Weblog de Joël Riou

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Isabelle Anna et Anuj Mishra au Musée Guimet

2012-04-28 11:45+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Danse — Danses indiennes — Culture indienne

Auditorium du Musée Guimet — 2012-04-27

Isabelle Anna, Anuj Mishra, danse kathak

Vikash Mishra, tabla

Juber Alam, chant, harmonium

Navin Mishra, sitar

Pandit Arjun Mishra, chorégraphie

Il y a quatre ans, j'avais assisté à un programme de danse kathak à la Cité de la Musique au cours des Vingt-quatre heures du Raga. Cette institution que j'apprécie n'a malheureusement pas toujours la main heureuse (cf. la partie indienne de la nuit soufie). Le caractère lamentable de cette prestation avait de quoi dissuader de façon définitive de revoir du kathak... En choisissant d'aller voir le duo d'Isabelle Anna et Anuj Mishra au musée Guimet, j'accordais une seconde et dernière chance à ce style de danse de me convaincre. Si je n'accrochais pas cette fois-ci, j'arrêtais les frais. Le moins que l'on puisse dire est que, de façon tout à fait inattendue, j'ai adoré ce spectacle !

Cette danse est très différente du bharatanatyam ! En gros, deux types de pièces se sont succédé. La forme qui a ma préférence est celle des pièces qui mettent le plus en valeur l'expression et la narration, comme la première qui était un duo entre les deux danseurs. La musique est chantée en ourdou, une langue qui se confond pour mes oreilles avec le hindi (je ne suis pas assez connaisseur pour reconnaître le vocabulaire d'origine plus arabo-persane que sanskrite). C'est dans ces pièces expressives (et tout particulièrement la première) que j'ai le plus apprécié la partie mélodique de la musique (voix et sitar). Comme ce type de musique (et de danse...) a beaucoup été imité dans les films indiens, cela a un léger air de Bollywood, mais de très haut de gamme, avec un certain raffinement et des improvisations en plus. En effet, le chanteur ne se prive pas d'insérer quelques ornementations et de solfier certaines suites de notes.

La première pièce, très sensuelle, représentait l'amour des deux personnages incarnés par les deux danseurs. Formant une sorte de douce pantomime continue, les mouvements sont fluides et majestueux. Si quelques mouvements des mains sont communs avec le bharatanatyam (comme la représentation de l'éclosion du lotus), c'est semble-t-il davantage à leur caractère universel qu'à une codification commune qu'il faut l'attribuer. On est plus dans la pure et simple expression des sentiments que dans un discours obéissant à une stricte grammaire. Quelques uns des mots du texte que je peux comprendre soulignent certains mouvements expressifs de la danseuse. C'est elle qui m'a le plus ému ! Qu'il est beau de voir sa robe tournoyer en faisant des ondulations pendant ses pirouettes, une robe qui se met à flotter onctueusement quand la rotation s'arrête et qui tombe majestueusement sur ses jambes en formant des plis réguliers !

L'exaltation est poussée à son paroxysme dans les frénétiques épisodes rythmiques qui s'insèrent dans ces pièces expressives (c'est un point commun avec le bharatanatyam d'insérer des numéros rythmiques de danse pure dans les pièces narratives). Je pense qu'il est impossible d'apprécier ces moments sans clapper le tal (c'est-à-dire battre la mesure) d'une façon ou d'une autre et de ressentir ainsi dans son corps la pulsation des danseurs et du tabla. Les danseurs effectuent souvent une pirouette complète sur un temps rythmique. Les mouvements de pieds se font sur des divisions de ces temps, tout comme les mouvements du cou (qui sont assez communicatifs avec le spectateur que je suis, je n'y peux rien...). Je suis en transe quand je sens que mon clappage du tal est parfaitement synchronisé avec le tabla et les mouvements de pieds de danseurs (sur des doubles croches, au moins !)...

L'autre forme privilégiée de pièces est la danse pure exécutée sur une musique essentiellement rythmique (j'ai une certaine empathie pour le joueur de sitar dont le rôle se réduit à répéter ad lib. la même petite mélodie sur un rythme immuable ; cela présente au moins l'intérêt de donner un repère dans le cycle rythmique ; cela dit, certaines courtes pièces ont mélangé des tals différents, il existe donc des guirlandes de tals comme il existe des guirlandes de ragas, Ragamalika !). Très extravertis, ces passages sont de véritables morceaux de bravoure pour les danseurs. La forme est différente de ce qu'on peut voir dans le bharatanatyam ou le kuchipudi. Le rôle du nattuvanar est primordial dans ces deux danses du Sud : celui qui joue des cymbales est en quelque sorte le chef d'orchestre. Dans certains passages rythmiques du kuchipudi, on trouve un jeu de questions et réponses entre la danseuse et celui qui est souvent son guru : il joue une phrase rythmique que la danseuse doit reproduire immédiatement en actionnant ses grelots de pieds (dont les orteils pincent un plateau en laiton !) tout en réalisant des mouvements de danse pure avec le haut du corps. Dans le bharatanatyam, la part d'improvisation est très certainement moindre puisqu'il n'y a pas de questions et réponses, la danseuse exécutant les mouvements en même temps que le nattuvanar joue des cymbales. J'ignore s'il en est toujours ainsi, mais dans le programme de kathak de ce soir, un des deux danseurs (ou les deux en même temps) venaient au micro annoncer une longue séquence rythmique : tout en clappant le tal avec une main, ils prononçaient les syllabes rythmiques indiennes standards ou bien les numéros des temps (en hindi ou en anglais). Cette séquence était ensuite reproduite par le tabliste et suivait un fou numéro de danse pure exécuté sur ce rythme par un des danseurs (ou dans au moins un cas, crois-je me souvenir, par son partenaire). Pour moi, cela a été un plaisir enivrant de les voir. Je pense qu'il faudrait passer à un autre niveau de compréhension de cette danse pour véritablement apprécier à sa juste valeur le subtil raffinement qui doit certainement se cacher derrière cette virtuosité. Pour le moment, c'est un plaisir plus immédiat, moins intellectuel que cela peut l'être avec le bharatanatyam, et c'est déjà pas mal !

Le travail sur l'expressivité (y compris dans les numéros rythmiques) et la narration est beaucoup plus saisissant et émouvant chez Isabelle Anna. Ses solos ont mis l'accent sur ces pièces lyriques, dont faisait partie l'adorable évocation des jeux (d'eau, rien à voir avec Bruno Mantovani) de Krishna qui charme les bergères grâce au son de sa flûte. J'ai aimé aussi son évocation de l'amour d'une courtisane.

Les solos du danseur étaient tournés principalement vers la danse pure. Il a ainsi exécuté des numéros de claquettes indiennes avec ses grelots de chevilles et de vertigineuses suites de pirouettes. Le comble a été une triple série de pirouettes enchaînées : 34+34+34=103 (ce n'est pas moi qui ai fait l'addition !). Les deux ou trois dernières pirouettes étaient un peu moins rapides que les précédentes, mais c'était le délire dans la salle, le tal étant clappé sonorement par le public ! Anuj Mishra a toutefois cherché à ajouter une part expressive dans une petite suite de courtes pièces rythmiques. Celles-ci évoquaient la nature : l'antilope, la vache, le lion, le cheval. Sa pièce la plus développée et la plus convaincante dans cet aspect de la danse évoquait le paon. Cela reste moins subtil et raffiné que la danse d'Isabelle Anna (qui a aussi fait de fort belles pirouettes !), mais j'apprécie que ce danseur n'ait pas été que virtuose !

Parmi les moments dont je me souviendrai sans doute longtemps, il y a eu ce duo dans lequel les danseurs et les musiciens m'ont donné l'impression qu'un cycle rythmique à onze temps pouvait comme aller de soi. Je n'en reviens pas ! J'aimais notamment la façon dont les temps étaient accentués et divisés lorsque l'on s'approchait de la fin d'un cycle, l'entrée dans le cycle suivant étant annoncée par les mêmes paroles du chanteur.

Un autre moment de transe à été le jeu de questions et réponses (rythmiques) auquel se sont livré les danseurs. Ce type d'improvisations fait partie des pièces que je trouve les plus délectables dans la musique et la danse indienne, quelle que soit la configuration. Un des plus mémorables avait été celui de deux percussionnistes accompagnant Sri Mohan Santhanam à Chennai en août dernier. Un autre plus récent associait Jayanthi Kumaresh et son percussionniste. Les deux danseurs ayant chacun des grelots de chevilles, ils peuvent très bien jouer à un tel jeu de questions et réponses. Les phrases rythmiques sont d'abord assez longues (je ne sais plus combien de temps comportait le cycle rythmique). Puis tout semble s'accélérer parce que la question et la réponse qui suit immédiatement se font de plus en plus courtes au point de ne plus comporter qu'une ou deux frappes de pied.

Exceptionnellement en mode ninja (contraint et forcé puisque le placement était libre), une place se libérant opportunément par le lapin posé à une spectatrice par une de ses amies, j'ai de façon inattendue été extrêmement bien placé au quatrième rang. Mes jumelles n'ont donc pas été nécessaires. Je me délecte par avance des très probables opportunités prochaines de revoir Isabelle Anna dans l'intime salle du Centre Mandapa (qui était fort bien représenté au premier rang de l'auditorium !). À la fin du spectacle, très émue par l'accueil du public (standing ovation), elle a remercié le père de son partenaire, Pandit Arjun Mishra (gharana de Lucknow) qui a chorégraphié et conçu ce programme.

Deux représentations de ce spectacle étant prévues, à l'heure où j'écris ces lignes, peut-être est-il encore possible d'acheter des billets pour assister à la représentation de ce samedi à 20h30 ?

Je n'avais été que moyennement convaincu par les premiers spectacles que j'avais vu à l'Auditorium du Musée Guimet (Urmila Sathyanarayanan et Priyadarshini Govind), mais après la superbe Meenakshi Srinivasan, c'est la deuxième fois de suite que je ressors très enthousiaste de cette salle.

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Les trois dernières symphonies de Mozart dirigées par Christoph Eschenbach

2012-04-28 00:50+0200 (Orsay) — Culture — Musique

Salle Pleyel — 2012-04-26

Philippe Aïche, violon solo

Orchestre de Paris

Christoph Eschenbach, direction

Symphonie nº39 en mi bémol majeur, KV 543 (Mozart)

Symphonie nº40 en sol mineur, KV 550 (Mozart)

Symphonie nº41 en ut majeur “Jupiter”, KV 551 (Mozart)

À défaut de me procurer du plaisir, ce concert aura au moins eu le mérite pédagogique de me faire un peu voir ce qu'est une symphonie de Mozart (même impression qu'avec S. Saketharaman en musique carnatique récemment). Je me suis amusé à essayer de déchiffrer la structure rythmique (divisions binaires ou ternaires, accents, etc.). Dans la trente-neuvième de Mozart, j'ai eu l'impression que le chef mettait beaucoup de rubato dans sa direction. Il en mettra moins dans les deux autres symphonies.

