Weblog de Joël Riou

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Édimbourg

2013-08-31 21:55+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Thé — Photographies

De toutes les villes que j'ai visitées cet été pour des festivals, Édimbourg est celle que j'ai préférée, et pas seulement parce que j'y ai assisté au plus beau concert de ma vie et à une belle sélection de ballets. Certes, il faut souvent y supporter un léger crachin, mais le soleil parvient régulièrement à se glisser entre deux nuages :

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Scott Monument, Edinburgh

La ville se déploie autour d'une citadelle :

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La présence d'un tel relief induit alentour de fortes pentes qui font d'Édimbourg un dédale véritablement tridimensionnel comportant un nombre invraisemblable de ponts, tunnels, passages, chemins escarpés, escaliers, etc. La latitude et la longitude d'un point sont des informations insuffisantes pour s'y rendre, encore faut-il savoir à quelle altitude on souhaite aller. Voici par exemple la vue quasi-eschérienne que j'avais depuis la cuisine de l'appartement de cité universitaire où je louais une chambre :

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Si l'idée de retrouver dix ans après l'exiguïté des chambres d'étudiants ne me réjouissait pas follement, j'ai eu des raisons de ne pas regretter ce choix. L'accueil de la résidence dépendant de l'université était en effet des plus agréables. En moins de deux, on me réglait un problème de WiFi ; en France, je n'ose imaginer le nombre de règles qui auraient fait obstacle à la résolution de ce problème. La cuisine de l'appartement m'a permis de faire de petites économies sur la nourriture. Si j'avais déjà pris un Strawberry Gâteau chez Patisserie Valerie pendant l'après-midi, pour le dîner, je pouvais bien me contenter d'un yaourt acheté chez le penjabi ou pakistanais du coin (où j'ai aussi acheté des journaux en ourdou), précédé d'une tarte à £1.10 de chez Piemaker, n'est-ce pas ? et ce d'autant plus que mes déjeuners ont eu tendance à être copieux, que ce soit avec le biryani de la Mosque Kitchen, le buffet du restaurant Red Fort ou les nouilles à la sauce de curry thaï rouge du Red-Box Noodle Bar. (J'ai évidemment testé aussi les produits locaux, comme la panse de brebis farcie, le fameux haggis.)

Avant de venir en Écosse, j'avais noté l'adresse d'une bonne boutique de thé, et j'ai profité d'avoir une cuisine à disposition pour m'en préparer :

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Ceci n'est pas un zhong.

L'idéal pour préparer un tel thé wulong torréfié serait a priori d'utiliser une petite théière, mais je n'avais ni théière ni zhong. Toutefois, j'ai découvert dans ma cuisine à Édimbourg qu'avec deux tasses et une cuiller à soupe, on pouvait faire aussi bien. Pour préparer mon thé, je plaçais quelques feuilles dans une tasse, puis versais de l'eau chaude. Si j'avais eu un zhong, j'aurais rémué les feuilles avec le couvercle. J'ai ici tout simplement utilisé une cuiller à soupe, et quand le thé a infusé, j'ai versé le liquide dans une deuxième tasse en faisant jouer à la cuiller le rôle d'un filtre. Après avoir bu cette première infusion, je pouvais recommencer l'opération plusieurs fois. (Il était nécessaire de transvaser le thé dans un deuxième récipient, car en raison de l'utilisation d'eau bouillante le thé serait devenu trop fort et certainement amer s'il avait infusé jusqu'à ce que le liquide atteignît une température permettant de le boire. Dans le cas d'un thé vert, j'aurais utilisé de l'eau moins chaude ; il n'aurait alors pas été absolument nécessaire de transvaser le thé, mais l'opération de filtrage de l'eau grâce au couvercle d'un zhong aurait été bien plus délicate à réaliser avec une simple cuiller !)

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Dans la rue règne une certaine effervescence. Le soir, des feux d'artifices éclatent au-dessus du château. En journée, plein de jeunes gens se promènent avec des looks tout-à-fait improbables. La seule explication que j'aie trouvé est qu'il s'agissait de comédiens de petites productions qui s'étaient habillés et maquillés dans leur chambre avant d'aller se produire sur une des très nombreuses scènes du festival off (Fringe) dont le numéro d'inscription est inscrit sur les enseignes (Fringe Venue #123). Dans leurs costumes, ils abordent les passants pour leur suggérer d'aller les voir. Des flyers sont distribués. Toutes sortes de manières de retenir l'attention sont utilisées. Parfois, le spectacle consiste simplement en ces petites animations de rue. À l'exception d'un charmant petit concert de musique de chambre (voir ci-dessous), je n'ai pas eu le temps d'assister à des spectacles du Fringe. J'ai pourtant essayé. Je me suis retrouvé sur le seuil d'une arrière-salle d'un bar dans la cour duquel les clients regardaient un match (de rugby ?) sur grand écran. La salle avait l'air de faire 10-15 m² tout au plus. C'était manifestement un one-man-show. La salle était pleine, mais je n'ai pas réussi à savoir si la comédie pour laquelle on m'avait donné un flyer était déjà commencée quand je suis arrivé, ou si le show précédent était en train de faire des prolongations. (D'après cette page, treize spectacles se succédaient pendant toute la jounée et une partie de la nuit ! Celui que j'avais la possibilité de voir s'intitulait The Other Half of Next Year's Show et façon amusante le flyer ne montrait que la moitié gauche du titre The Other Half...)

Grand Gallery, National Museum of Scotland, Edinburgh — 2013-08-18

Arunda Trio

Sarah Cruickshank, hautbois

Jenny Stephenson, clarinette

Anna Mary Lynch, basson

Divertimento (Mozart)

Extraits de Carmen (Aragonaise, Seguedille, Danse bohême), Bizet

Largo al factotum, extrait du Barbier de Séville, Rossini

La Petite Pâtisserie (La Tarte aux Pommes, Trois croissants au beurre), Jacques Leclair

Valse de mariage (Shin-Itchiro Yokoyama)

Libiamo, extrait de La Traviata, (Verdi)

Ce moment musical avec le trio d'instruments à vent Arunda Trio a eu lieu dans la Grand Gallery du Musée national d'Écosse. Il me fut assez agréable d'écouter certains transcriptions (pas inintéressantes, même pour les extraits de Carmen !) et de découvrir l'existence d'œuvres étrangement intitulées La Tarte aux Pommes ou Trois croissants au beurre (Jacques Leclair). Malgré les conditions d'écoute assez peu favorables, j'ai tout particulièrement aimé le son de la hautboïste.

The Queen's Hall, Edinburgh — 2013-08-19

Dorothea Röschmann, soprano

Malcolm Martineau, piano

Liederkreis, op. 39, Schumann

Mörike Lieder (Gesang Weylas, An eine Äolsharfe, Erstes Liebeslied eines Mädchens, Denk es, O Seele, Im Frühling, Begegnung), Wolf

Sieben früher Lieder (Nacht, Schilflied, Die Nachtigall, Traumgekrönt, Im Zimmer, Liebesode, Sommertage), Berg

Nur wer die Sehnsucht kennt, Schubert

Le dernier spectacle que j'aie vue à Édimbourg a été un concert. La soprano Dorothea Röschmann que j'avais déjà entendue à Salzburg dans Les Saisons chante des Lieder accompagnée par le pianiste Malcolm Martineau. Le public a ovationné la chanteuse, mais je n'ai pour ma part pas vraiment été passionné par ce concert. Je l'avais choisi en raison de la présence de Lieder de Wolf. Ceux-ci m'ont semblé bien plus vivants que les délétères Lieder du cycle Liederkreis de Schumann. La soprano a curieusement interprété le dernier vers Hüte dich, sei wach und munter! de Zwielicht. Au lieu de chanter cette phrase qui plonge dans les graves, elle l'a parlée (et même plutôt criée), ce qui n'est pas vraiment une esthétique que j'aurais envie de privilégier en tant qu'auditeur. Si j'ai aimé le jeu du pianiste Malcolm Martineau dans les Lieder de Wolf et Berg, la voix assez peu articulée de la chanteuse ne m'a pas convaincu. Je me suis réconcilié avec elle dans le bis Nur wer die Sehnsucht kennt de Schubert, mais c'était déjà la fin du concert.

Après ce concert, avant de prendre un bus pour l'aéroport, je suis allé visiter une exposition à la Talbot Rice Gallery (cf. la fin de ce billet sur les concerts du Chamber Orchestra of Europe), à laquelle on peut accéder depuis la cour de l'Université d'Édimbourg :

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University of Edinburgh

On ne saurait faire un billet sur l'Écosse sans mentionner la présence de quelques kilts et cornemuses :

Photo 36

Je ne sais pas si j'irai à des festivals de musique pendant l'été 2014, mais le cas échéant, ce sera plutôt Édimbourg que Salzbourg.

Mes autres photos d'Édimbourg sont .

