Weblog de Joël Riou

« The Second Woman aux Bouffes du Nord | Myriam Ould-Braham en Juliette »

Urmila Sathyanarayanan au Musée Guimet

2011-04-30 02:00+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Danse — Danses indiennes — Culture indienne

Cela faisait un peu plus d'un an que je n'avais pas vu de bharatanatyam. Je suis donc allé au musée Guimet pour en voir. Avant cela, je suis allé voir l'exposition Lucknow, une cour royale en Inde (organisée par le Los Angeles Country Museum of Art) qui présente des pièces assez variées (des miniatures, accrochées presque bord à bord sur les murs, ce qui vu l'affluence empêche de les apprécier sereinement, des objets de la vie quotidienne richement ouvragés, des photographies datant d'avant la révolte de 1857-1858, et quelques unes datant d'après, comme la Residency ravagée...). J'ai été surpris de voir Qaisar Bagh, photographié 1864-1865, que je n'ai pas vu lors de mon séjour à Lucknow : forcément, il a été détruit par les Anglais. Quelques photographies ou peintures représentant La Martinière/Constantia. Quelques unes des œuvres montrées avaient été en leur temps commandées par le colonel Polier, qui fut un des premiers occidentaux à avoir connaissance à la littérature indienne ancienne, en particulier le Mahabharata, et sa version de l'épopée a été publiée par Georges Dumézil (Gallimard). Pour ce qui est des miniatures, il était évidemment difficile de faire aussi intéressant que l'exposition à la BnF il y a un an. C'est surtout la diversité des types d'œuvres qui fait l'intérêt de cette exposition. (Par exemple, à un moment j'ai craint qu'on ne montre que Lucknow avant la mutinerie, mais plus loin, on trouve aussi comme je le dis plus haut quelques photographies montrant des monuments détruits.)

Auditorium du Musée Guimet — 2011-04-29

Urmila Sathyanarayanan, bharatanatyam

Swamimalai Kalidas Suresh, chant et nattuvangam

Dhananjayan, mridangam

J. B. Sruthi Sagar, flûte

Le récital d'Urmila Sathyanarayanan ne m'a convaincu qu'à moitié. La première pièce Pushpanjali évoquait Surya, le dieu du Soleil. Cette pièce semble commencer par un lever du Soleil, lent et solennel, la danseuse étant de dos, presqu'immobile. Par la suite, on voit Surya éclairer successivement diverses directions de l'espace. La pièce se finit élégamment sur la chevauchée du Soleil sur son char céleste.

La pièce qui m'a le plus déçu est la pièce principale du récital, le Varnam, dans lequel une femme se languit de Krishna (sujet on ne peut plus classique dans le bharatanatyam). Dès le début de la première pièce, le style de la danseuse s'était affirmé, sans exubérance, renvoyant assez souvent à l'iconographie, mais plus tournée vers la pantomime que vers la danse. On voit la jeune femme choisir un sari pour se faire belle pour Krishna, reconnaissable à sa flûte. Plus tard, elle se maquille. Je ne suis pas très convaincu par cette pièce dans laquelle s'insèrent quelques passages rythmiques (le premier est arrivé de façon très abrupte quelques secondes seulement après le début du Varnam).

Entre cette pièce et la suivante, le temps pour la danseuse de changer de costume, on a inséré un interminable intermède musical (de flûte). Entre les pièces suivantes, il faudra encore supporter ces intermèdes. Le percussionniste s'est fait extrêmement discret au cours du récital. En revanche, le chanteur et joueur de nattuvangam m'a plu.

Dans la pièce dansée suivante Padam, une courtisane se prépare à accueillir un client. Que ce soit Shiva, Vishnu ou Brahma, qu'il paye 6000 pièces d'or ! Quand elle aura vu Shiva, elle changera d'attitude et se laissera séduire. Dans cette pièce, la danseuse travaille beaucoup au sol, comme on imagine la courtisane confortablement installée sur un sofa.

Une autre pièce suit, Javali, évoquant l'amour d'une héroïne pour Srinivasa (il eut été sympathique d'expliquer que c'est un des noms de Vishnu...). Curieusement, le dieu Kama (homologue de Cupidon) est tout simplement appelé Cupid(on) dans la présentation. Dans cette pièce, on verra la représentation de Vishnu couché sur l'océan cosmique et l'héroïne viendra lui masser les pieds (tout comme le fait Lakshmi dans l'iconographie). Cependant, j'ai déjà vu plusieurs fois cette même représentation de Vishnu évoquée de façon plus élégante par d'autres danseuses (notamment par la courbe du bras pour évoquer les têtes du serpent Ananta/Shesha). Comme dans la pièce précédente, une part significative de la danse-pantomime se fait au sol.

La pièce où le talent particulier de la danseuse s'est le mieux exprimé est peut-être le Padam sur un sujet que je n'avais encore jamais rencontré dans le bharatanatyam, celui de l'amour d'une mère pour sa jeune fille. On est encore plus complètement dans la pantomime. Il n'y a pas vraiment de pas de danse et peu de gestes semblent appartenir à quelque codification que ce soit. Très mignon.

Traditionnellement, un récital se finit par un dynamique Thillana. Celui-ci, s'il n'a pas manqué de mérites, était vraiment beaucoup, beaucoup, beaucoup trop long.

Et après la fin, la danseuse vient également présenter ses hommages aux musiciens, à la divinité tutélaire (Shiva-Nataraja) et au public. Cette partie, souvent complètement formelle, a été beaucoup plus développée que d'ordinaire puisqu'on a en vérité assisté à une petite pièce supplémentaire évoquant, sur un chant dévotionnel vishnouïste, le culte ordinaire : prière, offrandes. La danseuse a même eu l'idée amusante d'insérer une apparition d'un Krishna espiègle venant mettre un peu de pagaïe dans la cérémonie.

Le récital a été inhabituellement long : un peu plus de deux heures ! C'est à tempérer par le fait que les intermèdes musicaux ont été trop longs et pas extraordinairement passionnants. Si j'étais très déçu à l'issue du Varnam, les pièces suivantes ont fait remonter mon intérêt et ont eu le mérite de me faire partir sur une bonne impression.

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