Manquant de légèreté (4 contrebasses...), l'ensemble m'a paru assez massif (surtout les cinq premières minutes du concert, pendant lesquelles les différents pupitres me semblaient avoir du mal à démarrer ensemble, mais ma perception est peut-être déformée parce que ma place à l'arrrière-scène était assez proche du timbalier). Je me distrais en regardant mes chefs de pupitres préférés (Philippe Aïche, David Gaillard, Bernard Cazauran). J'apprécie la façon presque chambriste qu'ont les musiciens de se faire des signes (tel vent qui se concerte avec son voisin, qui prend le même rythme d'ondulation du dos que le violon solo Philippe Aïche, etc.). Les instruments à vents (notamment les clarinettes) me plaisent tout particulièrement. Ceci est de bon augure pour leurs prochains concerts de musique de chambre. Bernard Cazauran, contrebassiste solo, est comme d'habitude magnifidable (c'est moi qui ai crié Bravo quand après avoir salué le premier rang des cordes, le chef est venu le saluer). Je n'ai regardé que lui pendant le finale de la dernière symphonie (très belle mini-fugue !).

Ailleurs : Grignotages, Paris ― Broadway.

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Acheter des billets de trains indiens

2012-04-27 14:47+0200 (Orsay) — Voyage en Inde XI

En Inde, la façon la plus économique et confortable de faire des trajets longue distance est de prendre le train. Lors de mes deux premiers voyages (en 2005 et 2006), je ne m'étais pas assez bien organisé : je savais dans quels aéroports j'arrivais et repartais, mais je n'avais qu'une vague idée des étapes intermédiaires. Comme il n'était pas très commode de réserver un billet de train dans les gares indiennes et que quelques jours avant le départ des trains ceux-ci étaient déjà complets, je m'étais retrouvé à prendre des bus longue distance : j'ai un souvenir particulièrement cauchemardesque d'un bus de nuit Jhansi-Indore et un souvenir plus amusé d'un Pondichéry-Madurai. Un récent Tiruvannamalai-Chennai m'avait épuisé.

Ainsi, depuis quelques années, pour voyager confortablement, je choisis le train, ce qui demande de s'organiser un minimum à l'avance. J'ai commencé à utiliser le site IRCTC des chemins de fer indiens en 2006 pour acheter un billet Allahabad-Mumbai (qui arrivera à destination avec une dizaine d'heures de retard). À l'époque, l'interface était spartiate. Il fallait rentrer les codes à trois lettres des gares de départ et d'arrivée, connaître les différentes classes de billets (et un certain nombre d'autres subtilités). Une fois arrivé à la caisse, on se retrouvait devant une galaxie de plates-formes de payement et il fallait avoir de la chance pour tomber sur celle qui acceptait les cartes Visa internationales (voir ce billet pour un résumé de l'épreuve initiatique). D'une année sur l'autre, la banque qui acceptait ces cartes ne les acceptait plus, une autre prenait le relais (il fallait les tester toutes jusqu'à ce que ça marche, et à chaque fois saisir à nouveau toutes les informations...). L'ergonomie du site s'améliorait sensiblement. On pouvait taper Chennai, cliquer sur Chennai - All stations dans le menu qui apparaissait pour obtenir les résultats correspondant aux différentes gares de la ville.

Le début de la fin, cela a été vers 2010. Pour les payements par carte Visa, il devenait obligatoire de passer par l'étape Verified by Visa. Cela engendrait des bugs supplémentaires, mais cela avait fonctionné. Sur place, j'avais eu des problèmes pour changer un Chandigard-Delhi : ma carte n'était plus acceptée. De retour en France, m'inquiétant en vue du voyage en 2011, j'avais fait des essais de réservation et cela ne marchait toujours pas. Un test avec le site Cleartrip avait toutefois été concluant. À l'approche de mon voyage de 2011, le site IRCTC était retombé en marche, mais des messages inquiétants apparaissait comme, de mémoire, Update your account with correct mobile number. Accounts with junk information will be deleted..

La semaine dernière, vendredi, à environ J-90 de la date du premier billet de train que je voulais réserver, je vais sur le site IRCTC. Première mauvaise nouvelle : je n'aurai pas de place dans le Rajdhani Kolkata-Parasnath (voyager en Rajdhani, c'est le grand luxe) puisque le quota de places vendues sur Internet est très faible et qu'il est désormais possible de réserver jusqu'à 120 jours à l'avance (il y a quelques années, c'était déjà passé de 60 à 90 jours). Deuxième mauvaise nouvelle, plus inquiétante : il faut absolument que je mette à jour mon compte. Pour cela, je dois rentrer un numéro de portable. Bien sûr, il n'y a pas la place pour mettre un indicatif (+33) autre que celui qui est codé en dur (+91). Si on s'avise de mettre un numéro à 10 chiffres français, le site répond qu'un numéro de portable ne commence pas par 0.

Mettre n'importe quoi qui fasse dix chiffres et ne commence pas par un zéro ne suffit pas tout à fait puisqu'on est censé recevoir par SMS un code d'activation du compte IRCTC. Bref, si on est à l'étranger, c'est mort. Seulement, une solution existe, elle est décrite ici au milieu d'autres informations utiles sur les trains indiens. Pour faire que mon compte IRCTC devienne un compte vérifié, j'ai donc mis un numéro de mobile farfelu (mais contenant un certains nombres de chiffres de mon vrai numéro) et envoyé un mail à care@irctc.co.in en expliquant brièvement ma situation : je voudrais recevoir par mail mon code d'activation. J'ai joint un scan de mon passeport pour qu'ils puissent vérifier mon identité. Dans la journée qui a suivi, j'ai reçu une réponse qui m'a permis d'avoir un compte IRCTC vérifié. On peut lire ici ou là des commentaires un peu brutaux à cet égard, mais je les trouve exagérés. Les Indiens doivent représenter l'écrasante majorité des utilisateurs du site IRCTC. Comme je crois savoir que la procédure permettant d'obtenir un téléphone portable en Inde demande de fournir des papiers d'identité, lier un compte Internet à un téléphone portable offre une garantie raisonnable d'authentification (c'est une mesure un peu pénible, mais pas non plus invraisemblable ; la raison invoquée est la lutte contre le marché noir).

Il ne faudrait pas croire qu'avoir un compte IRCTC vérifié suffise à acheter des billets de train. Ce n'était que l'étape facile... En effet, à ce stade, IRCTC n'accepte pas d'autres cartes bancaires étrangères que les American Express. Ça, c'est vraiment lamentable... Il serait intéressant de savoir quel pourcentage de la population des États-Unis, de la France et de l'Inde satisfont les conditions de revenus permettant d'avoir une telle carte bancaire...

Tout n'est pas perdu puisqu'il est possible de passer par des intermédiaires qui acceptent d'autres cartes. C'est le cas de Cleartrip. Pourquoi donc me suis-je embêté à faire valider mon compte IRCTC si in fine je vais acheter mes billets sur Cleartrip ? C'est que l'IRCTC a rendu obligatoire de lier un compte du site Cleartrip (ou d'un autre intermédiaire) à un compte IRCTC vérifié... Samedi dernier, j'ai donc lancé la procédure sur le site Cleartrip en rentrant mon login Cleartrip, mon login IRCTC, etc (ce qui ne s'est pas fait sans mal, le code Javascript de la page du formulaire s'évertuant à refuser mon code postal). Le but est d'obtenir deux codes de vérification One-time Passwords (OTP), un par mail et un autre par SMS. J'ai bien reçu de la part d'IRCTC le Email OTP, mais de même que pour la validation du compte IRCTC, il faut passer par le service clients pour obtenir le Mobile OTP. C'est là que les choses se sont gâtées.

Dimanche, le lendemain, après un accusé de réception envoyé automatiquement, je reçois un premier message :

Dear Customer,
Kindly note that we have already sent to you the mobile code on your registered email id whether you have recieved or not .

if you have recieved
then please firstly you need to activated the account with given mobile code at irctc site then you will be able to registered at other site like (makemytrip.com ,cleartrip.com)

Je venais de dire dans mon message que j'avais déjà un compte IRCTC activé et que je voulais justement m'inscrire sur un autre site. Je réponds immédiatement :

As I wrote it in my previous mail, I already activated my IRCTC account. What I would like to do next is the second step you mention: synchronise my Cleartrip and IRCTC accounts so that I can book tickets on Cleartrip. To do this, I will have to enter my Cleartrip username "xxxxxxxxxxxxxx", my IRCTC username "xxxxx" and two OTP (Email & mobile). I received by email the Email OTP, which is "xxxxxx". The last information I need is the corresponding Mobile OTP which I cannot get by mobile because I do not own an Indian mobile. Could you send this Mobile OTP to me by email?

La réponse suivante montre que j'aurais pu écrire n'importe quoi dans mon message puisqu'il n'a pas été lu :

Kindly contact the customer care department of cleartrip.com providing the exact error message encountered and at which step of user ID creation/registration you get this error message.
Please write to Cleartrip customer care at the email ID railesc@cleartrip.com.

Mon salut ne peut pas venir de Cleartrip, seulement d'IRCTC, c'est ce que je réexplique dans mon message suivant en perdant quelque peu ma patience :

May I insist? Please read carefully the following lines (then you will see that this is really to IRCTC Customer Care that I need to talk). I have an IRCTC account (which is activated) and a Cleartrip account. In order to book train tickets, IRCTC has recently made mandatory to connect accounts of third-party sites like Cleartrip to a (verified) IRCTC account. I launched the process on Cleartrip without any error. the procedure is that I should get two OTP (one by email and one by mobile) *from IRCTC* that, as the IRCTC automatic message says "are to be used on IRCTC partner website for activation.". I successfully received the Email OTP from IRCTC, see the following excerpt of this mail:
> ticketadmin@irctc.co.in wrote :
> The Email OTP is xxxxxx Mobile OTP is being sent by SMS on the mobile provided Email OTP and Mobile OTP are to be used on IRCTC partner website / Mobile Application for activation.

The only information that I need now is the "Mobile OTP". As I am a foreigner, living outside India, I only have a French mobile, so that I did not get this Mobile OTP. What I am asking (for the third time) is that you kindly send me this "Mobile OTP" by email.
The relevant details are :
* IRCTC username "xxxxx"
* Partner website : Cleartrip ; Cleartrip username "xxxxxxxxxxxxxx"
* Email OTP "xxxxxx".

Silence radio pendant plusieurs jours. Je reçois dans la nuit un message encourageant :

We would like to inform you that your below enclosed email has been forwarded to the concerned department.You will receive a reply in this regard shortly.