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Dance Odysseys au Festival Theatre à Édimbourg

2013-08-22 21:34+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Danse

Le Scottish Ballet a présenté un ensemble de programmes intitulé Dance Odysseys dans le cadre du festival d'Edinburgh. J'ai assisté à quelques uns de ces spectacles (tous ceux programmés le samedi 17 août). Si la compagnie a à son répertoire des ballets classiques, l'accent était résolument mis sur la dance contemporaine et plus particulièrement sur des ballets nécessitant peu de moyens scénographiques et peu de danseurs. Le nouveau directeur artistique de la compagnie Christopher Hampson a été très présent, et ce de façon autant utile qu'agréable.

On Stage Studio, Festival Theatre, Edinburgh — 2013-08-17 à 12:00

“Contemporary Classics”

Scottish Ballet

Christophe Bruce, chorégraphie et costumes

Kenji Bunch, musique (Swing Shift)

Shift

Twyla Tharp, chorégraphie

Gabrielle Malone, Andrew Robinson, mise en scène

Kermit Love, costumes

Jennifer Tipton, lumières

The Fugue

Jiří Kylián, chorégraphie, décor

Natasa Novotna, mise en scène

Dirk Haubrich, musique

Joke Visser, constumes

Kees Tjebbes, lumières

14'20"

James Cousins, chorégraphie

Ben Frost, musique (O God Protect Me)

Jealousy

Luke Ahmet, Daniel Davidson, Constance Devernay, Laura Kinross, Sophie Laplane, Andrew Peasgood, Owen Thorne, Katie Webb

Ce programme, comme presque tous les autres, avait lieu sur le On Stage Studio. Ceci signifie que les spectateurs ont eu l'occasion de visiter les coulisses du théâtre avant de s'asseoir sur les gradins provisoires installés à l'arrière de la grande scène du Festival Theatre. L'espace scénique utilisé par les danseurs s'étend du rideau de scène (baissé) jusqu'à ces gradins. Étant arrivé parmi les premiers, j'ai pu m'installer dans les tout premiers rangs et bénéficier ainsi d'une proximité rare avec des danseurs. Le public édimbourgeois est d'ailleurs tout-à-fait charmant. On se sent immédiatement à l'aise.

Le programme est intitulé Contemporary Classics. Y sont donc présentés des ballets contemporains qui sont devenus des classiques. Le duo de Kylián intitulé 27'52" (déjà vu au TCE) était présenté ici sous une forme réduite 14'20" qui m'a moins enthousiasmé que le film Silent cries qui a été projeté et qui montrait Sabine Kupferberg danser sur le Prélude à l'après-midi d'un faune de Debussy dirigé par Bernard Haitink. Le programme avait commencé par Shift de Christophe Bruce. En le voyant, j'ignorais que ce mot pouvait renvoyer à l'organisation du travail en trois huit, comme cela fut discuté pendant de l'après-midi au cours d'une conversation entre Chistopher Hampson et Jane Pritchard. Le ballet représente trois couples de danseurs que l'on voit exécuter des mouvements assez répétitifs et mécaniques. Sont-ils en train de tourner des poignées, des robinets ou de serrer des boulons ? C'est en tout cas très dynamique, constitue une bonne entrée en matière, et la danseuse Katie Webb s'y distingue particulièrement. (Le programme assez mal fichu du Scottish Ballet présente néanmoins l'intérêt de comporter un trombinoscope des danseurs de la compagnie !)

Au cours de la journée, le ballet qui m'a le plus ému a certainement été The Fugue de Twyla Tharp (une femme, comme 50% des chorégraphes programmés ce jour-là !). Ce ballet est une merveille ! Il est pourtant situé à l'extrême inverse de mes goûts puisqu'il ne raconte absolument pas d'histoire : il s'agit de danse pure. Le ballet met en scène trois danseurs (ici deux femmes et un homme), portant tous le même costume constitué d'un pantalon gris et d'une chemise blanchâtre. Avant de voir ce ballet, je ne connaissais que le titre The Fugue dont j'ignorais qu'il n'avait d'autre sens en anglais que le sens qu'on lui donne en musique. Il m'est pourtant apparu comme évident dès le début du ballet que la chorégraphe faisait jouer aux danseurs le rôle de chacune des voix d'une fugue. Ce ballet se joue sans musique : les seuls sons que l'on entend viennent des frappes de pieds des danseurs et de leurs bruits corporels, la scène étant amplifiée par la présence de quelques micros placés au bord. Les mouvements d'un danseur trouvent ainsi écho dans ceux d'un deuxième puis d'un troisième et certaines variations et transformations s'opèrent, comme par exemple des retards d'une voix sur une autre qui produisent des effets rythmiques assez intéressants. Certains mouvements peuvent également s'inverser. Les danseurs ne se touchent pas, sauf lors d'un contact du bout du doigt entre deux interprètes qui apparaît alors extrêmement intense. Rien que pour ce ballet, je suis très heureux d'avoir assisté cette journée marathon au Festival Theatre !

Alors que la représentation était en principe terminée, une voix a annoncé que nous pourrions suivre les indications du personnel du théâtre pour nous rendre à l'endroit où le spectacle allait continuer. J'aime bien ce genre de surprise ! Après un détour par les coulisses, les spectateurs peuvent s'asseoir sur la moquette du Foyer du thêatre pour voir une représentation du duo Jealousy de James Cousins. J'y reviendrai plus bas parce que ce ballet a aussi été représenté dans le programme Duets.

En début d'après-midi, j'ai assisté au même endroit à une projection du ballet The Green Table créé en 1932. Le film (noir et blanc) tourné dans les années 1960 montre le Folkwang Ballet interpréter cette œuvre de Kurt Jooss. Dans la première scène, des hommes sont autour d'une table. Ils portent des masques qui suggèrent qu'ils appartiennent à des pays différents. Leurs relations d'abord obséquieusement cordiales se tendent très sérieusement. Les scènes suivantes représentent diverses étapes d'une guerre. Un danseur y représente l'allégorie de la Mort. (Et parmi les danseuses, on peut reconnaître la jeune Pina Bausch.)

Si j'ai été content de voir cette Table verte, j'ai dû lutter pour rester éveillé pendant la projection du Portrait of Mary Wigman, étourdi que j'étais par la mauvaise qualité des images et l'absence de commentaire pertinent sur l'apport de Mary Wigman.

On Stage Studio, Festival Theatre, Edinburgh — 2013-08-17 à 17:00

“Duets”

Scottish Ballet

Peter Darrell, chorégraphie

Cheri & David Earl, musique (Brian Prentice, piano)

Philip Prowse, costumes

Cheri

James Cousins, chorégraphie

Ben Frost, musique (O God Protect Me)

Jealousy

Peter Darrell, chorégraphie, costumes

Gustav Mahler, musique (Fünf Rückert-Lieder)

Fünf Rückert-Lieder (Ich atmet'einen linden Duft, Ich bin der Welt abhanden gekommen)

Sophie Laplane, chorégraphie

Susumu Yokota, musique (Circular, extrait de Magic Thread)

Oxymore

Helen Pickett, chorégraphie

Rachmaninov, musique (Prélude, op. 23 nº4)

Trace

James Cousins, chorégraphie

Ben Frost, musique (O God Protect Me)

Kristen McNally, chorégraphie

Jonny Greenwood, musique (Split Sabre, Sweetness of Freddy, extraits de The Master)

Ennio Morricone, musique (March of the Beggars extrait de Film Music)

Nick Cave, musique (Martha's Dream extrait de The Proposition)

Foibles

Daniel Davidson, Bethany Kingsley-Garner, Brenda Lee Grech, Sophie Martin, Luciana Ravizzi, Nicholas Shoesmith, Owen Thorne, Katie Webb, Victor Zarallo

Après un bon café, j'étais prêt pour les duos programmés au On Stage Studio. Si Peter Darrell a été à l'origine de la création de la compagnie de danse qu'est le Scottish Ballet, je ne sais pas si c'était une bonne idée de programmer ses ballets, surtout à l'état de courts extraits présentés en dehors de tout contexte narratif. Certes, ces extraits se distinguent de la plupart des autres ballets de la journée puisque la technique est classique (danseuses sur pointes ou demi-pointes), mais je n'ai absolument pas été ému pendant le court pas de deux Cheri (dans lequel les danseurs ont frôlé l'accident), et ce d'autant plus que la musique enregistrée était jouée sur un piano manifestement désaccordé. Les deux extraits des Five Rückert Songs m'ont paru très ennuyeux. Le deuxième (nº4), qui n'était d'ailleurs pas un duo, tenait à la rigueur la route grâce à la conviction de la danseuse.

Entre ces deux pièces était présenté Jealousy de James Cousins. Dans ce duo, un homme est obsédé par une femme qu'il porte littéralement pendant toute la durée du ballet. La danseuse ne touche absolument jamais le sol ! Quand elle se tient sur ses pieds, ceux-ci sont posés d'une manière ou d'une autre sur le corps du danseur. La musique ou plutôt l'accompagnement sonore de la pièce peut suggérer que le danseur est en train d'être soumis à des appareils d'imagerie médicale en trois dimensions qui révèlent la présence féminine dans son esprit. Ce ballet a été une très bonne surprise pour moi, et ce d'autant plus que je l'ai vu deux fois. J'ai été légèrement plus convaincu par les interprètes vus en bonus à la fin du programme Contemporary Classics. Le rôle féminin était alors me semble-t-il interprété par Brenda Lee Grech.

