Weblog de Joël Riou

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Société asiatiaque de Kolkata

2008-08-02 11:41+0530 (খড়্গপুর) — Voyage en Inde V — Mathématiques

Mon train de Kolkata vers Bhubaneshwar a été détourné (pas par des terroristes), je suis un peu forcé de rester ici quelques heures avant de monter dans un autre train. Joli temple de Ram à côté de la gare avec une très belle sculpture de Hanuman. À un ou deux kilomètres au Sud de la gare, j'ai réussi à trouver un cyber-café. :-).

Hier matin, je suis descendu à Rabindra Sadan pour visiter la cathédrale Saint-Paul. Je suis ensuite allé à la société asiatique où je suis resté quelques heures. À l'entrée, après que j'eus dit que je faisais de la recherche en mathématiques, on m'a suggéré de passer à la bibliothèque qui est très fournie : ce serait la première institution de ce genre en Inde. Pour y accéder, j'ai dû signer un nombre invraisemblable de registres, discuter avec un public relations qui aurait étudié les Éléments d'Euclide, et m'entretenir avec la chef de salle qui m'a expliqué le fonctionnement de la bibliothèque.

J'ai demandé un ouvrage sur les mathématiques védiques. Il s'agit des comptes-rendus d'une rencontre sur ce sujet à Jaipur en 1988. Certaines contributions m'ont paru un peu douteuses, mais d'autres semblaient plus sérieuses. L'une d'entre elles expliquait le système de numération décimale utilisé dans les temps anciens. Plutôt que d'utiliser de nouveaux signes pour les chiffres, ces mathématiciens utilisaient les consonnes du sanskrit, chaque chiffre pouvant être représenté par plusieurs consonnes. Ces mathématiques pouvaient donc être transmises par voie orale de la même manière que l'ont été les Veda et les épopées avant l'écriture des premiers manuscrits. Un exemple fameux est donné :

गोपीभाग्यं मधुव्रातशृङ्गयोदधिसन्धगः।
खलजीवितखातागलहालारसधरः॥

Dans ce śloka, la première ligne serait dédiée à Krishna tandis que la seconde le serait à Shiva. Si on décode ces 32 syllabes, on obtient :

3141592653589793
2384626433832792

Si l'on ne tient pas compte du dernier chiffre qui est faux, voilà une trentaine de décimales de π. Je n'ai pas réussi à déchiffrer avec certitude la consonne en gras sur la première ligne et sur la seconde il faudrait remplacer les deux par des pour obtenir le résultat indiqué. Il n'y a pas d'indication de date, je préfère ne pas discuter cette question. Si le vers n'est pas interpolé, qu'il donne des décimales de π ne peut pas être le fruit du hasard. Après tout, l'alphabet sanskrit comporte plus de trente-deux consonnes, si on arrive à composer un śloka en utilisant autant, on peut certainement fabriquer un codage associant un chiffre à une consonne de façon à ce qu'il se décode sur un nombre à 32 chiffres arbitraire, en particulier une approximation de π. Sauf erreur de comptage, nous n'avons ici que 17 consonnes codantes. Bref, même en piochant des vers dans le Mahabharata, il est très improbable que l'on tombe sur un tel vers si cela n'avait pas été fait exprès.

J'ai poursuivi ma visite avec le musée. La plupart des œuvres volumineuses ont été transférées à l'Indian Museum. Néanmoins, on y trouve une très belle collection de manuscrits anciens, les plus anciens étant des textes bouddhiques du septième siècle. Une traduction du Mahabharata en perse, de nombreuses versions du Ramayana, le premier dictionnaire tibétain-anglais. On peut aussi y observer un édit en brahmi de l'empereur Ashoka (250 ac) provenant de la région de Delhi.

J'ai de nouveau mangé à Park Street. J'ai choisi de prendre un buffet végétarien : c'est moins frustrant que de devoir se contenter d'un seul plat, comme c'est souvent le cas lorsque l'on commande à la carte, même dans un grand restaurant.

Je suis ensuite allé au Millenium Park, au bord de la Hooghly d'où l'on a une belle vue sur le Howrah Bridge qu'il est toutefois interdit de photographier ; comme je me suis déjà fait ennuyer pour avoir tenté de photographier un horoscope, je n'ai pas tenté ma chance.

Je suis rentré après avoir dû traverser tout doucement un bazar monstre du côté d'une grande mosquée (probablement la mosquée Nakhoda). En payant a note d'hôtel, j'ai remarqué une ligne de 99 roupies qui ne correspondait à rien de ce que j'avais consommé, puisqu'il s'agissait d'un Chicken Dopiaza. Il a vraiment fallu que j'insiste pour que l'on me rembourse cette petite somme. Je n'ai pas grand chose à faire de 99 roupies, mais je ne vais quand même pas payer pour la bombance de quelqu'un d'autre.

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Commentaires

1. 2009-11-02 15:28+0100 (delclos)

Peut-on avoir la clef des nombres exprimés par des consonnes ou des syllabes dans les textes sanskrit ?

Votre blog est passionnant

et plein d'humour

2. 2009-11-02 18:36+0100 (Joël)

> Peut-on avoir la clef des nombres exprimés par des consonnes ou des syllabes dans les textes sanskrit ?

Non, je n'avais recopié dans mes carnets que le vers et les chiffres correspondant aux consonnes qui y apparaissent, pas l'intégralité de la correspondance qui était donnée dans le livre que j'avais consulté.


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