Et un peu plus tard, j'obtiens enfin les informations voulues :

Kindly note that your Mobile Otp is xxxxxx and email Otp is xxxxxx.

Je rentre ces informations en suivant le lien indiqué dans le mail donnant le Email OTP et je vois apparaître le message You can now start making train bookings with your Cleartrip username: xxxxxxxxxxxxxx. Cela a bien fonctionné, en dépit de quelques messages d'erreurs comme Aaargh!! Train no longer available, Sorry, but one of the Train you selected is no longer available. It's annoying, but it happens., Cleartrip's system is behaving badly, j'ai pu réserver sept billets de train pour mon prochain voyage. J'ai aussi eu un problème au moment du payement : je ne sais jamais si je dois cocher Debit Card ou Credit Card. Cela a commencé par ne pas marcher avec Credit Card. J'ai donc acheté mes deux premiers billets en cochant Debit Card, et puis plus rien. Entretemps, l'option Credit Card était tombée en marche. Non, sans ces messages d'erreurs et bugs incompréhensibles, ce ne serait plus drôle de réserver des billets de train...

Pour 3500₹ (soit à peine 50€, l'euro semble redevenu assez fort par rapport à la roupie !), je pourrai faire 2800 kilomètres de train. Quatre des septs billets m'ont coûté chacun environ 3€. Ce sont les trois trains de nuit en compartiment climatisé qui font passer ce budget train de trois fois rien à pas grand'chose !

PS: Si on n'a pas de compte IRCTC, on peut le créer en même temps que le compte Cleartrip. Seule la deuxième étape (avec les deux OTP) est vraiment importante. Si on dispose déjà d'un compte IRCTC (non vérifié), il est probablement que première étape de validation de ce compte IRCTC soit superflue. (Prévoir une semaine de marge pour l'ensemble de la manip'.)

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L'Histoire de Manon à Garnier

2012-04-24 10:33+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Danse

Opéra Garnier — 2012-04-23

Koen Kessels, direction musicale

Orchestre de l'Opéra national de Paris

Ballet de l'Opéra

Jules Massenet, musique (extraits d'œuvres musicales, 1867-1910)

Martin Yates, nouveaux arrangements et orchestration (2011)

Kenneth MacMillan, chorégraphie et mise en scène (1974), réglées par Karl Burnett et Gary Harris

Nicholas Georgiadis, décors et costumes

John B. Read, lumières

Patricia Ruanne, répétitions

Aurélie Dupont, Manon

Josua Hoffalt, Des Grieux

Jérémie Bélingard, Lescaut, frère de Manon

Muriel Zusperreguy, Sa Maîtresse

Aurélien Houette, Monsieur de G. M.

Viviane Descoutures, Madame

Adrien Couvez, Le Chef des mendiants

Arnaud Dreyfus, Le vieux Gentilhomme

Myriam Kamionka, Une Prostituée travestie en jeune garçon

Mathieu Botto, Le Geôlier

L'Histoire de Manon

J'ai assisté aux deux premières représentations de la reprise de L'Histoire de Manon de MacMillan à l'Opéra Garnier. Samedi dernier et lundi soir. La distribution ci-dessus est celle de lundi.

L'intrigue du roman de l'Abbé Prévost est relativement bien respectée. Toutefois, le personnage de Manon est rendu plus sympathique. Dans cette version, son inconstance paraît avoir pour seule cause l'intérêt de son frère pour l'argent. Après vérification, dans le roman (dont je recommande la lecture), Lescaut incite effectivement Manon à se faire entretenir par G. M., mais Manon avait eu avant quelqu'autre occasion de tromper Des Grieux. Dans ce ballet, les mouvements de pieds semblent parfois assez compliqués ; pendant les entr'actes, entre balletomanes, on se demande si certaines aspérités ou défauts de synchronisation sont volontaires ou non (parfois, manifestement oui, mais des doutes subsistent, c'est intrigant !). Globalement, les mouvements des danseurs de la deuxième distribution m'ont semblés plus fluides. Comme dans certains ballets de Noureev (en particulier, Roméo et Juliette), on a parfois l'impression d'assister à la reconstitution d'une scène de rue, des solistes dansant au devant de la scène tandis que les membres du corps de ballet font plus ou moins acte de figuration en arrière-plan en vaquant à de diverses occupations. Cette vulgarité va parfois plus loin, notamment au deuxième acte, avec la représentation de la trivialité. Celle-ci était parfois montrée de façon grossière dans Roméo et Juliette. On la retrouve ici dans une scène de bacchanale (beaucoup plus convaincante samedi que lundi, où il était bien difficile de comprendre ce qui se passait ; il faut dire que j'étais distrait par l'orchestre, j'y reviendrai !).

Venons-en maintenant aux danseurs. Si j'ai trouvé Clairemarie Osta (Manon) et Nicolas Le Riche (Des Grieux) très bons samedi, ils ne m'ont ému qu'au troisième acte au cours duquel, spoiler alert, Manon meurt en Amérique dans les bras de Des Grieux. Lundi, Josua Hoffalt et la sublime Aurélie Dupont étaient en état de grâce. La jeunesse, l'amour des deux personnages était plus convaincants à mes yeux dans leur pas de deux du premier acte. L'expression du visage, à laquelle j'accorde une grande importance, était plus travaillée chez Josua Hoffalt que chez Nicolas Le Riche (je ne pense pas que ce soit lui faire injure de dire que l'expression faciale n'est pas son point fort : il en a tellement d'autres !). De son côté, Aurélie Dupont est absolument rayonnante ! Le rôle de G. M. est interprété lundi par Aurélien Houette avec une froide noblesse. J'ai trouvé que cette anguleuse rigidité faciale correspondait mieux au personnage que les courbes de Stéphane Phavorin samedi. Le sentiment de malaise pendant le pas de trois Manon/G. M./Lescaut à la fin du premier acte n'en était que plus malsain. Plus qu'un simple entremetteur, Lescaut assiste et participe incestueusement à leur manège.

Si elle semble sous l'influence de Lescaut au premier acte, ce n'est qu'au deuxième acte que transparaît véritablement l'ambiguité de Manon. À quel point l'argent et la séduction ne sont-ils pour elle qu'un jeu ? ce jeu que refuse Des Grieux. Lundi, j'ai particulièrement aimé la façon dont les deux personnages entrent en conflit sur ce sujet qui est symbolisée par le bracelet orné de pierres précieuses que G. M. a offert à Manon.

Dans la scène festive du deuxième acte, Lescaut paraît complètement ivre. Le rôle comporte une variation suivie d'un pas de deux avec la maîtresse de Lescaut au cours de laquelle celle-ci est bien embêtée d'avoir un partenaire incapable d'aligner convenablement une suite de pas, de prises de mains et de portés. Samedi, Stéphane Bullion a été très drôle dans cette scène ! davantage que Jérémie Bélingard dont la pantomime m'a alors semblée quelque peu exagérée. Si en général j'apprécie beaucoup Alice Renavand, dans le rôle de la maîtresse de Lescaut, son interprétation ajoutait une dimension un peu trop putassière au rôle. Je lui ai donc préféré Muriel Zusperreguy qui dansait ce lundi.

Parmi les solistes, je voudrais aussi signaler le chef des mendiants qui apparaît au premier acte. Samedi, j'ai été très impressionné par Allister Madin (qui est le seul danseur du ballet de l'Opéra à qui j'aie serré la main, grâce au Petit Rat, à l'issue une représentation de La Bayadère au cours de laquelle ce danseur avait été une très belle idole dorée).

Parmi les ingrédients qui peuvent transformer une belle soirée en une des meilleurs soirées de ballet de l'année (à côté de Myriam Ould-Braham dans La Source et dans La Bayadère, et puis Aurélie Dupont et Evan McKie dans Onéguine), il faut bien sûr compter l'orchestre. Si samedi, l'orchestre m'avait semblé jouer très bien la musique de Massenet, ce lundi, il jouait fantabuleusement bien. Comment est-ce possible ? C'est simple : ce n'étaient pas les mêmes musiciens ! Parmi les moments les plus délicieux, ce passage du deuxième acte mettant en valeur Manon qui est un bien bel ensemble pour instruments à vents. L'entendant depuis ma loge de face (plutôt qu'une loge de côté samedi), je pouvais profiter pleinement de la stéréo ! Les instruments qui m'ont procuré le plus de plaisir ont été la clarinette et le hautbois (qui comme samedi avait une sonorité proche de celle du cor anglais, comme le faisait observer l'experte Klari). Les solos de violon, de violoncelle (et aussi d'alto me semble-t-il) étaient également très beaux. Je ne suis pas des plus grands admirateurs de la musique de Massenet, mais il faut bien admettre que l'arrangement et l'orchestration de Martin Yates sont bien faits. Il me faudrait quelques nouvelles écoutes pour mieux m'en rendre compte (je ne retournerai voir ce ballet que lors de la dernière pour les adieux de Clairemarie Osta), mais j'ai apprécié le caractère motivique de cette musique. Certaines apparitions et réapparitions de personnages sont ainsi soulignées par des motifs, et pas seulement au troisième acte quand avant que Manon meure les personnages rencontrés précédemment font une apparition en arrière-plan, chacun étant accompagné d'une musique qui lui corresponde.

Ailleurs :

Parlons maintenant des à-côtés. Lundi soir, en me dirigeant vers ma première loge 28, je vois une ouvreuse sortir de la 30 dont je soupçonne qu'elle communique avec la 28. Lui tendant ma place, elle me dit de voir avec sa collègue s'occupant des loges de côté. Il n'y a pas lieu de s'étonner que cette autre ouvreuse fût débordée... Arrivé à ma place, je constate que j'aurais effectivement pu entrer par la porte de la loge 30 si la première ouvreuse ne l'avait fermée devant moi. Ces grandes loges de face comportent des rangées de 8 fauteuils. Au deuxième rang, on vend à 70€ des places aveugles derrière quelque pilier. Une dame a fait un scandale à ce propos. Une autre a débarqué en me regardant moi et mon voisin d'un air et d'un ton accusateur, genre dégagez d'ici. Devant cette inédite revêche, j'ai déployé toute l'amabilité qu'il me restait pour lui demander de sortir et de tourner à droite pour trouver sa loge impaire (au total, ce soir, j'ai dû servir de panneau indicateur à quatre personnes, il faudrait que je pense à me faire payer par l'Opéra). Au bout de dix minutes de spectacle, on a bizarremment fait entrer des retardataires dans cette grande loge, dont tous les sièges étaient déjà occupés. Les loges sont spacieuses, mais rajouter ainsi des resquilleuses, c'est du vice. Est-ce un bêta-test pour la configuration de l'année prochaine dans laquelle certaines loges auront un cinquième rang ? Par ailleurs, en arrivant à l'Opéra, j'avais découvert que les interminables travaux sur les toilettes du côté pair étaient terminés. Ils sont un peu plus dignes que ce qu'il y avait là avant. Le loquet fonctionne mal ; chez les dames on manque manifestement de savon puisque certaines vont se laver les mains que les messieurs. Miracle, le sèche-mains fonctionne ! Trop bien puisqu'il fait un un bruit infernal qui s'entend à trente mètres à la ronde (il est aidé en cela par le fait que la porte d'accès reste ouverte en permanence). Au milieu du premier acte, je n'ai donc guère été étonné d'entendre un suspect bruit de soufflerie.