C'est cette même danseuse qui fait des étincelles dans Oxymore de Sophie Laplane ; elle éclipse complètement son partenaire qui exécute des mouvements semblables. L'atmosphère me fait penser à celle de In the middle, somewhat elevated de William Forsythe et les mouvements me rappellent Signes de Carolyn Carlson. Cependant, contrairement à Signes, Oxymore est suffisamment court et drôle pour que je ne m'ennuie pas.

La chorégraphie de Trace de Helen Pickett m'a plutôt plu. Le bas du corps des danseurs adopte des mouvements et positions classiques, mais le haut du corps est animé de mouvements plus contemporains. Cependant, le costume ridicule de la très convaincante danseuse Katie Webb gâche un peu tout...

La représentation se termine par le ballet Foibles de Kristen McNally interprété par quelques danseurs dans le foyer du théâtre. Le ballet a semble-t-il été commandé tout spécialement pour le festival. Si le voir n'a en rien été désagréable, et ce d'autant plus que la formidable danseuse Brenda Lee Grech avait le rôle le plus important, l'ensemble incohérent ne m'a semblé être qu'un délire surréaliste.

Festival Theatre, Edinburgh — 2013-08-17 à 20:00

Scottish Ballet

Glen Tetley, chorégraphie

Bronwen Curry, mise en scène

Arnold Schönberg, musique

Rouben Ter-Arutunian, décors et costumes

John B. Read, lumières

Allison Bell, soprano

RCS MusicLab

Mieko Kanno, violon, alto

David Sloan, violoncelle

Isabelle Hübener, flûte, piccolo

Calum Robertson, clarinette basse

Kristi Kapten, piano

Gordon Bragg, direction musicale

Luke Ahmet, Pierrot

Bethany Kingsley-Garner, Columbine

Owen Thorne, Brighella

Pierrot Lunaire

Cela s'est joué à peu de choses, mais mon placement m'a permis de voir les pieds des danseurs :

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Je connais trop mal Pierrot lunaire pour apprécier l'adéquation entre le texte et la chorégraphie de ce ballet de Glen Tetley qui était remonté pour cette unique soirée. Le décor est constitué d'un échafaudage blanc qui est placé au centre de la scène et sur lequel les trois personnages (Pierrot, Columbine, Brighella) peuvent grimper (à leurs risques et périls : j'espère qu'aucun danseur n'a été blessé en interprétant ou en répétant ce ballet...). Drôle par moments, la chorégraphie ne m'a pas ennuyé, mais elle ne m'a pas excessivement passionné non plus. Ce qui m'a semblé magnifique en revanche, c'est l'interprétation musicale de l'œuvre de Schönberg par le RCS MusicLab. C'est assurément le plus beau Pierrot lunaire que j'aie entendu ! (J'ai d'ailleurs saisi une opportunité de le dire aux jeunes musiciens qui étaient rassemblé dans le hall un peu plus tard dans la soirée.) La pianiste était fantastique, tout comme la flûtiste. Je n'imaginais pas qu'il était possible de faire sonner un piccolo comme elle le faisait ! Le violoncelliste était merveilleux aussi... Bref, ils étaient tous excellents et défendaient cette musique avec une très grande conviction. La soprano Allison Bell a aussi beaucoup contribué à cette réussite. Son Sprechtgesang était résolument plus chanté que parlé, et je crois que c'est ainsi que je préfère entendre ce cycle ! Quelle beauté !

On Stage Studio, Festival Theatre, Edinburgh — 2013-08-17 à 21:45

Scottish Dance Theatre

Fleur Darkin, chorégraphie

Plastikman, musique (In Side, Locomotion)

Moritz von Oswald Trio, musique (Pattern 3)

Four Tet, musique (Wing Body Wing)

Ricardo Villalobos, musique (Easy Lee)

Hayley Scanlan, costumes

Lucy Carter, lumières

Glyn Perrin, conception sonore

Eve Ganneau, Fhunyue Gao, Manon Greiner, Jori Kerremans, Frank Koenen, Matthew Robinson, Audrey Rogero, Natalie Trewinnard, Quang Kien Van, Lewis Wilkins

SisGO

Pour ce dernier programme de la soirée, les danseurs ne sont pas du Scottish Ballet mais du Scottish Dance Theater, une compagnie spécialisée dans la danse contemporaine. Comme pour les autres spectacles programmés au On Stage Studio, avant de se diriger en file indienne vers les coulisses pour monter sur la scène, les spectateurs doivent se rassembler près d'une porte dans un coin de la salle. Avant le début de ce spectacle de Fleur Darkin intitulé SisGo (et qui ressemble étrangement à un précédent intitulé DisGo), on nous a demandé d'y laisser nos affaires et d'enlever nos chaussettes pour en mettre d'autre de couleur blanche.

Après le passage par les coulisses, nous ne sommes pas dirigés vers les gradins, mais vers la scène qui est délimitée par des néons. Les danseurs se mettent en mouvement entre les spectateurs, qui étaient parfois invités à réagir. Un peu sceptique au début, j'ai progressivement apprécié cette expérience. Cela dit, l'interaction danseurs-spectateurs a ses limites qu'un spectateur louche n'a pas vraiment saisi : il s'est fait vider assez rapidement... Ce spectacle est aussi un exercice de manipulation de foule. À certains moments, la chorégraphie prévoit que les spectateurs initialement placés sans ordre s'organisent dans des configurations particulières. Pour cela, quelques indications implicites venant des danseurs et de l'utilisation de quelques accessoires comme du scotch ou des cordes aidaient, mais auraient été insuffisantes sans l'aide d'un certain nombre de spectateurs complices qui participaient aussi à quelques chorégraphies d'ensemble. Bref, il ne suffisait pas de regarder qui portait des chaussettes blanches pour distinguer les spectateurs des autres. Au début, j'ai eu le sentiment que le ratio spectateurs/danseurs était un peu trop grand, mais quand la pièce s'est développée, j'ai eu l'impression qu'il se passait toujours quelque chose où qu'on soit. En tout cas, je ne me suis pour ma part pas du tout ennuyé. L'expérience était amusante et parfois exaltante tant il est impressionnant de voir des danseurs exécuter certaines figures à quelques centimètres de distance !

Quand ce spectacle participatif s'est terminé, le rideau de scène s'est relevé, ce qui a donné aux spectateurs une très belle vue sur la salle depuis la scène. J'ai découvert plus tard que cela ne faisait pas partie du spectacle : c'était une intervention des pompiers suite à une fausse-alerte incendie...

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Le Chamber Orchestra of Europe et Yannick Nézet-Séguin à Édimbourg

2013-08-21 15:46+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Expositions

Je viens de passer quelques jours à Édimbourg et j'en reviens enchanté ! Je reviendrai plus tard sur certains aspects de cette ville qui m'a beaucoup plu ; je me contenterai ici d'évoquer la raison première de mon séjour en Écosse : les deux concerts du Chamber Orchestra of Europe au Usher Hall.

Photo 26
Usher Hall, Edinburgh

A priori, les deux concerts avaient un très haut potentiel. J'en attendais évidemment beaucoup ! Bien sûr, j'attendais ces opportunités d'entendre la violoniste Lorenza Borrani en soliste comme un concert dijonnais m'en avait donné l'envie. Je concevais que dirigées par Yannick Nézet-Séguin, les Métamorphoses de Strauss auraient plus de relief que lorsque Semyon Bychkov avait dirigé le COE dans cette œuvre il y a quelques mois. Je me réjouissais aussi d'entendre les troisième et septième symphonies de Beethoven. Mes attentes n'étaient-elles pas trop hautes au point que je risquais d'être déçu ?

Ce fut tout le contraire. Ces deux concerts m'ont satisfait au-delà de toutes mes espérances ! En termes d'émotions fortes, si j'osais faire une comparaison inspirée de la haute densité de restaurants indo-pakistains et asiatiques à Édimbourg, je dirais que cela a été du même niveau d'intensité que peut l'être la dégustation d'un thai red curry. Au déluge de larmes qui s'écoulait de mes yeux et aux palpatitations et tremblements extatiques dont j'étais saisi parfois, un observateur aurait pu penser que je me trouvais mal, mais au contraire, je ne m'étais jamais senti aussi bien... En termes d'expériences préalables de concerts, je ne peux comparer ce plaisir qu'à celui ressenti lors de l'écoute de la Symphonie Pastorale par le COE dirigé par Bernard Haitink (et tout particulièrement le deuxième mouvement au bord du ruisseau). À Édimbourg, ce plaisir d'auditeur a été plus intense encore et s'est étendu sur la quasi-totalité des deux fois deux heures de programme.

