transition entre un Tirmanam et la phrase suivante. Malgré la fatigue engendrée par l'exécution de Tirmanams difficiles, il faudrait réussir à garder un peu d'énergie pour exécuter la formule rythmique complexe qu'est l'Arudi avec vigueur et enthousiasme. Là, les frappes étaient tellement peu marquées que je n'ai pas réussi à savoir avec certitude quand est-ce que cet Arudi se finissait. (Cela dit, à part moi, je ne pense pas que la réponse à cette question intéresse grand'monde, donc ce n'est pas bien grave...)
Kalpana a ensuite interprété une pièce dans laquelle Yashoda essaye d'endormir Krishna en lui racontant l'histoire de Rama. Sita est trouvée par Janaka dans un sillon qu'il creuse dans la Terre. Vishvamitra, le guru de Rama, l'emmène à Mithila pour qu'il participe au Svayamvar de Sita : seul celui qui pourra soulever l'arc de Shiva que possède Janaka pourra l'épouser. Plus tard, influencée par la bossue Manthara, Kaikeyi, une des épouses du père de Rama, le force à envoyer Rama en exil pour que son propre fils Bharata soit nommé prince héritier à la place de Rama. L'exil a commencé : Rama, son épouse Sita et son frère Laksmana sont dans la forêt. L'histoire se poursuit jusqu'à l'enlèvement de Sita par Ravana. Kalpana a magnifiquement interprété cette pièce... deux fois. La pièce proprement dite est accompagnée de Shlokas en sanskrit (une forme musicale dans laquelle il n'y a pas de pulsation régulière). Préalablement, Kalpana a présenté la pièce, mais la présentation a probablement été aussi longue que l'interprétation de la pièce elle-même. La première fois, elle a utilisé sa voix (en français) pour raconter l'histoire qu'elle interprétait en même temps avec des mouvements de tout le corps et en utilisant l'espace de la scène. Il s'agissait d'une interprétation en mode Sutradhar, comme un conteur. C'était extrêmement convaincant ! J'ai trouvé dommage que la pièce soit réinterprétée à nouveau, sa voix étant remplacée par la musique enregistrée des Shlokas sanskrits. N'ayant plus à raconter l'histoire par la parole, Kalpana était alors davantage dans l'incarnation des personnages, donc il s'agissait bien d'une interprétation différente de la première. Cependant, en tant que spectateur, je pense qu'il aurait été plus intéressant (et moins répétitif) d'aller jusqu'au bout de la logique et d'interpréter cette pièce en ne donnant que la version avec voix en français.
Kalpana a ensuite interprété un Kirtana dédié à la Déesse. Je n'ai pas été totalement convaincu par l'interprétation des passages expressifs dans cette pièce dévotionnelle. Les poses adoptées par la danseuse étaient vraiment très belles, mais il manquait à mon goût peut-être un tout petit peu de liant pour que cet aspect de la pièce prenne complètement forme. La pièce étant de Muthuswamy Pillai, la chorégraphie a comporté une proportion très importante de danse pure !
Armelle a ensuite dansé “Kalai Tooki”. C'était tout simplement fantabullissime ! Un grand moment d'émotion devant la beauté de cette évocation de Shiva. (Ce n'est qu'en rédigeant la première partie de ce billet que j'ai pris conscience que j'avais déjà vu cette pièce, cf. plus haut.)
Ce beau récital s'est conclu par un Shloka dédié à Annapurna, la forme de la Déesse qui réside à Kashi (Varanasi) et qui enlève la peur chez ses dévots.
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