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Don Giovanni à Bastille

2012-04-17 14:17+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra

Opéra Bastille — 2012-04-16

Peter Mattei, Don Giovanni

Paata Burchuladze, Il Commendatore

Patricia Petibon, Donna Anna

Saimir Pirgu, Don Ottavio

Véronique Gens, Donna Elvira

David Bizic, Leporello

Nahuel Di Pierro, Masetto

Gaëlle Arquez, Zerlina

Marius Stieghorst, direction musicale

Michael Haneke, mise en scène

Christoph Kanter, décors

Annette Beaufays, costumes

André Diot, lumières

Alessandro Di Stefano, chef de chœur

Orchestre et Chœur de l'Opéra national de Paris

Don Giovanni, Mozart.

Je n'ai pas pris un plaisir fou en allant voir Don Giovanni à Bastille. Même pour cet opéra, qui s'il n'est pas mon préféré m'avait cependant procuré beaucoup de plaisir au TCE il y a deux ans, l'Opéra Bastille s'avère incapable de m'émouvoir. Ce n'est pas de la faute de la mise en scène remarquable du cinéaste Michael Haneke mettant l'accent sur les cruels antagonismes entre classes sociales (cols blancs et cols bleus) dans un immeuble de bureaux. Ce qui m'a manqué ce soir, c'est le plaisir musical. Pour tout dire, l'Orchestre me procure davantage de plaisir quand il joue La Bayadère de Minkus ! À vrai dire, ce n'était pas exactement le même orchestre qui jouait puisqu'il y a en fait deux orchestres à l'Opéra (les bleus et les verts). Lors des représentations du ballet La Source où les deux formations alternaient, j'avais déjà eu l'occasion de constater qu'un des deux orchestres avait ma préférence... N'étant pas expert en mozartitude, je ne saurais dire exactement ce qui m'a déplu, mais les symptomes étaient présents dès l'ouverture. Parmi les explications possibles, l'effectif musical peut-être un peu trop bourrin pour ce répertoire : quatre contrebasses, cela ne favorise pas vraiment la légèreté. Du gros son, bref, pas vraiment une interprétation baroquisante... Les effets sont parfois brutaux, manquant de rondeur. Les cordes et les vents me donnent parfois l'impression d'être dans des mondes parallèles.

Quand les chanteurs commencent à utiliser leur voix, un soupçon s'installe en moi : sont-ils sonorisés ? Je présume que les mécanismes de financement occulte des précédentes campagnes présidentielles seront complètement mis au jour avant que l'on dispose d'une réponse définitive à cette question...

Dans les prestations vocales, je retiens d'abord celles de Saimir Pirgu (Don Ottavio) et Gaëlle Arquez (Zerlina), et pour mentionner aussi les premiers rôles, Véronique Gens (Donna Elvira), tout particulièrement dans son grand air du deuxième acte. La présence scénique de Peter Mattei (Don Giovanni) est tout à fait impressionnante...

Pièce de 2€, fête de la musique 2011

Parmi les sources de déplaisir, il faut mentionner l'insupportable public de l'Opéra Bastille. L'intervention finale du Commandeur est intervenue à l'entour de 23h. J'avais du mal à croire le compte-rendu Laurent/Paris—Broadway à propos d'un concert londonien, mais je peux maintenant faire le même constat : on trouve encore de nos jours des gens qui ont une montre qui bippe toutes les heures et qui ne pensent pas à la laisser chez eux quand ils vont voir un spectacle (ce genre de montre, cela ne devrait être bon que lorsqu'on est au collège et que le bip est couvert par les sonneries périodiques annonçant la fin des cours, non ?). Bref, cela a bippé, bippé et encore bippé. Après l'entr'acte, mon nez s'est retrouvé agressé par une odeur de tabac venant de quelque voisin, lequel se passait souvent la main sur ses joues (ce qui à moins d'avoir un rasage impeccable ne saurait être silencieux...). Un peu plus loin, quelqu'un fouille occasionnellement dans un sac en plastique. Bien sûr, cela bavarde et tousse de partout. Des spectateurs sont manifestement entrés dans la salle avec leur coupe de champagne puisque quelques unes d'entre elles se sont dénoncées bruyamment. En 2012/2013, hors ballets, je n'ai prévu qu'une seule sortie à Bastille pour voir un opéra (La Khovantchina). Je vais essayer de m'y tenir... C'est un comble que la chose la plus plaisante que je puisse associer à cette soirée soit la pièce de 2€ de 2011 ci-contre célébrant les trente ans de la Fête de la musique qui s'est trouvée en ma possession après avoir pris un café.

J'avais déjà remarqué pareil dispositif quand j'étais allé voir La Dame de Pique en février. Ce soir également, un paravent permettait à quelques personnes situées dans une gallerie d'utiliser une lumière pour feuilleter la partition posée sur un pupitre sans gêner visuellement les autres spectateurs :

Paravent à Bastille

Est-ce un dispositif nécessaire au bon déroulement de la représentation (déclenchement des surtitres, tournage de boutons pour l'amplification des voix, etc.) ? S'agit-il d'étudiants en musique ? Je suis preneur de toute information ou hypothèse à ce sujet !

Ailleurs : Pink Lady.

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Aruna Sairam au Théâtre de la Ville

2012-04-15 13:37+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Culture indienne

Théâtre de la Ville — Place du Châtelet — 2012-04-14

Aruna Sairam, chant

H. N. Bhaskar, violon

J. Vaidyanathan, mridangam

S. V. Ramani, ghatam

J'avais déjà entendu la chanteuse de musique carnatique Aruna Sairam en concert. C'était au NCPA de Mumbai en 2010. Qu'elle soit invitée par le Théâtre de la Ville cette année avait été la raison principale pour laquelle je m'étais abonné cette année. Je ressors extrêmement enthousiaste de ce concert. Je n'ai qu'un seul regret : qu'il n'ait pas duré un peu plus qu'une heure quarante.

Le récital a commencé par deux compositions relativement courtes (kritis). Le premier en Raga Abhogi est manifestement en l'honneur de Shiva puisqu'il commence par Om Namah Shivaya. La suite du texte serait en tamoul. À la fin de la composition, on entre progressivement dans une séquence improvisée autour de ce qui a précédé et dans laquelle la chanteuse utilisera beaucoup le nom des notes. La conclusion apaisante intervient quand la voix de la chanteuse se met à l'unisson du tampura. Suit une deuxième composition du même type, en Raga Lalita, en sanskrit et dédiée à Lakshmi.

Je n'ai pas tout compris à la présensation qu'a faite la chanteuse de la pièce suivante. Apparemment, en passant devant l'église St George à Chennai, un compositeur de musique carnatique aurait entendu un chant qui lui plaisait et il aurait décidé d'adapter la mélodie étrangère pour en faire quelque chose d'indien.

Après ces pièces assez brèves, on est entré de la pièce principale du récital, en Raga Todi. Ce développement a eu à peu près la même forme que celle que j'ai pu décrire à l'occasion d'autres concerts, comme celui de S. Saketharaman. Cette pièce a commencé par un Alap dont j'aurais aimé qu'il ne se termine jamais. Ce n'est pas un Alap dans le même genre que ceux de la musique du Nord de l'Inde, puisque tout va plus vite. Cependant, comme elle l'a annoncé au début de cette section, la chanteuse a utilisé toute une palette de Gamaka, des ornementations autour des notes du Raga. La technique qu'elle a le plus utilisée a été celle consistant à faire osciller de façon contrôlée la hauteur d'une note. Elle a également parcouru le chemin entre diverses notes de la gamme en glissant. J'ai oublié de le préciser, puisque c'est une caractéristique de la musique carnatique, mais depuis le début du concert toutes les lignes mélodiques, ornementations comprises, sont reproduites immédiatement par le violoniste ! La gestique des chanteurs de musique carnatique inclut le plus souvent des mouvements de la main droite pour clapper le tal. Aruna Sairam accompagne ses mouvements mélodiques de nombreux gestes de la main gauche, mais aussi de la main droite.

À la fin de l'Alap et le solo de violon obligatoire (dans lequel le violoniste passe curieusement sans y rester trop longtemps sur les notes qui résonnent le mieux avec le tampura), on passe à une partie semi-rythmique, ce qui est assez original (c'est la première fois que j'entends ça dans un développement). La chanteuse chante en effet des phrases comme Da doum Da doum... dans lesquelles un rythme est immédiatement perceptible, mais entre ces phrases rythmées s'intercalent des silences qui seront bientôt comblés quand les percussionnistes entreront en action.

La suite du développement sera jouée sur un rythme à sept temps. Le texte du śloka contient des références à Krishna (qui est aussi nommé Shyam), mais le mot qui reviendra le plus souvent sera Kamakshi qui est un nom de la Déesse. La chanteuse se lance ensuite dans des improvisations. Le nom des notes se mélange aux syllabes du vers. Si je comprends bien, en principe, les phrases sont censées se terminer à un endroit précis du cycle rythmique. Au début de son improvisation, les vertigineuses phrases chantées par Aruna Sairam dureront plusieurs cycles. Elle doit avoir une technique pour respirer sans qu'on s'en rende compte... Bref, elle fait décoller un avion, et quand l'envie lui prend de finir sa phrase, elle n'a aucune difficulté à le faire atterrir à l'endroit qui lui plaît. Après avoir élaboré des phrases avec d'une grande virtuosité, la chanteuse va en réduire la longueur par paliers, en terminant par des fractions du cycle rythmique. Après avoir fait chacun un petit solo, les deux percussionnistes joueront ensemble. L'échange a été assez bref et agréable, mais pas aussi délectable que celui auquel j'avais assisté lors d'un concert de Sri Mohan Santhanam. La chanteuse a conclu la pièce principale du concert en revenant au vers, et en particulier au mot Kamakshi.