Usher Hall, Edinburgh — 2013-08-16

Chamber Orchestra of Europe

Yannick Nézet-Séguin, direction

Métamorphoses, Richard Strauss

Kay Frömbgen, hautbois

Matthew Wilkie, basson

Lorenza Borrani, violon

William Conway, violoncelle

Symphonie concertante en si bémol majeur pour hautbois, basson, violon et violoncelle, Hob.I/105 (Haydn)

Symphonie nº3 en mi bémol majeur Héroïque (Beethoven)

Je suis confortablement installé au deuxième rang au centre du parterre du Usher Hall pour assister au premier concert. Le programme commence par les Métamorphoses de Strauss, que j'entends pour la troisième fois en concert. Les deux auditions précédentes ne m'avaient pas complètement convaincu, mais cette fois-ci, j'ai été captivé par ce que j'entendais. Dans le détail, j'aime l'introduction du thème du deuxième mouvement de la Troisième Symphonie de Beethoven par les altos. Je me régale aussi avec les pizz. de la première contrebasse (Enno Senft) et des phrasés de la deuxième (Lutz Schumacher). Davantage que des individualités, j'ai adoré la musique produite par tous les musiciens ensemble. J'avais déjà connu une telle sensation d'entendre des musiciens comme chantant ensemble avec les solistes des Berliner Philharmoniker, mais au lieu de six parties, il y en avait là vingt-trois ! Je n'entendais bien sûr pas vingt-trois voix dans ma tête, mais j'avais bien souvent le sentiment d'en distinguer au moins quatre sans effort particulier, tout naturellement. Les interactions entre toutes ces voix m'ont procuré beaucoup de plaisir. Je retiens particulièrement celles entre Lorenza Borrani (violon 1) et Tomas Djupsjöbacka (violoncelle 4) qui se répondaient très harmonieusement, tandis que j'admirais la conviction et la vigueur des coups d'archets de Jérôme Fruchart (violoncelle 5). Cette interprétation a pour moi relevé du prodige !

Parmi les œuvres présentées au cours des deux concerts, celle que j'attendais le plus était la Symphonie concertante de Haydn pour hautbois, basson, violon et violoncelle (comme pour toutes les œuvres concertantes présentées dans ces deux concerts, les solistes étaient issus de l'orchestre). Le lendemain, avant un spectacle de danse, je discutais avec un Écossais qui avait assisté au concert et la première phrase qu'il me dit visait à souligner le seul défaut de ce concert. Quand je lui expliquais que cela avait été le meilleur concert de ma vie, il admettait volontiers I thought it was excellent!. Mon interlocuteur n'avait pas tort, il est indéniable que le violoncelliste William Conway a eu par moments des soucis avec une de ses cordes les plus aiguës, comme si le son s'éteignait et perdait toute brillance. Cependant, cela ne m'a nullement empêché d'apprécier l'écoute de ce chef-d'œuvre de Haydn. J'ai aimé l'humour du compositeur qui s'exprime notamment dans certaines interventions du basson (Matthew Wilkie). La façon dont Lorenza Borrani interprète certains points d'orgue est tout autant délicieuse. J'ai aimé les interactions entre les quatre solistes entre eux, notamment entre le hautbois (Kay Frömbgen) et le violon (Lorenza Borrani). Dans la cadence située dans le premier mouvement, le chef Yannick Nézet-Séguin s'efface, accordant une entière confiance aux musiciens. Dans le deuxième mouvement, je suis ému par le jeu du violoncelliste William Conway. Je trouve presqu'indécent d'avoir le privilège d'entendre le son délicieusement gras de sa corde de do (la plus grave). Le troisième mouvement me réjouit énormément. Les timbales et les cors s'y rappellent au bon souvenir des spectateurs. Les cordes (dont Lily Francis occupe pendant cette œuvre le rôle de premier violon) produisent le son vrlach caractéristique du COE. Les solistes, et parmi eux Lorenza Borrani tout particulièrement, font preuve d'une éclatante virtuosité !

Pour interpréter la Symphonie nº3 “Héroïque” de Beethoven, les seconds violons ont échangé leur place à côté des premiers avec les violoncelles pour se retrouver à droite du chef d'orchestre, et cela s'entend ! Au début du deuxième mouvement, alors que les violoncelles jouent le thème déjà entendu plus tôt dans les Métamorphoses de Strauss, sans les voir, je me rends compte du fait que les contrebasses sont placées derrière violoncelles, ce qui rend plus impressionnant encore ce passage mettant en valeur les instruments à cordes les plus graves. Les deux derniers mouvements me mettent dans un rare état d'euphorie. Le placement des violons à gauche et à droite du chef signalé plus haut se révèle particulièrement judicieux dans le troisième mouvement (Scherzo) dans lequel le somptueux son du cor se fait entendre. Le moment le plus exaltant de l'interprétation de cette œuvre (et même des deux concerts) sera pour moi un certain passage vers le milieu du quatrième mouvement dans lequel le chef a fait jouer l'orchestre à un tempo de fou furieux et avec des accents tels que ce passage prenait un merveilleux air de musique populaire. Irrésistible !

L'accueil du public édimbourgeois a été très chaleureux ; certains musiciens étaient manifestement très émus... En sortant, j'entends des spectatrices s'exclamer Oh gosh, it was sooo good!.

Ailleurs : Seen and Heard, Hilde Metzger.

Usher Hall, Edinburgh — 2013-08-18

Chamber Orchestra of Europe

Yannick Nézet-Séguin, direction

Romain Guyot, clarinette

Matthew Wilkie, basson

Duett-Concertino, Richard Strauss

Lorenza Borrani, violon

Pascal Siffert, alto

Symphonie concertante en mi bémol majeur pour violon et alto, KV 364 (Mozart)

Symphonie nº7 en la majeur (Beethoven)

J'avais choisi un placement à l'arrière-scène pour ce concert afin de profiter au maximum de la Septième symphonie de Beethoven. En réservant ma place, j'ignorais que le rang F serait en fait le premier rang. Voici ce que je voyais depuis ma place :

Photo 51
Usher Hall, Edinburgh

La salle est pour ainsi dire pleine. Les spectateurs réservent un très bon accueil aux musiciens, qui sont applaudis jusqu'à ce que le dernier se soit assis. Ceci vaudra une entrée un peu gaguesque à une second violon arrivée un tout petit peu après les autres et qui aura ainsi le privilège de recevoir des applaudissements qui lui furent tout spécialement destinés.

Lors de l'écoute du Duett-Concertino de Strauss, j'ai adoré le début de l'œuvre qui met en scène un sextuor à cordes (composé sauf erreur de ma part de deux violons, deux altos, un violoncelle et une contrebasse). S'y insère la ma-gni-fique clarinette de Romain Guyot. Plus tard, ce sera le basson de Matthew Wilkie. Bien que je ne l'aie alors vu que de dos, ses solos m'ont beaucoup impressionné, surtout dans le deuxième mouvement de l'œuvre. Cependant, l'œuvre est celle qui m'a le moins passionné dans ces deux concerts du COE. Elle est indéniablement très agréable à écouter, mais elle a davantage le goût d'une bonne friandise que d'un curry thaïlandais.

La Symphonie concertante pour violon et alto de Mozart a été pour moi un merveilleux moment ! Le placement des premiers et seconds violons de part et d'autre du chef se révèle encore une fois très opportun. Depuis ma place, je peux apprécier la gestuelle de Yannick Nézet-Séguin, qui ne se limite d'ailleurs pas à des mouvements de bras. Son expression faciale est assez étonnante, aussi ; aurait-il fait du kathakali dans une vie antérieure ? Il dirige parfois en n'utilisant que ses sourcils ! Cela fonctionne très bien en tout cas. Au cours du premier mouvement, je le vois à un moment donné esquisser la battue d'une mesure 4/4 avec un micro-geste de la main à peine perceptible. Je me cramponne alors à mon siège parce que je devine qu'il prépare quelque chose... à savoir un crescendo fulgurant ! L'orchestre a bien sûr été formidable. Les cordes avaient bien entendu le son ©COE. Le hautbois et les cors n'étaient pas au premier plan de l'action dans les deux premiers mouvements, mais ils devaient néanmoins faire preuve d'une endurante présence en arrière-plan (pédale). Dans le troisième mouvement, ils étaient davantage mis en valeur et le public les a beaucoup applaudis. Toutefois, les héros de cette œuvre étaient bien sûr Lorenza Borrani (violon) et Pascal Siffert (alto) dont l'entente a été parfaite. J'ai été vraiment très impressionné par l'altiste Pascal Siffert que j'entendais pour la première fois comme soliste.

La série de concerts s'est achevée avec la Septième Symphonie de Beethoven. Comme la veille, Yannick Nézet-Séguin dirige Beethoven sans partition. Si son style de direction est toujours très physique, par rapport à mes souvenirs de concerts passés (Ravel, Schumann), j'ai le sentiment qu'il tend vers une certaine économie de gestes. Sans doute très en confiance avec les musiciens du COE, il se dispense très souvent de battre la mesure. Si les gestes sont moins nombreux, ils sont néanmoins affûtés et intenses, sauf quand il s'amuse à prendre des poses maniérées en se dirigeant vers les vents lors de certaines phrases.

