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Matthias Goerne à Pleyel

2012-04-13 12:56+0200 (Orsay) — Culture — Musique

Salle Pleyel — 2012-04-12

Roland Daugareil, violon solo

Orchestre de Paris

Paavo Järvi, direction

Manfred, ouverture op. 115, orchestration de Gustav Mahler (Schumann)

Matthias Goerne, baryton

An Silvia (Schubert)

Traum durch die Dämmerung (Strauss)

Das Rosenband (Strauss)

Freundliche Vision (Strauss)

Greisengesang (Schubert)

Heimliche Aufforderung (Strauss)

Ruhe, meine Seele (Strauss)

Im Abendrot (Schubert)

Allerseelen (Strauss)

Tränenregen, extrait de La Belle Meunière (Schubert)

Morgen! (Strauss)

Symphonie nº1, en si bémol majeur, dite du Printemps (Schumann)

L'ouvreur du premier balcon me suggérant de me replacer, j'ai suivi ses conseils, et même au delà puisque je suis descendu au parterre de la Salle Pleyel et y ai trouvé une place au centre, ni trop loin ni trop près de la scène. Depuis le concert de rentrée de 2010 où s'était notamment joué Kullervo (Sibelius), je n'avais pour ainsi dire plus vu le dos Paavo Järvi lorsqu'il dirige l'Orchestre de Paris, puisque je suis le plus souvent à l'arrière-scène pour écouter cet orchestre. Le moins que l'on puisse dire est qu'il ne fait pas du tout la même impression de dos que de face ! Ceux qui n'ont jamais été à l'arrière-scène doivent s'imaginer que c'est un honorable homme honnête et droit. Ah, s'ils savaient comment l'espiègle utilise sa bouche pour lancer un pizz. de contrebasses ou un solo de basson...

Le début de l'ouverture Manfred m'a plu, et puis c'est devenu un gros fourbi schumannien qui m'a autant insupporté qu'il a failli m'endormir.

Le baryton Matthias Goerne a ensuite pris place entre le premier violon et le chef. Son programme est constitué de Lieder orchestrés de Schubert et Strauss. Avant le concert, je disais à “Grignotages” et à Klari qu'il faudrait vraiment que Goerne chante divinement bien pour que je ne m'assoupisse pas. C'est bien l'impression qu'il m'a faite ! Après des premiers Lieder sur le mode Aimons-nous follement dans l'herbe, les thèmes dériveront vers du moins joyeux.

Je ne suis d'habitude pas un admirateur inconditionnel de Matthias Goerne, mais l'écouter et le voir de près a été une merveilleuse expérience. Dans ce cycle de Lieder, les tempis ont systématiquement été très lents. Pas d'acrobaties vocales à signaler. Une bonne respiration est prise, la voix s'installe, la phrase musicale se développe lentement. Chaque inflexion semble réfléchie. Le chanteur se transforme presqu'en danseur. Il se penche d'un côté ou de l'autre, reprend appui sur ses pieds. Surtout, il accompagne son chant de gestes des mains qui semblent l'aider à modeler ses phrasés et la majestueuse courbe de sa ligne vocale. Le temps semble tellement s'arrêter que j'ai le temps de me dire Qu'est-ce que ce serait merveilleux si la note suivante, celle qui finira la phrase, était une longue note toute plate et de constater un temps indéterminé plus loin que c'est bien ainsi qu'il l'a chantée !

Le chant du baryton a été particulièrement délectable pendant les Lieder de Strauss, notamment Ruhe, meine Seele (ah, ces ruhe prononcés peu avant la fin !), mais j'ai aussi trouvé intéressante sa manière de chanter les Schubert. Celui de ceux-là que j'ai préféré a été Greisengesang (Le chant du vieillard). Au cours de ce concert, je n'ai pas eu l'impression d'entendre des Lieder que je connaissais déjà, à l'exception de Tränenregen extrait de La Belle Meunière. Dans ce Lied, le tempo a été extrêmement lent, comme dans les Lieder qui avaient précédé, mais autant le chanteur que l'orchestre ont su maintenir l'édifice musical en équilibre sans le faire s'écrouler. J'avoue n'avoir pas pu détourner mon regard du chanteur pendant ce programme. Cela ne m'a heureusement pas empêché d'apprécier les solos de Roland Daugareil.

Après l'entr'acte, je me suis replacé dans la partie centrale de l'arrière-scène pour la Première Symphonie de Schumann. Bien qu'étant schumannophobe, je dois admettre avoir passé un bon moment, et tout particulièrement pendant les trois derniers mouvements, moins assommants que le premier. De très beaux solos d'instruments à vents (le basson, la flûte, etc...), quelques passages vivifiants, de beaux accents dans le Scherzo, une phrase appuyée des vents dans le dernier mouvement qui me fait curieusement penser à l'Orient de Shéhérazade de Rimski-Korsakov. Le chef Paavo Järvi dirige de mémoire. Dans le finale, c'est tout comme s'il faisait à vive allure des exercices de musculation de ses bras et des épaules ! Lors des saluts, il viendra saluer le percussionniste (solo de triangle à la fin du premier mouvement !), qui devait vraisemblablement jouer son dernier concert avec l'Orchestre avant sa retraite, vu la manière dont ses collègues ont tapé leurs pieds sur le sol. Qu'est-ce que je ne donnerai pas pour savoir quand un certain contrebassiste sera salué de la même façon...

Ailleurs : Klari.

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Commentaires

1. 2012-04-13 17:22+0200 (klari)

C'est donc pour ça qu'ils ont donné la symphonie de Rott l'automne dernier ! Pour que le trianguliste puisse jouer un concerto avant son départ en retraite.

Un peu triste d'avoir manqué ce moment émouvant ... :-(

2. 2012-04-13 19:59+0200 (Joël)

J'ai repensé à la symphonie de Rott pendant le premier mouvement...

3. 2012-04-13 23:48+0200 (klari)

Mr Conanima aussi, Hugo aussi, moi aussi. On ne pourra plus écouter de triangle sans penser à l'affreux Hans ..

4. 2012-04-15 11:24+0200 (M. Conanima)

Oh non, j'aimais beaucoup ce percussionniste moi aussi (lui qui portait la moustache et les rouflaquettes comme personne), je regrette moi aussi d'avoir raté sa dernière apparition !

Et voilà qu'on croit à une citation de la symphonie de Rott à chaque tintement de triangle... Dur. Mais rendons grâce à Mahler de ne pas avoir poussé le vice jusqu'à doubler l'effectif...


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