Pour compléter le programme, la chanteuse a inséré un Abhang et un Tillana comme elle l'avait déjà fait lors de son concert à Mumbai en février 2010. Ce sera le même Tillana, absolument superbe (voir cette vidéo), en l'honneur de Krishna et de sa lutte contre le serpent à cinq têtes Kalinga. Avant cela, elle aura donc chanté un Abhang. Il s'agit de musique dévotionnelle marathi. Originaire de Mumbai, la chanteuse aime insérer ce type de chant dans ses programmes. Je pense que c'est le morceau de musique que j'ai préféré pendant ce concert. En tout cas, c'est celui qui m'a le plus ému. L'art de la chanteuse dans son interprétation de Bhakta Jana Vatsale ce samedi est sans commune mesure avec ce que l'on peut entendre en visionnant certaines vidéos sur Internet (je préfère cependant celle-ci à celle-là). J'étais aux anges jusqu'à la fin de cet Abhang que la chanteuse a conclu en répétant de nombreuses fois un des noms de Vishnu, Vittala, qui est la divinité à laquelle rendent hommage les Abhang.

Le public en redemandant avec insistance, la chanteuse est revenue pour chanter la toute première des compositions, dédiée à Muruga, d'Arunagirinathar (si j'ai bien reconstitué le nom...).

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Matthias Goerne à Pleyel

2012-04-13 12:56+0200 (Orsay) — Culture — Musique

Salle Pleyel — 2012-04-12

Roland Daugareil, violon solo

Orchestre de Paris

Paavo Järvi, direction

Manfred, ouverture op. 115, orchestration de Gustav Mahler (Schumann)

Matthias Goerne, baryton

An Silvia (Schubert)

Traum durch die Dämmerung (Strauss)

Das Rosenband (Strauss)

Freundliche Vision (Strauss)

Greisengesang (Schubert)

Heimliche Aufforderung (Strauss)

Ruhe, meine Seele (Strauss)

Im Abendrot (Schubert)

Allerseelen (Strauss)

Tränenregen, extrait de La Belle Meunière (Schubert)

Morgen! (Strauss)

Symphonie nº1, en si bémol majeur, dite du Printemps (Schumann)

L'ouvreur du premier balcon me suggérant de me replacer, j'ai suivi ses conseils, et même au delà puisque je suis descendu au parterre de la Salle Pleyel et y ai trouvé une place au centre, ni trop loin ni trop près de la scène. Depuis le concert de rentrée de 2010 où s'était notamment joué Kullervo (Sibelius), je n'avais pour ainsi dire plus vu le dos Paavo Järvi lorsqu'il dirige l'Orchestre de Paris, puisque je suis le plus souvent à l'arrière-scène pour écouter cet orchestre. Le moins que l'on puisse dire est qu'il ne fait pas du tout la même impression de dos que de face ! Ceux qui n'ont jamais été à l'arrière-scène doivent s'imaginer que c'est un honorable homme honnête et droit. Ah, s'ils savaient comment l'espiègle utilise sa bouche pour lancer un pizz. de contrebasses ou un solo de basson...

Le début de l'ouverture Manfred m'a plu, et puis c'est devenu un gros fourbi schumannien qui m'a autant insupporté qu'il a failli m'endormir.

Le baryton Matthias Goerne a ensuite pris place entre le premier violon et le chef. Son programme est constitué de Lieder orchestrés de Schubert et Strauss. Avant le concert, je disais à “Grignotages” et à Klari qu'il faudrait vraiment que Goerne chante divinement bien pour que je ne m'assoupisse pas. C'est bien l'impression qu'il m'a faite ! Après des premiers Lieder sur le mode Aimons-nous follement dans l'herbe, les thèmes dériveront vers du moins joyeux.

Je ne suis d'habitude pas un admirateur inconditionnel de Matthias Goerne, mais l'écouter et le voir de près a été une merveilleuse expérience. Dans ce cycle de Lieder, les tempis ont systématiquement été très lents. Pas d'acrobaties vocales à signaler. Une bonne respiration est prise, la voix s'installe, la phrase musicale se développe lentement. Chaque inflexion semble réfléchie. Le chanteur se transforme presqu'en danseur. Il se penche d'un côté ou de l'autre, reprend appui sur ses pieds. Surtout, il accompagne son chant de gestes des mains qui semblent l'aider à modeler ses phrasés et la majestueuse courbe de sa ligne vocale. Le temps semble tellement s'arrêter que j'ai le temps de me dire Qu'est-ce que ce serait merveilleux si la note suivante, celle qui finira la phrase, était une longue note toute plate et de constater un temps indéterminé plus loin que c'est bien ainsi qu'il l'a chantée !

Le chant du baryton a été particulièrement délectable pendant les Lieder de Strauss, notamment Ruhe, meine Seele (ah, ces ruhe prononcés peu avant la fin !), mais j'ai aussi trouvé intéressante sa manière de chanter les Schubert. Celui de ceux-là que j'ai préféré a été Greisengesang (Le chant du vieillard). Au cours de ce concert, je n'ai pas eu l'impression d'entendre des Lieder que je connaissais déjà, à l'exception de Tränenregen extrait de La Belle Meunière. Dans ce Lied, le tempo a été extrêmement lent, comme dans les Lieder qui avaient précédé, mais autant le chanteur que l'orchestre ont su maintenir l'édifice musical en équilibre sans le faire s'écrouler. J'avoue n'avoir pas pu détourner mon regard du chanteur pendant ce programme. Cela ne m'a heureusement pas empêché d'apprécier les solos de Roland Daugareil.

Après l'entr'acte, je me suis replacé dans la partie centrale de l'arrière-scène pour la Première Symphonie de Schumann. Bien qu'étant schumannophobe, je dois admettre avoir passé un bon moment, et tout particulièrement pendant les trois derniers mouvements, moins assommants que le premier. De très beaux solos d'instruments à vents (le basson, la flûte, etc...), quelques passages vivifiants, de beaux accents dans le Scherzo, une phrase appuyée des vents dans le dernier mouvement qui me fait curieusement penser à l'Orient de Shéhérazade de Rimski-Korsakov. Le chef Paavo Järvi dirige de mémoire. Dans le finale, c'est tout comme s'il faisait à vive allure des exercices de musculation de ses bras et des épaules ! Lors des saluts, il viendra saluer le percussionniste (solo de triangle à la fin du premier mouvement !), qui devait vraisemblablement jouer son dernier concert avec l'Orchestre avant sa retraite, vu la manière dont ses collègues ont tapé leurs pieds sur le sol. Qu'est-ce que je ne donnerai pas pour savoir quand un certain contrebassiste sera salué de la même façon...

Ailleurs : Klari.

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Myriam Ould-Braham dans La Bayadère

2012-04-12 12:22+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Danse

Opéra Bastille — 2012-04-11

Ludwig Minkus, musique, réalisée et adaptée par John Lanchbery

Marius Petipa, Sergueï Khoudekov, livret

Rudolf Noureev, chorégraphie et mise en scène d'après Marius Petipa

Ezio Frigerio, décors

Franca Squarciapino, costumes

Vinicio Cheli, lumières

Fayçal Karoui, direction musicale

Myriam Ould-Braham, Nikiya

Florian Magnenet, Solor

Charline Giezendanner, Gamzatti

Axel Ibot, Le Fakir

Yann Chailloux, Le Grand Brahmane

Éric Monin, Le Rajah

Natacha Gilles, Aiya, servante de Gamzatti

Cyril Mitilian, L'Esclave

Allister Madin, L'Idole dorée

Marine Ganio, Danse Manou

Héloïse Bourdon, Sébastien Bertaud, Danse indienne

Sarah-Kora Dayanova, Première variation

Valentine Colasante, Deuxième variation

Sabrina Mallem, Troisième variation

Ballet de l'Opéra

Élèves de l'École de danse de l'Opéra

Orchestre de l'Opéra national de Paris

La Bayadère, ballet en trois actes (production créée pour le Ballet de l'Opéra national de Paris le 8 octobre 1992)

Après l'avoir vue dans les rôles de Juliette et de Naïla, j'ai eu ce soir l'occasion de voir Myriam Ould-Braham dans un autre grand rôle : Nikiya. J'ai dû pour cela casser ma tirelire afin d'acheter un billet sur la bourse d'échange de l'Opéra, les distributions ayant été annoncées trop tard pour qu'il fût possible de voir à bas prix les interprètes que l'on voulait, en l'occurrence la distribution non étoilée !

Je crois que ce qui m'a le plus ému dans la danse de Myriam Ould-Braham, ce sont ces instants où elle est immobile. Quel port de tête ! Quel travail dans l'expression du visage ! (Cela me fait repenser à Mallika Thalak, une danseuse de bharatanatyam qui m'avait aussi ému avant de faire le moindre pas.) Ses mouvements de mains m'ont également marqué. Parmi les nombreux moments passionnants, la façon dont elle repousse le Grand Brâhmane, son pas de deux avec l'Esclave, sa confrontation avec Gamzatti, la variation de la corbeille à fleurs et les danses plus éthérées du troisième acte. J'ai hâte de revoir cette artiste dans d'autres grands rôles !

J'ai beaucoup aimé aussi Charline Giezendanner dans le rôle de Gamzatti. Ce n'est que la deuxième fois que je la vois dans un grand rôle si on excepte le visionnage du DVD de la Coppélia de Lacotte par l'école de danse de l'Opéra il y a une dizaine d'année et dans laquelle elle était épatante. Je l'avais trouvée très bien dans le rôle de Naïla dans La Source. Dans celui de Gamzatti, elle m'a fait une très grande impression, autant dans la pantomime que dans la danse.

Florian Magnenet (Solor) est toujours aussi impressionnant techniquement parlant, mais il sourit un peu trop...

Plus que lors de mes Bayadère précédentes, j'ai été saisi par l'extravagante succession des danses du deuxième acte. Le plus beau moment de cette séquence a été la variation de l'Idole dorée, superbement dansée ce soir par Allister Madin ! J'ai adoré également la danse Manou de Marine Ganio, qui a une espiègle façon d'écarquiller les yeux dans ce jeu avec deux élèves de l'école de danse au cours duquel elle doit éviter de renverser sa cruche. Dans la danse indienne, sans qu'elle soit aussi éblouissante que Sabrina Mallem dans le même rôle, j'ai aimé regarder Héloïse Bourdon.

Ailleurs : Blog à petits pas, Danses avec la plume, Danse-opera, Aymeric ont vu la même distribution lors de la représentation du 28 mars.

