« Akhmatova à Bastille | Shashank au Théâtre de la Ville »
2011-04-03 02:05+0200 (Orsay) — Culture — Musique
Athénée Théâtre Louis-Jouvet — 2011-04-02
Quatuor Thymos
Eiichi Chijiiwa, Gabriel Richard, violons
Nicolas Carles, alto
Marie Leclercq, violoncelle
Michel Fau, lecteur
Textes d'Olivier Py, Aristote, Copi
Trois pièces pour quatuor à cordes, Stravinski
Quatuor à cordes nº2, opus 33 (Hob. III:38), Haydn
Quatuor à cordes nº2, Charles Ives
Ouverture sur Le Vaisseau Fantôme comme joué à vue par un orchestre de seconde zone à 10h du matin sur la place du village, Hindemith
Quel beau concert que celui de ce quatuor à cordes (Thymos) formé de musiciens de l'Orchestre de Paris au théâtre de l'Athénée — Louis Jouvet. C'est la première fois que j'y mets les pieds, à deux pas de l'Opéra (ne pas confondre avec l'hôtel Plaza Athénée situé tout près du TCE...). J'en avais entendu parler par Klari à propos d'un précédent concert de la série.
Le lieu est tout ce qu'il y a de plus charmant, accueillant et sympathique. Malheureusement, la salle est remplie à peine aux deux tiers (seuls l'orchestre et la corbeille de face sont bien garnis). Un ouvreur m'a fait signe au moment où je commençais à envisager une migration depuis le dernier rang du balcon. Je ne me suis pas fait prier pour saisir l'opportunité qui m'était faite de m'installer au premier rang de corbeille sur l'extrême côté, tout près de la scène.
Je crois que je n'ai jamais été dans d'aussi bonnes conditions autant visuelles qu'acoustiques pour un concert de musique de chambre. Le thème est l'humour noir. En prélude au concert et entre les pièces, le comédien Michel Fau lit remarquablement bien quelques textes très drôles (je me disais bien que sa tête me disait quelque chose : d'après mes archives, je l'avais déjà vu dans L'Orestie à l'Odéon en 2008). On entendra ainsi un sermon du Diable extrait de L'Apocalypse joyeuse d'Olivier Py, un texte attribué à Aristote évoquant six systèmes politiques (royauté, aristocratie, timocratie, tyrannie, oligarchie, démocratie), les trois derniers étant les versions corrompues respectives des trois premiers. Le dernier sera un texte de Copi extrait du Bal des folles où un inverti raconte son histoire d'amour avec un Pierre amouraché à un(e) Marilyn ayant un serpent pour animal de compagnie. Nombreux fous-rires dans la salle.
Venons-en maintenant à la musique. Cela commence par trois courtes pièces de Stravinski utilisant des sonorités très variées. La violoncelliste et le violon II échangent leurs places. Vient ensuite l'œuvre qui m'a le plus enthousiasmé : le quatuor à cordes nº2, opus 33 (Hob. III:38) de Haydn. J'apprécie de voir les musiciens se faire de petits signes, sourires et grimaces. Les deux premiers mouvements sont assez espiègles. Le troisième, lent, est plus sage. Lors du quatrième, je me dis d'abord qu'on est à côté du thème, mais la toute fin me fait comprendre la raison de son insertion au programme : après plusieurs répétitions du thème de ce mouvement, il faut bien terminer le quatuor et c'est fait en introduisant quelques silences à divers endroits des derniers développements de façon à ce qu'à plusieurs reprises on puisse avoir l'impression que le quatuor est terminé. Et cela recommence... encore... une dernière fois... allez, encore une autre... C'est bon, maintenant, vous pouvez applaudir. Si j'ai aimé cette œuvre, je crois que ce n'est pas seulement parce que c'était de Haydn... mais peut-être aussi parce que c'était merveilleusement bien interprété.
La troisième œuvre au programme est un quatuor en trois mouvements de
Charles Ives (dont je ne connaissais le nom que parce qu'il apparaît dans
le titre d'une œuvre de John Adams, jouxtant dans la discographie son
remarquable concerto pour violon électrique The Dharma at Big
Sur). Elle est précédée d'une petite introduction du violoniste
Gabriel Richard qui était jusque là violon II et qui passe violon I, les
musiciens ayant repris la configuration standard du quatuor (de gauche à
droite : violon I & II, alto, violoncelle). Il nous explique que
l'œuvre met en jeu quatre hommes (sic) qui lors du premier mouvement
(Andante emasculata !) vont parler chacun dans leur coin, lors du
deuxième mouvement se disputer ouvertement, et lors du troisième joindre
leurs efforts pour aller à l'assaut d'une montagne jusques auprès du
firmament. (Il indique aussi beaucoup d'emprunts, mais je ne les ai pas
reconnus.) C'est annoncé comme atonal
, mais cela s'écoute finalement
très bien, en tout cas beaucoup plus que l'atonal qui se joue
ces jours-ci à Bastille.
Le concert se termine par l'ouverture du Vaisseau fantôme (Wagner) revisitée par Hindemith (cf. plus haut pour le titre complet...), ce qui donne lieu à un grand n'importe quoi où l'on reconnaît parfois un peu l'œuvre d'origine mais aussi des délires qui semblent singer d'autres genres musicaux. Au début, les musiciens étaient affalés dans des fauteuils et un lit (du décor de la pièce qui se joue ces jours-ci dans ce théâtre). Il faudra toute la persuasion de Michel Fau pour que, apparemment sans conviction, les musiciens voulussent bien se lever, se mettre devant leurs pupitres, mettre la bonne partition devant leurs yeux fatigués et jouer tout en essayant de donner l'impression qu'ils déchiffrent l'œuvre. Dans ce numéro, Gabriel Richard et Nicolas Carles sont plus joueurs que leurs deux collègues.
C'est effectivement un théâtre charmant avec un programme très varié. Je vais voir Michel Fau dans une pièce cet après-midi et je pense que je viendrai plus souvent l'année prochaine, car les tarifs sont très raisonnables et le personnel très aimable ce qui nous change de certaines institutions.....
Oui, moi, je vais déjà y retourner au moins deux fois d'ici à la fin de l'année !
La pièce de Copi, grinçante et drôle malgré tout est un vrai bonheur avec Michel Fau en comédien hospitalisé et Marianne James en diva exubérante !
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