Dans cette interprétation magnifique de la Symphonie nº7, le moment le plus intense vint pour moi de l'idée de génie du chef d'enchaîner les deux premiers mouvements. Dans l'Allegretto, j'ai bien sûr aimé le début mettant en scène les instruments à cordes, mais je me suis encore davantage régalé quand Romain Guyot est entré avec sa clarinette tandis que la pulsation des cordes passait à l'arrière-plan. Dans le troisième mouvement, comme lors d'une écoute précédente, j'ai aimé le passage qui me rappelle toujours le motif de la Fonte de l'Acier de Siegfried. Si l'orchestre était bien entendu déchaîné dans les deux derniers mouvements, j'ai été tout particulièrement impressionné par le timbalier et par le flûtiste Pirmin Grehl (que je n'avais encore jamais vu avec le COE).

Le public a réservé un véritable triomphe à l'orchestre. Ce n'est pas la première fois que j'assiste à une standing ovation, mais je pense que c'est la première fois que j'en vois une qui est manifestement destinée à un orchestre dans son ensemble. Comme la veille, Yannick Nézet-Séguin met un terme au concert en faisant ostensiblement le geste qu'il est temps d'aller boire un coup.

Ailleurs : The Scotsman, The Telegraph, Hilde Metzger.

Je n'ai pris d'alcool ce soir-là, j'ai pourtant bien essayé à l'entr'acte, mais alors que je commandais un verre de blanc, la serveuse du Usher Hall me répondit dans un français parfait que la cloche sonnait et que je n'aurais pas le temps de le boire avant le début de la deuxième partie.

La fin théorique du concert était de 21h20, ce qui me laissait en principe largement le temps de rejoindre The Hub pour le concert suivant, mais comme il était 21h41, il me fallait me presser. L'accès à l'arrière-scène se faisant par un escalier donnant sur les coulisses, en filant, j'ai surpris une violoniste séchant les larmes nées de l'émotion de ce merveilleux accomplissement artistique et de l'accueil du public.

The Hub, Edinburgh — 2013-08-18

Pierre-Laurent Aimard, piano

Játékok (extraits), Kurtág

Marco Stroppa, électronique

Traiettoria (Traiettoria... deviata, Dialoghi, Contrastri), Marco Stroppa

En venant à Usher Hall, j'étais passé par The Hub pour estimer la distance entre les deux salles. Sans traîner, j'avais mis 10' pour faire la descente. Si je voulais arriver à l'heure, il me fallait presser le pas pour faire la montée. J'ai même couru, et au bout de 5'58", j'étais arrivé au Hub à 21h47, largement à temps pour assister au concert de Pierre-Laurent Aimard. Ce concert a eu lieu dans une salle carrée à l'étage du Hub :

Photo 02
The Hub, Edinburgh

La centaine de spectateurs est installée tout autour de l'estrade où se trouve le piano. J'avais décidé d'aller à ce concert en raison de la présence des Játékok de Kurtág. S'il m'a semblé réussir à entrer dans certaines des miniatures, je n'y ai pas ressenti la même émotion que lors du récital de Márta et György Kurtág à la Cité de la musique ou à l'écoute du simple Perpetuum mobile (objet trouvé) par la jeune Hámos Júlia à Budapest. Encore sous le choc émotionnel du concert de COE, j'avoue avoir écouté Kurtág comme s'il s'agissait d'une agréable musique de relaxation... La transition entre Kurtág et Stroppa m'a semblé toute naturelle, ce que je n'aurais pas imaginé a priori. J'avais assisté avec un certain plaisir à la création de l'opéra Re Orso de ce compositeur. Le piano de Pierre-Laurent Aimard se fait très souvent très percussif. Depuis une console, Marco Stroppa transforme le son qui est spatialisé grâce à un ensemble d'enceintes placées en hauteur le long des murs de la salle carrée. Alors que l'obscurité est presque totale, c'est à un voyage dans un univers psychélique que le compositeur et le pianiste invitent les auditeurs. Cela me fait penser à ce que Varèse aurait peut-être fait s'il avait disposé d'une technologie plus avancée.

Ce concert trouvera en moi un certain écho avec l'exposition Transmitted Live: Nam June Paik Resounds que je verrai le lendemain à la Talbot Rice Gallery. L'artiste coréen semble comme Varèse un précurseur dans son domaine, ici l'art vidéo. Vues quelques décennies plus tard, certaines œuvres expérimentales peuvent donner l'impression d'avoir dépassé la date limite de consommation. Cependant, l'accent particulier mis sur le lien entre Nam June Paik et d'autres arts m'a rendu l'exposition intéressante, notamment par le lien avec John Cage, Merce Cunningham ou Beethoven.

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The Hindu & The Musalman

2013-08-15 11:30+0200 (Orsay) — Culture — Lectures — Culture indienne — Voyage en Inde XII

Aujourd'hui, on célèbre le 66e anniversaire de l'indépendance de l'Inde. Contrairement aux années précédentes, je n'ai pas visité ce pays cet été, mais je passerai Noël à Chennai pour le festival de musique (carnatique) et de danse (principalement bharatanatyam). Dans cette ville, j'ai pris l'habitude de lire The Hindu, notamment pour les pages 3 et/ou 4 où sont annoncés les programmes des salles de spectacles. Comme j'envisage de visiter Lahore au Pakistan un de ces jours, mais pas dans l'immédiat, je me dis qu'il serait intéressant de progresser en hindoustani, cette langue dont la forme la plus couramment parlée en Inde s'appelle hindi et qui s'écrit en devanagari (un alphabet que je maîtrise depuis mon tout premier voyage en Inde) et dont la forme parlée au Pakistan, l'ourdou, utilise l'alphabet arabe. Bref, j'aimerais progresser dans le hindi oral et apprendre l'alphabet arabe.

Le hic est que plusieurs styles calligraphiques existent pour l'alphabet arabe. Le style le plus courant est apparemment le naskh, mais il semblerait que l'ourdou utilise traditionnellement le style calligraphique nastaliq, qui a résisté pendant longtemps aux tentatives des typographes. C'est pourquoi les journaux rédigés en ourdou étaient encore écrits à la main par des calligraphes il y a quelques décennies de cela. Maintenant, des fontes comportant les nombreuses ligatures nécessaires existent et les journaux se sont informatisés. Le sujet est assez sérieux, puisque l'Inde a tout récemment déclaré son indépendance typographique vis-à-vis du Pakistan : pour écrire l'ourdou, des fontes produites localement remplaceront dorénavant les fontes importées du Pakistan !

Tous les journaux se sont informatisés, sauf un : The Musalman :

The Musalman
Photographie chipée sur cette page

Comme on peut le voir dans cet émouvant film, tous les jours trois calligraphes écrivent à la main les quatre pages de ce journal. Il est annoncé à la fin que le rédacteur en chef Syed Failullah est décédé en 2008. On apprend avec joie dans un autre film que son fils Syed Arifullah lui a succédé, et qu'il entend continuer cette tradition familiale dont il représente la troisième génération.

Ce journal est publié en Inde, et plus précisément à Chennai. Lors de mon prochain séjour, je pourrai donc acheter tous les mains The Hindu et The Musalman ! (Je ne serai sans doute pas encore en mesure de déchiffrer la calligraphie nastaliq, mais je pourrai au moins mettre ces journaux de côté pour m'entraîner par la suite.)

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Quelques jours à Munich

2013-08-13 21:03+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra

La solution la plus économique pour me rendre à Salzburg était de prendre l'avion pour Munich puis le train. La ville m'a beaucoup plu. On y trouve des hôtels et des restaurants à des prix tout à fait raisonnables. Je ne suis pas allé dans des grands restaurants, mais vu la qualité de ce que j'ai mangé dans certaines échoppes, je crois pouvoir dire qu'on mange bien dans cette ville. La gare de Munich (Hauptbahnhof), avec ses nombreux petits restaurants et stands, est particulièrement impressionnante de ce point de vue là.

Pour ce qui est du tourisme, la perspective d'assister à des opéras depuis des places debout ne m'a pas incité à faire de longues marches. Je me suis contenté de la Maximiliamstraße :

Photo 104
Regierung von Oberbayern, Munich

Photo 110
Maximilianeum, Munich

Photo 153
Résidence de Munich

Le seul monument pour lequel j'aie pris un billet payant a été la Résidence de Munich, située tout près de l'Opéra d'État de Bavière. Je n'ai pas pu visiter qu'un nombre limité des salles, sans que je comprenne très bien si les autres étaient en travaux ou si leur accès était fermé en fin de journée (j'étais pourtant entré deux heures avant la fermeture). L'endroit est sidérant de beauté. J'avais hésité à prendre un billet combiné pour le Trésor, mais je ne l'ai pas regretté, parce que je n'ai jamais vu autant d'objets aussi richement ouvragés, même dans les palais et temples les plus extravagants de l'Inde !