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Nixon in China au Châtelet

2012-04-11 09:35+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse

Théâtre du Châtelet — 2012-04-10

Franco Pomponi, Richard Nixon

Alfred Kim, Mao Zedong

June Anderson, Pat Nicon

Sumi Jo, Jiang Qing (Madame Mao)

Kyung Chun Kim, Zhou Enlai

Peter Sidhom, Henry Kissinger

Sophie Leleu, Nancy Tang, première secrétaire de Mao

Alexandra Sherman, Deuxième secrétaire de Mao

Rebecca de Pont Davies, Troisième secrétaire de Mao

Hai Wen Hsu, Salem Sobihi, Danseurs solistes

Orchestre de chambre de Paris

Chœur du Châtelet

Alexander Briger, direction musicale

Chen Shi-Zheng, mise en scène et scénographie

Shilpa Gupta, décors

Petra Reinhardt, costumes

Alexander Koppelmann, lumières

Yin Mei, collaboratrice à la chorégraphie

Olivier Roset, vidéaste

Stephen Betteridge, chef de chœur et assistant du chef d'orchestre

Nathalie Steinberg, chef de chant

Sylvie Leroy, pianiste répétitrice

Elsa Lambert, pianiste chœur

Rob Kearley, Christophe Gayral, assistants à la mise en scène

Doriane Fréreau, assistant aux décors

Frédéric Llinares, assistant aux costumes

Nixon in China, opéra en trois actes de John Adams sur un livret d'Alice Goodman

J'aime bien John Adams. J'avais entendu pour la première fois sa musique dans le ballet Parzival de John Neumeier. J'avais alors beaucoup aimé Harmonielehre. Plus tard, au disque, j'ai adoré son concerto pour violon électrique The Dharma at Big Sur. J'ai un revanche presque détesté son opéra Doctor Atomic dont j'ai visionné le DVD et en particulier son interminable deuxième acte où il est question de la météo avant le premier essai nucléaire. En concert, je n'ai pas davantage aimé la Doctor Atomic Symphony qui en est tirée. C'était après l'annonce de la programmation 2011/2012 du Théâtre du Châtelet. Sans avoir donc de prévention particulière, j'avais donc réservé une place assez chère pour la première représentation de la nouvelle production de Nixon in China qui avait lieu ce mardi.

John Adams a une façon bien à lui d'associer vents et cordes. Cette manière apparaît notamment dans les passages les plus impressionnants qui me procurent le plus grand plaisir. Cependant, je suis presque choqué par l'aspect répétitif de cette œuvre. Elle me semble découpée en tranches d'environ deux minutes. Quelques vents ou le synthé répètent un motif très court, d'autres motifs durant une mesure sont joués par d'autres instruments. Quelques phrases musicales plus longues sont brodées par dessus. La musique ne fait pas non plus complètement du sur place puisque les harmonies changent régulièrement, et ce de façon abrupte. À ces répétitions s'ajoutent parfois des notes surgissant d'une façon qui pourrait laisser à penser qu'elles reviendraient avec régularité lors des mesures suivantes, mais le compositeur semble s'être amusé à surprendre l'auditeur en mettant un peu d'aléatoire dans ces surgissements. Quelques cassures et dégradés rythmiques sont également à signaler.

Pendant le premier acte, j'ai ainsi eu l'impression d'entendre une première ambiance se développer pendant quelques minutes, puis très brutalement une deuxième est entrée en scène sans aucune transition. Ces changements de Raga peuvent très bien survenir au milieu de l'intervention d'un chanteur, ce qui est assez surprenant.

La façon dont la voix est traitée ne me plaît pas énormément. Cela me déplaît toutefois moins que dans Doctor Atomic. Le texte d'Alice Goodman est assez subtil, mais la mise en musique fait un peu brut de décoffrage. Comme dans Doctor Atomic, les rares exceptions au récitatif sont le fait des personnages féminins interprétés par June Anderson (Pat Nixon) et Sumi Jo (Madame Mao) à qui on a confié quelques acrobaties vocales.

Pendant le prélude, des vidéos d'époque des États-Unis d'Amérique et de la Chine sont projetées. Quelle époque exaltante cela devait être !.. Le premier acte montre l'arrivée de Nixon en Chine. Il est accompagné par sa femme et Henry Kissinger. Ils sont accueillis par Zhou Enlai puis par Mao Zedong qui semble s'intéresser davantage à la philosophie qu'à la politique.

Comme on peut le constater presque tous les jours à notre époque où ce type de rencontres est très fréquent, l'opéra met très bien en évidence que la communication par images et le storytelling sont aussi mensongers qu'ils ne sont pas nouveaux...

Je me suis un peu plus laissé emporter par la musique du deuxième acte, en particulier pendant la grande scène au cours de laquelle Nixon assiste à une représentation du Détachement féminin rouge (représentation qui dégénère en Révolution culturelle, les héroïnes finissant par être forcée à s'humilier lors de séances d'autocritique). La chorégraphie et la danseuse soliste Hai Wen Hsu méritent que les balletomanes se déplacent !

En revanche, le troisième acte pendant lequel les personnages rêvassent à propos de leur jeunesse, je l'ai trouvé d'un ennui mortel.

Ailleurs : Zvezdo, Palpatine.

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Passions – Le sang du Christ à la Cité de la musique et à Pleyel

2012-04-09 01:00+0200 (Orsay) — Culture — Musique

Cette semaine, la Cité de la musique et la Salle Pleyel avaient concocté un programme Passions – Le sang du Christ. J'ai assisté à trois concerts de cette série :

Cité de la musique — 2012-04-05

Stile Antico

Helen Ashby, Kate Ashby, Rebecca Hickey, sopranos

Emma Ashby, Cara Curran, Eleanor Harries, altos

Jim Clements, Andrez Griffiths, Benedict Hymas, ténors

Will Dawes, Oliver Hunt, Matthew O'Donovan, basses

Woefully arrayed (William Cornysh)

Hosanna to the son of David (Orlando Gibbons)

O sacrum convivium (Thomas Tallis)

In monte Oliveti (Roland de Lassus)

I give you a new commandment (John Sheppard)

Salvator mundi (Thomas Tallis)

O vos omnes (Tomás Luis de Victoria)

O Crux, ave (Cristóbal de Morales)

Vide homo (Roland de Lassus)

Dum transisset Sabbatum (John Taverner)

Tulerunt Dominum meum (Nicolas Gombert)

Maria Magdalene (Francisco Guerrero)

I am the resurrection (Orlando Gibbons)

Congratulamini mihi (Thomas Crecquillon)

Surrexit pastor bonus (Jean Lhéritier)

In resurrectione tua (William Byrd)

Cela commence jeudi avec l'ensemble vocal Stile Antico constitué de douze chanteurs spécialisés dans la musique de la Renaissance. Les textes sont en latin et en anglais. Dans la première partie, ils évoquent la Passion et dans la deuxième ce sera la Résurrection. La pure beauté de cette musique est sidérante. Tout est très polyphonique. Le cas le plus extrême sera apparemment celui d'une pièce à 8 voix, chacune étant chantée par un seul interprète.

J'ai souvent l'impression d'entendre plusieurs chanteurs de dhrupad jouant simultanément. Au lieu qu'une voix entre en résonance avec le bourdon du tampura, les voix interagissent les unes avec les autres.

Entre chaque pièce, les chanteurs changent de place dans le demi-cercle qu'ils forment. La relative jeunesse des chanteurs, le silence respectueux du public qui se déchaînera à la fin ont fait de ce concert un très beau moment. (Merci à Klari d'avoir attiré mon attention sur ce concert.)

Ailleurs : Zvezdo, Klari.

Salle Pleyel — 2012-04-06

Orchestre philharmonique de Radio France

Académie de l'Orchestrer Philharmonique de Radio France et du Conservatoire de Paris

Amaury Coeytaux, violon solo

Christophe Henry, orgue

Ton Koopman, direction musicale

Michael Lonsdale, récitant

Les sept dernières paroles du Christ en croix, version originale pour orchestre (Hob. XX:1), Haydn

Je ne suis pas du tout rentré dans ce concert du Vendredi saint, notamment en raison d'une fatigue accumulée au cours de la semaine et tout particulièrement en ce vendredi. À mon avis, les Sept dernières paroles du Christ en croix ne sont pas le chef-d'œuvre de Haydn, ne serait-ce que parce qu'il a aussi composé Les Saisons. Je dois même avouer que je me suis souvent ennuyé. La musique est certes adorablement belle, mais à l'intérieur d'un mouvement, elle me paraît très répétitive.

Je savais que cette œuvre admettait plusieurs versions, mais je n'avais pas étudié le cas en détail. Après avoir écouté une version chez moi, je m'attendais notamment à entendre juste avant le tremblement de terre du dernier mouvement un mi bémol grave de basse prononçant Meinem Geist (note que je me suis amusé à atteindre et dépasser en travaillant mes graves pour le dhrupad...), mais il n'y eut rien de tout cela puisque c'est la version originale pour orchestre qui était jouée. Chacune des sept paroles est chantée par le chœur, puis dite par le récitant Michael Lonsdale (quelle voix !) à l'issue de la lecture de textes de Jean-Pierre Nortel. L'orchestre intervient alors sans aucun accompagnement vocal.

Malgré ma fatigue et mon relatif déplaisir, ce concert restera un bon souvenir puisqu'outre que l'œuvre se termine par un énergique tremblement de terre, j'ai eu l'honneur, avec la petite proportion des spectateurs ayant un peu joué le jeu, d'être dirigé par Ton Koopman ! Vers 20h, il est en effet entré en scène seul avec l'organiste Christophe Henry pour faire répéter au public les sept courts chorals constituant la partie vocale de cette œuvre, comme originellement l'assemblée des fidèles pouvait accompagner l'orchestre. J'ai donc essayé de chantonner la partie T. de la partition fournie avec le programme. Étant trop fatigué, je m'en suis abstenu pendant le concert. Les choristes de Radio France étaient censément dispersés incognito au cœur du public.

Salle Pleyel — 2012-04-08

Marita Sølberg, soprano

Nathalie Stutzmann, alto

Markus Brutscher, ténor, l'Évangéliste

Christian Immler, basse, Jésus

Eugénie Warnier, soprano

Owen Willetts, alto

Magnus Staveland, ténor

Benoît Arnould, basse

Jolanta Kowalska, soprano

Mélodie Ruvio, alto

Svetli Chaumien, ténor

Charles Dekeyser, basse

Les Musiciens du Louvre-Grenoble

Marc Minkowski, direction musicale

Matthäus-Passion, BWV 244.

Dimanche à la Salle Pleyel se jouait la Passion selon Saint Matthieu de Bach. J'ai entendu un certain nombre de fois les deux Passions de Bach. Il y a deux ans, j'avais été particulièrement impressionné par la version donnée au même endroit par Marc Minkowski. J'avais été notamment frappé par la tension dramatique incarnée par le fabuleux évangéliste Markus Brutscher. Comme c'était la même équipe qui remettait le couvert pour cette Saint Matthieu, j'attendais évidemment beaucoup de ce concert. Mes vœux ont été exaucés !

