Weblog de Joël Riou

« The Fairy Queen à l'Opéra Comique | La Sonnambula à Bastille »

Une Norma colorisée au Châtelet

2010-01-23 01:39+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra

Théâtre du Châtelet — 2010-01-22

Lina Tetriani, Norma

Paulina Pfeiffer, Adalgisa

Nikolai Schukoff, Pollione

Nicolas Testé, Oroveso

Blandine Staskiewicz, Clotilde

Luciano Botelho, Flavio

Ensemble Matheus

Chœur du Châtelet

Jean-Christophe Spinosi, direction musicale

Nicholas Jenkins, chef de chœur et assistant du chef d'orchestre

Peter Mussbach, mise en scène et décors

Daniela Juckel, décors

Andrea Schmidt-Futterer, costumes

Alexander Koppelmann, lumières

Axel Bott, dramaturgie

Norma, Bellini

Je n'étais pas retourné au théâtre du Châtelet depuis un an et demi. La dernière fois, c'était pour un concert du dimanche matin avec Le Concert français dirigé par Pierre Hantaï et la fois précédente, c'était pour Padmâvatî de Roussel.

Cette fois-ci, c'est pour Norma de Bellini, qui, hasard du calendrier intervient presqu'en même temps que la production de La Sonnambula du même compositeur à l'Opéra Bastille.

Les décors du metteur en scène Peter Mussbach et de Daniela Juckel sont conceptuels. Un grand vide bordé de trois murs. Une grande boule, représentation d'une divinité lunaire, est un totem que déplacent les Gaulois. Les membres du chœur, des comédiens et une acrobate restent sur scène en permanence. Ils portent des costumes ternes. Les couleurs changeantes des murs, des éléments de décor, des costumes, sont presqu'entièrement le fruit des lumières. La scène sera ainsi toute verte, toute rouge, bleue, etc, suivant la situation. Ce procédé est d'autant plus éclatant quand une tâche de lumière colorée suit un personnage, en l'occurrence Oroveso (Nicolas Testé), le chef des druides. C'est le père de Norma (Lina Tetriani), sorcière-prêtresse censée annoncer l'oracle aux Gaulois. Elle a eu deux enfants (interprétés par des sortes de poupées !) du proconsul romain Pollione (Nikolai Schukoff) dont la moitié haute du corps est dorée par le maquillage. Celui-ci doit rentrer à Rome, et plutôt que Norma, c'est la jeune Adalgisa (Paulina Pfeiffer) qu'il aimerait emmener. Norma est jalouse, elle veut mener sa vengeance à son terme en se servant du pouvoir que sa religion lui donne sur les Gaulois. Norma envisagera de sacrifier ses enfants (comme Médée...), puis annoncera à son peuple qu'il faut non seulement sacrifier à leur divinité le profanateur Pollione, mais aussi une jeune fille qui s'est compromise avec lui. Jusqu'au dernier moment, elle hésitera. Finalement, elle se dénoncera elle-même pour rejoindre Pollione dans la mort. Ce dernier loue une femme qu'il perd. Je me demande un moment s'il pense à Adalgisa ou à Norma, mais il semble bien qu'il s'agisse de Norma, bien plus forte qu'il l'avait pensée.

Musicalement, c'est très beau. Autant je n'avais pas du tout été convaincu par l'Ensemble Matheus dirigé par Jean-Christophe Spinosi dans L'Oratorio de Noël, autant dans Bellini, cela rend bien. Les chanteurs des trois ou quatre rôles principaux sont bons. Bien sûr, quand le public a entendu des centaines de fois l'air Casta Diva chanté par Maria Callas (le nombre de films qui l'utilisent dans leur bande son est assez invraisemblable), il est difficile que la comparaison ne paraisse pas défavorable (simplement parce que les détails d'interprétation sont différents, et qu'on pourrait attribuer à une faute ou une faiblesse ce qui n'est qu'un choix, pas forcément moins pertinent). Lina Tetriani, qui a été annoncée souffrante à l'entr'acte, s'en est très bien sortie. Dans ses airs, Nikolai Schukoff montre ses talents de bel cantiste. La première scène du deuxième acte met en scène un superbe duo entre Norma et Adalgisa, cette dernière étant prête à sacrifier son amour de Pollione pour son aînée.