Photo 132
Trésor de Munich

Bayerische Staatsoper, Munich — 2013-07-26

Alexander Tsymbalyuk, Boris Godunow

Yulia Sokolik, Fjodor

Anna Virovlansky, Xenia

Heike Grötzinger, Xenias Amme

Gerhard Siegel, Fürst Schuiskij

Igor Golovatenko, Andrej Schtschelkalow

Anatoli Kotscherga, Pimen

Sergey Skorokhodov, Grigorij Otrepjew

Vladimir Matorin, Warlaam

Ulrich Reß, Missaïl

Margarita Nekrasova, Schenkwirtin

Kevin Conners, Gottesnarr

Goran Jurić, Nikititsch

Joshua Stewart, Leibbojar

Tareq Nazmi, Mitjucha

Christian Rieger, Hauptmann der Streifenwache

Kent Nagano, direction musicale

Calixto Bieito, mise en scène

Rebecca Ringst, décors

Ingo Krügler, costumes

Michael Bauer, lumières

Sören Eckhoff, chef des chœurs

Andrea Schönhofer, dramaturgie

Bayerisches Staatsorchester

Chor, Extrachor der Bayerischen Staatsorchester

Kinderchor der Bayerischen Staatsorchester

Statisterie der Bayerischen Staatsorchester

Boris Godunow, Oper in vier Teilen (7 Bilder), Erste Fassung „Ur-Boris“, Moussorgsky.

Quelques jours avant de venir à Munich, j'avais revu avec plaisir La Flûte enchantée mise en scène par Peter Brook, une production que j'avais beaucoup aimée en 2010 et dont les décors se réduisent à quelques tiges de bambous. Le lendemain, je verrai à Salzburg une production très traditionnelle de Lucio Silla, puis une production un peu moins traditionnelle de Falstaff. Ces mises en scènes représentent des styles très variés, mais pour le lyricomane parisien, le travail de Calixto Bieito est encore au-delà, en dehors du monde connu. Visuellement, ça décoiffe, mais la production ne m'a pas franchement convaincu.

De même que La Khovantchina programmée au début de l'année 2013 à l'Opéra Bastille, Boris Godounov est un opéra de Moussorgsky sur un sujet historique. Comme l'a expliqué la dramaturge Andrea Schönhofer dans la présentation de l'opéra qui a été faite quelques dizaines de minutes avant le début de la réprésentation, on jouait la version d'origine „Ur-Boris“, en sept scènes, resserrée autour du personnage de Boris Godounov (mais dans laquelle l'usurpateur Grigori apparaît dans deux scènes consécutives pour ne plus revenir, me donnant une impression de l'ensemble comme étant une suite de tableaux dans lesquels je ne saisis pas la cohérence). Le synopsis de l'opéra a été rappelé lors de cette présentation. Je l'avais parcouru avant de venir (sans saisir complètement quelles scènes seraient omises dans cette version). Pendant la représentation, un placement pas idéal à une place debout, la fatigue de cette station, la difficulté à apercevoir les surtitres (et à les comprendre, le cas échéant), toutes ces conditions d'écoute ne favorisaient pas ma compréhension de ce qui se passait. Le moins que je puisse dire est que la mise en scène n'était pas de nature à m'aider. C'est anecdotique, mais par exemple un personnage de garçon a été doublement travesti (rôle masculin interprété par une femme portant des vêtements féminins) et l'interprête du rôle principal change radicalement de coiffure pour la scène finale (et du coup, avec le cerveau ramolli par la chaleur, je ne l'ai pas reconnu ; enfin, si, j'ai bien compris que c'était Boris Godounov, mais je me demandais rétrospectivement où il s'était caché dans les scènes précédentes). Parmi les images intéressantes, je retiens néanmoins la représentation de la manipulation de la foule, qui après avoir brandi des panneaux à l'effigie de Poutine, Sarkozy et d'autres se met à soutenir Godounov.

Alors que j'avais beaucoup aimé La Khovantchina, principalement en raison des magnifiques chœurs, je n'ai pas été émerveillé par la musique. Si certains passages et quelques thèmes récurrents sont saisissants ou beaux (comme le solo introductif du cor anglais), la musique m'a paru assez statique, comme une atmosphère se développant dans un lent surplace. Dans cet opéra, si l'on fait exception de quelques moments fugitifs, le chant en russe m'a paru assez peu gracieux.

J'ai presque regretté d'avoir pris une place payante pour cet opéra que j'ai vu dans de mauvaises conditions, puisque j'aurais pu y assister peut-être pas confortablement, mais néanmoins assis sur la Max-Joseph-Platz où la représentation était diffusée sur grand écran dans le cadre de l'opération Oper für alle. Ceci dit, rien ne remplace le spectacle vivant...

Photo 026

Les chanteurs et le chef sont venus saluer ce public nombreux en descendant sur les marches de l'Opéra :

Photo 027

Il est possible de visionner cette production sur le site de la Radio bavaroise.

Cuviliés-Theater, Munich — 2013-07-30

Schumann Quartett (München)

Barbara Burgdorf, violon

Traudi Pauer, violon

Stephan Finkentey, alto

Olivier Göske, violoncelle

Quatuor à cordes nº9 en ré mineur, op. 34 nº2 (Dvořák)

Quatuor à cordes nº1 en ré majeur, op. 25 (Britten)

Quatuor à cordes nº3 en si bémol majeur, op. 67 (Brahms)

Ce concert de musique de chambre avait lieu dans le Cuviliés-Theater, qui appartient au vaste ensemble de bâtiments constituant la Résidence. Il peut d'ailleurs se visiter pendant la journée. Cela dit, la meilleure façon de visiter une salle de spectacles est d'aller, justement, y assister à un spectacle. J'ignore pourquoi le site Internet de l'Opéra de Bavière ne m'a pas proposé d'imprimer moi-même mon billet. Je ne savais pas très bien où le récupérer, alors je suis allé à tout hasard à la billeterie de l'Opéra. Habitué aux habitudes françaises, en demandant à la guichetière si je pouvais retirer mon billet, je m'attendais à me faire réprimander, mais j'entendis quelque chose comme Ja, natürlich!. J'en profitais pour lui demander par où on entrait au Cuviliés-Theater. En passant par l'Odeonplatz, après avoir marché dans une grande allée, devant le plus grand trompe-l'œil que j'aie vue, puis contourné l'entrée vers une grande cour où aurait lieu simultanément un concert en plein air, j'ai pu accéder à un couloir donnant accès au foyer du Théâtre, apparemment plus grand que la salle elle-même ! C'est un charmant petit théâtre à l'italienne :

Photo 161

Bien qu'excentré, mon placement me permet de voir tous les musiciens alors que la japonaise assise en première partie à côté de moi ne voyait strictement rien (elle est partie à l'entr'acte, alors qu'elle prétendait préférer sa place just for hearing à la place vacante au premier rang de la loge que je lui suggérais d'occuper...).

Photo 162

Tous les musiciens de ce quatuor Schumann (München) à l'exception du violoncelliste appartiennent à l'Orchestre de l'Opéra d'État de Bavière et sont chefs de pupitres des premiers violons, des seconds et des altos. Je n'ai été que moyennement convaincu par l'interprétation du quatuor de Dvořák, notamment à cause des pizz. tous pareils du violoncelliste dans le troisième mouvement. Après l'entr'acte, j'ai apprécié le quatuor de Brahms (avec une très belle présence de l'alto dans les deux derniers mouvements), mais c'était sans commune mesure avec le plaisir que m'a procuré le quatuor nº1 de Britten, joué avec beaucoup d'engagement par les musiciens. C'est la présence de ce compositeur au programme qui m'avait décidé à acheter une place pour ce concert. Je m'attendais à ce que cela soit bien, mais pas que mon plaisir fût à ce point élevé que la petite demi-heure aura été pour moi très largement le point culminant émotionnel de l'ensemble des concerts auxquels j'ai assisté pendant cette semaine à Munich et Salzburg.

Bayerische Staatsoper, Munich — 2013-07-31

Thomas Hampson, Amfortas

Ante Jerkunica, Titurel

Kwangchul Youn, Gurnemanz

Christopher Ventris, Parsifal

Evgeny Nikitin, Klingsor

Petra Lang, Kundry

Kevin Conners, Erster Gralsritter

Tareq Nazmi, Zweiter Gralsritter

Solist der Tölzer Knabenchors, Erster Knappe

Solist der Tölzer Knabenchors, Zweiter Knappe

Ulrich Reß, Dritter Knappe

Kenneth Roberson, Vierter Knappe

Anna Virovlansky, Golda Schultz, Tara Erraught, Evgeniya Sotnikova, Angela Brower, Heike Grötzinger, Klingsors Zaubermädchen

Kent Nagano, direction musicale

Peter Konwitschny, mise en scène

Johannes Leiacker, décors et costumes

Peter Halbsgrut, lumières

Werner Hintze, dramaturgie

Sören Eckhoff, chef des chœurs

Bayerisches Staatsorchester

Chor und Kinderchor der Bayerischen Staatsorchester

Parsifal, Wagner

On pourra voir sur la photographie ci-dessous que je ne voyais vraiment pas grand'chose de la scène depuis ma place debout, même si quelques abandons de spectateurs au premier entr'acte m'ont permis de me recentrer un peu :

Photo 163

À part quelques détails parmi lesquels la mutilation visible de Klingsor ou la scène des filles-fleurs, c'est donc comme si je n'avais rien vu de ce Parsifal ! L'orchestre m'a plu, comme il y a deux ans, surtout dans les deux derniers actes, mais mon plaisir d'auditeur n'a pas été aussi grand qu'avec l'Orchestre de la Radio hongroise et ses extraordinaires contrebasses entendues un mois plus tôt à Budapest. À part un Amfortas pas au meilleur de sa forme (Thomas Hampson), la distribution est très solide. Dans le rôle de Gurnemanz dans lequel Matti Salminen était un peu limite à Budapest, Kwangchul Youn est absolument ma-gni-fique.