Ce n'est peut-être pas la concert de ma vie (voir ici et ), mais cela s'en rapproche d'assez près ! Comme il y a deux ans dans la Saint Jean, l'effectif vocal est réduit. Il est constitué de 3 chœurs de 4 chanteurs solistes. C'est la première fois que j'entends en concert cette œuvre dans cette configuration, dont j'ai un enregistrement par Paul McCreesh (avec encore moins de chanteurs !). L'orchestre est également divisé en deux. Depuis ma place centrée au fond du premier balcon, l'effet visuel est saisissant. Au fond, une sorte de mur de basses avec les deux contrebasses (une pour chaque orchestre), deux violoncelles et un seul gambiste. C'est la première fois que j'entends aussi bien les cordes graves dans ce répertoire. Peut-être est-ce un stade du développement mélomaniaque : au début, on n'entendrait que les voix aiguës, puis on se mettrait à entendre ce que font les graves et le stade ultime, ce serait quand on arriverait à se figurer simultanément ce qui se passe chez les altos ?

Bref, dans le chœur introductif que j'ai pourtant écouté un certain nombre de fois (en concert, la dernière fois remonte à quatre ans), j'ai ainsi une sensation d'inouï en entendant les violoncelles. Dans tout l'orchestre, je finis par ne pour ainsi dire plus entendre que le violoncelliste Niels Wiebolt, absolument magnifique, que ce soit dans l'accompagnement des récitatifs ou dans les Ploum-ploum pizz. de l'air Erbarme dich. (En relisant ma chroniquette d'il y a deux ans, je me rends compte que je l'avais déjà remarqué ! J'essaierai de retenir ce nom, au cas où il ferait des concerts de musique de chambre...)

Revenons à l'orchestre divisé en deux. Jamais l'aspect stéréophonique ne m'a autant frappé que lors de cette cinquième écoute en concert. Alors que d'autres adouciraient les contrastes et chercheraient un beau son rassurant et soyeux, l'interprétation de l'orchestre a juste ce qu'il faut de rêche pour qu'à l'audition, on n'ait pas l'impression de goûter un plat aseptisé, mais un plat qui ait du goût (et sans poudre de perlimpinpin ajoutée : je veux parler du vibrato). Dans certains numéros musicaux, l'opposition entre la moitié gauche et la moitié droite de l'orchestre n'en est que plus frappante. Ceci accentue encore la tension dramatique de l'œuvre.

Venons-en aux chanteurs. L'interprétation du rôle de l'évangéliste par Markus Brutscher est conforme à ce à quoi on pouvait s'attendre après sa Saint Jean. Ce n'est pas du tout un évangéliste terne-palot ! C'est très très incarné, parfois un peu trop, mais je préfère qu'il y en ait trop que pas assez ! La basse Christian Immler fait également un très bon Jésus. Ce sont ces deux chanteurs qui se distinguent le plus sur la durée de l'œuvre, et tout particulièrement dans la première partie, très dramatique. Les autres chanteurs ne semblent aucunement chercher à briller. Sans pourtant être ternes, ils chantent leurs airs et récitatifs sans forcer leur voix (que j'entends très bien). Les personnages ne m'en paraissent que plus humains. Peu avant la fin de la première partie intervient le duo So ist mein Jesus nun gefangen entre la soprano Marita Sølberg et l'alto Nathalie Stutzmann. Leurs deux voix se sont merveilleusement bien mariées. Leur duo est suivi par une très belle fugue, et après un récitatif, la première partie s'achève par le choral O Mensch, bewein' dein' Sünde groß pour lequel les chanteurs qui étaient jusque-là regroupés quatre par quatre (deux groupes à l'avant et un à l'arrière), la plupart des solistes donc se sont rassemblés à l'arrière tandis que quatre voix de femmes se regroupaient au milieu. L'attitude, la proximité entre les chanteurs, les gestes échangés donnaient une formidable impression de communion dans l'épreuve entre les disciples de Jésus (qui viennent pourtant de prendre la fuite alors qu'il vient d'être arrêté). À l'issue de cette première partie, j'étais bouleversé...

La deuxième partie est plus contemplative que narrative. Le début m'a fait légèrement redescendre après les sommets de la première partie. L'ensemble est moins incarné, plus éthéré. Il y a plus de commentaire que d'action. Cependant, quelle belle suite de tubes n'entend-on pas ! notamment dans les airs accompagnés par la viole de gambe (ou encore le fanthautboisbuleux Sehet, Jesus hat die Hand, en passant par le Aus Liebe will mein Heiland sterben! accompagné par la flûte et joué cet après-midi sur un tempo dangereusement lent). On entendra aussi un fort beau solo du premier violon de l'orchestre I (et un autre moins au point pour l'orchestre II). Pendant toute la durée de l'œuvre, Marc Minkowski aura ménagé de longs points d'orgue et quelques silences à la fin de certains numéros. La mort de Jésus sera suivi de plusieurs secondes d'absolu silence. Malheureusement, une partie du public ne respectera pas la volonté évidente du chef de faire succéder au chœur final Wir setzen uns mit Tränen nieder un silence.

Il y a très exactement un an selon le calendrier liturgique, j'avais l'impression de finir un cycle. Je venais alors d'entendre une Passion selon Saint Jean qui m'avait beaucoup déçu. Étais-je à ce point blasé-exigeant que j'en perdais le goût pour cette musique ? J'ai l'impression qu'un nouveau cycle a commencé avec cette Saint Matthieu !

Ailleurs : Bladsurb, Palpatine.

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The Suit aux Bouffes du Nord

2012-04-04 08:46+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Théâtre

Théâtre des Bouffes du Nord — 2012-04-03

Nonhlanhla Kheswa, Matilda

William Nadylam, Philemon

Jared McNeill

Arthur Astier, guitare

Raphaël Chambouvet, piano, accordéon

David Dupuis, trompette

Peter Brook, Marie-Hélène Estienne, Franck Krawczyk, adaptation, mise en scène et en musique

Philippe Vialatte, lumières

Oria Puppo, éléments scéniques et costumes

Rikki Henry, assistante à la mise en scène

Guillaume Lepert, régisseur plateau

The Suit, d'après Can Themba, Mothobi Mutloatse et Barney Simon

N'ayant découvert Peter Brook qu'assez récemment via son travail sur Le Mahābhārata (voir mon billet sur les films qu'il a réalisés ou mon résumé de l'épopée), je ne connaissais pas la pièce Le Costume. Je n'avais en effet jusqu'à hier soir vu que trois de ses précédents spectacles (Love is my sin d'après Shakespeare, Fragments de Beckett et Une Flûte enchantée). La pièce est adaptée de la nouvelle de Can Themba. Peter Brook, Marie-Hélène Estienne et Franck Krawczyk l'ont réadaptée pour cette nouvelle version en anglais dont la première avait lieu hier soir.

Le décor est fait de simples chaises colorées, de penderies, d'une table en bois. Les penderies auront de multiples usages comme les tiges de bambou verticales utilisées dans Une Flûte enchantée. Au fond de l'espace scénique, des tiges métalliques sont dressées, apparemment juste pour le clin d'œil.

La pièce met en scène trois comédiens et un figurant (non crédité). Les deux personnages principaux sont Philemon et Matilda, un couple de Noirs vivant à Sophiatown, près de Johannesbourg. Quand Philemon va découvrir que sa femme le trompe, l'amant aura fui en laissant son costume. La punition qu'il va infliger à sa femme sera de devoir supporter la présence de ce costume comme invité d'honneur permanent. Il sera leur compagnon lors des repas et promenades. Le troisième personnage est un ami de Philemon, celui par qui il a eu connaissance de l'inconstance de sa femme.

L'action est très rondement menée. Au bout de quelques minutes, on ne s'étonne plus de la manière dont les personnages insèrent dans le texte des dialogues des mots adressés aux spectateurs et à eux-mêmes révélant leur état d'esprit et les sentiments qu'ils éprouvent face aux différentes situations.

Avant de venir, j'avais bien vu que Franck Krawczyk participait à ce spectacle. Comme il avait réalisé l'adaptation de la partition pour Une Flûte enchantée qu'il avait interprétée certains jours, il était clair que la musique aurait sa place dans ce spectacle. En fait, c'est une très belle pièce de théâtre musical ! Sur la scène, trois musiciens ont pris place. Une guitare, une trompette, un accordéon (dont l'instrumentiste joue également sur un clavier de synthétiseur). La musique accompagne l'action. Parfois elle est en arrière-plan et rythmes les scènes. Parfois elle est décorative, le synthétiseur étant par exemple utilisé pour produire une sonnerie quand Philemon téléphone à son patron (blanc). Parfois la musique prend le dessus. Elle est constituée d'un étonnant assemblage de morceaux provenant de très diverses sources (classiques, sud-africaines, américaines, etc.). Pour ne mentionner que celles que j'ai reconnues, on entendra ainsi le piano jouer la valse du Beau Danube bleu. La guitare accompagnera la chanteuse-comédienne Nonhlanhla Kheswa dans la version de Jeux interdits chantée par Miriam Makeba : Forbidden Games. Elle chantera aussi Malaika, entre autres. Jared McNeill chantera pour sa part Strange fruit. D'après le programme, il y aurait également du Schubert (que je n'ai pas identifié précisément). Il peut sembler étonnant qu'on puisse arriver à monter une pièce de théâtre assez brève (environ 1h10) tout en incluant des musiques aussi diverses sans que l'assemblage paraisse hétéroclite. Pourtant, cette équipe y est parvenu et le résultat est bouleversant ! Que la pièce soit en anglais comme le sont la plupart des chansons n'est sans doute pas étranger à l'impression de continuité, qui est renforcée par le fait que les musiciens puissent se déplacer dans l'espace scénique et même participer à l'action (comme le seront d'ailleurs deux spectatrices !).

Cela se joue jusqu'au 5 mai, cf. le site du théâtre.

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“Loué soit le Créateur”

2012-04-03 10:04+0200 (Orsay) — Culture — Musique

Salle Pleyel — 2012-04-02

Akademie für Alte Musik Berlin

Accentus

Sandrine Piau, soprano

Topi Lehtipuu, ténor

Johannes Weisser, baryton

Laurence Equilbey, direction

Die Schöpfung, Haydn

Chœur Es wird ein Stern aus Jakob aufgehn extrait de Christus, Mendelssohn

J'assistais hier soir à ma troisième Création de Haydn. La première date de 2008 et était dirigée par Philippe Herreweghe. En relisant mon billet sur celle de l'année dernière, je me rends compte que je pourrais presque en faire un copier-coller, et ce d'autant plus que sur les trois solistes, deux étaient déjà présents (Sandrine Piau et Topi Lehtipuu).

Je n'avais pas réécouté cette musique depuis un an. Je redécouvre cette œuvre qui est un oratorio à la manière d'un opéra de Mozart. On sent néanmoins parfois l'influence du maître du genre : Händel.