Une partie du public a lancé des huées à la fin du premier acte et lors des saluts. Je ne sais pas si cela visait Spinosi ou bien le metteur en scène qui n'était pas là pour saluer. Pour ma part, j'ai trouvé que cette production était réussie.

PS: L'utilisation de toute la profondeur du plateau fait qu'il vaut mieux être au centre pour bien profiter de cette mise en scène, ce qui était mon cas vu que j'étais au premier balcon, plein centre, avec néanmoins devant moi un pilier, qui n'est pas très gênant : à un moment, Norma et Adalgisa étaient toutes les deux côté cour dans l'axe du pilier, mais par vision stéréoscopique, Adalgisa de l'œil gauche, Norma de l'œil droit (à moins que ce ne soit le contraire), je les voyais toutes les deux simultanément (cela marche bien sûr aussi derrière des jumelles).

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Commentaires

1. 2010-01-23 09:00+0100 (Ariana)

Je vous envie Joël!

J'adore cet opéra et Peter Mussbach m'a beaucoup impressionnée dans sa mise en scène de Traviata <URL: http://ariana.typepad.fr/le_geste_et_la_voix/2008/05/lost-highway-in.html > et j'aurais aimé l'entendre et la voir.

Malheureusement, mon manque de souplesse en disponibilités étant ce qu'il est, impossible.

Le seul point qui m'avait adoucie était de voir Spinosi à la baguette, craignant le pire parce que tout de même Bellini, c'est l'avant-scène du Romantisme..

2. 2010-01-23 14:59+0100 (Joël)

Votre analyse de sa mise en scène de la Traviate me rassure. Après avoir écrit mon billet, j'ai regardé les critiques... Nombre d'entre elles visent Peter Mussbach qu'elles prétendent disqualifier en rappelant qu'il avait déguisé Violetta en Marylin Monroe (ce qui n'a rien de grotesque a priori si on a lu le roman de Dumas fils). Votre commentaire confirme qu'il ne s'agit là que d'opinions outrancières.

3. 2010-02-04 10:02+0100 (Jean-Paul Maillet)

Cette Norma est la bienvenue,car cet opéra est si rarement joué.Dans la mise en scène, les gaulois transformés en fous agités,pose problème car ces fous doivent, au dernier acte, se révolter, et alors on ne comprend plus.....

Pour les chanteurs la partie est tellement périlleuse que cela fut une bonne surprise. Les échecs de Carole Vanness à Bastille, il y a quelques années le prouvent. Lilia Tétriani fut une bonne Norma.Qui s' attaque à ce rôle aujourd'hui?Le ténor Schukoff a lui aussi bien chanté ,un rôle impossible.Mme Aude Roux dit dans Le Monde qu'il fut"braillard", elle devrait réfléchir à ce qu'elle dit. C'est faux. Des ténors "braillards" nous en avons entendu dans ce rôle:Botha à Bastille et d' autres , mais M. Schukoff a bien chanté et bien joué.La mezzo était excellente .

Bref , une soirée très intéressante, malgré quelques partis pris de mise en scène.

4. 2011-03-06 16:56+0100 (pyrausta)

S'attaquer à Norma quand on a des Callas ou autre Montserat Caballe devant soi..(et d'autres encore évidemment) n'est pas chose aisée.Il y a des rôles comme ça qui sont marqués du sceau de...Mais ils sont tellement beaux qu'une chanteuse ne peut s'empêcher (et heureusement!!) de se l'approprier.


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