Mon placement ne m'a pas permis d'apprécier véritablement la mise en scène de Peter Konwitschny, mais j'ai été néanmoins ému par l'image de colombe blanche descendue des cintres à la fin de l'opéra. Le moment le plus émouvant de cette représentation fut toutefois l'adieu très chaleureux du public munichois à Kent Nagano, qui quitte son poste de chef d'orchestre principal.

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Planning d'août 2013

2013-08-07 13:02+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Danse — Cinéma — Planning

Après Budapest en juin, Montpellier, Salzburg et Munich en juillet, je vais me diriger en août vers Édimbourg pour assister à un nouveau festival de musique.

La raison première de ce séjour réside dans les deux concerts donnés par le Chamber Orchestra of Europe (COE) qui sera dirigé par Yannick Nézet-Séguin :

  • 16 août 2013 (20h) (Usher Hall) : Les Métamorphoses de Strauss intelligemment associées à la Troisième symphonie de Beethoven. Si l'interprétation des Métamorphoses par le COE dirigées par Semyon Bychkov ne m'avait qu'à moitié convaincu, je ne doute pas qu'avec Yannick Nézet-Séguin, ce sera mieux (il a déjà réussi l'exploit de me faire aimer le mauvais Schu-). Concernant l'Héroïque, je ne l'ai pas entendue par le COE/Haitink (cf. le billet hilarant de Klari), mais je l'ai entendue récemment par l'Orchestre national de France dirigé par Haitink. (Si Yannick Nézet-Séguin dirige un jour l'ONF dans cette œuvre, je ne manquerai évidemment pas d'y aller car je pourrai alors réaliser la somme amalgamée de COE/Nézet-Séguin et ONF/Haitink le long de ONF/Nézet-Séguin pour obtenir COE/Haitink et compléter le diagramme ?) Entre les Métamorphoses et l'Héroïque s'insère dans le programme la véritable raison de ma venue à Edinburgh : la Symphonie concertante de Haydn pour violon, violoncelle, hautbois et basson. Je n'ai jamais entendu le COE dans Haydn, mais je crois que c'est une combinaison orchestre/compositeur/chef qui peut faire monter le frissonomètre très haut, et ce d'autant plus que les quatre solistes sont issus de l'orchestre : comme un concert à Dijon en mars m'en avait donné l'envie, je pourrai entendre la violoniste Lorenza Borrani en soliste !
  • 18 août 2013 (19h30) (Usher Hall) : Avant d'interpréter la Septième Symphonie de Beethoven, le COE interprètera deux œuvres concertantes : Romain Guyot (clarinette) et Matthew Wilkie (basson) joueront le Duet-Concertino de Strauss, puis Lorenza Borrani (violon) et Pascal Siefert (alto) la Symphonie concertante de Mozart.

J'avais déjà acheté ces deux places quand je me suis rendu compte que le Festival d'Edinburgh était en quelque sorte pluridisciplinaire : arts visuels, théâtre, danse, musique, opéra. Après avoir longtemps tergiversé, j'ai choisi d'intercaler entre les deux concerts du COE un marathon de danse (contemporaine) proposé par le Scottish Ballet :

  • 17 août 2013 (12h) (Festival Theatre) : Triple bill intitulée Contemporary Classics avec le duo 14'20" de Jirí Kylián (un extrait de 27'52"), Shift de Christopher Bruce et The Fugue de Twyla Tharp.
  • 17 août 2013 (14h30) (Festival Theatre) : Projection de deux films sur la danse moderne : La Table verte de Kurt Jooss et un portrait de Mary Wigman.
  • 17 août 2013 (16h) (Festival Theatre) : Une discussion à propos de la Triple bill ci-dessus.
  • 17 août 2013 (17h) (Festival Theatre) : Des duos extraits de Chéri et Five Rückert Songs de Peter Darrell, Jealousy de James Cousins et Trace de Helen Pickett.
  • 17 août 2013 (20h) (Festival Theatre) : Pierrot lunaire de Glen Tetley.
  • 17 août 2013 (21h45) (Festival Theatre) : Le Scottish Dance Theatre, spécialisé en dance contemporaine, interprétera SisGo de Fleur Darkin.

(Il est à noter qu'une proportion significative des ballets programmés ont été chorégraphiés par des femmes, ce qui change de Paris...)

  • 18 août 2013 (12h45) (Grand Gallery, National Museum of Scotland) : Puisqu'il convient de faire un peu de tourisme à Édimbourg, mais que l'entrée du Château est hors de prix (£16, seriously?), je vais sans doute me rabattre sur le Musée national d'Écosse. Non seulement, l'entrée y est gratuite, mais je pourrai y entendre un charmant trio d'instruments à vents, Arunda Trio (qui peut aussi venir jouer de la musique à votre mariage).
  • 19 août 2013 (11h) (Queen's Hall) : J'espère que l'obscurité sera faite dans la salle pour ce récital de Lieder de Dorothea Röschmann parce que le mélange de bleu et de rouge constituant la décoration du Queen's Hall me paraît d'assez mauvais goût, comme j'ai eu le malheur de le constater en faisant la visite virtuelle (qui me permet d'espérer que ma place derrière un pilier ne devrait pas trop gêner ma vue).

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Trois jours au festival de Salzburg

2013-08-04 12:43+0200 (Orsay) — Culture — Musique — Opéra — Danse

Contrairement à ce que l'on pourrait imaginer, la ville de Salzburg n'est pas hors de prix. Il est vrai que lorsque l'on pénètre dans le Großes Festspielhaus ou le Haus für Mozart, on a l'impression de faire la montée des marches au festival de Cannes, les hommes ayant presque tous veste et nœud papillon ou cravate et les dames des robes de soirée, qui en comparaison font d'une soirée de gala à l'Opéra de Paris une petite fête paysanne. Ce qui est vrai en revanche, c'est que la ville est obsédée par le jeune prodige Mozart qui y est né ; le physicien Christian Doppler aussi, mais cela se voit moins quand on parcourt les ruelles de la vieille ville. Il serait intéressant de connaître la proportion des visiteurs estivaux de Salzburg qui fréquentent le festival. La veille ville est en effet infestée de touristes, et à supposer que le commerce y soit prospère, ceux-ci semblent plus intéressés par les chocolats Mozart et autres produits dérivés que par la musique de Mozart. Cela dit, j'ai aussi mangé ma dose de ces chocolats et pus opportunément acheter juste avant qu'il pleuve un parapluie décoré de partitions.

Photo 073
Salzburg

Haus für Mozart, Salzburg — 2013-07-27

Rolando Villazón, Lucio Silla

Olga Peretyatko, Giunia

Marianne Crebassa, Cecilio

Inga Kalna, Lucio Cinna

Eva Liebau, Celia

Francesco Corti, clavecin

Marie McDunnough, Julia Sedwick, Cynthia Smithers, Magdalena Vasko, Jones Henry, Kevin Kong, Jeremy Nasmith, Jack Rennie, Edward Tracz, danseurs

Marc Minkowski, direction musicale

Marshall Pynkoski, mise en scène

Antoine Fontaine, décors et costumes

Jeannette Zingg, chorégraphie

Hervé Gary, lumières

Aloïs Glaßner, chef de chœur

Les Musiciens du Louvre-Grenoble

Salzburger Bachchor

Lucio Silla, KV 135 (Mozart)

La plus grande satisfaction de ce festival, aussi haute qu'inattendue a été pour moi cette représentation de Lucio Silla, la première de la reprise de cette production déjà jouée lors de la Mozartwoche en février 2013.

La production est traditionnelle. Le décor unique représente une sorte d'atrium me semble être un décor générique qui pourrait servir à représenter n'importe quel opéra. Les costumes sont d'époque, ce qui ne signifie pas que les chanteurs portent des costumes plaçant l'action à Rome au premier siècle avant Jésus-Christ (comme le fait timidement le décor), mais plutôt en Europe il y a quelques siècles de cela (peut-être du temps de Mozart ?). La dizaine de danseurs apporte une décoration supplémentaire à ce tableau. Au milieu de l'avant-scène est disposée une petite rallonge de scène souvent utilisée par les chanteurs ; ils peuvent ainsi être certains d'être bien au milieu de la scène pour chanter leurs airs. Malgré tous les aspects traditionnels de cette production, je trouve qu'elle est réussie. En effet, les sonorités produites par l'orchestre sont merveilleuses. Le caractère très engagé des Musiciens du Louvre-Grenoble dirigés par Marc Minkowski assorti à la bonne acoustique de la salle rend tellement vivante cette musique. Je n'imaginais pas prendre autant de plaisir à l'écoute d'un opéra de jeunesse de Mozart (disons avant Idomeneo), et ce d'autant plus que l'histoire se finit par un happy ending invraisemblable comme souvent chez le jeune Mozart : pour laisser une trace heureuse dans l'Histoire, Lucio Silla fait volte-face en décidant de rendre tout le monde heureux. Par ailleurs, j'ignore si le livret y fait référence, mais la mise en scène suggère une relation incestueuse entre Lucio Silla et sa sœur Celia.