Dans l'évocation des créatures, mon goût se fixe sur d'autres animaux que lors des auditions précédentes. Cette fois-ci, j'aime tout particulièrement le chant des alouettes et le roucoulement des colombes. J'admire également le jeu de mécano du contrebassoniste qui doit ajouter des rallonges à son instrument pour faire deux pôm pôm.

Je n'ai pas été immédiatement convaincu par l'orchestre : aux quelques minutes illustrant le chaos précèdant l'apparition de la Lumière manquaient de l'inquiétante tension que j'aurais aimé entendre (le tempo était me semble-t-il très très lent dans cette introduction). Mon impression sur l'orchestre s'est très nettement bonifiée par la suite. En revanche, le chœur Accentus m'a beaucoup plu dès son entrée. L'ensemble fête ses 20 ans ; du coup, le directeur de la Cité de la musique et de la Salle Pleyel a été de corvée de discours. La lumière a été. Sandrine Piau a superbement loué le Créateur. Des trois solistes, c'est elle que j'ai préférée. Son chant ornementé m'a semblé plus enthousiasmant que celui, plus terne, surtout au début, du ténor. Le chant du baryton Johannes Weisser, que j'entendais pour la première fois, m'a paru agréable aussi, même si la chef l'a apparemment un peu mis en difficulté en adoptant un tempo très lent dans un de ses numéros. Quels beaux graves !

Le mystère s'éclaircit-il quand on voit Laurence Equilbey depuis l'arrière-scène ? Depuis mon deuxième balcon, je ne vois guère de corrélation entre ce que je vois et ce que j'entends. Il semble à peu près certain qu'elle dirige pas mal en avance sur la musique. Un certain nombre de gestes, parfois brusques, me semblent indéchiffrables (cela dit, je ne suis pas musicien). Mon point de repère dans l'orchestre est la violoncelliste Kathrin Sutor de l'Akademie für Alte Musik Berlin. Curieusement, ses yeux se tournent davantage vers le premier violon que vers la chef. Elle semble communiquer son enthousiasme à ses camarades, qui semblent jouer en très bonne entente, se faisant des petits signes ou accompagnant certains accents de mouvements de tête. Cela fait un peu musique de chambre, à beaucoup mais pas trop : 2 contrebasses suffisent. Dans les récitatifs (et avec le reste de l'orchestre par ailleurs), ce n'est pas un clavecin, mais un pianoforte que l'on entend. Cet instrument rentre un peu plus dans le moule orchestral là où un clavecin aux sonorités si éloignées des autres instruments se distinguerait plus immédiatement.

Si la musique de cet oratorio me plaît de plus en plus, la niaiserie du livret m'apparaît à chaque écoute encore plus navrante.

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Programmes Prokofiev et Stravinski pour le Philharmonique de Radio France

2012-04-01 22:37+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Danse

Salle Pleyel — 2012-03-30

Orchestre philharmonique de Radio France

Hélène Collerette, violon solo

Arvo Volmer, direction musicale

Elisabeth Leonskaja, piano

Concerto pour piano et orchestre nº2 en sol mineur, op. 16 (Prokofiev)

Petrouchka, scènes burlesques en quatre tableaux, version de 1947 (Stravinski)

Vendredi soir, j'ai eu mon dernier concert orchestral du mois de mars. Il semblerait que les orchestres installés à Paris ou de passage soient en pleine forme... Pour cette dernière, c'était le Philharmonique de Radio France, dirigé par Arvo Volmer (qui remplaçait Pablo Heras-Casado). Au poste de violon solo, le programme avait annoncé Svetlin Roussev, mais c'est Hélène Collerette qui est venue. (Elle n'a pas eu droit à un rectificatif de programme.)

Assis au deuxième balcon en première partie de programme, je profite d'un très bonne acoustique, ce qui me dissuadera de descendre à l'arrière-scène à l'entr'acte. De tout en haut, la course des mains d'Elisabeth Leonskaja sur le piano est impressionnante ; je n'ose imaginer l'effet que ça doit certainement faire vu de près. Il semblerait qu'avec Prokofiev, on ne soit jamais déçu... La musique est assez folle, les cuivres de l'orchestre sonnent particulièrement bien (les cors, le tuba !). La musique me rappelle parfois d'autres compositions de Prokofiev (en particulier Cendrillon). Le troisième mouvement de ce concerto pour piano est particulièrement dansant.

Au milieu de son bis, alors qu'elle est sur un point d'orgue, la pianiste aura un élégant mouvement de la main gauche pour faire signe aux applaudisseurs intempestifs de s'arrêter. Pour ce qui est des tousseurs, ils ont eu un très très long passage choral entre le premier et le deuxième mouvement du concerto.

Après l'entr'acte, l'orchestre est peut-être plus nombreux encore pour interpréter Petrouchka. J'ai beaucoup aimé cette interprétation. Quelle énergie chez les contrebasses ! qui sont au nombre de 8. Le moment que je préfère dans cette musique (le début du quatrième tableau) a été merveilleusement bien joué. Le premier violon, la flûte et la trompette ont été excellents dans leurs solos. Mon seul regret : dans l'empilement orchestral, la mélodie jouée par les vents était parfois cachée par les cordes.

Cité de la musique — 2012-04-01

Orchestre philharmonique de Radio France

Hélène Collerette, violon solo

Arvo Volmer, direction musicale

Fanny Ardant, récitante

Raphaëlle Delaunay, danse, chorégraphie

Manon Gignoux, costumes

L'Histoire du soldat (Stravinski)

Petrouchka, scènes burlesques en quatre tableaux, version de 1947 (Stravinski)

L'empêchement que j'aurai d'aller voir L'histoire du soldat à l'Athénée en juin et l'annulation du récital de Thomas Quasthoff à la Cité de la musique m'ont fourni l'occasion de substituer à ce récital un billet pour le concert de ce dimanche de l'Orchestre philharmonique de Radio France. En première partie, un ensemble de sept musiciens dirigés par Arvo Volmer interprètent la musique du mélodrame de Stravinski. Les premières interventions de Fanny Ardant sont parlées, mais en mesure ! Le texte est heurté et brut, mais il est rimé. Entre les numéros musicaux, la comédienne libérée de cette contrainte rythmique et donc plus détendue pourra mettre en évidence son talent dans la lecture de ce texte. Le soldat rentrant dans sa famille a accepté un pacte du diable. En échange de son violon, il aura connaissance du futur, ce qui lui permettra de s'enrichir et d'épouser la fille du roi. La dernière rencontre avec le diable alors qu'il revenait voir sa mère lui sera fatale. Mon état de fatigue et la faiblesse des lumières m'empêchent de profiter complètement de cette première partie. Cependant, pendant mes moments de lucidité, j'apprécie tout particulièrement la partie de violon d'Hélène Collerette, ainsi que la moue de celle-ci quand le texte fait dire au soldat que son instrument est de mauvaise qualité (acheté pour dix francs !).

Après l'entr'acte, l'orchestre au complet occupe tout l'espace scénique ordinaire de la salle des concerts. Cette salle étant modulable, les rangées de sièges avaient été reculées de façon à laisser un espace à l'avant-scène sur lequel pourrait évoluer la danseuse et chorégraphe Raphaëlle Delaunay (ancienne du Ballet de l'Opéra, du Tanztheater Wupperthal et du Nederlands Dans Theater, excusez du peu). Que ce Petrouchka se tienne à la Cité de la musique et non à Pleyel et qu'il comporte une partie dansée font que cette moitié de concert ne doublonnera pas complètement avec celle du concert de vendredi où cette œuvre était interprétée par le même orchestre et le même chef.

Le fait que la plate-forme où danse Raphaëlle Delaunay soit si basse m'empêche de voir ses pieds, ce qui n'est pas idéal pour apprécier la danse... Pour ce que j'en ai entr'aperçu, je n'ai pas du tout été convaincu par la chorégraphie qui m'a un peu trop détourné de la musique, mais sans m'intéresser ou m'émouvoir. La danseuse portera trois costumes au cours de la grosse demi-heure que dure l'œuvre. Forcément, changer de costume prend un certain temps... pendant lequel il ne se passe rien sur scène. Soit on fait jouer les différents rôles par plusieurs danseurs, soit on abandonne la convention qui voudrait que chaque personnage ait son costume (les danseuses de bharatanatyam arrivent très bien à interpréter simultanément plusieurs rôles en gardant un unique costume !). Rester en coulisses pendant tout un tableau (le deuxième, celui qui se passe chez Petrouchka), je trouve que c'est se moquer du monde. On trouve quelques références à la chorégraphie/scénographie d'origine. Dans le premier tableau, la danseuse entre habillée en ballerine en portant des béquilles, ce qui fait écho aux bras contraints des trois danseurs interprétant les rôles des trois poupées dans le ballet de Fokine au moment où le charlatan les présente à la foule. Plus tard, dans le quatrième tableau, on verra à une poignée de reprises la danseuse faire des mouvements mous des épaules et des bras comme le fait Petrouchka. Le point culminant du ballet, pour la danseuse, est le troisième tableau où elle joue le rôle du Maure, montrant ses muscles et faisant tournoyer des colliers de perles autour de son cou. C'est une performance tout à fait appréciable, mais le problème est que visuellement tout se passe comme s'il n'y avait que le Maure ; rien ne semble signaler l'entrée de la ballerine (que la musique annonce pourtant). À la fin de cette partie, la danseuse fera un petit numéro à la Joséphine Baker (ceinture de bananes). La danseuse ayant endossé le rôle de la ballerine et du Maure, je me dis qu'au quatrième, elle sera Petrouchka. C'est un tout petit peu vrai vu la poignée de mouvements qui rappelleront ce personnage comme j'ai dit plus haut, mais j'ai surtout l'impression d'avoir la confirmation que la danseuse-chorégraphe tourne le ballet en dérision. Elle apparaît en effet habillée en jeune des banlieues avec un casque sur les oreilles et elle se met à danser dans un style hip hop (enfin, je crois) jusqu'à la fin. Elle a même continué à danser longtemps après que l'orchestre s'est arrêté.

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Debrief de mars

2012-04-01 00:24+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Danse — Lectures — Culture indienne

Quel mois ! En novembre dernier, j'avais déjà eu un mois très chargé en spectacles. La plupart avaient été extrêmement satisfaisants. Ce mois de mars a été encore plus riche en émotions. Voici un récapitulatif, le nombre de points d'exclamation étant une indication approximative d'appréciation, au frissonomètre, au lacrimomètre, au youpiömètre, enfin bref :

Des 23 spectacles auxquels j'aie assisté ce mois-ci, je n'ai gardé que le meilleur, certains spectacles juste bien n'ayant pas été considérés dignes de figurer dans la liste !

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