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2015-05-18 15:48+0100 (Orsay) — Culture — Musique — Danse — Danses indiennes — Culture indienne
Centre Mandapa — 2015-05-07
Jyotika Rao, danse bharatanatyam, chorégraphie du Jatiswaram et du Tarana
Sucheta Chapekar, chorégraphies
Isabelle Bayard, mise en scène
Mallari (Raga Hamsadhwani, Mishra Tala)
Vinayak Dharu (Raga Hamsadhwani, Rupaka Tala)
Jatiswaram (Raga Bhairavi, Rupaka Tala)
Shiva Kautukam (Chatushra Ekam Tala)
Jakkini Dharu (Shankara Bharanam, Adi Tala)
Kone Kavada (Raga Kafi, Adi Tala)
Tarana (Raga Kedar, 8 temps)
Bhajan “Vishweswara Dharashana Kara” (Raga Sindhu Bhairavi, Rupaka Tala)
Hasard du calendier, il y avait en ce soir du 7 mai deux récitals intéressants de bharatanatyam programmés à Paris : Lavanya Ananth et Jyotika Rao. J'avais déjà eu de nombreuses occasions de voir Lavanya Ananth en récital (au Centre Mandapa, au Musée Guimet et au Bharatiya Vidya Bhavan) et lors du week-end du 8 mai j'ai participé à son stage de bharatanatyam dans lequel elle nous a transmis sa chorégraphie du Chidambaram Natesha Kavuthvam ; j'ai donc préféré aller voir ma prof Jyotika Rao au Centre Mandapa et je ne l'ai pas regretté. Ce récital n'a pas comporté de Varnam et je trouve dommage qu'il n'y ait eu qu'une seule pièce d'Abhinaya, mais ce récital a constitué une belle plongée dans le style de son guru Sucheta Chapekar et la mise en scène a été particulièrement originale ! Il faut signaler aussi que par rapport au récital précédent qu'elle avait donné au Centre Mandapa, le programme a été pour ainsi dire entièrement renouvelé. (Il va sans dire que je serai sans doute moins objectif dans ce billet que je ne pourrais l'être habituellement.)
L'aspect le plus étonnant de ce récital se trouve dans la mise en scène du spectacle. Au lieu de l'alternance habituelle entre l'introduction des pièces et les danses elles-mêmes, les pièces s'enchaînent ici continuellement. La danseuse reste en permanence en scène et les brèves présentations des pièces ne sont pas des parenthèses mais font partie du spectacle. Cette atmosphère s'est instaurée dès son entrée en scène dans le silence, suivie d'une salutation aux quatre directions diagonales avant l'interprétation de la première pièce Mallari. Comme pour un certain nombre d'autres pièces dansées au cours de ce récital, je connais la musique pour ainsi dire par cœur, soit parce que j'ai appris ces pièces, soit parce que j'ai vu d'autres élèves les danser ou les répéter. C'est le cas dans la pièce Vinayak Dharu, dont la première ligne de texte est Santosh Nritya Kari. Cette pièce développée comportant quatre séquences rythmiques utilisant des onomatopées évoque la danse de Ganesh. La première partie de la chorégraphie que j'ai apprise évoque notamment sa trompe, ses oreilles et sa défense cassée. Dans la suite, je découvre semble-t-il le miel qui s'écoule de ses tempes au clair de Lune et sur lequel les abeilles se ruent. Plus loin, on verra aussi sa ceinture en forme de serpent et la souris, sa délicieuse monture.
Après le Jatiswaram qui est une pièce de danse pure, le récital s'est poursuivi avec un ensemble de pièces dédiées à Shiva. Tout d'abord un Shloka enchaîné avec un Shiva Kautukam en marathi qui a été magnifiquement interprété ; la composition musicale porte la signature d'un des rois marathes de Thanjavur. Le Shloka évoque le contexte de la danse de Shiva pour laquelle les divinités et diverses créatures célestes se sont rassemblées et qu'elles accompagnent de leurs instruments de musique. Dans la pièce vive qu'est le Shiva Kautukam proprement dit, les quelques lignes de textes mettent en scène un dialogue dans lequel un dévôt de Shiva tente de convaincre son interlocuteur de la grandeur de Shiva. Cette pièce s'enchaîne avec Jakkini Dharu qui est un poème comportant quelques séquences rythmiques et qui évoque certains attributs de Shiva, comme son collier de crânes, son tambour Damaru, les cendres, la rivière Ganga, etc. Il m'a aussi semblé reconnaître une référence à son nom de Nilakantha lié à son rôle dans le barattage de la mer de lait.
Après cet enchaînement de pièces assez rythmées, l'unique pièce d'Abhinaya proprement dit est intervenue. Elle représente un malentendu entre deux personnages. La mise en scène joue de ce malentendu et la description des détails des situations montrées dans la chorégraphie ne sera donnée espièglement qu'à la fin de la pièce, et non pas au début ! N'ayant pas eu le temps de lire préalablement la feuille de programme, j'ai dû regarder le début de la pièce sans même savoir de quels personnages il allait s'agir. Certains mots dans le texte que j'entendais dans le texte me faisaient penser à Krishna. L'atmosphère joyeuse et résolument humaine de la situation allaient aussi dans ce sens. Une combinaison de gestes de mains suggérant que le personnage conduisait un bovin pouvait continuer à me le laisser croire, mais je me disais que cela pouvait aussi être Shiva. J'ai donc regardé le début de cette pièce sans trop savoir s'il était question d'un malentendu entre Krishna et une des gopis ou si c'étaient Shiva et Parvati qui étaient représentés. Assez rapidement, le doute ne fut plus permis et je compris que l'héroïne était Parvati, laquelle avait enfermé Shiva hors de sa maison pour plaisanter. Celui-ci venait plaider sa cause en lui rappelant ses divers exploits, mais en déformant ses propos elle faisant semblant de ne pas le reconnaître. J'ai rarement été aussi ravi de ne pas très bien saisir le sens d'une pièce d'Abhinaya...
Les deux pièces proposées en conclusion du récital sont une alternative au Tillana qui conclut habituellement les récitals de bharatanatyam. Le style Nrityaganga qu'a développé Sucheta Chapekar utilise la musique hindustani. L'équivalent du Tillana de la musique carnatique est le Tarana, mais ce dernier n'est constitué que d'onomatopées (comme l'est en général la première partie d'un Tillana). Le Tarana est donc une pièce de danse pure évocant la joie. La seconde partie (textuelle) du Tillana est ici remplacée par une autre composition musicale. Lors de ce récital, ce fut un Bhajan en l'honneur de Shiva. J'ai été ravi de voir des allusions à Vishnu dans la chorégraphie et dans le texte, sous le nom de Padmanabha.
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