La distribution vocale est sans faille ! Des quatre chanteuses (dont deux travesties), celle qui remporte le plus de suffrage est évidemment Marianne Crebassa dans le rôle de Cecilio. Elle fait d'ailleurs une forte impression dans la scène d'escrime magnifiquement chorégraphiée, et j'ai particulièrement aimé l'air qu'elle a chanté accompagnée de seulement quatre musiciens constituant un quatuor à cordes. Si Rollando Villazón ne m'a semblé qu'à moitié convaincant dans les deux premiers actes, il a fait des merveilles dans le troisième !

Ailleurs : il tenero momento.

Mozarteum, Salzburg — 2013-07-28

Gereon Kleiner, orgue

Mozarteumorchester Salzburg

Ádám Fischer, direction

Sonate d'église pour orchestre et orgue en do majeur, KV 278 (Mozart)

Jörg Widmann, clarinette

Concerto pour clarinette en la majeur, KV 622 (Mozart)

Sonate d'église pour orgue et orchestre en do majeur, KV 329 (Mozart)

Symphonie nº6 Pastorale (Beethoven)

Le dimanche matin avait lieu une Mozart-Matinee au Mozarteum. En première partie, entre deux sonates d'église anecdotiques de Mozart (avec un orgue inaudible dans la première), le programme comportait le concerto pour clarinette en la majeur. Si l'orchestre m'a paru très convaincant et très engagé, le clarinettiste Jörg Widmann ne m'a pas autant plu que Romain Guyot dont l'interprétation à Dijon m'avait semblée plus incarnée. Le musicien a fait le choix de jouer peu d'ornementations (voire pas du tout) et ses notes aiguës passaient souvent difficilement. Bref, si l'écoute de cette œuvre ne m'a pas paru désagréable, elle ne m'a pas mis en transe.

Après l'entr'acte, l'orchestre a joué tout autre chose : la Symphonie Pastorale de Beethoven. On n'a à mon avis pas atteint les sommets de l'interprétation du Chamber Orchestra of Europe dirigé par Bernard Haitink, pourtant quelle belle interprétation que celle qu'ont donné ces musiciens déchaînés sous la direction d'Ádám Fischer (qui dirige cette œuvre de mémoire) ! Mon placement dans la salle ne me permettait de voir que la moitié droite de l'orchestre, mais fort heureusement le timbalier était en plein milieu de mon champ de vision. Dans le quatrième mouvement, je n'ai regardé que lui. Après avoir mis ses lunettes précautionneusement, il a paisiblement attendu le moment de son entrée pour déclencher un orage inouï !

Großes Festspielhaus, Salzburg — 2013-07-28

Dorothea Röschmann, soprano

Michael Schade, soprano

Florian Boesch, basse

Wiener Philharmoniker

Konzertvereinigung Wiener Staatsopernchor

Nikolaus Harnoncourt, direction

Ernst Raffelsberger, chef de chœur

Die Jahreszeiten, Joseph Haydn

La raison de ma venue à Salzburg était ce concert dans lequel Nikolaus Harnoncourt allait diriger les Wiener Philharmoniker dans Les Saisons de Haydn. Je m'attendais à ce que de concert salzbourgeois fût très bon, voire extraordinaire, mais je n'imaginais pas un seul instant en ressortir avec un sentiment d'amère déception. Heureusement, j'aimais déjà Haydn avant d'entrer dans le Großes Festspielhaus, et tout particulièrement Les Saisons dont je garde un souvenir émerveillé de l'interprétation de John Elliot Gardiner à Pleyel il y a quatre ans. En effet, sinon, ce concert m'aurait dégoûté de Haydn...

Les problèmes sont apparus dès la toute première mesure de l'œuvre. Les musiciens ne jouaient tout simplement pas ensemble. Les violents coups de timbales étaient un bon gros quart de seconde en avance sur les cordes. Ensuite, le volume sonore des Wiener Philharmoniker a pratiquement toujours été très faible. Dans ces conditions, les si délicieux passages dans lesquels Haydn fait imiter les sons des animaux par l'orchestre ne pouvaient guère se distinguer. Le seul passage de ce genre dont je me souvienne est celui évoquant le son des abeilles. Quand le volume sonore augmentait, comme dans l'orage intervenant dans l'Été, c'était avec une brusquerie assez déplaisante. Dans l'accompagnement des récitatifs, si j'ai apprécié le musicien jouant du pianoforte, celui qui officiait au violoncelle m'a paru produire des sons insipides, alors que j'ai souvent eu l'occasion de m'extasier devant le talent des violoncellistes ou gambistes accompagnant des récitatifs (Nils Wiebolt et Atsushi Sakaï sont les premiers noms qui me viennent à l'esprit). Ce n'était pas du tout, mais alors pas du tout baroquisant. Si les chanteurs n'ont globalement pas démérité, comme les musiciens des Wiener Philharmoniker, ils ont exécuté l'œuvre de façon très austère, complètement désincarnée, sans vie. Les trois rôles ont pourtant des noms ! Ils s'appellent Hanne, Lukas et Simon...

Si certains musiciens de l'orchestre se sont parfois brillamment distingués (les cornistes semblent appartenir à un autre monde !), mon unique satisfaction est venue du chœur de l'Opéra d'État de Vienne. La seule des quatre parties de l'œuvre qui m'aient un peu plu a en effet été l'Automne, et cela tient surtout au chœur qui a égaillé l'ambiance par son interprétation de la chanson à boire à la fin de cette partie.

Haus für Mozart, Salzburg — 2013-07-29

Ambrogio Maestri, Sir John Falstaff

Fiorenza Cedolins, Mrs. Alice Ford

Massimo Cavalletti, Ford

Eleonora Buratto, Nannetta

Elisabeth Kulman, Mrs. Quickly

Stephanie Houtzeel, Mrs. Meg Page

Javier Camarena, Fenton

Luca Casalin, Dott. Cajus

Gianluca Sorrentino, Bardolfo

Davide Fersini, Pistola

Zubin Mehta, direction musicale

Damiano Michieletto, mise en scène

Paolo Fantin, décors

Carla Teti, costumes

Alessandro Carletti, lumières

rocafilm, vidéo

Christian Arseni, chef de chœur

Walter Zeh, chef de chœur

Wiener Philharmoniker

Philharmonia Chor Wien

Falstaff (Verdi)

Cette représentation de Falstaff m'a paru fort agréable. Sans être éblouissants collectivement, les Wiener Philharmoniker sonnent bien mieux que la veille ! Les solos des musiciens de l'orchestre sont très souvent délicieux. Dans les ensembles, les qualités individuelles des musiciens ont toutefois tendance à se perdre, notamment quand à la fin de certains passages le chef Zubin Mehta lâche les décibels...

La production, sans être géniale, est tout à fait plaisante. Le concept est semble-t-il de représenter le compositeur Verdi vieillissant, écrivant son dernier opéra comme si c'était pour lui un cauchemar dans lequel il est identifié au personnage de Shakespeare. Ce personnage prenant le temps de ce rêve la place de Falstaff pourrait aussi bien être plus simplement un musicien retraité anonyme hanté par Verdi, ce n'est pas tout à fait clair pour moi.

Tandis que les spectateurs prennent place dans la salle, des images de la Casa Verdi contemporaine sont montrées en plan fixe comme pour en souligner la monotonie. Au lever du rideau, on entre dans l'institution, qui est une maison de retraite pour musiciens. Alors qu'en principe cet opéra de Verdi commence sans préambule, on voit ici un pianiste jouer pour les pensionnaires des morceaux de musique dans lesquels on peut reconnaître des extraits d'opéra de Verdi. Cette musique va en quelque sorte infuser dans l'esprit du personnage, qui va, selon l'interprétation, revivre l'histoire de Falstaff ou composer l'opéra que l'on est en train de voir. Le côté onirique de cette vision permet de ne pas traiter de façon littérale certaines scènes, en particulier dans la fameuse scène où le panier dans lequel Falstaff s'est caché est en principe jeté dans la Tamise.

Sans être éblouissants, les chanteurs m'ont paru plutôt bons. Toutefois, je garde un meilleur souvenir des interprètes des rôles féminins de la seule autre représentation de Falstaff à laquelle j'aie assisté (au TCE en 2008). J'ai beaucoup aimé le ténor Javier Camarena dans le rôle de Fenton, et dans celui de Falstaff, Ambrogio Maestri m'a paru meilleur chanteur qu'Alessandro Corbelli que j'avais vu dans ce rôle en 2008.

Ailleurs : Paris — Broadway.

Photo 099
Mirabellgarten, Salzburg

Les autres photographies que j'ai faites à Salzburg et à Munich sont ici.

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